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Actualités, enquêtes à Lyon et dans la région

A Gleizé, quand les maires confiaient la com’ de la ville à la famille

A Gleizé, quand les maires confiaient la com’ de la ville à la famille

A Gleizé, une commune de 7 500 habitants à côté de Villefranche-sur-Saône, on fait ses affaires en famille. Selon Le Progrès, 90 contrats ont été confiés à des membres de la famille des maires de la commune entre 2006 et 2017. Et ce, sans mise en concurrence.

Ce jeudi 28 octobre, Le Progrès révèle une affaire réglée « en famille », à Gleizé. Entre octobre 2006 et décembre 2017, la ville du Beaujolais a confié plus de 90 prestations à l’entreprise Storm (Stratégie et Organisation Multimédia). Brochures de saisons culturelles, bulletins municipaux… Cette dernière a réalisé un chiffre d’affaires de 204 000 euros TTC (172 000 euros HT).

Problème, le patron de cette entreprise, Maurice de Longevialle, n’est autre que le frère de Ghislain de Longevialle (Union du centre et de la droite), maire de la commune depuis 2015 et candidat malheureux aux élections départementales. Avant cela, ce dernier était premier adjoint de sa compagne, aujourd’hui épouse, Élisabeth Lamure (LR), maire de 1989 à 2015, également sénatrice de 2004 à 2020.

A Gleizé, on fait travailler la famille sans mise en concurrence

Autre problème, ces contrats ont été réalisés sans appel à la concurrence, selon le quotidien.

« Je n’ai jamais répondu à des appels d’offres pour ces contrats, a admis Maurice de Longevialle, patron de Storm et frère de l’actuel maire, dans Le Progrès. Les missions récurrentes que j’ai pu effectuer étaient négociées par mail ou téléphone avec le service de communication de la Ville. À l’époque, cela ne me choquait pas, même si mon frère était adjoint à la communication et que sa conjointe était maire, car j’estimais faire du bon travail, à des prix corrects. J’ignorais qu’il fallait me mettre en concurrence. »

Contactée par Le Progrès, l’ancienne maire, Élisabeth Lamure, assure avoir « suivi les règles. » Son mari, actuel maire, marque de son côté qu’il n’a plus eu de contacts avec Storm après 2016. Quand il est interrogé sur des factures signées à cette période, il assure « ne pas avoir la mémoire de tous ces détails ».

A Gleizé, le maire est empêtré dans des histoires de famille.
A Gleizé, le maire, et l’ancienne maire, sont empêtrés dans des histoires de famillePhoto : Sebleouf/Wikicommons

Dans la commune du Beaujolais, des affaires de famille à répétition

Ghislain de Longevialle ne semble pas être à sa première affaire familiale. En avril 2021, le conseil Départemental avait annoncé renoncer à la construction d’un collège sur la commune de Gleizé, à la suite de révélations du Progrès. Le terrain choisi pour la construction de l’établissement appartenait, en effet, à des cousines germaines du maire, en conflit avec ce dernier.

Le Département n’avait pas voulu tomber dans une querelle familiale pouvant aboutir à des poursuites judiciaires.

#Gleizé

A Lyon, l’accueil chaotique des migrants afghans arrivés de Briançon

A Lyon, l’accueil chaotique des migrants afghans arrivés de Briançon

Une soixantaine de migrants afghans, en provenance de Briançon (Hautes-Alpes), sont arrivés mardi 26 octobre en fin d’après-midi à la gare routière de Lyon Part-Dieu. Une partie a pu être hébergée pour la nuit.

« Quand on pense aux 250 Afghans qui ont été reçus avec les ors de la République et puis à eux… C’est juste ceux qui n’ont pas eu le temps de monter dans l’avion. »

Paola Baril, coordinatrice régionale à Médecins du Monde, secoue la tête d’un air las. Elle ajuste son brassard aux couleurs de l’association et s’avance à la rencontre de la soixantaine de migrants afghans qui ont débarqué mardi 26 octobre en fin d’après-midi à la gare routière de Lyon Part-Dieu, en provenance de Briançon.

Regroupés dans le parc Jeanne Jugan, à deux pas de la gare routière, un groupe de jeunes Afghans d’une vingtaine d’années tentent de communiquer en anglais avec les bénévoles de Médecins du Monde, tandis que des familles avec enfants et bébés s’installent tant bien que mal de l’autre côté de l’allée centrale sur les couvertures vertes données par la Croix-Rouge.

Tous attendent qu’une solution d’hébergement leur soit proposée pour la nuit, ou au moins des tests Covid pour qu’ils puissent continuer leur route.

migrants afghans Lyon
Sur la soixantaine de migrants afghans arrivés à Lyon ce mardi 26 octobre, il en reste une trentaine qui attendant qu’une solution d’hébergement soit trouvée pour la nuit. Parmi eux, une dizaine d’enfants dont des bébés.Photo : OM/Rue89Lyon

Des migrants afghans en provenance de Briançon après la fermeture d’un refuge

Tous ces gens sont arrivés à Lyon mardi 26 octobre en fin d’après-midi, dans deux bus d’une trentaine de places chacun, affrétés par la préfecture des Hautes-Alpes. Ils viennent d’Afghanistan, ont transité par l’Italie puis par Briançon.

Là-bas, le refuge qui accueillait les migrants, dans le tiers-lieu des « Terrasses solidaires », a dû fermer ses portes ce lundi 25 octobre en raison d’une surpopulation.

« Il y avait environ 200 personnes alors que la capacité du refuge est de 80, explique Isabelle Lorre, coordinatrice de Médecins du Monde à Briançon. On savait qu’il y avait aussi environ 160 personnes qui attendaient en Italie de traverser la frontière. »

Dimanche 24 octobre au soir, ce sont donc 200 migrants qui se sont retrouvés à dormir à la gare de Briançon. D’après La Croix, l’évêque de Gap est finalement intervenu et un prêtre de Briançon les a accueillis dans son église pour les nuits de lundi et mardi. Une soixantaine de migrants s’y trouvent toujours, d’après Isabelle Lorre.

« La Croix-Rouge venait faire des tests Covid au refuge environ deux fois par semaine mais la préfecture leur a interdit de continuer ce mardi », déplore-t-elle.

À l’arrivée à Lyon, la présence de forces de police fait fuir une partie des migrants afghans

Lundi 25 octobre, des migrants étaient déjà arrivés en provenance de Briançon et de Grenoble pour être conduits dans les locaux de la police aux frontières (PAF) qui se trouvent à Lyon. Tous ont été relâchées au compte-goutte, selon les associations. Malgré tout, méfiantes après ces arrestations, de nombreuses personnes ont décidé de quitter le refuge de Briançon par leurs propres moyens. Seuls deux bus d’une trentaine de places chacun sur les quatre affrétés par la préfecture des Hautes-Alpes ont alors quitté Briançon en début d’après-midi mardi 26 octobre, direction Lyon.

A l’arrivée des deux bus à la gare routière de Lyon Part-Dieu, c’est le chaos. Une vingtaine de membres des forces de l’ordre sont présents pour assurer la sécurité. A la vue des uniformes, plusieurs passagers décident de partir précipitamment.

Les équipes de Médecins du Monde et de la Croix-Rouge, épaulées par des Lyonnais.es venu.es en soutien, distribuent des colis alimentaires et des couvertures vert pomme aux Afghans. Parmi eux, une dizaine d’enfants dont certains sont âgés d’à peine quelques mois.

« On a été prévenus ce matin par nos collègues de Briançon, confirme Paola Baril. Ils nous ont dit que la plupart de ces personnes souhaitent poursuivre leur route et ont juste besoin de faire un test Covid pour pouvoir prendre les transports. Le problème, c’est le prix des tests. On aimerait qu’ils puissent passer la nuit au chaud et leur faire faire les tests gratuitement demain matin. »

En attendant de trouver une solution d’hébergement, les équipes de Médecins du Monde les orientent vers le parc Jeanne Jugan sous l’œil des policiers. Julien Perroudon, secrétaire général adjoint de la préfecture du Rhône, pendu au téléphone, cherche des places d’hébergement.

« La préfecture dit un truc, et cinq minutes après elle en dit un autre »

Soudain, un vent de panique parcourt le petit groupe d’Afghans rassemblés dans le parc.

Une dizaine de policiers de la police nationale viennent de faire leur apparition et ont mis le cap droit sur eux. Sans un mot, ils font irruption au milieu du groupe, taser et matraque à la main pour certain.es. Le ton monte rapidement avec les salariés de Médecins du Monde qui s’interposent.

C’est l’incompréhension générale. Les policiers expliquent avoir reçu des ordres de la préfecture pour intervenir. Les autres leur désignent le représentant de la préfecture, toujours au téléphone.

« La préfecture dit un truc et cinq minutes après elle en dit un autre », râle un policier.

Ils finissent par se replier près du secrétaire général adjoint de la préfecture, en bordure du parc. Ce dernier a été rejoint par un membre de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) et une solution d’hébergement semble se dessiner.

Il faut dire que le nombre de personnes à héberger a drastiquement baissé depuis l’arrivée des bus, il y a près de trois heures. Il fait froid, la nuit tombe, et de nombreux Afghans jettent des regards anxieux aux forces de l’ordre.

« Where is sleeping ? », s’inquiètent plusieurs d’entre eux.

police taser migrants afghans Lyon
Les équipes de Médecins du Monde tentent d’intervenir alors que la police nationale fait irruption dans le groupe de migrants afghans, taser à la main.Photo : OM/Rue89Lyon

Une solution d’hébergement trouvée pour une nuit

En début de soirée, la préfecture a finalement trouvé une solution d’hébergement pour la nuit de mardi à mercredi, dans un foyer Adoma du 8e arrondissement de Lyon. Des voitures du foyer assurent les aller-retour pour emmener tous ceux qui restent dans le parc.

Sur la soixantaine de personnes qui se trouvaient dans les bus à la gare routière, il en reste une petite trentaine. Tous ont pu avoir un toit ce mardi soir, les familles avec enfants comme les jeunes hommes seuls.

« C’était délirant, constate Paola Baril. Je m’attendais à ce qu’il y ait plus de collectifs structurés sur place. C’est rare qu’on se retrouve à faire l’intermédiaire entre la préfecture et les gens. Il y avait quand même quelqu’un de la préfecture et quelqu’un de l’OFII. Nous, on s’était préparés à leur indiquer un parc où dormir, c’est pour ça qu’on avait demandé des couvertures à la Croix-Rouge. »

Lassés d’attendre, plusieurs jeunes Afghans ont décidé de se payer un test Covid à la pharmacie la plus proche. Ils comptent tenter leur chance sur les chemins de fer français et espèrent pouvoir rejoindre la capitale sans se faire contrôler. Quant à la trentaine de personnes hébergées, la plupart souhaitent quitter Lyon également au plus tôt.

De nouvelles arrivées de migrants afghans sont prévues dans les jours à venir. D’après Médecins du Monde Briançon, deux nouveaux bus ont été affrétés par la préfecture des Hautes-Alpes ce mercredi 27 octobre : l’un en direction de Marseille, l’autre pour Lyon.

« Ouvrez les fenêtres, lisez la presse indépendante »

« Ouvrez les fenêtres, lisez la presse indépendante »

Rue89Lyon, possédé à 100% par ses journalistes, est signataire avec soixante d’autres médias indépendants (voir la liste en fin d’article) de l’appel ci-dessous.

Nous sommes des médias indépendants, lus, écoutés, regardés chaque jour par des millions de citoyennes et citoyens. Au-delà de nos différences éditoriales, nous nous retrouvons sur l’essentiel : la passion d’un journalisme libre, honnête, au service de nos publics et à l’écoute de la société.

Quatre menaces sur l’information libre et pluraliste

Une information libre et pluraliste est la condition de la démocratie. Elle est aujourd’hui menacée par un système médiatique dominant qui vient de nous infliger deux mois de « zemmourisation » du débat public et un agenda informatif médiocre, pour ne pas dire plus.

Elle est menacée avec la mise à genoux du journalisme par Vincent Bolloré. L’homme d’affaires a décidé de mettre son immense groupe de presse au service d’un polémiste xénophobe et misogyne, condamné à deux reprises pour provocation à la haine raciale.

Elle est menacée par une concentration sans précédent des grands médias aux mains d’une petite dizaine de grandes fortunes qui recherchent ainsi protection et influence et, trop souvent, imposent leur agenda idéologique.

Cette information libre et pluraliste est aussi mise en danger par un système d’aides publiques aux médias dénoncé depuis des années comme inefficace et inégalitaire. Pourquoi ? Parce que dix grands groupes en sont les principaux bénéficiaires et cette distorsion de concurrence menace directement le pluralisme.

A la Libération, Hubert-Beuve Méry, fondateur du journal Le Monde, dénonçait la « presse d’industrie », cette presse de l’entre-deux-guerres tenue par des industriels et qui allait sombrer dans la collaboration. « Il y a une chance d’éviter pour l’avenir les pourritures que j’ai vues dans le passé », disait-il alors. « Une société qui supporte d’être distraite par une presse déshonorée court à l’esclavage », écrivait Albert Camus.

Une chance : la presse indépendante

Il y a une chance d’éviter l’actuel affaissement du débat public. D’éviter l’engloutissement du journalisme sous les polémiques nauséabondes, les post-vérités, les intérêts politiciens et/ou mercantiles.

Cette chance est la presse indépendante.

Dans leur diversité, ces médias indépendants vous proposent ce que le rouleau compresseur des médias dominants écrase ou minore, ignore ou discrédite. Les questions sociales, de l’égalité femmes-hommes, des mobilisations antiracistes, du travail, les nouvelles luttes et dynamiques qui traversent la société, les enjeux environnementaux, l’urgence climatique, les nouveaux modes de vie.

Dans les régions, ce sont des titres indépendants qui viennent bousculer par leurs enquêtes une presse régionale souvent en situation de monopole et dépendante des pouvoirs locaux. A l’échelle internationale, ils décryptent l’actualité de l’Europe, enquêtent sur ses institutions, éclairent les nouveaux enjeux du monde

Avec de faibles moyens financiers, cette presse indépendante enquête, raconte, innove, débat. Il est urgent de la soutenir face aux offensives des puissances d’argent. Il faut la soutenir face à l’inaction et au silence inquiétants des pouvoirs publics en réaffirmant que l’information n’est pas une marchandise comme les autres.

Il est urgent, à travers elle, de défendre les droits moraux des journalistes, leurs conditions de travail. Il est urgent de construire un environnement économique propice à ces éditeurs indépendants et à la production d’une information de qualité.

Nos titres vivent aujourd’hui pour l’essentiel, et parfois exclusivement, des contributions, dons ou abonnements de nos lectrices et lecteurs. Ils garantissent notre indépendance.

Mais c’est à la société tout entière que nous adressons cet appel en forme d’alerte. Il y a une alternative à la « mal info » et à certains médias de masse qui propagent les peurs, les haines et fracturent la société.

Soutenez la presse indépendante. Regardez-la, écoutez-la, lisez-la.

Liste des signataires mise à jour le 28 octobre:

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Encadrement des loyers : comment ça marche à Lyon et Villeurbanne ?

Encadrement des loyers : comment ça marche à Lyon et Villeurbanne ?

À partir du 1er novembre 2021, l’encadrement des loyers et ses règles entrent en vigueur à Lyon et Villeurbanne. Quels sont les logements et les locations concernés ? Quels sont les plafonds (ou planchers) de loyers ? Quelles démarches faire pour les locataires et propriétaires ? Voici quelques réponses.

L’encadrement des loyers à Lyon et Villeurbanne va être expérimenté à compter du 1er novembre 2021. La mesure était une des promesses de campagne de la majorité métropolitaine, menée par les écologistes. Après Paris et Lille, la métropole de Lyon (ainsi que d’autres territoires) va mettre en place cette mesure censée faire baisser les prix du marché locatif privé.

Comment cette mesure va-t-elle s’appliquer concrètement ? Comment savoir si un loyer est conforme à la réglementation ? S’il est trop élevé, comment faire baisser un loyer ? Voici quelques éléments de réponses.

J’habite (ou je loue) à Lyon ou Villeurbanne, suis-je concerné·e par l’encadrement des loyers ?

L’encadrement des loyers concerne pour l’heure uniquement les communes de Lyon et Villeurbanne dans la métropole de Lyon.

La mesure s’applique dans trois situations :

    première mise en location d’un logementchangement de locatairerenouvellement de bail.

En clair, pour toutes les locations en cours débutées avant le 1er novembre 2021, la mesure ne s’applique pas. Le loyer restera inchangé. Elle ne pourra s’appliquer qu’au moment du renouvellement du bail.

Tous les types de logements sont-ils concernés par l’encadrement des loyers ?

Non. L’encadrement des loyers concerne les logements, meublés ou non, du parc locatif privé. La mesure concerne également les meublés loués via un bail mobilité (1 à 10 mois).

Elle ne concerne pas : les logements sociaux à loyers déjà modérés (HLM, ANAH), les locations saisonnières et les logements meublés dans certaines résidences avec services. Certaines résidences étudiantes avec services peuvent donc ne pas être concernées par la mesure.

Comment s’applique l’encadrement des loyers à Lyon et Villeurbanne ?

La règle est la suivante : pour chaque logement, le montant du loyer ne peut excéder un certain plafond (ni un certain plancher). Son coût ne pourra dépasser un plafond correspondant au loyer de référence du logement majoré de 20% (et il ne pourra être inférieur au loyer de référence minoré de 30%).

Quel est le plafond que mon loyer ne peut pas dépasser ?

Pour connaître le montant maximal de votre loyer, la Métropole de Lyon a mis en place un simulateur.

Pour déterminer le loyer de référence, elle a décidé de diviser le territoire de Lyon et Villeurbanne en quatre zones. Pour chacune de ces zones, un loyer de référence au m2 (un loyer médian) a été fixé par l’Observatoire local des loyers. C’est à partir de ce prix (majoré de 20% ou minoré de 30%) que sera établi le loyer maximal (et minimal) applicable à votre logement.

Le plafond du loyer peut donc varier d’un logement à l’autre. En effet, celui-ci est établi selon différents indicateurs : sa localisation, son ancienneté, sa surface, sa typologie (T1, T2..), son niveau de services ou de confort et s’il est loué meublé ou non.

Ces loyers de référence seront mis à jour annuellement.

Par ailleurs, un complément de loyer pourra être demandé par le bailleur si « le logement présente des caractéristiques de localisation ou de confort le justifiant ». Les loyers des meublés pourront se voir appliqués une « majoration unitaire par mètre carré ».

Zones encadrement des loyers Lyon et Villeurbanne
Zonage des villes de Lyon et Villeurbanne pour établir les loyers de référence dans le cadre de l’encadrement des loyers. Illustration Métropole de Lyon

Comment faire si son loyer est supérieur au plafond autorisé ?

Il faut déjà s’assurer que la mesure est applicable à son logement et à son bail (voir plus haut).

Le locataire doit agir au moins 5 mois avant la fin de son bail en cours. En activant deux démarches :

    une procédure civile : soit un courrier auprès de son propriétaire pour se mettre en conformité, une saisie de la Commission départementale de conciliation en cas de non réponse ou d’absence d’entente avec lui. Sans accord, il peut entamer une procédure judiciaire.une procédure administrative : soit un signalement à la Métropole de Lyon du non respect de l’encadrement des loyers pour son bail (par mail) qui en informera la préfecture. Cette dernière pourra alors mettre en demeure le propriétaire pour qu’il se conforme à la mesure d’encadrement des loyers en l’absence d’accord avec son locataire (dans un délai de deux mois auquel s’ajoute un mois de phase contradictoire donc, au total, un délai de trois mois).

À noter que la procédure civile est la même pour les propriétaires qui voudraient augmenter le montant du loyer de leur bien qui serait inférieur au loyer plancher.

Quelles sont les obligations et les risques pour les bailleurs qui ne respectent pas les règles de l’encadrement des loyers à Lyon ?

À partir du 1er novembre, les bailleurs doivent faire apparaître sur les contrats de bail le loyer de référence ainsi que le loyer plafond applicables au bien loué.

Dans le cas d’une procédure, les bailleurs qui ne respectent pas les dispositions peuvent être amenés à rembourser au locataire le trop-perçu de loyers. S’ils ne le font pas malgré une mise en demeure du préfet, ils peuvent écoper d’une amende (5000 euros pour un propriétaire physique, 15000 euros pour une personne morale).

Quels sont les moyens de contrôle de l’encadrement des loyers à Lyon et Villeurbanne ?

Ils sont relativement faibles et c’est une des principales limites de la mesure.

La métropole de Lyon va mettre en place une « équipe métropolitaine de l’habitat » (EMHA). Cette EMHA s’occupera par ailleurs également de la lutte contre le logement indigne. Selon Renaud Payre, vice-président de la Métropole de Lyon en charge du logement, elle sera « progressivement dotée de 6 à 8 personnes d’ici l’été 2022 ».

Comme indiqué, c’est au locataire de faire la démarche en cas de non respect. La Métropole de Lyon, ou un service de l’État, ne peut pas s’autosaisir pour faire respecter les dispositions d’encadrement des loyers. En clair, tout repose sur les locataires pour signaler un non respect des règles.

Les procédures évoquées plus haut peuvent, dans certains cas, être longues et coûteuses pour les locataires. De quoi en décourager de les entamer. Par ailleurs, une partie de l’application du dispositif pourrait reposer également sur la bonne foi des propriétaires.

En outre, dans le cas d’une majoration de loyer décidée par le propriétaire, les prestations ou dispositions du logement la justifiant peut être source de litiges en cas d’appréciations différentes entre les deux parties.

L’encadrement des loyers à Lyon et Villeurbanne est-il définitif ?

Non, pas pour l’instant.

La mesure est en place au moins jusqu’à fin 2023. « Et sûrement jusqu’en 2026 », selon Jacques Banderier, directeur départemental des territoires du Rhône.

L’encadrement des loyers à Lyon et Villeurbanne est une expérimentation. Elle est possible grâce à la loi ELAN. La Métropole de Lyon avait décidé de candidater au dispositif à l’automne 2020. Sa candidature a été officiellement retenue début septembre 2021 par le ministère du logement. Un arrêté préfectoral du 30 septembre 2021 permet l’entrée en vigueur du dispositif au 1er novembre 2021.

L’encadrement des loyers va-t-il faire baisser les loyers à Lyon et Villeurbanne ?

Pour la majorité métropolitaine, c’est tout l’enjeu.

« En faisant baisser les loyers, la rentabilité de certains bien pour les investisseurs va baisser. On l’assume. Mais notre but c’est que le locataire paye un loyer à un prix raisonnable.», a ainsi affirmé Bruno Bernard, président de la Métropole de Lyon lors de la présentation de l’entrée en vigueur de l’encadrement des loyers, le 26 octobre 2021.

Selon Renaud Payre, vice-président à la Métropole de Lyon en charge du logement, la mesure « aura surtout des effets sur les petites surfaces, les studios, T1 et T2 ».

Malgré cet encadrement des loyers, l’accès au marché locatif privé restera en grande partie conditionné par le niveau de la demande. La baisse des niveaux de loyers de certains logements doivent les rendre accessibles à des personnes ou ménages qui n’ont aujourd’hui pas les moyens. Toutefois, si la demande de logement à Lyon et dans la métropole reste forte, il n’est pas certain qu’une baisse des loyers permettent à certains d’accéder plus facilement à un logement privé. Un propriétaire choisira toujours le locataire avec le meilleur dossier, au détriment d’un candidat moins aisé.

« Au sujet de la pression locative, on essaye de la desserrer aussi par la construction de logements en plus d’autres mesures comme l’encadrement des loyers. Mais on doit aussi avouer nos limites », a reconnu, à ce propos, Renaud Payre.

Enfin, comme indiqué plus haut, une majoration du loyer peut être décidée par le propriétaire. Dans le cas où « le logement présente des caractéristiques de localisation ou de confort le justifiant ». Les contours très flous de cette majoration pourront permettre à certains propriétaires de compenser ainsi la baisse du montant du loyer de leur bien.

A Lyon, des actrices afghanes réfugiées au théâtre : « Quand nous jouions, nos familles n’étaient pas au courant »

A Lyon, des actrices afghanes réfugiées au théâtre : « Quand nous jouions, nos familles n’étaient pas au courant »

Depuis mi-septembre, une troupe de théâtre composée d’actrices afghanes est arrivée à Lyon. Accueillies par le TNG et le TNP, ces jeunes femmes et leur metteur en scène ont dû fuir Kaboul lors de l’arrivée des talibans. En amont du festival Sens Interdits, elles nous ont raconté leur histoire. 

Il y a un peu de fatigue dans les regards ce dimanche après-midi, au théâtre des Ateliers, rue du Petit-David (Lyon 2e). Ce 17 octobre, neuf jeunes artistes afghanes sont rassemblées dans le cadre du festival de théâtre Sens Interdits, à Lyon. Tout sourire, elles tapotent leurs bras pour montrer qu’elles ont reçu le vaccin contre la Covid-19 la veille. « Seconde dose », plaisante l’une d’elles. 

Parlant pour quelques-unes en anglais, elles tentent de s’exprimer aussi avec quelques mots de français. Arrivées en France mi-septembre, ces jeunes femmes d’une vingtaine d’années (voire moins) ont commencé à l’apprendre tous les matins. L’après-midi, elles se retrouvent en résidence pour faire du théâtre. 

Les artistes afghanes et leur metteur en scène
Quatre des artistes afghanes et leur metteur en scène lors du festival Sens Interdits.Photo : PL/Rue89Lyon.

A Kaboul, « des hommes devaient jouer les rôles des personnages féminins »

Rapidement, nous nous retrouvons avec trois d’entre elles et leur metteur en scène, en amont d’une conférence organisée par le festival. Dès le début des échanges, leur humour, presque enfantin, disparaît pour laisser s’installer un air sérieux.

Via l’aide de Daoud, un traducteur immigré afghan ayant fui l’arrivée des Russes dans les années 80, la troupe nous raconte son histoire en dari (persan afghan), une des langues les plus parlées dans ce pays multi-ethnique – avec le pachto. Un récit qui commence par celui de l’initiative prise par le metteur en scène, Naim.

« Quand on a commencé à jouer à Kaboul, on s’entrainait dans une tente, à côté d’une conteneur, se souvient-il. Mais au bout d’un moment, nous avons pu nous entraîner au centre culturel français. » 

A 31 ans, le jeune homme est l’aîné de la troupe et le fondateur du « Kabul Girls Theater Group. » Diplômé des Beaux-arts, il veut revenir dans ses créations sur « les difficultés de la société afghane ». 

« Quand j’ai commencé mes études d’art, nous ne jouions pas avec des femmes, se rappelle-t-il. Pour certaines pièces, des hommes jouaient les rôles des personnages féminins. » 

Sept membres d'une troupe de théâtre afghane accueillie à Lyon.
La troupe de théâtre afghane interprète Les ombres noirs, une pièce inspirée de leurs craintes.Photo : Naim/Kabul Girl’s Theater

Comédiennes afghanes : « Quand nous jouions, nos familles n’étaient pas au courant »

Après ses études, il commence à travailler et à intervenir dans différents établissements scolaires. Son objectif alors : aider, par le théâtre, les élèves à éviter la violence et à privilégier la parole aux coups. 

« En Afghanistan, beaucoup de violences sont le fait de luttes subsistant entre différentes ethnies, constate-t-il. Notre but était de combattre cela. » 

C’est par ce biais qu’ils rencontrent les jeunes filles. En 2015, il lance ce projet de troupe avec un objectif : faire faire du théâtre à des femmes. 

« A l’époque, quand nous jouions des pièces de théâtre, nos familles n’étaient pas au courant, raconte Fresha, 18 ans. C’était très dur de travailler. Il a fallu les convaincre de nous laisser faire. Puis, quand ils ont découvert ce que c’était réellement, ils sont venus nous voir jouer. » 

Rapidement, des pièces commencent à se monter. La troupe joue les jours de fête, autour de Kaboul, avec un accueil, parfois, consterné. Dans la ville, voir jouer sa fille dans une pièce, peut être considéré comme une « honte. » 

« Au début, les gens étaient plutôt méfiants, reprend Fresha. Puis, quand ils ont vu que l’on jouait sur des problématiques importantes, ils nous ont soutenues. » 

Six membres d'une troupe de théâtre afghane accueillies à Lyon.
Six membres d’une troupe de théâtre afghane interprète « Zombies », une de leur création.Photo : Naim/Kabul Girl’s Theater

Place des femmes, toxicomanie… Des pièces pour « faire évoluer les mœurs afghanes »

Quand on demande à Naim un nom de pièce qu’il a tenue à monter, il répond, en anglais, « To be or not to be ». Comme un symbole fort, Hamlet, la pièce de Shakespeare racontant « qu’il y a quelque chose de pourri dans le royaume du Danemark », est l’une des premières jouées par la troupe dans un pays en proie à la violence.

Pour le jeune homme, la réflexion d’Hamlet, héros de cette tragédie, devant un crâne se demandant « être ou ne pas être, telle est la question », est partagée par de nombreux d’Afghans. 

« Tout le monde se pose cette question en Afghanistan et se demande « Pourquoi » ? »

Mais l’équipe jouera aussi Le Malentendu, d’Albert Camus et des créations. 

« Chez nous, il y a énormément de toxicomanes, reprend, en exemple, Shegofa, Nous avons donc monté une pièce qui s’appelait Zombies. L’idée était de montrer aux gens qu’ils ne doivent pas finir comme ça. » 

A 21 ans, la jeune femmes est une des plus âgées du groupe. Sur un ton calme et serein, cette étudiante explique qu’elle voulait montrer à travers leur exemple que les Afghanes étaient capables de faire du théâtre, de travailler… Et de faire autre chose que du travail ménager.

De Kaboul à Lyon : « Les talibans sont allés plus vite que l’administration française »

Une expérience brutalement stoppée par l’avancée des talibans. Avec l’annonce de la reconquête des provinces par les fondamentalistes islamistes, les actrices cessent de jouer. Impossible pour elles de continuer à pratiquer leur art.

En France, un réseau se met en place pour accueillir des artistes afghan·es à l’initiative de l’artiste Kubra Khademi. A Lyon, plusieurs structures du monde du théâtre s’activent. Le TNP (Théâtre national populaire) et le TNG (Théâtre nouvelle génération) en font partie. 

« En juillet, nous avons commencé à faire les démarches pour accueillir des artistes. Nous avons lancé les demandes de visas afin de les accueillir un an en résidence, développe Joris Mathieu directeur du TNG. Malheureusement, les talibans sont allés plus vite que l’administration française. » 

Le jour de l’entrée des talibans dans Kaboul, la troupe reçoit par mail une convocation à l’ambassade de France. Malheureusement, la France n’a aucun moyen d’aller les chercher. « C’était une souricière », regrette Joris Mathieu en revenant sur l’événement, lors d’une conférence avec les actrices. 

Une troupe de théâtre afghanes accueillie à Lyon.
Le Kabul Girls’ Theater Group joue Hamlet de Shakespeare.Photo : Naim/Kabul Girl’s Theater

Dans la capitale afghane, où les combattants talibans circulent sans cesse, il leur faudra quatre jours pour rejoindre l’aéroport. Sans entrer dans les détails, elles montrent simplement une photo de la foule aux portes de ce dernier. Ces images, connues, peuvent laisser entendre les difficultés à quitter les lieux. 

Arrivées à Lyon mi-septembre, elles ont depuis commencé les démarches pour être reconnues réfugiées. La plupart ont eu leur rendez-vous à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) pour finaliser leur demande d’asile. Elles sont hébergées dans des appartements avec le soutien du TNG, du TNP et l’aide des Villes de Lyon et Villeurbanne.

Des pièces de théâtre à Lyon pour montrer que « l’Afghanistan n’est pas un pays terroriste »

Plus de deux mois après la prise de Kaboul par les talibans, elles ont repris le travail. Après des cours de français langue étrangère (FLE) le matin, elles travaillent dans des studios mis à disposition par les salles de théâtre l’après-midi.

En 2022, elles veulent monter une exposition photo sur la vie des Afghans. Elles souhaitent également monter une pièce de théâtre sur la vie dans leur pays, il y a dix ans. 

« L’Afghanistan n’est pas un pays de terroriste, et c’est ce que nous voulons montrer », reprend Naim, le metteur en scène. 

A travers ce travail, les actrices veulent également poursuivre des échanges, numériques, avec leur pays. Des pièces seront montrées aux amis et familles, restées sur place.

« Tout ce que nous n’avons pas pu faire en Afghanistan, je le ferai à Lyon, reprend Shegofa, 21 ans. Physiquement, je suis là. Mais mes pensées sont là-bas. » 

En les accueillants, les théâtres lyonnais leur ont au moins offert cette opportunité.

La rivière en Anthropocène : quels enjeux écosystémiques ?

La rivière en Anthropocène : quels enjeux écosystémiques ?

Les 14 et 15 juillet 2021, les cours d’eau de plusieurs bassins fluviaux et rivières d’Europe de l’Ouest débordent, provoquant une catastrophe dite naturelle due à un niveau de précipitation record pour la saison. À quels enjeux écosystémiques doit faire face un gestionnaire de rivière ?

Le fait de donner une personnalité juridique aux fleuves et rivières permettrait-il de mieux les protéger ? Ces questions seront abordées au cours de la session des Mercredis de l’Anthropocène de ce 27 octobre. Des débats questionnant les nouveaux enjeux environnementaux et leurs impacts sur la biodiversité.

Cette séance se déroulera de 18h30 à 20h à l’Hôtel71 (Lyon 2ème) dans le quartier Confluence, sur les bords du Rhône. La présentation d’un pass sanitaire valide et le port du masque sont obligatoires. À écouter également en podcast. Cette conférence s’inscrit dans le cadre de la Rentrée Anthropocène #2021.

Retrouvez ci-dessous le texte écrit par Cyrille Vallet. Ingénieur agronome, il dirige des études en gestion de la ressource en eau et gestion du risque inondation au sein du bureau d’études EGIS.

La rivière en Anthropocène

Plus de 286 bassins hydrographiques dans le monde sont des bassins transfrontaliers. 151 pays et presque 3 milliards d’habitants sont concernés. Ces fleuves, partagés entre différents pays et usagers, sont sujets de négociations, de tensions voire de conflits entre acteurs qui dépendent de la ressource pour une grande diversité de secteurs d’activités.

Les interactions amont-aval illustrent la complexité additionnelle qu’implique un espace transfrontalier pour la gestion de la ressource. À titre illustratif, on peut mentionner les défis de coordination qui peuvent subvenir entre des usages tels que par exemple la production hydroélectrique, l’irrigation, la production d’eau potable, la production nucléaire ; soit des usages dont les objectifs et les modes opérationnels sont souvent divergents.

À l’échelle transfrontalière, la compétition entre usagers peut se cristalliser à différentes échelles allant du cas isolé jusqu’à la tension géopolitique. Dans ce dernier cas, les discussions peuvent être complexifiées par l’intervention de facteurs externes au bassin ou déconnectés de la gestion de la ressource. On peut mentionner l’influence de processus politiques globaux, de processus diplomatiques traitant d’autres secteurs ou l’influence inhérente à la visée d’autres priorités nationales.

Il est nécessaire de trouver des outils permettant la préservation des fleuves et rivières

Malgré sa complexité et les possibles tensions inhérentes au partage de la ressource, l’histoire montre que l’espace transfrontalier n’a que rarement été vecteur de « guerre de l’eau ». Au contraire, la dimension transfrontalière de l’eau a plus souvent été source de coopération entre les parties prenantes (Wolf, 2003). Pour traiter des spécificités de la gestion transfrontalière de l’eau, de nombreuses approches ont été développées, en particulier via des règles et principes de droit international (Tignino & Bréthaut, 2018).

Certaines de ces conventions se veulent génériques et applicables dans une grande diversité de contextes (la convention dite de Helsinki par exemple), d’autres, plus opérationnelles, se concentrent sur un bassin, un fleuve ou une rivière spécifique. Certains cadres juridiques se concentrent sur des usages spécifiques de l’eau alors que d’autres se veulent plus englobants.

Il est nécessaire de trouver aujourd’hui des outils permettant d’accélérer la coopération transfrontalière et la préservation des fleuves et rivières. Ainsi, ce débat s’est ouvert à de nouvelles approches. De nouveaux paradigmes et outils se développent. La mobilisation citoyenne est reconnue comme un facteur-clef de réussite de la gestion intégrée et de la coopération entre usagers. Les populations riveraines prennent part au débat sous différentes formes.

En Nouvelle Zélande et en Australie, on attribue des droits et une personnalité juridique aux rivières

En France, les Agences de l’Eau sont considérées comme le lieu de la démocratie de l’eau. Créées en 1964, elles assurent une mission d’intérêt général en gérant et préservant la ressource en eau. Ce sont des établissements publics dont le territoire d’actions est le bassin hydrographique. Au sein du Comité de Bassin, l’ensemble des usagers (y compris les représentants des citoyens), les collectivités et l’Etat définissent la stratégie et la politique de l’eau. L’Agence assure le secrétariat du Comité de Bassin et met en œuvre la politique définie. Ce modèle a été repris au niveau européen et s’enrichit aussi des expériences internationales.

La Saône prise côté Lyon 2è. Une photo de Cyrille Vallet.
La Saône prise côté Lyon 2è.Photo : Cyrille Vallet

De nouvelles approches juridiques apparaissent aujourd’hui avec, par exemple, l’attribution de droits et d’une personnalité juridique aux rivières. Des mises en œuvre concrètes ont lieu, notamment en Nouvelle Zélande et en Australie. Des défis complexes existent à la fois pour l’institutionnalisation et la mise en œuvre des droits légaux.

L’apport d’une telle approche pour résoudre les problèmes de coordination intersectorielle tout en valorisant les aspects économiques, culturels (voire spirituels) ou environnementaux des hydrosystèmes concernés se posent en Europe où les Agences de l’Eau existent déjà. Les gouvernances du fleuve ne sont pas les mêmes en Océanie.

Un glissement du fleuve en tant que propriété vers le fleuve en tant que personne morale

Se concentrant sur les personnalités juridiques des fleuves en Océanie, O’Bryain (2019) et O’Donnell (2018) identifient deux processus d’établissement différents :

     Modification de la loi, comme en Nouvelle-Zélande par le Te Awa Yupua Act Jugements ou décisions de justice, comme pour la rivière Atrato en Colombie

Ces deux processus, solidement ancrés dans les systèmes régulateurs de droit commun, tendent à modifier la limite entre objets et sujets de droits. Ces processus impliquent un changement de statut du fleuve illustré par un glissement du fleuve en tant que propriété vers le fleuve en tant que personne morale (Hutchison, 2014). Hutchison affirme que la personnalité juridique reflète les valeurs de la société. En Nouvelle-Zélande, le cadre juridique hérité du colonialisme se heurte aux valeurs maories selon lesquelles un statut juridique doit être accordé à un fleuve.

Outre les processus d’établissement de la personnalité juridique, on peut s’interroger sur le type de cadre juridique qui pourrait structurer son cadre de gouvernance. Le fleuve doit-il être géré par le droit public ou par le droit privé ? Comment un tel arrangement se matérialise-t-il ? Quelle est la place des citoyens ?

Passer de l’anthropocentrisme à l’écocentrisme

Concernant le fleuve lui-même comme objet de droits, son identification ou sa caractérisation est encore floue et des questions liées aux niveaux et aux échelles (Cash et al. 2006) demeurent. Parlons-nous uniquement du fleuve, des berges du fleuve, de la nappe fluviale, de l’ensemble du bassin hydrographique (y compris les arbres ou les animaux ?).

Par exemple, sur le fleuve Whanganui, le sujet de droit est « des montagnes à la mer, intégrant ses affluents et tous ses éléments physiques et métaphysiques » (Bourgeois-Gironde, 2020). En France, l’Agence de Bassin concerne l’ensemble du bassin hydrographique… français. La partie suisse du Rhône n’est pas concernée par exemple.

O’Donnell (2018) établit quatre raisons qui contribuent à conférer aux rivières une personnalité juridique :

    Mettre en œuvre les lois des Premières NationsPasser de l’anthropocentrisme à l’écocentrismePermettre la valorisation de la rivière services écosystémiques Et/ou pour plaider dans les débats publics et la mobilisation des citoyens : elle souligne le large potentiel d’applicabilité du concept.

Elle souligne cependant qu’un tel processus peut également exacerber les tensions entre les communautés. En fait, utiliser la personnalité juridique comme moyen de mobiliser la population et de renforcer sa cohésion n’est peut-être pas un moyen simple.

Donner une personnalité juridique à la rivière pour éviter d’octroyer des droits de propriété

Sanders (2018) soutient que la personnalité juridique est un moyen de gérer les conflits d’exercice du pouvoir entre les Premières Nations et l’État. Par exemple, dans le cas de la rivière Whanganui, la personnalité juridique de la rivière a été établie pour éviter d’octroyer des droits de propriété au gouvernement ou aux Maoris. La manière dont la Couronne s’est octroyée la propriété au milieu du XIXe siècle explique la mise en œuvre de la personnalité juridique comme réparation partielle pour les Maoris. La prise en compte des avis des populations riveraines est ainsi primordiale.

Outre l’établissement de la personnalité juridique, son application est un aspect essentiel. Talbot-Jones (2019) souligne les besoins d’une co-construction entre toutes les parties, ce qui prend du temps (8 ans dans le cas de la rivière Whanganui). Elle favorise l’appropriation et l’intégration des savoirs des communautés locales.

Le Rhône, à proximité du lac Léman. Photo de Cyrille Vallet.
Le Rhône, à proximité du lac Léman. Photo de Cyrille Vallet.

Le fleuve ayant besoin de représentants, différentes approches ont été développées. En Nouvelle-Zélande, le fleuve est représenté par Te Pou Tupua, un conseil de 2 membres. Comme la rivière Whanganuy a « tous les droits, pouvoirs, devoirs et responsabilités d’une personne morale », ses représentants peuvent saisir les tribunaux pour protéger la rivière. La loi Te Awa Tupua institue des organes de cogestion et de co-gouvernance. La recherche de l’unanimité ou du consensus pour la prise de décision est l’un des fondements du processus décisionnel.

L’autre exemple du conseil consultatif de la rivière Yarra en Australie

La rivière Yarra, en Australie, de son côté, n’a pas de personnalité juridique. Le Conseil de Birrarung assure l’implication des Communautés dans la protection et la promotion de la rivière Yarra. C’est un conseil consultatif. Ainsi, le statut juridique du fleuve et le mandat des représentants du fleuve reflètent la co-construction et le récit local. Mais ils sont tous les deux aussi un moyen de donner également la parole aux Premières Nations locales (O’Bryan, 2019).

Le contexte est différent en Europe, où il n’y a pas vraiment de peuples premiers. De plus, ces mises en œuvre concernent des fleuves « nationaux » uniquement. Ainsi, la question se pose de savoir si ce changement de paradigme est nécessaire ou utile en Europe ou si des adaptations du cadre actuel sont pertinentes et suffisantes.

« La rivière en Anthropocène » une conférence en direct le 27 octobre de 18h30 à 20h puis disponible en podcast.

Avec :

– Alice Prost : spécialiste des sciences de l’environnement, elle dirige, depuis 2003, le  Syndicat des Rivières Dombes Chalaronne Bords de Saône.

– Cyrille Vallet : ingénieur agronome, expert du cycle urbain et naturel de l’eau ainsi que des évaluations environnementales et de biodiversités, il fut conseiller auprès du Ministre de l’Environnement en Moldavie, et depuis 2018, il dirige des études en gestion de la ressource en eau et gestion du risque inondation (principalement à l’étranger) au sein du bureau d’études EGIS.

Animation : Adrián Torres-Astaburuaga

#Rivière

À Bron, des montagnes de récup au cœur d’un système de solidarité

À Bron, des montagnes de récup au cœur d’un système de solidarité

Depuis mars 2020, l’association Agir (ex-DLC) à Bron récupère des tonnes de produits alimentaires tous les jours de la semaine dans la métropole de Lyon. Trois fois par semaine, les denrées nourrissent une trentaine de personnes sur le marché de la ville. Une organisation lancée au printemps 2020 quand le Covid et les confinements ont désorganisés certains réseaux et associations d’entraide. Plus d’un an plus tard, les besoins sont toujours là et l’organisation quelque peu « victime de son succès » face à l’ampleur du travail à effectuer.

C’est une scène de solidarité peu banale qui est devenue habituelle à Bron. Le lundi, mercredi et vendredi, une trentaine de personnes se pressent vers des voitures garées à côté du marché, place de la liberté. Alors que les forains remballent leurs marchandises, les véhicules arrivent à 13h, remplis de nourriture.

« On évite d’amener des fruits et des légumes pour ne pas entrer en concurrence avec les commerçants, commente une habituée de l’association Agir (anti-gaspi initiative Rhône, anciennement DLC [Date limite de consommation]). Mais ils ne nous ont jamais dit que cela leur posait problème. Des fois, ils s’arrêtent même pour nous donner des choses. »

Ce vendredi matin, deux véhicules attendent les habitants, le coffre ouvert. Un à un, ces derniers viennent remplir leurs cabas. De la viande, des blettes, du fromage, beaucoup de pain… Dans la mesure du possible, les bénévoles ont mis les denrées, les viennoiseries notamment, dans des petits sacs séparés pour éviter des contacts superflus. Une application, à leur manière, des gestes barrières pour éviter propagation du Covid-19. La plupart se sont équipés de gants pour la distribution.

Annie, une bénévole de Agir participe à la distribution de solidarité faite à Bron.
Annie, véritable « mère récup » et bénévole d’Agir lors de la distribution au marché de Bron.Photo : PL/Rue89Lyon

A côté du marché de Bron, une récup « de la solidarité » pour une trentaine de personnes

« Poussez pas, chacun son tour ! » Sur un marché où les commerçants sont obligés de remballer leurs invendus pour des raisons d’hygiène, ce moment est devenu un rendez-vous habituel de personnes (souvent âgées) en difficulté financière, ou non.

« J’ai préparé un sac pour la mamie qui ne mange que des sandwiches, nous montre une bénévole. Comme ça, elle n’a pas à attendre trop longtemps. »

En 30 minutes, les deux voitures sont vidées. Avant d’arriver, elles étaient pleines de produits récupérés le jour même ou la veille dans des commerces et grandes enseignes de la métropole de Lyon. Que de la « récup », laissée par des grands magasins ou de petits commerces.

Un modèle de solidarité s'est mis en place à Bron.
Une trentaine de personnes se pressent devant les voitures arrêtées au marché de Bron.Photo : PL/Ru89Lyon

Au cœur de Bron : une maison au centre du processus de récupération

Pour comprendre un peu mieux l’organisation des lieux, il faut revenir quelques heures en arrière, autour de 11 h 30. Ce jour-là, une quinzaine de personnes s’activent dans le domicile d’une mère de famille de Bron. Dans la matinée, des voitures ont fait des allers-retours vers des épiceries solidaires, des enseignes de la grande distribution, pour récupérer les invendus du jour. Dans des grandes caisses vertes, les denrées s’agglutinent.

Ce jour-là, une caisse entière remplie de gnocchis est arrivée, ainsi que des sacs pleins de fromage fondu. A ceci s’ajoute un stock entier d’endives en sachet, des produits frais, des brochettes de viande… Bref, un stock énorme de nourriture à gérer.

Des sacs de récup à Bron
Les retours de grandes surfaces s’accumulent à Bron.Photo : PL/Rue89Lyon.

Étudiant, retraité, salarié… Tous les âges se pressent dans cette drôle de ruche où l’on parle toutes les langues. A la tête de celle-ci, Emmy (le prénom a été modifié) la « reine-mère », comme la surnomme affectueusement une amie, tente de mettre de l’ordre dans le bazar.

« Le deal est simple. Tu viens, tu participes, et puis tu prends ce que tu veux », indique-t-elle.

Solidarité à Bron : « Avec le Covid-19, tout le monde était en galère »

Volovan, Hakim, Annie… Les prénoms illustrent la diversité des origines. « J’avais beaucoup de préjugés avant de commencer la récup, se souvient-elle. Ils ont vite disparu. » Peu à peu, elle a commencé à connaître toute la vie de ces habitués, à commencer par leur régime alimentaire.

« Quand nous avons du poisson, c’est un peu plus rare, mais on le met de côté pour ceux qui ne mangent pas de viande », relate Annie, 60 ans, une habituée des lieux.

L’association Agir (alors DLC) a débuté son activité en mars 2020. A cette époque, le réseau associatif est fortement désorganisé et les enseignes de la grande distribution se retrouvent avec une quantité importante d’invendus du fait du confinement. Beaucoup d’étudiants se trouvent également en difficulté. C’est en partie à eux que pense Emmy quand elle lance ce projet.

Des viennoiseries de récup
Des viennoiseries ont été mises dans des petits sachets avant la distribution.Photo : PL/Rue89Lyon.

« Avec le Covid-19, tout le monde était en galère. En cherchant un moyen d’aider, je suis tombé sur l’association DLC Nantes. J’ai demandé si je pouvais prendre leur nom pour Lyon, et j’ai lancé la machine. » 

La jeune femme décide alors de prendre sa voiture. Cette ancienne des éco-charlies pense qu’il faut pousser le concept initié par cette association (faisant de la collecte de frais, de fruits et légumes de magasins bio) en allant voir tous les magasins. Sous le conseil d’un de ses enfants, cette mère de famille nombreuse contacte les magasins pour développer des relations partenariales. 

« Quand je vois la quantité de pain qu’on récupère… Ça me déprime »

Aujourd’hui, elle est en contact avec sept magasins de la grande distribution, un stocker, huit épiceries solidaires de la métropole de Lyon et quatre boulangeries.

« Quand je vois la quantité de pain qu’on récupère… Ça me déprime », lâche-t-elle.

Quand on lui demande le nombre de personnes participant au projet, elle se retrouve incapable de répondre précisément. 

« Sur la conversation Messenger, nous sommes 260. Cela dit, je ne peux pas mettre plus de personnes. Sinon, sur le groupe privé, nous devons être autour de 1200. » 

Une chose est certaine, il y a du monde. Sept jours sur sept, une quinzaine de personnes doivent participer à la récolte. Le matin, trois voitures partent récolter la nourriture. Chaque voiture ramène une quinzaine de palettes de nourriture parfois pleines à ras bord. L’après-midi, il y en a souvent une.

Résultat : tout ne part pas. Des stocks entiers de produits non-périssables (vinaigres de riz, bières, etc.) sont gardés. Pourtant, la « mère-récup » cherche à tout redistribuer. Chaque jour, les bénévoles se servent (en abondance) en plus des distributions au marché. 

Des sacs de récup
Les sacs de bénévoles repartant après une matinée de récup.Photo : PL/Rue89Lyon.

Emmy qui, de son côté, ne fait plus de courses depuis un moment, rappelle les règles : que des produits périmés de la veille, ou de l’avant-veille maximum. Une attention particulière est portée sur les produits frais. 

« Après, il existe aussi des boissons qui sont toujours consommables, même un an après », note-t-elle. 

Si elle ne prend pas le temps de mesurer la quantité récoltée, le nombre de bénéficiaires donne une petite idée des montagnes d’invendus collectés. Il faut compter entre 15 et 20 personnes par jour, plus, à peu près, 30 personnes tous les deux jours bénéficiant de la distribution place de la liberté. De quoi donner le tournis.

« Il y a toujours des choses qui vont être jetées »

Face à l’ampleur du phénomène, la Brondillante semble parfois un peu débordée. Depuis plusieurs mois, elle cherche avec ses amis un local pour structurer un peu plus l’association.

Elle essaye de déléguer aussi, histoire de prendre des vacances… Ayant du mal à lâcher, la quadra travaille 7 jours sur 7.

« Les magasins nous proposent toujours plus, mais je ne peux pas tout prendre, je suis obligée d’en laisser, lâche-t-elle. Il y a toujours des choses qui finissent par être jetées. »

Une réalité qui lui fait vivre un rythme de vie impossible.

A proximité, d’autres bénévoles tentent de la pousser à déléguer, et de prendre le relai, malgré l’ampleur du travail demandé.

« C’est un moment où je me sens vraiment utile », commente son amie Annie pour expliquer l’énergie qu’elle consacre à l’association, à 60 ans.

Cette force suffira-t-il à rendre la structure pérenne ? L’exemple montre en tout cas l’ampleur du gaspillage alimentaire. En France, 10 millions de tonnes nourriture sont gaspillées chaque année. Une réalité difficile à imaginer, qui prend toute sa mesure à travers cette initiative de Bron.

Beaujolais : « Nous ne sommes pas les premières vigneronnes, nous avons des mères »

Beaujolais : « Nous ne sommes pas les premières vigneronnes, nous avons des mères »

En amont du salon Sous les pavés la vigne à Lyon, nous avons rencontré deux vigneronnes du Beaujolais. Dans cet article, nous revenons sur le parcours de Claire Chasselay, installée à Chatillon. Une « chauvine » pas peu fier de son secteur et de son vin bio.

« Ok pour l’entretien, mais il faut que ça aille vite, je suis en pleine vinification. »

Claire Chasselay est le genre de personne à ne jamais avoir trop le temps. En ce mardi de la mi-octobre, elle court entre les tonneaux du domaine familial, allant des éprouvettes du labo, aux cuves, à l’accueil pour vendre quelques bouteilles. « Elle est branchée sur 220 volts », sourit une de ses consœurs.

Ce jour-là, elle nous accorde pourtant trois fois plus de temps que prévu autour d’un café. Vin bio, certification, féminisme… Elle envoie, sans ambages, ses convictions dans ces différents domaines. Même sur ses doutes concernant l’appellation « vin naturel », au label émergent.

« Si déjà tout le monde arrêtait de mettre du Round-up de partout, ce serait déjà pas mal », renâcle-t-elle.

Claire Chasselay, une vigneronne du Beaujolais. ©PL/Rue89Lyon
Claire Chasselay est vigneronne sur à Chatillon.Photo : PL/Rue89Lyon

« Quand on était jeunes, on ne se disait pas qu’on allait faire vignerons »

Installée avec son frère depuis 2008 sur les terres de son père (le domaine existe depuis 1464), Claire Chasselay a récupéré des vignes déjà 100 % bio. Ses parents, Jean-Gilles et Christiane, furent parmi les premiers du secteur des pierres dorées (sud Beaujolais) à entrer dans les démarches de labellisation. En 2003, la famille obtient une première certification AB. En 2006, les 11,5 hectares y sont passées.

Pas de désherbant, ni produit chimique de synthèse, une attention particulière au calendrier lunaire, etc. Elle poursuit l’histoire familiale, avec sa touche, et son tempérament. Un parcours qui n’a pas toujours relevé de l’évidence.

« Quand on était jeunes, moi comme mon frère, on ne se disait pas qu’on allait faire vignerons. D’ailleurs, avant nous, nos parents non plus ! »

Elle qui a toujours vécu et travaillé dans ce monde pense rapidement aux beaux-arts, avant de laisser tomber. Elle revient vite dans la viticulture et l’œnologie où elle travaillera six ans.

« Vendre le vin des autres, ça m’a plu, se souvient-elle. Mais il me manquait quelque chose. »

Claire Chasselay, une vigneronne du Beaujolais. ©PL/Rue89Lyon
Claire Chasselay suit l’évolution du vin durant le processus de vinification.Photo : PL/Rue89Lyon.

« Dans le Beaujolais, nous ne sommes pas les premières vigneronnes, mais maintenant nous avons le statut »

Rapidement, une évidence s’affirme : elle veut faire le vin qu’elle aime. Sous-entendu : le sien. Elle décide de repasser dans les vignes avec son frère. De sa période dans la vente, elle garde en haute estime la fonction du caviste. « C’est la prolongation naturelle de notre métier », marque-t-elle. Finie la vente en direct. Aujourd’hui, elle ne représente plus que 5 % de ces ventes.

Avec son frère, elle se concentre sur la production et la vinification. Lors de celle-ci, il et elle n’ajoutent aucun intrant. Il peut leur arriver d’ajouter une dose minimale de sulfite seulement à la mise en bouteille, pour optimiser la conservation. Derrière son microscope, elle surveille les étapes de la fermentation des vins.

Une place technique qu’elle aime occuper en tant que femme.

« Nous ne sommes pas les premières vigneronnes, nous avons toutes des mères, rigole-t-elle. Mais, maintenant, nous avons le statut. »

Elle le rappelle : sans les épouses, les vignes n’auraient jamais tourné. Pourtant, celles-ci n’ont pas toujours été considérées comme tel. Beaucoup n’ont d’ailleurs jamais été déclarées.

« À l’époque de mes grands-parents, il était inconcevable qu’une femme rentre dans la cave, constate-t-elle. C’est vraiment avec notre génération que cela a commencé. »

Une femme dans les vignes : une petite tendance à « ramener sa science »

Claire Chasselay, une vigneronne du Beaujolais. ©PL/Rue89Lyon
Claire Chasselay, une vigneronne du Beaujolais, devant les tonneaux du domaine géré avec son frère, Fabien.Photo : PL/Rue89Lyon

Aujourd’hui, les choses ont bien évolué. Comme sa consœur Elisa Guérin, elles sont plusieurs à avoir repris des domaines familiaux.

Reste que certains préjugés ont la vie dure. Alors, quand elle a des stagiaires consœurs, elle leur livre tout, prenant presque une position de mentor. Dans son parcours, c’est peut-être la principale chose qui lui a manqué, par rapport à ses confrères, en tant que femme vigneronne. « Mais les potes de ma génération m’ont bien aidé », souligne-t-elle.

De même, la jeune mère a tendance à « ramener sa science ». Surtout sur des sujets techniques, histoire de montrer que « les mecs » ne sont pas les seuls à les maîtriser. Il faut dire qu’à côté du gabarit de rugbyman de son frère, certains ont tendance à la prendre pour la commerciale. « C’est risible je sais. Mais bon, ça m’agace. » Ils en prennent alors pour leur grade.

Le Beaujolais à la recherche de nouveaux vignerons

Pour elle, il y aura besoin de femmes pour reprendre des vignes. Pour cause : avec une population vieillissante, un nombre importants de vignerons vont partir à la retraite prochainement.

A presque 40 ans, elle le souligne : la plus grande difficulté pour eux sera de trouver des successeurs.

« Quand on a repris, je pense que seuls 5 % des vignerons trouvaient des successeurs. Le métier n’était pas aussi « sexy », constate-t-elle. Alors aujourd’hui, que ce soit des femmes ou d’autres, il faut lancer un appel pour que du monde vienne reprendre. On est ouvert ! Sinon, 95 % des vignerons vont se trouver sans successeur. »

La période semble, pour cela, meilleure qu’à une époque. Le beaujolais a de nouveau la côte et les bonnes quilles se trouvent une meilleure place sur les tables de Lyon et d’ailleurs.

« Les grosses daubes de sanglier, c’est fini. Tout se rafraîchit ! »

« Les grosses daubes de sanglier, c’est finit. Tout se rafraîchit. Maintenant, on veut sentir plus les légumes. Et bien pour le vin, c’est pareil. »

Cette enfant du cru prêche pour sa paroisse. Faisant partie d’une « génération 100 % chauvin », elle « aime sa terre », son vin, et le défend.

« Aujourd’hui, quand les gens boivent un vin, ils ne veulent pas se prendre la tête, marque-t-elle. Est-ce que tu bois pour déguster ou pour te faire plaisir ? »

Dit comme ça, forcément, ça donne envie. Restera à convaincre de potentiels amoureux des vignes de venir s’installer. Dans un métier complexe, où la connaissance de son territoire et de sa topographie est primordiale, il paraît difficile parfois de trouver des successeurs hors des familles.

Ainsi, les vigneronnes rencontrées lors de notre passage dans le Beaujolais poursuivent souvent une histoire familiale. Le père de Claire Chasselay, Jean-Gilles, n’a pris sa retraite qu’en mai 2021. En absence d’héritières et d’héritiers systématiques, il faudra pourtant y arriver.

Claire Chasselay vigneronne Beaujolais
Claire Chasselay est vigneronne à Chatillon.Photo : PL/Rue89Lyon.
#Beaujolais nouveau#Cru du Beaujolais

L’extrême droite à Lyon : panorama d’une galaxie de groupuscules

L’extrême droite à Lyon : panorama d’une galaxie de groupuscules

Depuis sa création, la rédaction de Rue89Lyon documente la présence et les agissements des mouvements d’extrême droite à Lyon. Lyon est un carrefour et une terre plutôt propice au développement des groupuscules qu’ils soient nationalistes, identitaires ou néonazis. Voici donc un panorama de l’extrême droite à Lyon à travers notre couverture du sujet.

À Lyon, cohabitent différents groupuscules d’extrême droite, certains plus radicaux ou violents que d’autres. La ville constitue ou a constitué les sièges nationaux de différentes organisations comme le GUD devenu Bastion Social ou plus récemment Génération identitaire.

Leur présence et leurs activités dans Lyon ou sa région ne sont pas passées inaperçues. Alors qu’une manifestation contre l’extrême droite à Lyon doit se dérouler ce samedi 23 octobre, nous avons souhaité regrouper sur cette page notre couverture du sujet. Elle ne vise pas l’exhaustivité ni un recul historique complet mais une documentation depuis 2011, année de la création de Rue89Lyon, d’un sujet qui fait souvent la (mauvaise) réputation de Lyon.

Actions violentes, présence dans le Vieux Lyon, dissolutions et reformations des groupuscules, liens avec le stade de foot et des groupes de supporters de l’Olympique Lyonnais, ouvertures et fermetures de leurs locaux, liens avec le Front national… Voici donc un éclairage sur l’histoire récente de l’extrême droite à Lyon.

Sommaire ( cliquer sur ➡️ pour accéder aux sections)

    Les grandes familles de l’extrême droite à Lyon – ➡️L’extrême droite nationaliste : du GUD au Bastion social➡️Le développement des identitaires autour de Génération identitaire➡️La tendance néonazie à Lyon : concerts, free fight et hooligans – ➡️Le Vieux Lyon, fief revendiqué de l’extrême droite – ➡️Les agressions et actions violentes de l’extrême droite à Lyon – ➡️Les condamnations de militants d’extrême droite à Lyon – ➡️FN et l’extrême droite radicale : des liens parfois étroits – ➡️Les liens de l’extrême droite avec le stade de l’Olympique Lyonnais➡️Coup d’arrêt et recomposition, les effets relatifs des dissolutions➡️Comment les autorités traitent la question de la fermeture des locaux de groupes d’extrême droite radicale à Lyon ? – ➡️

Lyon, terre d’accueil de différents groupuscules d’extrême droite

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Ces dernières années, Lyon a notamment été la plaque tournante nationale de trois organisations d’extrême droite : le Bastion Social et les Jeunesses nationalistes (tendance nationaliste), et Génération identitaire, d’obédience régionaliste et identitaire.

Le Bastion Social est l’émanation de la vieille organisation étudiante d’extrême droite, le GUD (Groupe Union Défense). Le mouvement a été présent un temps à l’université Lyon 3. Il était notamment venu au soutien de Bruno Gollnisch, membre du Front National alors et professeur à l’université, à son retour en 2011 après une suspension de 5 ans. Il a possédé un local à Lyon sous le nom du Pavillon Noir. Un premier implanté à Saint-Just (Lyon 5e), rouvert plus tard sur les bords de Saône, quai Pierre Scize, jusqu’à sa dissolution en 2019.

Le mouvement Génération identitaire est lui aussi présent de longue date à Lyon. Plusieurs militants identitaires lyonnais font partie des cadres de l’organisation, comme Damien Rieu. Le siège national de l’organisation Génération identitaire est basé à La Traboule, dans le Vieux Lyon. À l’adresse même du bar associatif et militant de l’organisation.

À côté de ces deux organisations aujourd’hui dissoutes, on trouve également dans la période récente d’autres groupuscules d’extrême droite. Comme les royalistes de l’Action Française, présents notamment lors de manifestation de La Manif pour tous ou anti-IVG.

Les Jeunesses nationalistes, fondées en 2011 ont été un temps actives au plan national mais principalement à Lyon. À leur tête se trouvait Alexandre Gabriac, ancien conseiller régional Front National (FN) de Rhône-Alpes, exclu du parti après la diffusion d’une photo le montrant effectuant un salut nazi. L’organisation, dissoute en 2013, était en quelque sorte la branche jeunesse d’une vieille organisation d’extrême droite, l’Oeuvre Française.

À partir de 2012, cette dernière a été dirigée par Yvan Benedetti, ancien conseiller municipal FN de Vénissieux. En 2011, il est exclu du parti après s’être déclaré « antisioniste et anti-juif ». En 2014, Alexandre Gabriac et Yvan Benedetti mèneront une liste aux élections municipales de Vénissieux et seront élus. Des irrégularités dans la constitution de leur liste entraîneront l’annulation des élections. Par la suite, Yvan Benedetti fera vivre l’Oeuvre française en réveillant un autre vieux parti d’extrême droite, le Parti Nationaliste Français (PNF) qui compte quelques membres à Lyon.

Des membres du réseau Blood and Honour, tendance néonazie, sont également présents dans la région de Lyon. Officiellement dissous, il reste cependant actif en organisant des évènements. Certains de ses membres se mêlent parfois à des actions d’autres groupes d’extrême droite, notamment en marge de matchs de l’Olympique Lyonnais.

Lyon a également été considéré comme une section « modèle » pour le mouvement Égalité et Réconciliation d’Alain Soral.

La ville est également une place forte des catholiques traditionalistes, notamment proches de la Fraternité Saint Pie X.

Le GUD et le Bastion social, de l’université Lyon 3 à la dissolution

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Historiquement, le GUD (Groupe Union Défense) a été fondé à Paris et recrute dans les universités. À Lyon, il est officiellement présent depuis 2011. Il s’est présenté, sous un autre nom, aux élections étudiantes à l’université Lyon 3.

L’organisation est entrée en sommeil en 2017. C’est à partir de ce moment que plusieurs de ses branches locales sont apparues sous l’appellation Bastion Social. Le mouvement a été dirigé depuis Lyon par Steven Bissuel et Logan Djian anciens « gudards ».

Le Bastion Social, mouvement nationaliste, s’est inspiré notamment de l’organisation fasciste italienne Casapound. Comme cette dernière, il a ambitionné d’ouvrir en 2017 un squat pour loger des sans-abri qu’ils voulaient français et européens en contrepied d’un État franças qui selon eux ne se préoccuperait que des « clandestins extra-européens ». Ils ont occupé brièvement un immeuble de la Ville de Lyon sur la presqu’île à proximité de la place des Jacobins.

L’organisation a entretenu des liens avec certains membres proches ou membres par ailleurs d’organisations néonazies. Certains d’entre eux ont participé à des actions violentes avec des supporters de l’Olympique lyonnais (voir par ailleurs).

Après sa dissolution en 2019, deux émanations du Bastion Social ont vu le jour à Lyon : Lyon Populaire et Audace Lyon. Lyon Populaire est notamment à l’origine d’une autre organisation, Terra Nostra, qui a furtivement occupé un local à Larajasse dans les Monts du Lyonnais. Un territoire qui fut par le passé une des bases arrières de l’extrême droite à Lyon. Avant de perdre du terrain progressivement.

Le développement des identitaires à Lyon

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Branche jeunesse du Bloc identitaire, le mouvement s’est autonomisé à partir de 2012 à la suite de l’occupation de la mosquée en construction de Poitiers. Une action préparée depuis Lyon par des militants identitaires issus du groupe lyonnais Rebeyne.

Au sein de l’organisation on reconnaît dès sa création la place influente des militants lyonnais. Une mainmise qui se poursuivra jusqu’à la dissolution du groupe en 2021. Le groupe, qui met davantage en avant une fibre régionaliste et anti-immigration, s’est fait une spécialité d’opérations médiatiques.

Suite à une « opération anti-migrants » au col de l’Échelle dans les Hautes-Alpes, l’organisation est dissoute en mars 2021. Après les dissolutions ou les mises en sommeil d’autres organisations d’extrême droite, Génération identitaire est devenu entre temps le centre de gravité de la « fachosphère » à Lyon.

Génération identitaire a toujours voulu montrer une image respectable. Plusieurs de ses membres ont pourtant étaient condamnés pour des agressions et actions violentes à Lyon et sa région. Les frontières n’étant pas imperméables, certains de ses membres naviguent d’ailleurs au sein d’autres organisations plus radicales et violentes.

Son siège social et bar associatif, La Traboule, a cristallisé depuis son ouverture en 2011 des tensions. Notamment dans le quartier du Vieux Lyon où il est implanté, montée du Change. Par la suite, en 2017, une salle de boxe, l’Agogé, a été ouverte dans un local adjacent. Depuis la dissolution de Génération identitaire en 2021, les lieux ne sont pas pour autant fermés, grâce à des associations satellites locataires des lieux. L’organisation les maintient ouvert mais sous un nouveau nom, « Les remparts de Lyon ».

À Lyon et dans sa région : des néonazis avec concerts de Black Metal et combats de free fight

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Lyon a aussi eu ses groupes d’extrême droite tendance néonazie. Ils convergeaient notamment au « Bunker Kops », leur local situé dans le quartier de Gerland (Lyon 7e). Fermé en 2011, sur décision administrative de la Ville de Lyon, il a été actif durant un an et demi environ.

Dans la région de Lyon, des évènements organisés ou liés à des mouvements néonazis n’ont pas cessé pour autant. Le territoire est un de ceux où le réseau Blood and Honour est le plus actif. Ce mouvement, dissous lui aussi en 2013, est à l’origine notamment de nombreux concerts ou tournois de free fight qui ont lieu notamment dans le Nord Isère ou dans l’Ain. Là aussi en trompant bien souvent les communes au moment de louer une salle pour leurs évènements.

En outre, ces mouvements néonazis entretiennent des liens parfois étroits avec des membres de la branche nationaliste. Certains membres du réseau Blood and Honour sont passés au Pavillon Noir, le local Bastion Social à Lyon. Des membres de ces mouvements se sont également retrouvés ensemble lors de manifestations.

Le Vieux Lyon, fief revendiqué d’organisations d’extrême droite ne veut pas devenir « facho land »

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Quartier historique de Lyon, le Vieux Lyon représente pour certaines organisations d’extrême droite le symbole de l’histoire de la ville. Ils le revendiquent comme leur fief.

Plusieurs organisations ont ainsi eu des locaux dans le quartier. C’est le cas de Génération identitaire, avec le bar associatif La Traboule depuis 2011 et la salle de de boxe l’Agogé depuis 2017, toujours ouverts sous un autre nom à ce jour. Le Parti Nationaliste Français, mené par Yvan Benedetti, ancien du FN et de l’Oeuvre Française, a également possédé un local dans le Vieux Lyon.

Le GUD, devenu Bastion Social, a un temps occupé un local, le Pavillon Noir, dans le quartier de Saint-Just. Certains de ses membres, dont le leader du Bastion Social, Steven Bissuel, ont possédé des commerces dans le Vieux Lyon. L’organisation a par la suite occupé un nouveau Pavillon Noir, quai Pierre Scize sur les bords de Saône.

Certaines associations du quartier ont publiquement affiché leur opposition à leur présence. À l’image de la Maison des Passages ou encore de Philippe Carry, horloger à Saint-Paul. Elles ont ainsi connu des dégradations et attaques contre leurs locaux.

Les actions violentes de l’extrême droite dans les rues de Lyon

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La présence des groupuscules d’extrême droite à Lyon ne s’arrête pas à leurs différents locaux. Leurs militants mènent aussi des actions dans les rues de Lyon, parfois violentes.

Le Vieux Lyon en a été souvent le théâtre contre des associations du quartier ou des gens de passage. Lors d’affrontements contre des groupes de supporters anglais ou d’agressions « politiques » contre des personnes réputées d’extrême gauche. Ou bien encore lors d’agressions à caractère homophobe ou raciste. Des agressions qui peuvent se faire à coups de couteau comme en 2014. Ce genre d’attaques a pu se produire dans d’autres quartiers de Lyon, comme la Croix-Rousse, mais aussi à Villeurbanne.

Des locaux d’organisations politiques ont également connu des dégradations. C’est le cas notamment des locaux du Parti communiste, de la CGT ou de la Confédération Nationale du Travail (CNT).

Certains lieux réputés antifascistes ont aussi été la cible de militants d’extrême droite. Comme la librairie La Plume Noir située dans les pentes de la Croix-Rousse, plusieurs fois attaquée. Certains de ses membres ont également été agressés. Certains bars ou évènements, comme des concerts, ont également été la cible « d’expéditions punitives » de membres de l’extrême droite radicale à Lyon. Ou même Radio Canut.

Au printemps 2021, des membres de l’extrême droite ont attaqué la manifestation pour la fierté lesbienne à Lyon. En 2017, la préfecture du Rhône avait d’ailleurs interdit à la marche des fiertés de passer par le Vieux Lyon. Des membres de groupes d’extrême droite se sont montrés présents au sein de manifestations menées par la Manif pour tous, opposée au mariage homosexuel et à l’ouverture de la PMA et de la GPA. Ou se cachent derrière des manifestations « contre l’insécurité ».

À l’été 2021, des cadres de Génération identitaires ont été identifiés à la manœuvre des affrontements autour de la rue Mercière à Lyon. Ils avaient eu lieu durant la soirée du match de football de l’Euro 2020, France-Suisse.

De nombreuses condamnations de membres de l’extrême droite lyonnaise

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Plusieurs membres de l’extrême droite lyonnaise ont été condamnés ces dernières années. Ces condamnations découlant de différents type d’actes :

    agressions violentes,injures raciales, propos ou actes incitant à la haine racialereconstitution ou maintien d’organisations dissoutes.

C’est le cas notamment de Steven Bissuel, condamné pour l’agression de militants d’extrême gauche en 2011 et pour incitation à la haine raciale en 2018, suite à des propos tenus en 2015 à l’occasion des 70 ans de la libération du camp d’Auschwitz.

Yvan Benedetti et Alexandre Gabriac ont été condamnés eux pour maintien de ligue dissoute.

Par ailleurs, des membres du GUD et du Bastion Social ont été condamnés pour des agressions racistes ou contre un professeur à proximité de Lyon 3. Un autre a été condamné pour le tabassage d’un policier au Groupama Stadium lors d’un match de l’Olympique Lyonnais contre le CSKA Moscou.

Plusieurs cadres identitaires ont également été condamnés, notamment pour une agression au couteau en 2014. Damien Rieu et d’autres militants de Génération identitaire ont été condamnés puis relaxés, à la suite à l’opération « anti-migrants » au col de l’Échelle.

Les liens entre Front national et l’extrême droite radicale à Lyon

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Officiellement, le parti de Marine Le Pen maintient une ligne jaune avec les franges plus radicales de l’extrême droite. Toutefois, dans les faits, les liens sont parfois étroits.

À Lyon, ils le sont notamment avec les identitaires. Alors patron du Front national (devenu Rassemblement national) dans le Rhône, l’ancien conseiller municipal de Lyon, Christophe Boudot, ne se cachait pas pour afficher sa proximité avec Génération identitaire. Ils s’opposaient et manifestaient ensemble à la création de l’Institut français de civilisation musulmane en 2016. En 2015, les identitaires avaient également occupé le toit d’un bâtiment destiné à accueillir un village d’insertion pour des Roms à Saint-Genis-les-Ollières. Christophe Boudot s’était alors pressé sur les lieux, alors candidat du Front National aux élections régionales.

Le FN sous-traitait alors en quelque sorte la « gestion de la rue » aux identitaires. Notamment lors de manifestations ou rassemblements hostiles au parti frontiste ou à l’extrême droite en général. Même après le début de « dédiabolisation » du parti voulue par Marine Le Pen, certains de ses proches et cadres du parti étaient présents aux côtés des identitaires de Lyon, à La Traboule notamment.

Plus récemment encore, Marion Maréchal a fondé l’ISSEP, une école privée de « sciences politiques » à Lyon. Elle a pour but de former les cadres de l’extrême droite de demain notamment dans une logique de convergence des droites qu’elle appelle de ses vœux. La nièce de Marine Le Pen se rend par ailleurs régulièrement à des rencontres de cercles de réflexion proche des identitaires.

L’extrême droite et le stade de l’Olympique lyonnais

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Certaines travées du stade de football de l’Olympique lyonnais (OL) sont un lieu de rencontre ou de recrutement pour certains mouvements d’extrême droite. Des organisations comme la Mezza Lyon occupent notamment le virage sud, celui des groupes « indépendants ». La Mezza Lyon s’est notamment fait remarquer pour avoir brandi des banderoles hostiles aux immigrés. Sur le canal Telegram d’extrême droite Ouest Casual on peut notamment voir le drapeau de l’organisation déployé dans le mausolée où est enterré Benito Mussolini.

En 2018, de violents affrontements ont opposé des hooligans à la police en marge du match de l’Olympique lyonnais contre le CSKA Moscou. Un policier a été violemment tabassé au sol notamment. Un des auteurs des faits, repéré par la suite dans les tribunes du stade, a été condamné à 18 mois de prison ferme. Il était proche du Bastion Social et du réseau Blood and Honour.

D’autres affrontements ont eu lieu en marge ou lors de différents matchs de l’OL. Notamment lors de rencontres contre des clubs possédant des supporters ultras réputés antifascistes. Ainsi, de violents affrontements ont éclaté dans les tribunes du Groupama Stadium lors du match contre le club du Besiktas Istanbul en 2017. Certains de ses supporters avaient spécialement visé le virage sud où se trouvent des groupes de supporters liés à l’extrême droite lyonnaise. On a relevé également des affrontements avec des supporters du club de l’AS Rome.

L’impact relatif des dissolutions de groupes d’extrême droite à Lyon

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L’histoire récente des groupuscules d’extrême droite à Lyon est aussi celle de leur recompositions. Des évolutions et des changements de noms provoqués notamment par des mesures de dissolution. Ces recompositions entraînent parfois l’apparition de nouveaux groupuscules et/ou de nouveaux noms.

Suite à la mort du militant antifasciste Clément Méric à Paris en 2013, plusieurs organisations d’extrême droite ont été dissoutes. Parmi elles, l’Oeuvre française d’Yvan Benedetti et les Jeunesses nationalistes d’Alexandre Gabriac particulièrement actives à Lyon.

Les deux hommes ont par la suite réactivé une ancienne revue, Jeune Nation. Puis, Yvan Benedetti a repris un vieux parti, le Parti nationaliste français (PNF), pour poursuivre l’action de l’Oeuvre française. À leur procès pour maintien de ligue dissoute, ce dernier a avoué que « la dissolution les [avait] tués ».

Mais les dissolutions n’ont pas toujours le même effet. À défaut de mettre fin aux mouvements et à leurs activités, elles entraînent, un temps, une certaine désorganisation avant de nouvelles recompositions. Ce fut notamment le cas avec le Bastion Social dissous en 2019. Malgré la dissolution du mouvement et de ses associations satellites, le dernier local en date du mouvement a continué à être utilisé par des membres du groupuscule. Notamment pour préparer et mener des actions en marge des manifestations des Gilets jaunes.

Le cas du Bastion Social est toutefois révélateur d’une des techniques souvent utilisées par des mouvements d’extrême droite pour avancer masqués. Le local du mouvement à Lyon, comme ceux ouverts dans d’autres villes de la région comme Chambéry, a été loué via une association satellite. Ne faisant aucune référence au mouvement Bastion Social, elle prétendait dans ses statuts promouvoir et défendre les traditions lyonnaises. Mais en aucun cas être une organisation politique.

Dernier cas en date, celui de Génération identitaire. L’organisation a été dissoute en mars 2021. Or, elle aussi loue ses locaux via des associations satellites. Dans son cas, le décret de dissolution ne concerne pas ces deux associations, lui permettant de maintenir ses locaux ouverts. Y compris le bar La Traboule, siège social de feu Génération identitaire. En septembre 2021, l’organisation a repris ses activités sous le nom de « Les remparts de Lyon », nom d’un de ses comptes Twitter notamment, créé quelques années auparavant et peu utilisé jusqu’ici.

La fermeture administrative des locaux, une arme juridique pour contrer l’extrême droite

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Certaines associations, partis politiques, syndicats ou groupes antifascistes demandent constamment la fermeture des locaux de l’extrême droite.

Fermer les locaux d’organisations d’extrême droite n’est pas toujours chose facile. En cas de troubles à l’ordre public généré par le local, le préfet peut décider d’une fermeture administrative. Il doit toutefois avoir la volonté d’établir un lien entre le local et des troubles qui n’ont pas forcément lieu à proximité.

Pour ces locaux classés Établissements recevant du public (ERP), l’aval d’une commission de sécurité municipale préalable est obligatoire pour ouvrir. La municipalité s’assure notamment du respect des différentes normes de sécurité. Parfois, les organisations sont mises en défaut à ce moment-là. Offrant ainsi aux municipalités la possibilité de fermer, au moins temporairement, jusqu’à une potentielle mise en conformité. La complexité ou le coût des travaux à réaliser peuvent parfois entraîner la fermeture définitive des locaux.

Toutefois, en cas de mise en conformité, la municipalité n’a d’autre choix que de valider l’ouverture des locaux. Ce fut le cas de la Ville de Lyon en septembre 2020 qui a autorisé la réouverture de La Traboule et de l’Agogé, les locaux de Génération identitaire après d’importants travaux.

Après le départ au ministère de l’intérieur de Gérard Collomb, qui opposait souvent extrême droite et extrême gauche, ses successeurs se sont montrés davantage actifs sur le sujet.

A Lyon, l’avocat d’Alain Soral et les propos antisémites de son client

A Lyon, l’avocat d’Alain Soral et les propos antisémites de son client

Ce vendredi, un habitant du Rhône Sylvain C. comparaissait devant la cour d’appel de Lyon pour avoir envoyé un mail contenant des propos antisémites au responsable d’une étude de l’Inserm. Son avocat, connu pour avoir défendu le polémiste d’extrême droite Alain Soral, a lui voulu « relativiser » ses écrits. Récit d’une audience tendue.

« Mais qu’est-ce que peut bien être une tête de franc-maçon orientaliste ? »

Certaines questions ont pu laisser songeur, ce vendredi 22 octobre, à la cour d’appel de Lyon. Au « 24 colonnes », Sylvain C., comparaissait pour l’envoi d’un mail contenant des propos racistes et antisémites à un docteur de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).

En première instance, ce quadra avait été condamné à payer deux amendes de 1500 euros, dont 1000 euros avec sursis ainsi qu’à verser 800 euros au titre du préjudice moral et 600 euros au titre des frais d’avocat.

Le tribunal de police de Villefranche-sur-Saône l’avait reconnu coupable d’injure non-publique en raison de l’origine, l’ethnie, la nation, la race ou la religion et pour des faits de diffamation non-publique. Il avait fait appel.

En appel, son avocat a demandé la relaxe.

Des lunettes « judéophiles » pour les « ennemis biologiques de ma race » et autres propos antisémites à la barre de la cour d’appel de Lyon

En cause ? Un message électronique intitulé « Je ne souhaite plus participer à l’étude » envoyé à l’adresse mail d’un universitaire, le 2 février 2019, qui le suivait, jusqu’alors, pour une étude scientifique sur la nutrition.

Dans celui-ci, Sylvain C. explique sa démarche ainsi :

« Monsieur S. [Le nom du responsable de l’étude, NDLR] a une tête de franc-maçon orientaliste et un nom hautement suspect, je ne donne aucune infos santés à des maçons avec les yeux marrons dont je ne connais pas le grade, et j’incite ses employés à le questionner sur ce sujet en priorité à moins que la perspective d’être esclave de maçons à barbe soit une perspective qui les enchantent. »

Un peu plus loin, il enchaîne :

« S. l’ourson à lunettes judéophiles est pourvu de la tête et du corps des ennemis biologiques de ma race, les blancs aux yeux bleus. »

Après quoi, Sylvain C. soulignait que « l’Inserm fut aux mains du juif Yves Levy » avant, encore, d’ajouter, dans un message d’une vingtaine de lignes :

« Je suggère que ça permettra de nuire aux goys d’une manière ou d’une autre, soit pour que les juifs sachent ou mettre le poison préférentiellement. »

Pour le prévenu : « Je ne comprends pas que cela puisse choquer »

A la barre, Sylvain C. a confirmé avoir écrit ce mail. Il a cependant nié l’avoir adressé au docteur en question.

« Il s’adressait plutôt à la personne qui m’a tenu la jambe 30 minutes au téléphone avant », s’est-il défendu. 

Avant l’envoi du mail, une personne de l’étude, à la « voix exotique », selon les termes Sylvain C. lors de sa déposition, lui avait déjà posé plusieurs questions. Elle lui a suggéré d’envoyer les observations faites au téléphone par mail. A la suite d’une question, Sylvain C. reconnaîtra ainsi que ses « observations », faites par mail, avaient été proférées à l’oral au préalable.

« Je ne comprends pas que cela puisse choquer, a-t-il affirmé. Je reconnais les faits, mais j’estime avoir été piégé sous couvert de recherche scientifique. »

« Il y a des monuments à Paris avec des stèles de Franc-maçons où c’est écrit en juif » 

Pour lui, il aurait vu dans cette opportunité un « relais de liberté d’expression » ouvert par la science.  

L’avocat du chercheur de l’Inserm, Thomas Fourrey, « horrifié », a tenté de faire parler le prévenu sur son rapport aux « juifs », mot cité quatre fois dans le mail. Aux cours d’échanges musclés avec l’avocat de la défense, Damien Viguier, Thomas Fourrey n’est pas parvenu à avoir beaucoup d’explications de texte de la part de Sylvain C. 

« Il y a des monuments à Paris avec des stèles de Franc-Macons où c’est écrit en juif. Je me suis juste dit qu’il y avait un lien », a-t-il simplement souligné, refusant de s’excuser pour son texte. 

Un signe peu encourageant pour l’avocat.

« Un an plus tard, la situation reste la même, s’est-il désolé. On aurait pu s’attendre à un appel de l’intelligence. Mais il n’en est rien. » 

Cour d'appel de Lyon, sollicitée pour des propos antisémites.
Sylvain C. avait fait appel. Il comparaissait aux « 24 colonnes » à Lyon pour avoir tenu des propos antisémites.Photo : PL/Rue89Lyon

A Lyon, l’avocat de la défense moque les propos antisémites et « le diable fantasmé » sur toutes les chaines

Face à ce constat, l’avocat de la défense, Damien Viguier, aurait pu choisir de mettre en avant l’apparente fragilité psychologique de son client. Veuf, père d’un enfant de quatre ans, sans emploi depuis sept ans… Il n’en a rien été. Sans surprise. 

Damien Viguier est l’avocat du polémiste d’extrême droite Alain Soral, le président du mouvement Égalité et Réconciliation.

Ligne par ligne, cet avocat du barreau de l’Ain est revenu sur le contenu du texte pour « entrer dans plus de précision ». 

« Quand on parle de l’antisémitisme, le diable fantasmé sur toutes les chaînes de télévision […], je comprends que l’émotion soit difficile à contenir. » 

Objectif : montrer la « légèreté » d’un texte se voulant, selon lui, humoristique. Une défense que l’avocat général avait attaqué par anticipation, montrant les liens faits entre « le juif » et un supposé « poison » de la société. 

Raisonnement par l’absurde : « Une majorité de Juifs ont les yeux bleus. Regardez Eric Zemmour ! »

« On voit bien que tout ça n’a rien de très sérieux », a voulu minimiser l’avocat. 

Dans le terme « orientaliste », l’avocat Damien Viguier veut voir, potentiellement, un amour pour la Perse et le proche-orient. Concernant l’expression « maçon aux yeux marrons », il ne voit clairement pas d’insulte. Pour les « l’ourson à lunette judéophile », le défenseur marque que l’adjectif judéophile qualifiait les lunettes, et non le docteur ciblé dans le mail. Quant à la phrase concernant « les ennemis de ma race aux yeux bleus », il s’amuse : 

« Mais une majorité de Juifs ont les yeux bleus. Regardez Eric Zemmour, il est séfarade, il a les yeux bleus ! »

Pas certain que ces arguments convainquent la cour d’appel. Un point pourrait cependant jouer en faveur de la défense : la question de la confidentialité. Pour elle, Sylvain C. ne pensait pas que ce mail pouvait être lu par le médecin de l’Inserm, visé par le texte. Le mail a été envoyé à une adresse « générique », des personnes effectuant l’étude. Autrement dit : la conversation aurait pu, selon lui, rester strictement confidentielle entre la personne au téléphone et le prévenu. Mais le docteur en question avait accès à cette boite mail.

« Il faut qu’il y est une volonté de lever la confidentialité en matière de diffamation, a souligné Damien Viguier. Or, mon client s’était assuré auprès de l’interlocuteur que la personne n’allait pas pleurer au moindre propos qui pourrait être désagréable. » 

Un prévenu déjà passé devant la justice dans l’affaire Julie Hainaut

En ce sens, Sylvain C. avait fait remarquer qu’habituellement, quand il tient ce type de propos, « les gens raccrochent ». Chose qui ne s’était pas produite cette fois-ci. Un élément qui montre que le prévenu n’en est pas à sa première fois. S’il n’a jamais été condamné, il a déjà comparu devant la justice pour ce type de problématiques. 

Il avait été relaxé en décembre 2020 dans le cadre de l’affaire Julie Hainaut. Après un article pour le petit Bulletin, cette journaliste avait été victime d’injures et de harcèlement sur les réseaux sociaux.

Sylvain C. avait comparu pour avoir partagé un post raciste et sexiste vis-à-vis de l’autrice d’un article sur un bar de Lyon qui mettait en avant l’époque coloniale de manière positive. Condamné en première instance, il avait été relaxé en appel.

Le délibéré de l’affaire sera donné le 26 novembre prochaine. En fin de séance, la juge a demandé au prévenu s’il accepterait de faire des travaux d’intérêt général (TIG) pour payer sa peine. Une alternative proposée par l’avocat général afin d’éviter d’attaquer ses économies. Au RSA, Sylvain C. a souligné ne pas disposer de fonds importants. L’intéressé a répondu par la négative.

Cour d'appel de Lyon, propos antisémites
L’entrée des 24 colonnes à Lyon.Photo : PL/Rue89Lyon
#Cour d'appel#Egalité et Réconciliation