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Actualités, enquêtes à Lyon et dans la région

Pour ses 10 ans, Rue89Lyon vous offre un verre au salon des vins naturels

Pour ses 10 ans, Rue89Lyon vous offre un verre au salon des vins naturels

En novembre 2011, une petite équipe lyonnaise créait Rue89Lyon, un site d’info et d’enquêtes qui s’est attelé depuis cette date à créer du récit sur le territoire de Lyon et de sa région.

Devenu votre média local, Rue89Lyon propose chaque jour des enquêtes, des analyses, des témoignages, et même des applis… Le modèle économique de cette entreprise de presse est aussi unique au niveau local, avec une rédaction 100% indépendante : le site appartient toujours à ses journalistes.

Au travail journalistique mené depuis 2011 s’est ajouté, en 2015, la coproduction d’un salon des vins, « Sous les pavés la vigne à Lyon », menée avec l’éditeur Nouriturfu.

Mais pourquoi un média s’est-il lancé dans un événement lié aux vins ? Ce projet nous permet de tenir, en plus de nos articles réguliers, un propos crucial portant sur l’agroécologie, les nouveaux circuits de distribution, la gastronomie à Lyon… Grâce aux vigneron·nes programmées chaque année par Antonin Iommi-Amunategui, Lyon accède à quantité de vins dits naturels, produits en bio ou en biodynamie.

On parle ainsi d’un salon des vins « naturels et actuels », parce que fabriqués par ceux et celles qui font l’actualité et conçoivent cette agriculture soucieuse des questions environnementales et sanitaires.

Une entrée offerte aux personnes abonnées à Rue89Lyon

Rue89Lyon s’engage depuis 10 ans dans un travail d’enquête locale, dans ce qu’on appelle désormais du journalisme d’impact qui permet de débattre, d’entendre et d’appréhender avec des outils la ville, l’époque.

Voilà une date anniversaire que l’on compte célébrer à différents moments de l’année. Et cette 7e édition de « Sous les pavés la vigne à Lyon » est particulièrement indiquée pour lever nos verres ensemble. Le salon, qui présente cette année 70 vigneron·nes, propose aussi un débat sur les pesticides, des auteurs en dédicace, une expo, est ouvert samedi 6 et dimanche 7 novembre, de 10h à 19h, au Palais de la Bourse (Lyon 2e).

Pour l’anniversaire de Rue89Lyon, l’équipe partagera avec vous une dégustation spécifique, le dimanche 7 novembre à 16 heures. Les cuvées choisies dateront pour la plupart de 2011, pour marquer notre année de création. Comme celle des « Mayeuls », produite par le Petit Clou des Vents (100% merlot du Sud-Ouest) ; ou encore ce Côtes-du-Rhône Villages Laudun, « Les Passages », signé du domaine Maravilhas (en cinsault et grenache). Rendez-vous est donné à l’étage du Palais de la Bourse, en salle Tony Garnier.

Le prix de l’entrée pour rencontrer les 70 vigneron·nes invité·es est de 10 euros, avec le verre griffé offert, désormais collector. Toutes les personnes abonnées à Rue89Lyon bénéficient quant à elles d’une invitation gratuite (si vous ne l’êtes pas déjà, c’est par ici ; l’investigation locale vous remercie !). Envoyez votre nom et prénom dans un mail à hello@rue89lyon.fr avec, pour objet, « abonnés invitation salon » : nous vous ajouterons à la liste des invité·es à l’entrée du Palais de la Bourse. Tchin tchin.

Le verre du salon des vins Sous les pavés la vigne, par Rue89Lyon et Nouriturfu, devant le Palais de la Bourse à Lyon. © BE/Rue89Lyon
Le verre du salon des vins Sous les pavés la vigne, par Rue89Lyon et Nouriturfu, devant le Palais de la Bourse à Lyon.Photo : BE/Rue89Lyon

La manifestation contre l’extrême droite passera dans le Vieux Lyon ce samedi

La manifestation contre l’extrême droite passera dans le Vieux Lyon ce samedi

A Lyon, une manifestation contre l’extrême droite partira ce samedi 23 octobre de la place Bellecour en début d’après-midi. Une des revendications phares est la fermeture des locaux de feu Génération identitaire dans le Vieux Lyon.

Lyon, « berceau » de l’extrême droite radicale française ? C’est le rapport de la commission d’enquête sur les groupuscules d’extrême droite en France rendu il y a deux ans qui le dit. Et la situation ne semble guère avoir évolué depuis. Après un été et un automne 2021 marqués par une recrudescence des violences, une grande manifestation contre l’extrême droite est organisée ce samedi 23 octobre. Et quel endroit plus approprié pour la recevoir que Lyon ?

A l’initiative de cette mobilisation, un collectif de personnalités du monde syndical, associatif, politique ou universitaire qui ont lancé l’idée la semaine dernière dans une tribune publiée sur Mediapart. Du côté des organisateurs, on trouve plusieurs collectifs et associations de Lyon ou du Rhône ainsi que quelques partis politiques : les antifascistes de la Jeune garde de Lyon, les écologistes d’Alternatiba, le Planning familial du Rhône, les syndicats Solidaires, l’Unef ou encore l’Union départementale CGT, les militant·es politiques du NPA et de la France insoumise.

Une liste non exhaustive de militant·es d’horizons divers, rassemblé·es ce samedi pour réclamer – à nouveau – la fermeture des locaux de l’extrême droite à Lyon.

Vieux Lyon extrême droite Saint Jean bouchons
La place neuve Saint-Jean du vieux Lyon, très connue des touristes pour ses innombrables bouchonsPhoto : Amandine Eymes

Une manifestation qui passera dans le Vieux Lyon considéré comme un fief par l’extrême droite

Cette manifestation contre l’extrême droite est loin d’être la première à défiler dans les rues de Lyon. Une première mobilisation devait déjà avoir lieu le samedi 3 avril dernier à Lyon, suite à l’attaque de la librairie libertaire La Plume noire, à la Croix-Rousse. Elle avait été interdite par la préfecture du Rhône et s’était finalement tenue fin mai.

Pour celle de ce samedi 23 octobre, la préfecture a validé le trajet proposé par les organisateurs. Ainsi, le cortège partira à 14h30 de la place Bellecour pour rejoindre la place des Terreaux en passant par le Vieux Lyon (quai Fulchiron), quartier considérée comme un fief par l’extrême droite lyonnaise.

S’il ne s’agit pas d’une manifestation nationale ce samedi, même si de nombreuses personnalités universitaires, politiques et médiatiques ont signé la tribune publiée sur Mediapart, qui débute ainsi : :

« Lyon, considérée comme un « laboratoire de l’extrême-droite » depuis maintenant plus de 10 ans, subit de multiples agressions de l’extrême-droite (attaques racistes, islamophobes, antisémites, attaques au couteau, attaques de manifestations, attaques de librairies, attaques LGBTIphobes, etc…). Nous avons constaté ces derniers jours, à Lyon et ailleurs, ces dernières semaines, une accélération de ces violences. […] Il est temps d’inverser la situation. Notre devoir, à toutes et tous, est de les faire reculer. »

On trouve sous ce texte le nom des historiennes Laurence de Cock et Mathilde Larrère, la romancière Annie Ernaux, la militante écolo Sandrine Rousseau, le youtubeur Usul ou encore le candidat du NPA Philippe Poutou. Certain·es d’entre elles et eux doivent d’ailleurs faire le déplacement à Lyon ce samedi.

La question de la fermeture des locaux de l’extrême droite à Lyon

Comme nous l’indiquions dans un précédent article, il semble que la dissolution du groupuscule d’extrême droite Génération identitaire, emblématique de l’extrême droite radicale, en mars dernier, n’a pas eu les effets escomptés en matière de recours à la violence. Au contraire. Deux semaines plus tard, la librairie libertaire de La Plume noire se faisait attaquer à la Croix-Rousse. En juin et en septembre, des affrontements étaient également relayés par la presse dans le centre-ville de Lyon.

Raphaël Arnault, porte-parole des antifascistes de la Jeune garde de Lyon, dénonce une extrême droite « en roue libre » à Lyon, d’où la nécessité de cette mobilisation de samedi qui s’annonce suivie.

« Le but de cette manifestation est d’alerter sur les violences de l’extrême droite et d’instituer un rapport de force pour montrer à l’extrême droite et aux institutions qu’on ne lâchera jamais la rue, explique-t-il. Après la dissolution de Génération identitaire, on s’attendait à ce qu’ils soient agacés, mais pas à ce niveau. Il y a une accentuation des violences depuis le mouvement anti-pass sanitaire et à l’approche de l’élection présidentielle. »

Les anti-pass sanitaire sont dans la rue chaque samedi depuis cet été. Ce samedi 23 octobre, le « collectif contre la Coronafolie » sera également de la partie. Une manifestation déclarée en préfecture partira à 14h de la place Jean Macé, dans le 7e arrondissement de Lyon, jusqu’à la place des Dr Mérieux, à Gerland. Là-bas, des prises de parole, des « ateliers des libertés » et une chaîne humaine sont prévus au programme.

S’ils se revendiquent apolitiques, Les Patriotes de Florian Philippot se mobilisent régulièrement à leurs côtés, ainsi que des figures connues de l’extrême droite radicale.

« Ils se sentent pousser des ailes parce qu’ils ont toujours leurs locaux », affirme Raphaël Arnault.

La Traboule, espace de détente de Génération identitaire à Lyon. Janvier 2017 ©Léo Germain/Rue89Lyon.
La Traboule, le bar associatif et siège de feu Génération identitaire à Lyon en janvier 2017Photo : Léo Germain/Rue89Lyon.

La tribune publiée sur Médiapart accuse également la préfecture de faire preuve d’un certain laxisme à l’égard de l’extrême droite lyonnaise :

« La préfecture exerce un jeu trouble, en laissant se développer la fachosphère, à travers l’existence de locaux comme « La Traboule » et « l’Agogé », situés dans le Vieux Lyon, point de départ de la majorité des attaques. »

La fermeture des locaux de feu Génération identitaire dans le Vieux Lyon, le bar de La Traboule et la salle de boxe L’Agogée, est une des revendications phares de la manifestation de ce samedi.

Les anciens locaux de Génération identitaire sont toujours bien fréquentés malgré la dissolution du mouvement qui n’a pas pris en compte les associations de la galaxie identitaire.

Récemment en déplacement à Lyon, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a assuré que ses « services » surveillent ces locaux et les gens qui s’y regroupent.

À l’ancien hôpital Charial de Francheville transformé en centre d’hébergement : « On prône la mixité »

À l’ancien hôpital Charial de Francheville transformé en centre d’hébergement : « On prône la mixité »

Le site de l’ancien hôpital Antoine Charial, situé principalement à Francheville, a été réhabilité en centre d’hébergement pour personnes en situation de grande précarité. En novembre 2020, le projet avait été accueilli avec hostilité par les élus locaux. Un an plus tard, près de 500 personnes vivent dans les anciennes chambres de l’hôpital. Rue89Lyon s’y est rendu à l’occasion d’une journée portes ouvertes organisée à l’occasion de la « semaine de l’hospitalité ».

« Site de l’Hôpital Charial : un projet de territoire balayé par l’Etat ». Ainsi s’intitulait un communiqué datant du 6 novembre 2020 de la municipalité de Francheville au sujet de la décision de la préfecture du Rhône de signer une convention temporaire de trois ans avec les Hospices civils de Lyon (HCL) pour occuper les locaux vidés afin d’y installer un centre d’hébergement.

À l’époque, Les maires de Francheville, Craponne et Tassin-la-demi-Lune faisait valoir un autre projet, celui d’y édifier un parc de sport et de santé.

L’activité hospitalière s’est arrêté début 2021, et les travaux de réhabilitation du lieu en centre d’hébergement d’urgence se sont achevés en juin 2021. La gestion du site a été confiée pour trois ans par la préfecture au Foyer Notre-Dame des Sans-Abri (FNDSA) et à la Fondation de l’Armée du Salut, avec le soutien de la Métropole. Les deux associations se sont partagées équitablement les locaux de l’ancien hôpital.

L'ancien hôpital Charial de Francheville, désormais centre d'hébergement d'urgence pour 3 ans. ©LS/Rue89Lyon
L’ancien hôpital Charial de Francheville, désormais centre d’hébergement d’urgence pour trois ans.Photo : LS/Rue89Lyon

A Charial, la plupart des résidents viennent d’anciens centres d’hébergement

Les lieux sont très calmes, l’ancien hôpital étant entouré d’un grand parc. Les bâtiments gris impressionnent par leur taille. Charlotte Druet est responsable de service pour le Foyer Notre-Dame des Sans Abri :

« On a quand même 22 000 m² et 8 hectares de terrain. On est loin du vacarme de la grande ville, je crois que c’est apaisant pour les personnes hébergées. Nous, ça nous donne aussi la possibilité d’être créatifs et ouverts dans l’accompagnement. »

Les résidents restent généralement autour d’un an :

« Ça peut varier. Il y a des personnes qui restent un mois, d’autre quinze mois. Tout le monde n’a pas le même vécu ou le même besoin de temps pour rebondir. »

La plupart viennent des hébergements d’urgence de l’ancienne caserne Chabal de Saint-Priest et du collège Lassagne à Caluire-et-Cuire. Certaines personnes étaient également hébergées à l’hôtel depuis plusieurs années. Charlotte Druet ajoute :

« Dans les derniers reçus, certains viennent de la rue. »

C’est la Maison de la veille sociale (MVS) qui oriente les personnes vers les lieux d’hébergement d’urgence.

L’ancien hôpital Charial compte aujourd’hui 475 résidents. Parmi eux, 180 enfants dont 140 qui devaient être scolarisés en septembre. Ce qui en fait le plus gros centre d’hébergement d’urgence de la métropole. Charlotte Druet reprend :

« Maintenant tous les enfants qui devaient être scolarisés le sont. On a surtout eu des difficultés pour le secondaire, parce qu’il fallait pouvoir relier Francheville en transports. »

« On n’a pas placé les résidents par origine géographique »

Dans le centre d’hébergement, les familles ont été dispatchées selon leurs problématiques sociales et familiales. Il y a le service pour les femmes avec enfants de moins de 3 ans, le service familles, le service pour les personnes isolées… Charlotte Druet explique :

« On n’a pas voulu placer les personnes par origine géographique, et d’ailleurs elles ne nous l’ont pas demandé. On prône la mixité, c’est un préjugé de croire que les personnes s’entendent mieux entre elles. »

Généralement, dans les chambres d’hôpital réhabilitées en chambres d’hébergement, il y a deux personnes pour 14m² et trois pour 21m².  Dans cet ancien hôpital, il n’y avait pas de douches dans les chambres. On y a pratiqué jusqu’à la fermeture la toilette au gant et à la bassine. Les travaux de réhabilitation ont ainsi consisté à installer des douches et des cuisines collectives à chaque étage.

À chaque niveau, il y a des équipes de travailleurs sociaux qui aident les familles. Mylène Soutrenon est conseillère en économie sociale et familiale pour l’aile du foyer de Notre-Dame des Sans Abri. Elle travaille au service familles, et intervient auprès de 46 familles, qui comptent en tout 110 personnes :

« On est sept par étage, avec un chef de service en plus. On aide à accompagner la régularisation de certains. On fait aussi de l’aide aux devoirs et du soutien pour les enfants. On intervient là où on a besoin de nous. »

La plupart des personnes dont s’occupe Mylène Soutremon viennent de l’hébergement d’urgence du collège Lassagne, à Caluire-et-Cuire, où les résidents dormaient alors dans d’anciennes classes :

« C’était vraiment plus précaire là-bas qu’ici, les personnes n’avaient pas leur espace. Un bébé pleurait la nuit et tout le monde était réveillé. »

À l’ancien hôpital Charial : « On veut offrir un service tourné vers Francheville »

Morgan Rifflant est diététicienne de formation et travaille pour la Fondation de l’Armée du Salut. Elle gère la partie distribution alimentaire avec la Banque alimentaire. Elle donne aussi des ateliers de cuisine sur place :

« La plupart des personnes logées cuisinent très bien, et d’ailleurs sont très heureuses de pouvoir le faire à nouveau. Mais tout le monde ne sait pas préparer du chou fleur par exemple, on n’en trouve pas partout. »

Morgan Rifflant participe à l’édification d’une épicerie sociale et solidaire, en passe de voir le jour à l’ancien hôpital :

« On a la force de l’énorme capacité de stockage du lieu. On veut offrir un service tourné vers Francheville, en offrant du bio, du local, mais à prix réduit en mutualisant les commandes. »

Elle précise :

« Les résidents qui ont un reste à vivre suffisant bénéficieraient de prix encore plus réduits, et, à terme, on aimerait bien ouvrir ces prix aux précaires du territoire. »

Il est vrai qu’au sous-sol et au rez-de-chaussée de l’ancien hôpital, on trouve beaucoup d’espaces vides, ce qui peut surprendre. Charlotte Druet, responsable de service et coordinatrice du Foyer Notre-Dame-des-Sans-Abri, explique :

« On a lancé un appel à projets. Cet endroit ne doit pas appartenir qu’à nous mais aussi incarner un endroit de mixité sociale, tourné vers Francheville et les communautés environnantes. Un peu comme le projet Cinq Toits, à Paris. »

C’est d’ailleurs aussi en référence à un autre projet parisien que l’ancien hôpital Charial a choisi de s’appeler « Les Grandes Voisines ». En effet, de 2015 à 2020, c’est dans le 14è à Paris qu’une expérience similaire a eu lieu : sept centres d’hébergement mais aussi des ateliers, des bureaux et des associations se sont partagés les murs de l’ancien hôpital Saint-Vincent de Paul. Le projet, pionnier en la matière, s’appelait « Les Grands Voisins« .

Une résidente participe à l'atelier "mains" à l'ancien hôpital Charial de Francheville. ©LS/Rue89Lyon
Une jeune résidente participe à l’atelier « mains » à l’ancien hôpital Charial de Francheville.Photo : LS/Rue89Lyon

Retour à Francheville : 60% des espaces doivent être impérativement occupés par des personnes de la ville ou des communautés environnantes. Les locaux seraient loués à prix réduit à qui souhaite y établir son atelier, petit magasin… à une seule condition :

« Il faut que cette personne accepte de participer à la vie du lieu. Par exemple, on a un professeur de yoga qui souhaite donner des cours ici. Nous, on va lui demander que deux résidents puissent participer à chacun de ses cours par exemple. »

L’association Plateau Urbain appuie cet appel à projets.

« Il y a des enfants qui ont plein de choses à raconter »

Dans ces locaux, deux artistes de la Biennale Hors Norme se sont déjà installés. Leur espace aux couleurs chamarrées, situé sur une aile gauche de l’ancien hôpital a de quoi attirer l’œil. Gydalle et Loren y dessinent, comme tous les mercredis, une grande fresque avec les enfants résidents. Gydalle déclare avec bonhomie :

« Il y a une seule règle : on peut enrichir le travail de l’autre, mais on ne peut pas le détruire. »

Le thème de ce mercredi est celui de la main. Gydalle poursuit :

« La main c’est la solidarité, c’est aller vers l’autre. Y’en a même qui causent qu’avec les mains ! »

Gydalle et Loren de la Biennale Hors Norme ont un atelier à l'ancien hôpital Charial de Francheville. ©LS/Rue89Lyon
Gydalle et Loren de la Biennale Hors Norme ont un atelier à l’ancien hôpital Charial de Francheville.Photo : LS/Rue89Lyon

Généralement, les enfants restent entre cinq minutes et un heure, en fonction de leurs élans créatifs. Gydalle raconte :

« On dialogue avec les formes et les couleurs. Il y en a qui ont plein de choses à raconter, et certains ne l’ont jamais fait comme ça. »

Les deux artistes sont aussi allés à la rencontre des adultes, dans les étages :

« On a pensé ensemble l’appropriation des lieux, on a récupérer les anciens tableaux de transmission des hôpitaux et on en a fait des créations. »

Les deux artistes sont pressés de rencontrer les autres associations qui pensent à s’installer, comme par exemple Les collectes solidaires du 9ème. Une association de collectes de dons à destination des plus démunis qui s’est sporadiquement créée avec la crise Covid.

De leur côté, le personnel et les bénévoles du lieu ne manquent pas d’idée pour dynamiser les lieux : potager participatif, moutons en « copaturages », nouveaux jeux pour enfants, vide-grenier sur l’ancien terrain de foot…

Pour l’instant c’est timidement que les Franchevillois viennent aux activités proposées par le centre d’hébergement.

A Givors, de nouvelles élections municipales dans un climat digne d’OK Corral

A Givors, de nouvelles élections municipales dans un climat digne d’OK Corral

Ce mercredi 20 octobre, le Conseil d’Etat a annulé les élections municipales de Givors de 2020. Dans cet ancien bastion communiste, une nouvelle élection et une nouvelle campagne s’annoncent. Elle devrait être autrement plus musclée que celle qui a été rejouée récemment à Chassieu.

Le Conseil d’Etat a finalement donné raison au tribunal administratif de Lyon. Pour les juges lyonnais, plusieurs incidents s’étaient déroulés aux abords de bureaux 9 et 10 le jour du vote. Les procès-verbaux faisaient état « d’attitudes véhémentes voire d’intimidation » sur les électeurs de la part de soutien du candidat gagnant, Mohamed Boudjellaba.

« Compte tenu de la gravité de ces agissements, contraires au libre exercice du droit de suffrage, et au très faible écart de voix entre les listes, les juges estiment que ces troubles ont été de nature à altérer la sincérité du scrutin. »

Selon le Progrès, le Conseil d’Etat a également relevé de « graves agissements » dans ces bureaux.

Les Givordins sont donc rappelés aux urnes.

Christiane Charnay, maire de Givors (PCF), a été interrompue par un "gilet jaune" l'accusant de récupération alors qu'elle tentait d'exprimer son soutien au mouvement. © AD / Rue89Lyon.
Christiane Charnay, ancienne maire de Givors (PCF), lors d’un rassemblent de Gilets jaunes.Photo : AD / Rue89Lyon.

Pour Mohamed Boudjellaba : « Une campagne de mensonges » de la part de son opposition

Dans un communiqué, le maire de Givors élu en 2020 Mohamed Boudjellaba (gauche écologiste), a « pris acte » de la décision du Conseil d’Etat. A défaut d’attaquer l’institution, il prend pour cible son adversaire directe, et responsable du recours contre les élections, l’ancienne maire (PCF) Christiane Charnay.

« Cette décision est le résultat d’une campagne de mensonges, de tromperies et de magouilles, menée par Christiane Charnay, soutenue par un système clientéliste que nous avons commencé à changer », affirme-t-il.

Déjà en campagne, il accuse son adversaire d’être l’auteur de fausses attestations « fondées sur des usurpation d’identité », de « procès-verbal des élections falsifiées », etc.

« Aucune preuve tangible, non truquée ou non-partisane, n’appuie les allégations de madame Charnay quant à de supposées intimidations des électeurs aux Vernes [N.D.L.R : où se trouvaient les bureaux de vote]. »

Il n’en reste pas moins que ces preuves ont convaincu les différents juges administratifs.

De son côté, Christiane Charnay (PCF), ancienne maire de Givors a réagi sur Facebook :

« La justice a rendu son verdict. Elle disqualifie définitivement l’équipe de Monsieur Boudjellaba en reconnaissant qu’il existait des irrégularités contraires aux valeurs de la république lors de cette élection. »

Fabienne Grébert, Jean-Charles Kohlhaas et le maire de Givors boudjellaba
A droite, le maire de Givors, Mohamed Boudjelaba, lors d’un point presse avec Fabienne Grébert (EELV et Jean-Charles Kohlhaas (EELV) lors des élections régionales.Photo : PL/Rue89Lyon

Elections à Givors : Les gauches déchirées et le RN en embuscade

Ces attaques, souvent violentes, sont presque monnaie courante à Givors. Dans cette ville de 20 000 habitants tenue par les communistes de 1953 à 2020, les rebondissements judiciaires marquent régulièrement la vie politique locale. Avant Christiane Charnay, l’ancien maire communiste, Martial Passi (PCF), avait quitté ses fonctions pour une affaire de prise illégale d’intérêt.

Sous l’ancienne mandature, des conseils municipaux homériques, parfois longs de plus de six heures, étaient ponctués de plusieurs suspensions de séance pour calmer les esprits. Ces nouvelles élections sonnent un retour aux affrontements politiques.

Dans celles-ci, alors que la « gauche écologiste » se déchire contre le PCF, la place du Rassemblement national sera regardée de près. L’ancien leader du parti de Marine Le Pen dans le Rhône, Antoine Mellies, a été, lui aussi, proche de la victoire à Givors. Ce proche de Marion Maréchal, ex étoile montante du parti, a été depuis privé de ses fonctions de dirigeant de la fédération du Rhône.

Pour rappel, il avait rassemblé 25,40 % des suffrages en 2020, contre 28,24 % pour Christiane Charnay (PCF) et 28,88 % pour Mohamed Boudjellaba.

Ces nouvelles élections permettront une première victoire du RN au municipales dans le Rhône ou, finalement, le maintien des communistes ? Comment la majorité métropolitaine va réagir à cette guerre fratricide au sein même de sa majorité rassemblant communistes, écologistes et socialistes ? Ces nouvelles élections posent de nombreuses questions. Une chose est sûr, elles risquent de se passer une nouvelle fois « comme à Givors ». Autrement dit, les combats de joutes (très prisés à Givors) ne font que (re)commencer.

#Christiane Charnay

Problèmes de chauffage à la Duchère : « Il faut supplier pour avoir le minimum vital »

Problèmes de chauffage à la Duchère : « Il faut supplier pour avoir le minimum vital »

Dans les barres 410, 440 et 460 de la Sauvegarde, à la Duchère, les sols sont restés glacés et les murs humides un bon moment. Comme l’année passée, le bailleur social Grand Lyon Habitat a mis du temps pour fournir le chauffage à certains de ses locataires : une souffrance quotidienne pour les habitants.

Samedi 15 octobre, 10 heures du matin, une quinzaine de femmes rouspètent sur le parking de la rue Marius Donjon, emmitouflées dans des manteaux, écharpes et gilets de laines. Certaines d’entre elles sont venues avec leurs enfants, pas moins couverts, et qui pourtant ne cessent de tousser.

Au milieu du groupe, une grande femme, le menton relevé, s’exclame :

« La blague de l’année, c’est qu’à chaque fois qu’on appelle l’Opac, ils disent que c’est la première fois qu’on les appelle ! »

Les mères de familles viennent et repartent de la réunion improvisée des locataires sans chauffage à la Duchère. ©LS/Rue89Lyon
Les mères de familles viennent et repartent de la réunion improvisée des locataires sans chauffage à la Duchère.Photo : LS/Rue89Lyon

L’Opac est l’ancien nom du principal bailleur social de La Sauvegarde. La structure s’appelle aujourd’hui Grand Lyon Habitat, et dépend de la Métropole de Lyon. À la Sauvegarde, dans ce sous-quartier de la Duchère. Grand Lyon Habitat est le principal bailleur social. C’est contre celui-ci que les habitants des bâtiments 410 et 440 sont en colère.

Mi-octobre, il n’y a toujours pas de chauffage alors que les températures baissent de jour en jour.

Aziza, la grande dame très en colère affiche un air contrit. Elle tient par la main un jeune garçon pris de quintes de toux régulières :

« Je suis au 410. J’ai quatre enfants, deux jumeaux de 4 ans et deux filles de 9 et 10 ans. La nuit on dort tous dans ma chambre, à côté de mon petit chauffage électrique : les filles sur des matelas posés sur le sol, et les jumeaux et moi, dans le lit. »

À la Duchère, « L’hiver dernier il y avait déjà eu des problèmes de chauffage »

Aziza admet qu’elle perd patience face à ce qu’elle ressent comme de la désinvolture de la part de son bailleur social :

« J’avoue que la dernière fois que j’y suis allée, je me suis emportée. Je les appelle tous les jours depuis deux semaines et il ne se passe rien. Je leur ai dit qu’on allait finir par faire un feu avec des palettes sur le parking pour se réchauffer. »

Elle martèle :

« J’ai l’impression qu’il faut leur crier dessus. Quand on parle doucement, ils ne comprennent pas. Mes fils sont tout le temps malade, j’ai peur que ce soit en lien avec la moisissure. »

La mère d’Aziza, Fatima, aussi présente à la réunion improvisée, abonde :

« C’est quand même un comble. Quand on est en retard pour payer le loyer, ils ne sont jamais en retard pour envoyer des relances. Par contre, quand on demande à avoir ce pourquoi on paye, comme du chauffage, il ne se passe rien. »

Fatima occupe un autre appartement que sa fille, dans la même barre. Elle habite le quartier depuis 1996, et constate une dégradation des relations avec son bailleur social :

« J’aime le quartier, on s’entend bien avec les voisines. Le problème c’est vraiment l’Opac. Avant, ce n’était pas comme ça, il y avait du respect, de la qualité dans les services proposés. Maintenant il faut les supplier pour avoir le minimum vital. »

Fatima pointe le fait que déjà l’année dernière, des barres du quartier s’étaient retrouvées sans chauffage au milieu de l’hiver :

« Ça commence à être systématique, sans excuse ni contrepartie. »

Elle se souvient :

« Ils disent à chaque fois que le problème vient d’une pièce cassée. Ils n’expliquent rien de plus, et surtout ne nous disent pas quand ça va être réparé. On paye des charges qui servent à chauffer, autour de 50 euros par mois. Ce n’est pas rien. »

Grand Lyon Habitat a placardé des communiqués sur les portes des halls d'immeubles dans l'espoir de calmer la colère des locataires. ©LS/Rue89Lyon
Grand Lyon Habitat a placardé des communiqués sur les portes des halls d’immeubles dans l’espoir de calmer la colère des locataires.Photo : LS/Rue89Lyon

À la Duchère, « Le froid abîme tout et il y a de la moisissure sur les murs »

Juste à côté, Fidène et sa maman Cennet ont aussi le moral en berne. Fidène n’habite pas avec sa mère, ses deux frères et sa sœur enceinte dans la barre 410, mais elle essaie de soutenir sa mère du mieux qu’elle peut :

« J’appelle et j’envoie des mails tout le temps. Je m’inquiète pour ma maman qui a une santé fragile et ma sœur qui est enceinte. Le froid abîme tout et il y a de la moisissure sur les murs. »

Cennet loge aussi dans la barre 410. Elle habitait dans les anciennes barres de la Sauvegarde, celles qui ont été détruites au début de la réhabilitation. Souffrante de problèmes de dos et d’arthrose, le froid aggrave ses douleurs.

Fidène, sa fille, ne manque pas d’ouvrir les fenêtres de l’appartement de sa mère au moindre rayon de soleil pour essayer de réchauffer la maison, mais rien n’y fait, le sol reste glacé et l’air humide. Depuis deux semaines, à la maison, c’est toujours deux pantalons l’un sur l’autre. Cennet déclare:

« Mais on gèle quand même »

La mère de famille a donc acheté un tout petit chauffage d’à-point. Elle en avait déjà acheté un plus gros l’année dernière, au cours de la panne de novembre. Elle ne l’utilise plus car il lui a coûté trop cher en électricité.

La famille de Cennet et Fidène font face à un autre problème : le chauffe-eau non plus ne fonctionne plus depuis trois semaines.

« Mes frères travaillent sur les chantiers. Ils ne peuvent pas prendre de douche quand ils rentrent, sinon ils seraient gelés. Alors je leur fait bouillir de l’eau pour qu’ils puissent au moins se laver les mains et les pieds. »

Il y a quelques jours, Grand Lyon Habitat a envoyé quelqu’un pour changer le chauffe-eau de Cennet. Fidène raconte :

« On ne sait jamais trop qui l’Opac envoie, leur métier, leurs compétences. »

Après avoir changé le chauffe-eau l’homme aurait constaté que le nouveau ne fonctionnait pas non plus :

« Il nous a dit qu’il fallait prendre un plombier, car le souci venait de la pression de l’eau. Ce n’était pas vraiment une surprise, on a aucune pression de l’eau dans tout l’appartement. »

L’homme est parti, et dans les jours qui suivent, Cennet et Fidène ne cessent d’appeler et d’écrire à leur bailleur social en espérant avoir une réponse.

« En toute honnêteté, ça va tellement mal avec l’Opac qu’on demande à changer de logement depuis au moins cinq ans. On a fait les démarches, rempli les dossiers, mais rien n’y fait. »

Cenet porte en permanence deux gros pantalons en polaire l'un sur l'autre. ©LS/Rue89Lyon
Cennet porte en permanence deux gros pantalons en polaire l’un sur l’autre.Photo : LS/Rue89Lyon

« Déjà qu’on vit en camping dans les travaux, si en plus on n’a pas de chauffage, c’est l’enfer »

Retour à la réunion publique improvisée : on y aborde un autre souci, celui du bâtiment 440, actuellement en cours de rénovation. Une maman s’exclame d’ailleurs :

« Ils sont en train de changer l’isolation, alors ils font le même coup que l’année dernière : il n’y a pas de chauffage, alors même que le bâtiment est sans isolation thermique. »

Une autre maman ajoute :

« Déjà qu’on vit en camping dans les travaux, si en plus on se gèle, c’est vraiment l’enfer. Ça fait deux semaines que je ne peux utiliser ma cuisine et que les seuls repas chauds que mes trois enfants mangent c’est des tacos. Même celui qui adore les fast-foods en a assez. »

Une dernière d’ajouter :

« En plus, quand on arrive enfin à faire venir des gens de l’Opac pour constater nos conditions de vie, ils relativisent parce qu’ils viennent en journée. Ils disent « ça va, il ne fait pas si froid » mais la nuit il fait à peine 10°. »

Une partie de l'isolation thermique a été retirée dans le cadre de la rénovation de la barre. ©LS/Rue89Lyon
Une partie de l’isolation thermique de la barre 440 a été retirée dans le cadre de la rénovation.Photo : LS/Rue89Lyon

« On vit comme des bêtes »

Une autre maman, Sarah* (elle a souhaité rester anonyme), souffre elle aussi du froid et du manque d’isolation thermique de la barre 440 concernée par les travaux de rénovation :

« J’ai deux enfants adolescents. Ma fille qui vient d’avoir 18 ans a raté son bac blanc car elle avait la grippe et de la fièvre. »

Sarah estime que les travaux de rénovation ont été faits à la va-vite. Les plinthes auraient mal été faits et des fils électriques ont été laissés, branchés, sans être protégés.
Sarah estime que les travaux de rénovation ont été faits à la va-vite.Photo : LS/Rue89Lyon

Les travaux de son appartement se sont finis il y a quelques semaines :

« Il n’y a pas eu de vérification à la fin des travaux par Grand Lyon Habitat. Les ouvriers m’ont pressé de signer un papier, et sont partis. Résultat, j’ai des fils électriques non protégés qui pendent de mon plafond, qui courent sur les sols et les plinthes sont déjà pleines de petits trous. »

La jeune maman déclare avoir prévenu Grand Lyon Habitat, sans réaction de leur part.

Elle tempête :

« On vit comme des bêtes. »

Elle conclut, fataliste :

« J’aime bien l’ambiance du quartier, mais il y a tellement de problèmes avec Grand Lyon Habitat que je souhaite partir. Ils essaient de nous faire payer de plus en plus de choses et on a de moins en moins de service. Ça fait huit ans que je fais des démarches pour aller habiter ailleurs. »

À la Duchère, « les problèmes de chauffage ont été réglés »

Dans le cadre de la rédaction de cet article, Rue89Lyon a écrit à Grand Lyon Habitat pour les questionner sur ces problèmes de chauffage, de chauffe-eau, de moisissures et de relations difficiles entre bailleur social et habitants.

Après l’envoi de nos questions, une partie des problèmes a été réglée. Comme Fidène le souligne :

« Après votre venue, ils nous ont envoyé un plombier pour réparer l’eau chaude et hier ils ont enfin allumé les chauffages. »

De son côté, Grand Lyon Habitat défend une réactivité quasi immédiate aux appels de leurs locataires :

« Pour ce qui concerne les barres 410 et 460, les problèmes de chauffage ont été réglés dans les heures qui ont suivi leur signalement. »

Rue89Lyon a pourtant pu consulter des mails envoyés par une habitante datant du 7 octobre.

Par ailleurs, le bailleur social précise la raison du retard de mise en route du chauffage pour la barre 440 concernée par les travaux de rénovation :

« Le problème engendrant l’absence de chauffage est réglé depuis vendredi 15 octobre 2021 au soir. Il a eu pour conséquence la nécessité de purger les réseaux de chauffage au sol de certains appartements. »

Concernant les travaux de cette même barre 440, Grand Lyon Habitat considère avoir les choses bien en main :

« Le nouveau système de chauffage plus performant est déjà installé et permettra de palier à cette absence ponctuelle d’isolation extérieure. »

La direction du bailleur social ajoute que les fils non protégés dans les appartements seront bientôt recouverts.

Le bailleur social conclut plus généralement :

« Les collaborateurs sont à l’écoute des attentes [des locataires] et si les contraintes d’un chantier ne permettent pas d’abonder dans leur sens, les échanges parviennent à un terrain d’entente. »

Journaliste de France 3 à Lyon : « Le geste de Thierry Frémaux, c’est une première en 22 ans de métier »

Journaliste de France 3 à Lyon : « Le geste de Thierry Frémaux, c’est une première en 22 ans de métier »

Thierry Frémaux, directeur de l’Institut et du Festival Lumière, refuserait de présenter des excuses à l’équipe de journalistes de France 3 Rhône-Alpes. Il a en effet brutalement appuyé sur la caméra d’une journaliste reporter d’images, au cours du festival de cinéma, à cause de la lumière qu’elle projetait.

Les faits se sont déroulés le 15 octobre dernier, à l’occasion de la remise du prix du Festival Lumière 2021. L’incident a eu lieu dans la rue, à la sortie de l’Institut Lumière, alors que Jane Campion sortait de l’avant-première de son film « The power of the dog ». Thierry Frémaux, s’en est pris à une journaliste reporter d’images de France 3 Rhône-Alpes, abaissant violemment sa caméra au-dessus de laquelle une lumière était projetée.

On lui attribue souvent un « fort tempérament ». Thierry Frémaux, par ailleurs délégué général du Festival de Cannes, fait preuve d’un peu plus que cela sur la vidéo que France 3 a décidée de diffuser dans l’édition de son « JT » (journal télévisé) du 15 octobre 2021 (scène visible à 21′). D’autres journalistes, photographes notamment, attendant la sortie de la cinéaste.

Dans la semi obscurité, on voit le patron du cinéma français pointer du doigt la journaliste, avant de s’en approcher pour abaisser sèchement et avec un air agacé sa caméra.

Celle-ci a témoigné auprès de Rue89Lyon :

« En 22 ans de métier c’est la première fois que ça m’arrive. »

Thierry Frémaux se serait justifié par la « gêne » représentée par la petite lampe située au dessus de la caméra qu’on appelle parfois « minette ». Une lampe dont l’utilité initiale est de faire briller les yeux des personnes interviewées. Un argument insuffisant pour les journalistes de France 3 Rhônes-Alpes qui dénoncent, dès le journal diffusé le soir du lendemain, une réaction jugée abusive de la part du patron du festival de cinéma patrimonial :

« L’ensemble de la rédaction de France 3 Rhône-Alpes dénonce l’attitude du directeur du Festival Thierry Fremaux. […] Il s’en est pris à la caméra d’une de nos consœurs à laquelle nous apportons tout notre soutien. »

« Même pas un mail de soutien. Pourquoi ? Parce que c’est Thierry Frémaux ? »

Contre toute attente, ni Thierry Frémaux ni la direction du Festival Lumière n’a présenté d’excuses. Au contraire, d’après Myriam Figureau, représentante syndicale SNJ à France 3 Rhône-Alpes. Thierry Frémaux menacerait même de poursuivre la rédaction pour « dénonciation calomnieuse » si cette version des faits continue d’être colportée :

« C’est parce qu’on a dit le mot « agression » dans un communiqué qu’il nous menace comme ça. Peut-être que ce n’est pas une agression physique au sens pénal du terme mais elle est quand même empêchée violemment dans l’exercice de son métier. »

Thierry Frémaux.
Thierry Frémaux. REUTERS/Jacky Naegelen

La représentante syndicale regrette aussi que la journaliste n’ait pas reçu de message de soutien de la part du « réseau France 3 », l’équivalent de la direction nationale des chaînes locales :

« D’habitude, à chaque fois qu’il y avait une agression d’un ou une journaliste -et il y en a eu beaucoup ces derniers mois avec les manifestations contre le pass sanitaire- il y a un communiqué condamnant ces pratiques. Et le réseau France 3 propose de l’aide au journaliste, juridique notamment. »

Cependant, dans ce cas précis, il n’en a rien été :

« Elle n’a même pas reçu un mail de soutien, alors qu’il y a une vidéo qui montre bien que Thierry Frémaux a eu un comportement qui n’est pas tolérable. Pourquoi ? Parce que c’est Thierry Frémaux ? »

France 3, « partenaire du festival depuis plus de 12 ans »

Au sein des équipes du Festival Lumière, on défend une autre version des événements auprès de Rue89Lyon :

« Thierry Frémaux est intervenu car le flash de la journaliste était trop violent, d’ailleurs ça se voit sur la vidéo. Il l’a fait pour éviter que ce ne soit les gardes du corps de Jane Campion qui le fassent et que la situation ne dégénère. »

Et d’ajouter :

« Nous sommes extrêmement choqués par le terme « agression ». Il a été demandé à plusieurs reprises à la journaliste d’éteindre son flash avant que Thierry Frémaux ne prenne les choses en main. »

On explique également à Rue89Lyon qu’une interview a même été accordée à la journaliste, à la suite de cette altercation :

« Après ça, on s’est débrouillé pour organiser une interview imprévue entre la journaliste et Jane Campion. De plus, à la fin de la soirée, la journaliste et Thierry Frémaux se sont expliqué. Si elle s’était vraiment sentie agressée, elle n’aurait pas fait cette interview. »

Les équipes ont aussi fait part de leur tristesse à l’idée d’être à couteaux tirés avec France 3, « partenaire du festival depuis plus de 12 ans ».

#France 3

ZFE à Lyon : « L’industrie n’est pas prête pour le tout électrique »

ZFE à Lyon : « L’industrie n’est pas prête pour le tout électrique »

Dans le cadre de la concertation sur l’élargissement de la Zone à faibles émissions (ZFE) que la Métropole de Lyon veut mettre en place, une réunion a eu lieu ce lundi, avec les entreprises de la région. L’occasion d’avoir quelques éclaircissements sur le futur de la zone pour les premiers concernés -et premiers inquiets.

On en prend des nouveaux, et on recommence. Ce lundi 18 octobre, la Métropole de Lyon organisait une « rencontre d’information entre les professionnels et les élus », dans le cadre du projet d’amplification de la Zone à faibles émissions (ZFE). Alors que le sujet, technique mais primordial, avait (très) peu attiré les habitants, cette nouvelle visioconférence a rencontré un certain succès auprès des professionnels.

Si 90 habitants avaient assisté à la première réunion de concertation, ils étaient 130 en ligne ce lundi en plein dans l’après-midi.

Et pour cause : le sujet les concerne déjà. Depuis le 1er janvier 2021, les poids lourds et véhicules utilitaires légers destinés au transport de marchandises (catégorie N sur la carte grise), classés Crit’Air 3, 4 et 5 ou non-classés ne peuvent plus circuler, ni stationner à l’intérieur du périmètre de l’actuelle zone (lire encadré ci-après).

Des dérogations ont pu cependant être accordées. Avec leur fin potentielle, les questions s’accélèrent. En voici quelques-unes qui ont été posées par des chefs d’entreprise dans une réunion-visio marquée (comme souvent) par quelques soucis techniques en début et en fin de réunion. Avantage (ou pas) de ce rendez-vous numérique, les échanges ont été plutôt calmes et mesurés, loin des crispations que peut entrainer habituellement ce sujet.

ZFE de Lyon : quel calendrier pour les professionnels ?

C’était certainement la question n°1 : quel temps reste-t-il aux entreprises pour changer de véhicules ? Quelles aides pourront-elles avoir pour cela ?

C’est à voir. Du côté de la Métropole, on assure que tous les dossiers seront analysés un par un.

« Si un forain a un véhicule depuis trois ans, Crit’Air 3, qu’il ne conduit que très rarement sur Lyon, ce serait une ineptie écologique de lui demander de changer de véhicule, prend comme exemple Jean-Charles Kohlhaas (EELV), vice-président de la Métropole en charge des déplacements, des intermodalités et de la logistique urbaine. Que ce soit pour les aides ou les dérogations, on verra vraiment au cas par cas. »

Idem sur un calendrier plus général pour l’élargissement de la ZFE à Lyon. En 2026, les professionnels seront concernés par la sortie des Crit’air 2 de son périmètre actuel (diesels notamment). Pour l’instant, aucune autre étape intermédiaire n’est actée. « Il se pourrait que d’autres marches se rajoutent pour gravir la montagne », indique l’élu.

Ces dernières devraient être en partie définies durant la concertation actuelle.

Jean-Charles Kohlhaas (EELV), 5ème vice-président, délégué aux déplacements, aux intermodalités et à la logistique urbaine, en charge de la ZFE de Lyon. ©HH/Rue89Lyon
Jean-Charles Kohlhaas (EELV), 5ème vice-président, délégué aux déplacements, aux intermodalités et à la logistique urbainePhoto : HH/Rue89Lyon

Élargissement de la ZFE : Faut-il avoir peur des amendes à Lyon ?

Apparemment, pas trop pour 2022.

« Je crains que l’Etat ne nous donne pas beaucoup de marge de manœuvre d’ici quelques mois, voire quelques années », a indiqué Jean-Charles Kohlhaas.

Déjà dans un entretien au Progrès, le président de la Métropole, Bruno Bernard (EELV) avait déjà menacé de porter plainte contre l’Etat si rien n’était fait sur le sujet. Visiblement, pour l’heure, les contraventions peuvent être seulement données lors de défauts de stationnement. Une solution avec radar pourrait être envisagée pour début (ou fin 2023).

C’est l’inquiétude majeure soulevée par Pierre Albrieux, élu à la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME).

« Aujourd’hui, nous avons une dizaine de milliers de petits véhicules de 5 m3, avec une charge utile de 1 tonne, à 1,4 tonne, qui circulent dans la Métropole pour des PME. Avez-vous conscience que 100 % de ces véhicules vont devoir être changés d’ici cinq ans ? L’industrie n’est pas prête. Il est aujourd’hui impossible économiquement de modifier notre parc auto à ce point compte tenu de l’énormité de la tâche ! », s’est-il inquiété.

Réponse de Jean-Charles Kohlhaas :

« Si on ne met pas d’ambition, on ira nulle part. »

Se disant conscient de la difficulté de la montagne « à gravir », l’élu s’est voulu conciliant.

« Si on doit faire une dérogation pour les professionnels parce que les véhicules mettent 10 mois à être construits, nous le ferons, approuve-t-il. Mais si nous baissons notre ambition, les constructeurs ne s’adapteront pas. »

Parc de bornes électriques : le territoire est-il prêt ?

Lyon est-elle prête pour du tout électrique ? Pas totalement visiblement. Pour s’adapter aux exigences de la ZFE, beaucoup d’entreprises se tournent vers les véhicules électriques. Sauf que, pour accompagner cela, le territoire ne dispose pas encore de suffisamment de bornes.

« On a un vrai problème », admet à propos Jean-Charles Kohlhaas.

Selon lui, il y a un point de blocage actuellement pour installer des bornes de recharges « rapides », notamment, à Lyon. Pour des raisons patrimoniales, le corps des architectes des bâtiments de France (ABF) s’oppose à l’installation de ces dernières. « Pourtant, elles ne sont pas beaucoup plus grosses que leurs consœurs », assure-t-il.

Est-ce qu’il ne faudrait pas arrêter les véhicules polluants à l’entrée de la Métropole ?

C’est une des possibilités pour éviter que les véhicules polluants entrent dans la ZFE : développer les hôtels de logistique urbaine. Ces sortes de « parcs-relais » pour spécialistes de la logistique permettraient de laisser les véhicules polluants à l’entrée de la Métropole pour terminer l’acheminement dans la Métropole en véhicule « vert ». Une solution proposée par Philippe Bossin, directeur logistique urbaine à LPA (Lyon Parc auto).

Avoir à Lyon trois « gros » hôtels de logistique urbaine

Selon Jean-Charles Kohlhaas, des projets peuvent être développés pour cela. Il rappelle le lancement d’un appel à manifestation d’intérêt pour le fluvial, avec le développement, notamment, de l’entreprise ULS prévue pour 2022. « Il faut qu’on arrive à multiplier ces types d’initiative », espère-t-il.

Pour l’élu, avoir trois « gros » hôtels de logistique urbaine serait une bonne chose pour le territoire. Un projet de ce type grand de 30 000 m2 est déjà en cours au port Edouard Herriot. Néanmoins, ce dernier a mis un certain temps à décoller et la question du foncier risque de se poser en développer d’autres sur la métropole.

« On pourrait aussi avoir une logistique propre en amont, commente Jean-Charles Kohlhaas. Cinq kilomètres propres en ville, c’est bien. Mais quand les 500 kilomètres avant le sont aussi, c’est mieux. »

Pour cela, l’élu remet en avant la nécessité de développer le ferroviaire via la mise en place, notamment, du Contournement ferroviaire de l’agglomération lyonnaise (CFAL). Un serpent de mer dont la réalisation dépend, pour le coup, de l’Etat.

#monde de l'économie

Les AESH de Lyon appelées à manifester ce mardi

Les AESH de Lyon appelées à manifester ce mardi

Les AESH de Lyon sont invitées à une nouvelle mobilisation nationale ce mardi 19 octobre pour revaloriser leurs salaires et conditions de travail. Accompagnées de parents d’élèves et professionnels d’éducation, plusieurs d’entre elles se sont donné rendez-vous à 15h devant le rectorat de Lyon.

Les syndicats FSU, Fnec-FP-FO, CGT Éduc’action, SNALC, SUD éducation, SNCL-FAEN ont appelé à une mobilisation massive ce mardi 19 octobre pour défendre de « meilleures rémunérations, conditions de travail et de recrutement » pour les accompagnantes d’élèves en situation de handicap.

C’est une fois encore devant le rectorat, situé 92 rue de Marseille, (Lyon 7è), qu’elles devraient se retrouver à 15 heures. En amont, un pique-nique est organisé à 12h30 place Bahadourian, suivi d’une assemblée générale à la Bourse du Travail (Lyon 3è).

Les AESH de Lyon dénoncent un manque de mesures concrètes

Des mobilisations qui ne sont pas sans rappeler celles de l’année dernière. Elles ont, in fine, permis une ouverture des discussions au sujet des salaires et grilles de rémunération avec le ministère de l’Education nationale. Pour autant, d’après le communiqué de la FSU :

« Les revendications de réelle revalorisation salariale, de création d’un corps de fonctionnaires et d’amélioration des conditions de travail, notamment par l’abandon des PIAL [pôles inclusifs d’accompagnement localisés, ndlr], n’ont toujours pas de réponses concrètes. »

Les syndicats ont établi un certain nombre de revendications. Ils souhaitent que soient augmentées les rémunérations des AESH sur toute leur carrière, avec comme objectif l’alignement sur la grille de catégorie B. Ils exigent que soient rendus possibles les contrats à temps complet. Ils reviennent aussi sur la nécessité d’abandonner la réforme des PIAL et la politique de mutualisation des moyens :

« [La réforme des PIAL et la politique de mutualisation des moyens] dégradent les conditions de travail des AESH en leur imposant de suivre davantage d’élèves et d’intervenir sur plusieurs écoles, collèges et lycées.  »

Lidl à Vaulx-en-Velin : « La mairie est à rebours de l’urgence écologique »

Lidl à Vaulx-en-Velin : « La mairie est à rebours de l’urgence écologique »

À Vaulx-en-Velin Village, c’est sur l’avenue Marcel Cachin, qu’une première trouée a été creusée dans la verdure qui marque la sortie de ville. Il s’agit des prémisses des travaux du nouveau Lidl. Le magasin hard-discount sera bâti sur une zone végétale ; un projet commercial contre lequel des habitants comptent de se battre à tout prix.

C’est aussi dans cette « forêt » ou « friche » que la maire socialiste Hélène Geoffroy a annoncé fin d’année 2020 vouloir bâtir un pétanquodrome géant pour la modique somme de 4,5 millions d’euros. On en oublierait presque le Lidl, qui doit jouxter l’équipement sportif, aux côtés d’un nouveau complexe d’écoles maternelle et primaire par ailleurs programmés.

Le projet est rendu public au début de l’été 2019 : la mairie de Vaulx-en-Velin convoque les habitants pour les informer du futur bâti d’un Lidl en sortie de ville, entre les premières zones agricoles et les derniers pavillons de Vaulx-en-Velin village, sur la deux voies de l’avenue Marcel Cachin.

Dès l’annonce du projet, un collectif informel se constitue pour tenter d’empêcher le projet. Constitué d’habitants du quartier, issus de la société civile mais aussi de l’opposition politique, notamment le groupe de gauche sans étiquette, Agir-pour-Vaulx-en-Velin. Les justifications de leur désaccord sont nombreuses : protéger la petite forêt, cesser l’artificialisation des sols, ne pas dénaturer le village, éviter qu’un flot incessant de voitures ne circule.

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#Lidl#pétanquodrome

[PODCAST] Le tourisme spatial, étape d’une stratégie de « space dominance »

[PODCAST] Le tourisme spatial, étape d’une stratégie de « space dominance »

Les milliardaires et l’espace : tourisme de golden boy ou prémisses du nouveau colonialisme spatial ? Depuis 2015, une loi autorise les citoyens américains à s’approprier des ressources sur les planètes et astéroïdes du système solaire, et l’espace regorge de métaux rares indispensables à notre société numérique. Depuis Blue Marble, l’image de notre planète Terre totalement éclairée prise en 1972, qui n’a pas rêvé d’aller dans l’espace pour faire cette expérience hors norme ?

Ces questions seront abordées au cours de la session des Mercredis de l’Anthropocène du 20 octobre. Des débats qui repensent les clichés au sujet de la conquête spatiale en perspective.

Cette troisième séance de la saison 6 se déroulera de 18h30 à 20h à l’Hôtel71 (Lyon 2è) dans le quartier Confluence, sur les bords du Rhône. La présentation d’un pass sanitaire valide et le port du masque sont obligatoires. À écouter également en podcast. Cette conférence s’inscrit dans le cadre de la Rentrée Anthropocène #2021.

Retrouvez ci-dessous le texte écrit par Gilles Rabin, économiste et directeur de l’innovation, des applications et de la science du CNES.

Le tourisme spatial, étape d’une stratégie de « space dominance »

Après l’avion orbital de Richard Branson, le saut de puce de Jeff Bezos et la randonnée spatial d’Elon Musk, nous avons le choix entre admiration technologique, jalousie de ne pas en avoir été, et mépris devant ce nouveau tourisme qui consomme tant d’énergie dans ce monde ou le gâchis de ressource nous mène à l’abime.

Le plus aisé serait de croire qu’il s’agit juste d’un jeu de cours de récréation entre milliardaires qui s’ennuient, fortune faite, et qui cherchent un terrain pour s’affronter à coup de milliards et de show télévisés que sont devenus leurs tentatives.

D’abord la technologie. Si on décale de quelques centimètres son point de vue il faut admettre que les trois tentatives mêlent une communication aboutie et exploit technologique. Si Richard Branson joue le Bernard Tapie entre son premier job de vendeurs de journaux, puis de labels musicaux et enfin de Pdg de compagnies aériennes, Bezos et Musk ont d’abord été des techniciens qui rêvent d’espace bien avant d’être milliardaire. Et Musk est même resté Cto (directeur en charge de la technologie) chez SpaceX démontrant à la fois son énergie et sa compétence. Le milliardaire cache l’ingénieur et non l’inverse. On est loin de milliardaires revenus en enfance et cherchant à avoir le plus beau jouet dans le magasin. Ce sont des rêveurs de l’espace et leurs fortunes leurs permettent de réaliser ces rêves.

« L’avènement d’un spatial mondial et moins cher »

Le tourisme n’est donc que la face cachée de l’Iceberg. Depuis les années 2000 l’industrie spatiale n’est plus la chasse gardée d’industriels et de quelques pays qui se partageaient les orbites. Avec l’apparition notamment de SpaceX, mais aussi de Planet et en Europe récemment d’Isar Aerospace développant des micro lanceurs, avec l’émergence de nouveaux pays, Israël, l’Inde, les Emirats arabes unis, l’Australie… le spatial n’est plus cette Ivy League réservée à quelques acteurs.

Ajoutez la révolution numérique et donc pour le spatial la miniaturisation et donc la perte de poids et vous avez un spatial mondial et moins cher. Le Newspace n’est alors que la 4è révolution industrielle appliquée au spatial. Mais ce Newspace ce n’est pas comme l’affirme la presse dite économique, la privatisation de l’espace au profit de grandes entreprises. Le spatial est toujours financé par les Etats à hauteur de plus de 80%, y compris aux Us. SpaceX c’est Apple financé par la Nasa et la défense américaine. Alors tout bouge et rien ne change comme dans le Guépard de Visconti ? Pas tout à fait. Ce tourisme spatial est une nouvelle étape de deux phénomènes qui se percutent.

« L’homme est une espèce multi planète »

D’abord la « vision politique » des acteurs de Newspace qui à la manière des Gafam cherchent moins à nous vendre des objets ou services qu’à changer profondément nos modes de vie. Pour Bezos et Musk il s’agit de faire de l’espace ce que les américains appellent la frontière infinie (endless Frontier). Après la course au Mississipi du Far west, la course à l’espace des années 60, la prochaine étape sera une base sur la lune
et plus tard sur Mars.

« L’homme est une espèce multi planète » comme l’affirme Elon Musk et notre destinée est de sauter de planète en planète pour conquérir l’univers. En plus, cela tombe bien, la planète Terre n’est plus très en forme.

À quand le tourisme spatial ? Une photo SpaceX Falcon Heavy Launch
À quand le tourisme spatial ? Une photo par SpaceX du Falcon Heavy Launch

Le tourisme spatial est donc la prémisse de cette colonisation à venir et pour prouver que c’est possible, on acclimate le terrien aux voyages en orbite, en attendant de faire de tour de la Lune comme l’a promis SpaceX. On est loin de l’image de milliardaires jouant dans la cour de récréation.

« Le spatial s’affirme comme le nouveau champ de bataille des super puissances »

Second phénomène, le « space Dominance Us » ou la stratégie d’être leader dans le spatial pour nos amis américains et chinois. L’orbite base (entre 400 et 800 km) sera le champ de bataille militaire et civil. Pour les militaires comme pour les civils c’est de cette orbite que l’on peut voir et communiquer en temps réel sur l’ensemble de la planète.

Aujourd’hui, la constellation de satellites de télécommunication StarLink permet d’avoir l’internet à très haut débit sur la quasi-totalité de la planète, ce qui est un gain pour l’ensemble des services à offrir pour les territoires isolés mais aussi un avantage stratégique pour les forces armées Us. Envoyer des touristes Us dans l’espace c’est aussi démontrer la prédominance américaine.

Pendant que nous regardons les milliardaires s’amuser, le spatial s’affirme comme le nouveau champ de bataille des super puissances. L’orbite basse, la Lune et Mars sont les prochaines étapes de cette guerre. Du moment que les images sont belles…

« Le tourisme spatial, étape d’une stratégie de space dominance » une conférence en direct le 20 octobre de 18h30 à 20h puis disponible en podcast.

Avec :

– Gilles Rabin, économiste. Parmi toutes ses activités, il fut délégué général au développement économique et à la politique foncière de la Métropole de Lyon. Depuis 2017, il est le directeur de l’innovation, des applications et de la science du CNES, centre chargé d’élaborer et de proposer au gouvernement le programme spatial français, puis de le mettre en œuvre.

– Arnaud Saint-Martin, sociologue, chargé de recherche au CNRS. Ses recherches alternent entre l’histoire des sciences et techniques, notamment astronomiques, et l’étude des transformations de l’astronautique, de la guerre froide à l’avènement du « New Space ».

Animation : Valérie Disdier

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