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A Lyon, l’accueil chaotique des migrants afghans arrivés de Briançon

Une soixantaine de migrants afghans, en provenance de Briançon (Hautes-Alpes), sont arrivés mardi 26 octobre en fin d’après-midi à la gare routière de Lyon Part-Dieu. Une partie a pu être hébergée pour la nuit.

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police taser migrants afghans Lyon

« Quand on pense aux 250 Afghans qui ont été reçus avec les ors de la République et puis à eux… C’est juste ceux qui n’ont pas eu le temps de monter dans l’avion. »

Paola Baril, coordinatrice régionale à Médecins du Monde, secoue la tête d’un air las. Elle ajuste son brassard aux couleurs de l’association et s’avance à la rencontre de la soixantaine de migrants afghans qui ont débarqué mardi 26 octobre en fin d’après-midi à la gare routière de Lyon Part-Dieu, en provenance de Briançon.

Regroupés dans le parc Jeanne Jugan, à deux pas de la gare routière, un groupe de jeunes Afghans d’une vingtaine d’années tentent de communiquer en anglais avec les bénévoles de Médecins du Monde, tandis que des familles avec enfants et bébés s’installent tant bien que mal de l’autre côté de l’allée centrale sur les couvertures vertes données par la Croix-Rouge.

Tous attendent qu’une solution d’hébergement leur soit proposée pour la nuit, ou au moins des tests Covid pour qu’ils puissent continuer leur route.

migrants afghans Lyon
Sur la soixantaine de migrants afghans arrivés à Lyon ce mardi 26 octobre, il en reste une trentaine qui attendant qu’une solution d’hébergement soit trouvée pour la nuit. Parmi eux, une dizaine d’enfants dont des bébés.Photo : OM/Rue89Lyon

Des migrants afghans en provenance de Briançon après la fermeture d’un refuge

Tous ces gens sont arrivés à Lyon mardi 26 octobre en fin d’après-midi, dans deux bus d’une trentaine de places chacun, affrétés par la préfecture des Hautes-Alpes. Ils viennent d’Afghanistan, ont transité par l’Italie puis par Briançon.

Là-bas, le refuge qui accueillait les migrants, dans le tiers-lieu des « Terrasses solidaires », a dû fermer ses portes ce lundi 25 octobre en raison d’une surpopulation.

« Il y avait environ 200 personnes alors que la capacité du refuge est de 80, explique Isabelle Lorre, coordinatrice de Médecins du Monde à Briançon. On savait qu’il y avait aussi environ 160 personnes qui attendaient en Italie de traverser la frontière. »

Dimanche 24 octobre au soir, ce sont donc 200 migrants qui se sont retrouvés à dormir à la gare de Briançon. D’après La Croix, l’évêque de Gap est finalement intervenu et un prêtre de Briançon les a accueillis dans son église pour les nuits de lundi et mardi. Une soixantaine de migrants s’y trouvent toujours, d’après Isabelle Lorre.

« La Croix-Rouge venait faire des tests Covid au refuge environ deux fois par semaine mais la préfecture leur a interdit de continuer ce mardi », déplore-t-elle.

À l’arrivée à Lyon, la présence de forces de police fait fuir une partie des migrants afghans

Lundi 25 octobre, des migrants étaient déjà arrivés en provenance de Briançon et de Grenoble pour être conduits dans les locaux de la police aux frontières (PAF) qui se trouvent à Lyon. Tous ont été relâchées au compte-goutte, selon les associations. Malgré tout, méfiantes après ces arrestations, de nombreuses personnes ont décidé de quitter le refuge de Briançon par leurs propres moyens. Seuls deux bus d’une trentaine de places chacun sur les quatre affrétés par la préfecture des Hautes-Alpes ont alors quitté Briançon en début d’après-midi mardi 26 octobre, direction Lyon.

A l’arrivée des deux bus à la gare routière de Lyon Part-Dieu, c’est le chaos. Une vingtaine de membres des forces de l’ordre sont présents pour assurer la sécurité. A la vue des uniformes, plusieurs passagers décident de partir précipitamment.

Les équipes de Médecins du Monde et de la Croix-Rouge, épaulées par des Lyonnais.es venu.es en soutien, distribuent des colis alimentaires et des couvertures vert pomme aux Afghans. Parmi eux, une dizaine d’enfants dont certains sont âgés d’à peine quelques mois.

« On a été prévenus ce matin par nos collègues de Briançon, confirme Paola Baril. Ils nous ont dit que la plupart de ces personnes souhaitent poursuivre leur route et ont juste besoin de faire un test Covid pour pouvoir prendre les transports. Le problème, c’est le prix des tests. On aimerait qu’ils puissent passer la nuit au chaud et leur faire faire les tests gratuitement demain matin. »

En attendant de trouver une solution d’hébergement, les équipes de Médecins du Monde les orientent vers le parc Jeanne Jugan sous l’œil des policiers. Julien Perroudon, secrétaire général adjoint de la préfecture du Rhône, pendu au téléphone, cherche des places d’hébergement.

« La préfecture dit un truc, et cinq minutes après elle en dit un autre »

Soudain, un vent de panique parcourt le petit groupe d’Afghans rassemblés dans le parc.

Une dizaine de policiers de la police nationale viennent de faire leur apparition et ont mis le cap droit sur eux. Sans un mot, ils font irruption au milieu du groupe, taser et matraque à la main pour certain.es. Le ton monte rapidement avec les salariés de Médecins du Monde qui s’interposent.

C’est l’incompréhension générale. Les policiers expliquent avoir reçu des ordres de la préfecture pour intervenir. Les autres leur désignent le représentant de la préfecture, toujours au téléphone.

« La préfecture dit un truc et cinq minutes après elle en dit un autre », râle un policier.

Ils finissent par se replier près du secrétaire général adjoint de la préfecture, en bordure du parc. Ce dernier a été rejoint par un membre de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) et une solution d’hébergement semble se dessiner.

Il faut dire que le nombre de personnes à héberger a drastiquement baissé depuis l’arrivée des bus, il y a près de trois heures. Il fait froid, la nuit tombe, et de nombreux Afghans jettent des regards anxieux aux forces de l’ordre.

« Where is sleeping ? », s’inquiètent plusieurs d’entre eux.

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Les équipes de Médecins du Monde tentent d’intervenir alors que la police nationale fait irruption dans le groupe de migrants afghans, taser à la main.Photo : OM/Rue89Lyon

Une solution d’hébergement trouvée pour une nuit

En début de soirée, la préfecture a finalement trouvé une solution d’hébergement pour la nuit de mardi à mercredi, dans un foyer Adoma du 8e arrondissement de Lyon. Des voitures du foyer assurent les aller-retour pour emmener tous ceux qui restent dans le parc.

Sur la soixantaine de personnes qui se trouvaient dans les bus à la gare routière, il en reste une petite trentaine. Tous ont pu avoir un toit ce mardi soir, les familles avec enfants comme les jeunes hommes seuls.

« C’était délirant, constate Paola Baril. Je m’attendais à ce qu’il y ait plus de collectifs structurés sur place. C’est rare qu’on se retrouve à faire l’intermédiaire entre la préfecture et les gens. Il y avait quand même quelqu’un de la préfecture et quelqu’un de l’OFII. Nous, on s’était préparés à leur indiquer un parc où dormir, c’est pour ça qu’on avait demandé des couvertures à la Croix-Rouge. »

Lassés d’attendre, plusieurs jeunes Afghans ont décidé de se payer un test Covid à la pharmacie la plus proche. Ils comptent tenter leur chance sur les chemins de fer français et espèrent pouvoir rejoindre la capitale sans se faire contrôler. Quant à la trentaine de personnes hébergées, la plupart souhaitent quitter Lyon également au plus tôt.

De nouvelles arrivées de migrants afghans sont prévues dans les jours à venir. D’après Médecins du Monde Briançon, deux nouveaux bus ont été affrétés par la préfecture des Hautes-Alpes ce mercredi 27 octobre : l’un en direction de Marseille, l’autre pour Lyon.


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