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Actualités, enquêtes à Lyon et dans la région

Peut-on sauver les Alpes du changement climatique ?

Peut-on sauver les Alpes du changement climatique ?

En raison du changement climatique, d’ici 80 ans les Alpes pourraient n’être plus qu’un joli souvenir enfoui dans le cœur des alpinistes. Peut-on les sauver ?

En parallèle de l’exposition «Anthropocène Alpin – quel avenir pour nos montagnes ?» d’Etienne Maury, du collectif Item, cette session des « Mercredis de l’Anthropocène » questionne les conséquences du changement climatique dans les Alpes.

L’occasion de parler du fait que les zones montagneuses, et parmi elles les Alpes, se réchauffent presque deux fois plus rapidement que la moyenne planétaire. Une hausse qui approche 2°C depuis 1900, dont les conséquences sur les paysages et les activités humaines sont de plus en plus visibles.

La Mer de glace, dans la vallée de Chamonix (Haute-Savoie) est un exemple emblématique de ce qui attend les Alpes ces prochaines années : une glace qui se meurt, son manteau blanc s’amincissant en une langue grise à travers laquelle affleurent chaque été un peu plus de pierres.

Exceptionnellement, ce débat des « Mercredis de l’Anthropocène » se tiendra à l’atelier du collectif Item (3 impasse Rey, Lyon 1er), ce mercredi 10 novembre de 18h30 à 20h. A retrouver en podcast également.

Ci-dessous, voici le texte d’un des intervenants : Jean Krug, glaciologue, écrivain et guide d’expédition en Antarctique.

« Sans équivoque, l’influence humaine a réchauffé la planète, les océans et les terres. L’atmosphère, l’océan, la cryosphère et la biosphère ont été soumis à des changements rapides et de grande ampleur. »

Le dernier Rapport d’Évaluation du GIEC, le Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat, publié le 9 août dernier, n’a fait qu’enfoncer le clou. Depuis la période 1850-1900, la température moyenne à la surface de la Terre s’est élevée d’environ 1,1 degré, et la cryosphère, c’est-à-dire l’ensemble de l’eau présente sous forme gelée sur Terre, en subit les conséquences. Avec l’inertie qui caractérise ses composantes, c’est vrai. Avec les temps longs propres à la Terre.

Mais celle-ci répond. Depuis 1900, le niveau des mers s’est élevé d’environ 20 cm, à raison, aujourd’hui, de 3,7 mm par an. Sur les quinze dernières années, les calottes glaciaires et les pertes de masse des glaciers sont devenues les contributions principales à l’augmentation du niveau de la mer.

Et les Alpes, me demanderez-vous ?

Les Alpes réagissent elles aussi. Vite. Trop vite.

Panorama sur la Mer de Glace depuis la gare d’arrivée du Montenvers, l’un des points de vue les plus visités du massif du Mont-Blanc pour sa facilité d’accès. Il est estimé que d’ici 2070, le glacier pourrait ne plus être visible de ce point de vue. Chamonix Mont-Blanc, septembre 2019, alt. 1910m. Photo : Etienne Maury

Les glaciers alpins pourraient disparaître totalement d’ici 80 ans

Pour faire simple, parmi les massifs montagneux répondant le plus vite au réchauffement climatique, on trouve les glaciers de Nouvelle-Zélande, du Caucase et d’Europe centrale. En moyenne, depuis vingt ans, les glaciers alpins ont perdu entre 50 cm et 1 m d’épaisseur chaque année, avec de fortes disparités régionales. En fonction des scénarios d’émission de gaz à effet de serre évalués par le GIEC, d’ici à la fin du siècle, les glaciers alpins pourraient perdre de 70% à 100 % de leur masse.

Il n’est donc pas exclu, dans le pire des cas, que ceux-ci disparaissent totalement d’ici 80 ans.

Voilà pour les chiffres. Des chiffres dont on se doute depuis longtemps. Des chiffres qu’on a fait qu’affiner, en les passant à la moulinette austère de la démarche scientifique, à l’impartialité froide du processus de revue et de la précision statistique. Mais finalement, cela fait des années qu’on parle du retrait des glaciers. Ceux qui les fréquentent nous alertent depuis longtemps, avec une sorte de sensibilité, une forme d’empathie, une vague à l’âme qu’on qualifierait bien volontiers de trop pleine d’affect pour être réellement scientifique.

Ont-ils tort pour autant ?

Les Alpes, un monde envoûtant d’austérité

Mer de Glace, Mont Dolent, Glacier des Bossons, Glacier de Bionnassay, Cervin, Glacier d’Aletsch, Glacier Noir, Ailefroide, Glacier Blanc.

Des noms qui évoquent l’extrême, le brut, le vertical, l’intense et l’intime. Une puissance minérale et glacée, un enchevêtrement de brouillards et de vents plaqués, de couleurs et de sons, une source d’admiration. Un monde qui, bien qu’il subisse le réchauffement de plein fouet, nous marque encore aux fers de nos piolets et de nos crampons, nous laissant dans le corps la trace d’une âme griffée.

En 1910, Jean-Baptiste Charcot, au sortir de ses hivernages en Antarctique, évoquait ce qu’il appelait « le virus des pôles ». Il cherchait à comprendre ce qui rendait ce continent, pourtant glacial, austère, et si peu propice à la vie, aussi attractif, aussi attirant et finalement, aussi envoûtant.

« Ici, disait-il, c’est le sanctuaire des sanctuaires, où la nature se révèle en sa formidable puissance comme la divinité égyptienne s’abrite dans l’ombre et le silence du temple, à l’écart de tout, loin de la vie que cependant elle crée et régit. L’homme qui a pu pénétrer dans ce lieu sent son âme qui s’élève. »

Je me garderai bien de me comparer aux grands noms de l’âge héroïque de l’exploration polaire. Mais le randonneur glaciologue passionné que je suis ne peut cependant s’empêcher de penser que les propos de Charcot recèlent à la fois l’enjeu et la réponse.

Je ne peux m’empêcher de penser qu’il y a là, dans ces Alpes engivrées, dans ces décors lunaires zébrés et soufflés, dans les sons de ces craquements sinistres et puissants, dans l’écho mitraillé des éboulis et des fracas, une forme de puissance autre – rien de mystique –, dans laquelle l’observateur tire humilité et respect. Ce qui prend, là-haut, me fait penser à ce qui me prend, ce qui a pris Charcot, là-bas, tout au bout de la Terre.

Un respect qui ne peut conduire qu’à une forme d’amour.

Retomber amoureux des Alpes pour sauver la Terre

Alors, peut-on sauver les Alpes ?

Passé le constat scientifique – vital au demeurant –, peut-être nous faut-il retrouver ce son, ce bruit, extirper nos sensations du fond de nos gorges, où on les a enfouies. Faire rejaillir ce pourquoi on admire les glaciers, les montagnes, et, plus largement, la nature. Tenter de retrouver en nous ce qui a poussé nos ancêtres, les pionniers de ce monde blanc, à en tomber aussi viscéralement amoureux.

Enfin, transmettre. Éduquer, sans jamais oublier que les Alpes ne sont qu’une portion indissociable de notre monde rond. Elles sont un indicateur de son déclin, elles sont une glace d’alarme, qui s’est allumée. Depuis leur sommet, c’est la Terre qu’on contemple. Notre boule bleutée.

Au-delà des Alpes, c’est elle qu’on veut sauver.

« La sur-fragilité des territoires de montagne », un débat en direct le mercredi 10 novembre de 18h30 à 20h puis disponible en podcast.

Avec :

– Etienne Maury : photographe, il travaille aujourd’hui sur le changement climatique dans les Alpes. En collaboration avec la communauté scientifique, il documente les transformations en cours sur les paysages et les communautés locales, ainsi que les enjeux de ces territoires.

– Jean Krug : ce glaciologue et écrivain est, depuis novembre 2017, guide d’expédition en Antarctique. Son premier roman, Le Chant des Glaces, est paru en 2021 aux Éditions Critic.

Animation : Valérie Disdier, directrice-adjointe de l’Ecole urbaine de Lyon, chargée de programmation et de la diffusion.

L’Église de scientologie assiège les hôpitaux psychiatriques de Lyon

L’Église de scientologie assiège les hôpitaux psychiatriques de Lyon

Fermement engagés dans une lutte anti-psychiatrie, les adeptes de l’Église de scientologie, une secte bien implantée à Lyon, font le siège des hôpitaux pour tenter d’en détourner les patients et leurs familles. Pour convaincre, ils jouent sur les recours à l’isolement et la contention à l’hôpital psychiatrique ainsi que sur la pratique des « électrochocs » thérapeutiques. Enquête.

À l’affût près de la grille de l’hôpital psychiatrique Saint-Jean-de-Dieu, quelques quidams font le pied de grue et tendent de curieux tracts aux soignants, patients et visiteurs. En lettres capitales, on y lit des interpellations anxiogènes : « Abus psychiatriques : victimes ou témoins, contacter la CCDH » ; « Électrochocs, thérapie ou torture ? ».

Ces personnes se présentent comme des membres de la Commission des Citoyens pour les Droits de l’Homme (CCDH).

En réalité, un faux-nez de l’Église de scientologie, fermement engagé dans un combat contre la psychiatrie, et les abus qu’elle y devine : séances d’électrochocs, contentions forcées des patients, isolements à répétition des récalcitrants, et camisole chimique pour les plus endurants. Au risque de propager des contre-vérités nuisibles aux patients.

Les trois hôpitaux psychiatriques lyonnais sont concernés. Infirmière au Vinatier, Marie-Claude peine à dissimuler l’énervement dans sa voix :

« Ça fait 20 ans que je suis là. Ça fait 20 ans que les scientologues sont à nos portes ! »

Pour les soignants, ce siège de l’hôpital pose un risque : celui que des patients en situation de fragilité psychique, ou leurs familles inquiètes, soient convaincus par le discours alarmiste des scientologues, et se détournent des soins professionnels.

« Notre association dénonce les abus en psychiatrie : contention, isolement… Nous sommes 500 en France », assure Coralie Gamet, porte-parole nationale de la CCDH.

À Lyon, ils compteraient « 25 à 30 membres » à jour de cotisation selon Jean-Paul Blanc, le président de l’antenne locale. Militant à la CCDH depuis 30 ans, il organise régulièrement des manifestations aux abords des hôpitaux de l’agglomération lyonnaise.

« On fait trois actions par mois, toutes déclarées en préfecture. C’est une manifestation statique, avec des banderoles, des pancartes, et on distribue des tracts aux gens qui sortent de l’hôpital, détaille le scientologue. On cherche à toucher les gens qui viennent prendre leurs soins en ambulatoire. C’est là qu’on a un important réservoir d’informations. Ceux qui le désirent donnent leurs témoignages. »

Ces témoignages sont recueillis dans le but de constituer un dossier « qui peut aller devant les tribunaux, selon la qualité, précise Jean-Paul Blanc. On est revenu devant les centres hospitaliers suite à des actions plus musclées en justice : on porte plainte quand on a pu établir que la personne a subi des contraintes et n’était pas en état de se défendre, qu’elle soit attachée ou privée de ses droits. »

Combien au total intentent des actions en justice ? Les scientologues bottent en touche :

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A Lyon, le procès du voyeur de l’Ehpad de Saint-Priest et d’une enquête « bâclée »

A Lyon, le procès du voyeur de l’Ehpad de Saint-Priest et d’une enquête « bâclée »

Ce vendredi, Ludovic M. comparaissait devant la justice pour avoir filmé, à leur insu, dans les toilettes, ses collègues de l’Ehpad Le Château, à Saint-Priest. Derrière cette affaire, la partie civile est revenue sur une enquête « bâclée », selon elle, et sur l’inertie du parquet autour des faits.

La salle J du palais de justice de Lyon affiche complet ce vendredi 5 novembre. Dans le public, une douzaine d’employées de l’Ehpad du Château, à Saint-Priest, sont venues, avec leur directrice d’établissement. Tendues, elles revoient, parfois pour la première fois, un de leur ancien collègue, Ludovic M. Devant le tribunal, l’homme de 59 ans, ex-technicien de la résidence, est accusé de les avoir filmées, à leur insu, aux toilettes et dans les vestiaires pendant une période de près de trois ans.

Juste derrière lui, deux avocates, l’une représentant l’Ehpad de Saint-Priest, l’autre une bonne partie des victimes de ce jour. En tout, elles sont 28 soignantes à avoir déposé plainte.

Révélée par Rue89Lyon, l’affaire remonte au 21 octobre 2020. Ce jour-là, une infirmière se rend aux toilettes du vestiaire réservé au personnel féminin. Elle est alors attirée par une lumière rouge qui clignote, au bas des WC. Cette lumière vient d’une boîte de souricide posée sur le tuyau d’évacuation. En la prenant en main, elle découvre un système électronique complet. Il permet de filmer les employées se rendant aux toilettes.

De là, elle avertit sa direction. Dans la carte SD de la mini-caméra, elle découvre des vidéos des soignantes et des images du technicien en train d’installer le matériel vidéo. Ce dernier avoue immédiatement devant sa direction et la police.

Voyeur de l’Ehpad de Saint-Priest : « Je le prenais comme un jeu »

En tout, des centaines de vidéos de femmes aux toilettes seront retrouvées. Sur l’ordinateur du prévenu, les policiers mettront la main sur six mois de données auxquelles s’ajoutent 11 clefs USB permettant de faire des transferts et un power point comportant 222 photos centrées sur le sexe des victimes. Un disque dur comptant trois ans de données est également trouvé. Cassé, il ne pourra pas être exploité.

A la barre, Ludovic M. tente de faire amande honorable. Légèrement courbé, l’imposant technicien essaye de se retourner vers ses anciennes collègues, avant d’être rappelé à l’ordre par la présidente : « Adressez-vous au tribunal, s’il vous plaît ! »

« Je tenais à présenter mes excuses aux personnes blessées, tente-t-il. Je n’ai pas grand-chose à rajouter si ce n’est que je n’ai jamais eu des gestes déplacés au sein de l’établissement. »

Après cela, il tente de justifier un délit « qu’il prenait alors comme un jeu. » Dans l’assemblée, ses collègues manquent de s’étouffer. Alors que des voies s’élèvent, elle sont rapidement rappelées à l’ordre par le tribunal.

Le père de famille, ayant avoué parfois se masturber devant ces images, indique ne pas avoir pris conscience du problème. Dodelinant, il explique avoir répondu à des « pulsions » et assure qu’il ne recommencera pas. Licencié par la direction de l’Ehpad, il a repris un travail dans un hôpital à Bourgoin-Jallieu.

Pour la partie civile : la responsabilité de la police et du parquet

Un discours qui indigne ses anciennes collèges présentes. Ces dernières, explique leur avocate, Sarah Just, sont particulièrement « en colère ». La « nonchalance » du prévenu, certes, les irrite. Mais il n’y a pas que ça. Depuis novembre 2020, elles ont eu le sentiment de n’être prises au sérieux par personne. Ni par le prévenu, ni par les policiers du commissariat de Saint-Priest, ni par le parquet.

« Le prévenu a eu affaire à des enquêteurs plus que bienveillant à son égard, ils se sont contentés de peu, rage l’avocate Sarah Just. Quand des fonctionnaires de police disent aux victimes : « Ça va, c’est pas si grave que ça, il a déjà assez payé comme ça » et les découragent de porter plainte, ce n’est pas possible. »

L’enquête a ainsi été bouclée en trois semaines. « 300 vidéos de cinq minutes chacune analysées en une heure, il y a de quoi être furieux », renchérit sa consœur, chargée de défendre le réseau de maison de retraite Omeris. Bref, un travail « bâclé » par la police, comme par le parquet, pour la partie civile. Le technicien devait, initialement, comparaître en convocation sur reconnaissance préalable de culpabilité. Une option qui ne correspondait pas du tout aux victimes.

« Il y a une vraie rupture de confiance avec les policiers de Saint-Priest, poursuit l’avocate Sarah Just en s’adressant au procureur. Donc oui, ça réagit dans la salle. La banalité avec laquelle ces événements sont racontés a un impact énorme pour elle. »

Les employées de l’Ehpad de Saint-Priest « non identifiées » sont aussi victimes

Anxiété, insomnie, stress post-traumatique… Elle rappelle les difficultés psychologiques connues par ses clientes. Ludovic M. a travaillé plus de dix ans à l’Ehpad. Elles le connaissent bien. Certaines lui reprochaient ses manières de « coq », très à l’aise, se voulant séducteur. N’empêche qu’elles ne s’attendaient pas à ça. Elles travaillent toujours, pour une partie, sur les lieux et sont encore hantées par l’affaire.

Pour régler ce préjudice, l’avocate Sarah Just demande à ce que le délit soit requalifié avec le caractère sexuel aggravant. Une option que n’a pas suivi le parquet initialement.

De même, elle a plaidé pour que les employées de l’Ehpad, non-identifiées dans les vidéos, soient également considérées comme victimes. Pour elle, il ne fait pas de doute qu’elles ont été sur le disque dur « cassé » du technicien. En trois ans, toutes ont probablement été filmées.

« Il y a un préjudice d’anxiété au même titre que les personnes qui ont pu être exposé à l’amiante », affirme-t-elle.

Ehpad de Saint-Priest
Le procès s’est tenu au tribunal de Lyon.Photo : PL/Rue89Lyon

« On passe beaucoup de temps sur le choix du ministère et moins sur les actes du prévenu »

Face à elle, la procureure lui a donné raison sur la requalification du délit. Pas sur le deuxième point. « Le choix a été fait de ne pas suivre les personnes non-identifiables. »

Déclarant reprendre tout juste le dossier, Sylvia Perticaro a admis quelques possibles maladresses côté policier.

« Oui, c’est un dossier important, car il y a beaucoup de victimes. Mais, malheureusement, c’est aussi un dossier complexe. Ce sont des faits qui existent et dont le traitement judiciaire peut relever d’un commissariat. »

Visiblement gênée, elle a regretté que l’audience passe « beaucoup de temps sur le choix du ministère et du commissariat et pas sur les actes du prévenu » en tant que tel.

Une manière de remarquer que, derrière l’affaire, un déraillement général était à analyser.

Six mois de sursis et une victoire pour les soignantes de l’Ehpad de Saint-Priest

L’avocat de la Défense a défendu, une fois n’est pas coutume, les forces de l’ordre. Compte tenu de la teneur des vidéos, il a admis comprendre que les agents, notamment, aient accéléré la lecture.

« Certes, on peut reconnaître au mouvement post « Mee too » des progrès. Mais celui-ci a, comme tout, sa part d’excès », a voulu marquer Kevin Chapuis, dans sa plaidoirie.

Jugeant excessives les sommes demandées par la partie civile à son client, il est également revenu sur l’identification ou non des victimes. « Ce sont des victimes potentielles et alléguées. » De même, il s’est opposé à ce que le délit soit inscrit dans le casier judiciaire B2 du technicien de maintenance. Sa crainte : que celui-ci perde son travail actuel. Une demande justement de la partie civile. Ludovic M. effectue le même travail, et dispose des mêmes possibilités, que dans son ancien emploi.

Sur ce point, la présidente du tribunal a donné raison à la partie civile. Il a été interdit d’exercer le métier d’agent d’entretien dans des lieux accueillant du public durant trois ans. Ludovic M. est condamné à six mois de prison avec sursis « pour atteinte à la vie privée par captation d’image ». Le caractère sexuel aggravant a été retenu. La justice a de plus donné raison aux parties civiles en le condamnant à verser 1000 euros à chaque victime identifiée dans les vidéos. Les personnes non identifiées auront elle une indemnité de 500 euros.

Propos révisionnistes sur Vichy : Etienne Blanc quitte la présidence du groupe LR à Lyon

Propos révisionnistes sur Vichy : Etienne Blanc quitte la présidence du groupe LR à Lyon

Etienne Blanc a été contraint de quitter sa fonction de président du groupe LR au conseil municipal de Lyon, cinq jour après avoir tenu des propos révisionnistes dans les colonnes du JDD.

Dimanche 31 octobre, le Journal du dimanche publiait un article sur l’ancien candidat LR à la mairie de Lyon, « soutien de Barnier mais proche de Zemmour ».

A une question sur Eric Zemmour et ses propos sur le régime de Vichy, Etienne Blanc répondait :

« Est-ce qu’en signant l’armistice, on n’a pas donné aux juifs les moyens de protection qui, pendant deux ans, permettaient de fuir le régime nazi ? Moi, je ne peux pas répondre ».

Passé le week-end de la Toussaint, la polémique a enflé à gauche, au centre comme à droite, pour dénoncer ces propos révisionnistes.

Dans un premier temps, le sénateur du Rhône et ancien premier vice-président de Laurent Wauquiez à la Région Auvergne-Rhône-Alpes a tenté de résister en publiant un premier communiqué le mercredi 3 novembre :

« Comme je l’ai indiqué explicitement les décrets antisémites de Vichy ne distinguent pas entre les Juifs français et étrangers et en cela je réprouve les propos d’Éric Zemmour. La responsabilité du régime de Vichy dans la déportation de Juifs français et étrangers, dès sa constitution, n’est pas non plus contestable. Ces affirmations je les ai réitérées tout au long de mon engagement politique de manière constante »

Propos sur Vichy : Etienne Blanc finit par quitter la présidence du groupe

Mais la pression de son propre camp était trop forte. De nombreux élus de droite lyonnais lui reprochant globalement sa proximité avec Eric Zemmour.

C’est à la suite d’une réunion sur le sujet avec les élus de son groupe qui s’est tenue ce jeudi, que le sort d’Etienne Blanc a basculé.

Dans un communiqué publié ce vendredi en fin d’après-midi, les maires de droite du 2ème et du 6ème arrondissement, Pierre Oliver et Pascal Blache, lui ont demandé de se « retirer de la présidence du groupe ».

Une heure plus tard, Etienne Blanc annonçait sa démission dans un nouveau communiqué dans lequel il ne fait aucune mention du polémiste :

« Tout au long de ma vie politique j’ai exprimé mon rejet de l’antisémitisme. Cette polémique me navre. Mais, l’intérêt de ma famille politique prime évidemment sur ma situation personnelle. Je n’entends pas laisser perdurer un climat de défiance au sein de mon groupe. Je mets donc immédiatement un terme à ma fonction de président ».

C’est certainement la fin de la très courte histoire politique d’Etienne Blanc à Lyon. Lui qui a réalisé l’essentiel de sa carrière dans l’Ain, notamment comme maire de Divonne-les-Bains, était le chef de file de la droite aux dernières municipales de 2020.

Selon Lyon Capitale, c’est le maire LR du 2e arrondissement de Lyon, Pierre Oliver, qui devrait reprendre la présidence du groupe LR au conseil municipal.

Après le RN, cette démission montre que le cas Eric Zemmour travaille les rangs LR.

Etienne Blanc propos Vichy
Etienne Blanc lors du débat sur la culture organisé par le Petit Bulletin et Rue89Lyon le mardi 18 février 2020.Photo : Houcine Haddouche

A Lyon, des soupçons de favoritisme autour de la Fête des Lumières

A Lyon, des soupçons de favoritisme autour de la Fête des Lumières

D’après des informations du Monde, des tractations auraient eu lieu lors de l’édition 2018 de la Fête des Lumières, à Lyon, pour favoriser le projet du scénographe Damien Fontaine.

A trois jours d’une conférence de presse de présentation sur la grande fête lyonnaise, c’est une information qui fait désordre. Ce jeudi 5 novembre, Le Monde révèle que des soupçons de favoritismes pèseraient sur une précédente édition de la Fête des Lumières, à Lyon.

Une enquête préliminaire, auquel le quotidien a eu accès, relève des tractions au cours de la passation du marché public qui auraient permis de favoriser un artiste au détriment d’un autre, pour l’édition 2018.

Le scénographe Damien Fontaine et son producteur, Sébastien Salvagnac, sont suspectés d’avoir modifié leur projet pour remporter le lot réservé à l’animation de l’emblématique colline de Fourvière, en bénéficiant d’informations privilégiées. Un lot qui pèse autour de 200 000 euros TTC.

Fête des Lumières à Lyon : une triche pour s’adapter à des demandes « politiques »

Des éléments du dossier de Milosh Luczynski, artiste concurrent, auraient été subtilisés pour le dossier de Damien Fontaine, ayant finalement remporté le lot.

Ce dernier aurait échangé avec Jean-François Zurawik figure historique de la fête des lumière et responsable de la direction des événements et de l’animation de la ville de Lyon, pendant la période de consultation, au mépris des règles du marché public.

Le directeur aurait incité Damien Fontaine à changer son projet pour qu’il réponde aux attentes de « la hiérarchie »

« Notre mission, ce n’est pas de la décoration, c’est un engagement artistique. Comment peut-on modifier un projet à la demande des politiques ? », s’agace Milosh Luczynski, le plasticien perdant, à propos de cette tractation.

Des questions sur plusieurs Fête des Lumières de Lyon

Du côté de Damien Fontaine et de son producteur, on estime que Jean-François Zurawik a pu puiser l’inspiration chez ses concurrents à leur insu. Le directeur n’est plus là pour se défendre. Il est soudainement décédé en octobre 2020, peu avant sa garde à vue.

Des liens entre les deux hommes, notamment le rachat par Damien Fontaine d’une société de Jean-François Zurawik, en redressement judiciaire, poussent les juges à s’interroger sur une proximité sur le plus long terme. Des faits qui pourraient amener à des interrogations sur d’autres éditions de la Fête des Lumières.

Des élus pas considérés comme responsables

Pour l’instant, aucun élu n’est concerné par l’enquête. Ce qui ne satisfait pas la partie civile.

« Aucun n’a été entendu, précise Charlotte Grundman, avocate de la partie civile, interrogée par le quotidien. Or, la collectivité avait en charge le respect des règles de ce marché public. Nous ne voulons pas que certains servent de fusibles. »

A l’époque aux manettes de la ville, Georges Képénékian, alors maire de Lyon, Loïc Graber, ancien adjoint à la culture, ou encore Yann Cucherat, adjoint aux sports et aux grands événements, pourraient être concernés.

La procédure d’enquête préliminaire laisse aux mis en cause jusqu’au 20 décembre pour formuler des observations. Le parquet décidera ensuite des suites judiciaires à donner.

Le procès de sept antifas à Lyon : récit d’une affaire bancale

Le procès de sept antifas à Lyon : récit d’une affaire bancale

Ce jeudi 4 novembre, c’était le procès de sept militants antifas, accusés d’avoir commis des violences sur des membres de Civitas lors d’une manifestation anti-pass sanitaire fin août à Lyon. Récit d’une affaire bancale qui s’est soldée par une relaxe pour trois d’entre eux.

« Monsieur, le 28 août 2021, à Lyon, vous êtes accusé d’avoir commis des violences n’ayant entraîné aucune ITT, sur une personne non identifiée. »

Par cette phrase, la présidente du tribunal donne le coup d’envoi d’une audience qui durera près de dix heures. Elle résume aussi toute la minceur du dossier dont il est question, qui n’a pas empêché le parquet de Lyon de s’en auto-saisir.

Ce jeudi 4 novembre, sept hommes sont accusés d’avoir porté des coups à des militants de Civitas, un parti politique catholique intégriste, lors de la manifestation anti-pass sanitaire du 28 août dernier. Cette rixe n’a cependant été suivie d’aucune plainte du côté des victimes présumées. Pour les cinq avocats de la défense, l’affaire est symptomatique d’un dysfonctionnement de la justice, en particulier à Lyon.

Rixe entre les antifas et Civitas : qui a commencé ?

La salle d’audience du tribunal est pleine à craquer. Famille, amis, sympathisants venus soutenir les sept accusés qui passent en comparution immédiate à délai différé. Trois d’entre eux font leur apparition dans une cage en verre, escortés par les forces de l’ordre. Depuis leur interpellation le 21 septembre dernier, ils dorment en prison dans le cadre d’une détention provisoire. Les quatre autres ont été laissés libres suite à leur garde-à-vue, et placés sous contrôle judiciaire.

Deux des accusés, la petite vingtaine, semblent particulièrement mal à l’aise sur les bancs de la salle d’audience, encadrés par leur famille. Dans le box en verre, deux autres prévenus ont une trentaine d’années tandis que le troisième a la cinquantaine bien tassée. Avec ses cheveux blancs et son gilet en maille, il se démarque des autres accusés en jeans et vestes de survêtement.

Pour comprendre comment ces sept hommes, qui ne semblent pas avoir grand-chose en commun, ont atterri au tribunal correctionnel de Lyon, il faut remonter au 28 août dernier.

Ce jeudi 4 novembre, sept antifas passent en procès au tribunal correctionnel de Lyon.
Ce jeudi 4 novembre, sept antifas comparaissaient en procès au tribunal correctionnel de Lyon.Photo : Léo Germain/Rue89Lyon

Ce jour-là , deux manifestations anti-pass sanitaire défilaient dans les rues de Lyon, l’une plutôt fréquentée par des militants de gauche et des Gilets jaunes, l’autre par des groupes aux tendances droitières. Quelques incidents classiques en manifestation ont été rapportés par les forces de l’ordre sur le premier cortège.

Rue Sala, vers 17h30, une bagarre éclate entre différentes personnes. Difficile de dire ce qu’il s’est passé, mais les sept hommes présents à la barre sont accusés d’avoir porté, qui des coups de pied, qui des coups de poing, à trois militants de Civitas. Interrogés les uns après les autres, les accusés ne nient pas les violences, mais expliquent tous avoir réagi ainsi pour se défendre de ces mêmes militants de Civitas.

A.F. est le premier à être interrogé. Derrière la vitre du box, sa voix se casse quand il prend la parole.

« Il y avait deux manifestations contre le pass sanitaire. Je me suis rendu à celle qui était plutôt de gauche, l’autre je ne voulais pas y aller à cause de la présence de groupes complotistes et d’extrême droite. Ça s’est très bien passé, j’y suis allé avec mes petites sœurs. »

Jusqu’à ce que A.F. aperçoive un jeune homme arborant des stickers de Civitas.

« Civitas est un groupe antisémite, raciste et homophobe. C’est pas des opinions qu’ils ont, c’est des délits ambulants. J’ai demandé à l’homme de partir. Il a rigolé et m’a dit d’aller me faire foutre. Là, deux autres personnes m’ont saisi par les bras et il a essayé de me donner un coup de poing. C’est à ce moment-là que j’ai décidé de me défendre. »

Le deuxième jeune homme à passer à la barre, L.B., raconte des faits presque similaire. Il s’exprime d’une voix claire et assurée, ses lunettes et ses vêtements sobres achevant de lui donner un air de premier de la classe.

« J’ai vu un groupe de personnes qui hurlaient le slogan antisémite « Qui ? ». Je suis de famille juive. Pour moi, entendre ce slogan dans l’espace public est intolérable. Je ne l’ai pas aujourd’hui, mais normalement je porte une étoile de David en pendentif. Ces personnes m’ont traité de sale Juif et m’ont frappé plusieurs fois. »

S’ils s’expriment avec moins d’assurance, les cinq autres accusés, A.D., M. B., M. H., H. Q. et T. S. racontent la même histoire.

« Quand je suis arrivé, il y avait de la bagarre, explique le plus âgé, T. S. Il y avait un gros avec une couette, là, j’ai dû me défendre. Je lui ai mis une patate. Sinon, me bagarrer, c’est pas trop mon délire. »

Une vidéo inexploitable et tronquée dans le dossier

Systématiquement, la réponse de la présidente du tribunal est la même : « On ne voit pas ça. » Elle a sous les yeux les images tirées de la vidéosurveillance de la Ville de Lyon, qui montrent une partie de l’altercation entre les sept hommes et les militants de Civitas.

« C’est parce que ça s’est passé avant ! » lui répondent invariablement les accusés.

Les avocats de la défense expliquent avoir tenté de visionner la copie de cette vidéo qui leur a été envoyée, en vain. La présidente décide d’essayer à son tour. Sur l’écran du tribunal, s’affiche ce message sans appel : « Votre média ne peut pas être ouvert. »

Une vidéo publiée sur les réseaux sociaux, qui n’a pas été utilisée lors du jugement, montre le début de la rixe. On y voit distinctement un militant de Civitas, reconnaissable à sa chemise blanche, envoyer des coups de pied dignes d’un film d’arts martiaux à A.F. notamment.

Le cas de cette vidéo n’est pas le seul élément troublant de ce dossier. Les avocats de la défense font également remarquer que l’officier de police judiciaire qui a ouvert une enquête suite à la rixe du 28 août n’a pas jugé bon d’en avertir le parquet immédiatement. Il aurait attendu trois jours avant de le faire. Ce même policier aurait ensuite contacté un certain D.B. de Civitas, une des victimes présumées, qui lui aurait affirmé ne pas souhaiter porter plainte et vouloir rester anonyme. Mais ce dernier n’a pas été entendu. Pendant cette enquête, les données de géolocalisation des téléphones des sept accusés ont été utilisées, y compris dans le courant du mois de septembre.

Quant aux perquisitions faites à leurs domiciles, les avocats de la défense questionnent l’absence dans le dossier de la requête du Ministère public à ce sujet.

« Cette enquête a été faite en roule libre, en dehors de tout contrôle du parquet », conclut Olivier Forray, l’avocat de quatre des accusés.

« Appartenez-vous au GALE ? »

Régulièrement, une question revient dans la bouche de la présidente :

« Appartenez-vous à un groupe ? Appartenez-vous au GALE ? Qu’est-ce que ça signifie, dites-le moi ? »

« Le GALE », pour Groupe antifasciste Lyon et environs, est une organisation antifasciste d’extrême gauche bien connue à Lyon. Les sept accusés nient toute appartenance à celle-ci mais revendiquent leur antifascisme. Dans le téléphone de l’un d’eux, M.B., des vidéos et des photos antifascistes sont retrouvées, ainsi que des autocollants antifascistes à son domicile. Dans la chambre d’un autre, H.Q., deux livres sur l’anarchisme ont été retenus comme éléments à charge. Cette insistance du tribunal sur la supposée appartenance des accusés à un groupe antifasciste n’échappe pas aux avocats de la défense.

« L’idée de l’antifascisme n’est interdite nulle part, rappelle Agnès Bouquin, avocate de quatre des accusés aux côtés de Olivier Forray. C’est la construction même de notre démocratie. C’est le préambule de la Constitution de 1946. On est tous antifascistes. Evidemment. »

« Exprimer des idées fascistes est puni par le code pénal, insiste Amandine Fabrègue, avocat de A.D. On ne peut pas uniquement mettre dos à dos deux groupes avec des convictions qui se vaudraient. L’un des deux a des convictions interdites par la loi que nous tentons de faire respecter. »

Un rassemblement de soutien était organisé ce jeudi 4 novembre à côté du tribunal judiciaire de Lyon, pour le procès de 7 antifas accusés d'avoir commis des violences sur des membres de Civitas.
Un rassemblement de soutien était organisé ce jeudi 4 novembre à côté du tribunal judiciaire de Lyon, pour le procès de 7 antifas accusés d’avoir commis des violences sur des membres de Civitas.Photo : OM/Rue89Lyon

Le procureur de la République a déroulé un court réquisitoire. A plusieurs reprises, il utilise les termes « un déchaînement de violences » pour qualifier les faits qui se sont déroulés le 28 août dernier. Redressant la tête, il conclut son propos par cette affirmation :

« La loi aussi s’oppose aux pensées racistes, homophobes et antisémites ! »

A ces mots, la salle d’audience explose de rire.

« Il y a un déficit d’instruction civique majeur dans cette salle », s’écrie le procureur d’un ton courroucé.

Les rires s’éteignent bien vite quand il annonce les sanctions qu’il requiert à l’encontre des sept accusés. Pour tous il demande des peines de prison qui vont de deux mois avec sursis pour L.B. à 1 ou 2 ans de prison ferme et un retour en cellule dès ce soir pour les trois accusés dans le box en verre, dont A.F.

« C’est complètement délirant ! s’emporte le père du jeune homme, les larmes aux yeux. Quand on compare aux violences commises par l’extrême droite… C’est un procès politique qui n’aurait pas dû être jugé ici ! »

« Qu’est-ce qui se passe à Lyon ? L’antifascisme y est devenu un crime ! »

Dans leur plaidoirie, les cinq avocats de la défense dénoncent tous un dossier « bancal » et « mal ficelé ».

« Cette procédure ne fait pas honneur à la justice, tacle Amandine Fabrègue. On a trois victimes qui ne se considèrent pas comme telles, elles ne portent pas plainte et il n’y a pas d’ITT. On accepte que l’identité de ces trois personnes de Civitas soit tenue secrète, on ne les entend pas. Il y a une définition des agresseurs et des victimes qui a été faite de façon arbitraire par les services de police. C’est une enquête totalement à charge, qui ne permet pas de faire émerger la vérité. »

« Je trouve ça insultant envers vous, que des policiers se sentent autorisés à vous faire voir ce qu’il faut que vous voyez ! » renchérit Carine Monzat, l’avocat de T.S., le doyen des accusés.

Car c’est bien là que réside le problème majeur de ce dossier, selon les avocats : ils accusent les policiers d’avoir sciemment escamoté une partie de la vérité sur les faits en ne transmettant au parquet que des morceaux choisis de la vidéosurveillance de la Ville de Lyon.

« Il y a un désagréable sentiment que si vous êtes antifa vous irez au tribunal correctionnel et si vous êtes un facho vous aurez porte ouverte, énonce lentement Olivier Forray. Pourquoi l’égalité devant la loi n’existe pas selon que vous êtes antifa ou d’extrême droite ? C’est un problème lyonnais. »

Pour étayer ses dires, l’avocat énumère les dernières affaires de violences dans lesquelles l’extrême droite s’est illustrée à Lyon :

« La dernière plainte déposée par les gérants de la librairie La Plume noire [attaquée à plusieurs reprises par l’extrême droite, ndlr] a été classée sans suite pour recherches infructueuses. L’avant-dernière plainte est restée dans le tiroir du commissariat. La plainte de la Pinte douce [bar de la Croix-Rousse attaqué par l’extrême droite en décembre 2019, ndlr] a été classée sans suite pour infraction non caractérisée. »

Et de conclure cette longue audience par ces mots :

« Qu’est-ce qui se passe à Lyon ? L’antifascisme y est devenu un crime ! »

Trois relaxes et quatre amendes pour les sept antifas de Lyon

En attendant que la cour rende son verdict, les proches des accusés tournent anxieusement en rond dans le hall du tribunal, alternant les allers-retours aux toilettes crasseuses du tribunal et les cafés arrachés à grand peine de distributeurs poussifs. Ils craignent que les accusés écopent de mois de prison ferme.

Quand la cour fait de nouveau son apparition dans la salle d’audience, les conversations, les bruits de mastication et les froissements de papiers cessent immédiatement. Toute la salle semble retentir son souffle quand la présidente prend la parole.

Elle a retenu deux exceptions de nullité concernant la réquisition de la vidéosurveillance auprès du Centre de supervision urbaine de la Ville de Lyon et l’utilisation des données de géolocalisation. Ce qui a annulé la plupart des PV.

Soudain, un tonnerre d’applaudissements fait vibrer les murs de la salle d’audience, et les cris de « Lyon ! Lyon ! Antifa ! » résonnent. Pour trois accusés, H.Q., M.B. et A.D., c’est la relaxe totale. Les quatre autres sont déclarés coupables de violences n’ayant entraîné aucune ITT et condamnés à payer une contravention de 4e classe, à savoir 300 euros. A.F. et L.B. écopent en plus d’un mois de prison avec sursis chacun, respectivement pour avoir refusé de donner le code de déverrouillage de son téléphone portable pour l’un, et pour avoir refusé un prélèvement ADN pour l’autre. Les sept accusés écoutent le détail des peines d’une oreille distraite. Sous les masques, on devine de larges sourires.

#Civitas

A Lyon, polémique autour de l’avenir d’Interpol

A Lyon, polémique autour de l’avenir d’Interpol

Mercredi, le ministre de l’Interieur, Gérald Darmanin, a appelé les collectivités locales à mettre l’argent nécessaire pour garder le siège d’Interpol – l’organisation internationale de police – à Lyon. Une demande qui en a fait grincer plus d’un, dont le maire de Lyon, Grégory Doucet.

Cela ne va pas mieux entre Gérald Darmanin (LR) et Grégory Doucet (EELV). Après les récentes tensions autour de la question de la vidéo-surveillance à la Duchère, le ministre de l’Intérieur a demandé au maire de Lyon, au président de la Métropole de Lyon et au président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes d’investir massivement pour éviter le départ d’Interpol.

Dans un courrier, également relayé par le Progrès, le ministre demande aux collectivités de mettre les fonds nécessaires pour l’extension des locaux de la police des polices. L’institution, qui comptait 250 agents en 1989, en accueille aujourd’hui 700 à Lyon. Selon le ministre, il est prévu qu’un tiers de l’investissement soit pris en charge par l’Etat, le reste relevant, selon lui, des collectivités. Autrement, Interpol pourrait quitter Lyon et la France.

Interpol : des élus de Lyon pointent les oublis du ministre de l’Intérieur

L’annonce n’a pas plu au maire de Lyon. Toujours dans le Progrès, ce dernier s’est agacé d’avoir reçu la lettre du ministre après la presse. « Tout cela relève soit de l’amateurisme soit du coup de com’ », lâche-t-il chez nos confrères.

Il pointe que la Ville de Lyon garantit déjà la mise à disposition du terrain pour l’organisation internationale. De plus, il craint que la future présidence d’Interpol ne porte préjudice à l’institution.

En cause : la candidature d’un général emirati, accusé de torture. En novembre 2020, Médiacités révélait ainsi que le général Ahmed Nasser Al-Raisi était le seul candidat à la présidence d’Interpol. Or, ce dernier est sous le coup d’une plainte pour actes de torture et complicité de ces actes devant le pôle crime contre l’humanité du parquet de Paris. Même si la tchèque Šárka Havránková a annoncé sa candidature depuis, il est toujours vu comme un des favoris pour prendre les rênes de l’institution.

« Incroyable, le ministre de l’intérieur se préoccupe d’Interpol, a ainsi réagi le député Hubert Julien-Laferrière (Génération écologie). Pour s’inquiéter de la probable élection d’un tortionnaire à sa présidence ? Non… Pour demander des millions à la ville de Lyon et à la Métropole. »

La Région en soutien au ministre de l’intérieur

Côté Région, Laurent Wauquiez (LR) a lui décidé de soutenir le ministre dans sa démarche se disant prêt à mettre les fonds nécessaires, à part égale avec la Ville et la Métropole de Lyon, dans cet investissement.

Reste à connaître son montant exacte. Il pourrait s’agir de 40 millions d’euros, selon des informations remontant à Gérard Collomb. L’actuel maire de Lyon déclare lui que le coût de l’investissement total n’est pas encore connu. Il demande un « dossier sérieux » pour pouvoir décider de la participation, ou non, de la ville au projet.

Les élus vont avoir peu de temps pour débattre sur le sujet. Le ministre a annoncé vouloir une réponse avant le 23 novembre. Pas certain que ce laps de temps suffise à convaincre tout le monde. La Métropole de Lyon n’avait pas encore réagi à la suite du courrier de Gérald Darmanin.

#Interpol

« Comment ça se fait que 50 fafs traversent Lyon un samedi soir ? »

« Comment ça se fait que 50 fafs traversent Lyon un samedi soir ? »

[Témoignage] Dans la nuit du samedi 23 octobre, la soirée de Jean, 26 ans, a viré au cauchemar quand il a croisé la route d’une cinquantaine de militants d’extrême droite en rentrant chez lui, à la Croix-Rousse.

« Je m’appelle Jean (le prénom a été modifié), j’ai 26 ans. J’habite à la Croix-Rousse depuis que j’ai 18 ans. J’ai grandi dans un quartier populaire. Je ne suis pas militant mais je suis assez réceptif aux problématiques d’immigration, d’identité nationale etc. Je ne suis pas du tout politisé mais j’ai quelques potes qui sont dans les mouvances d’extrême gauche. Ça m’arrive assez régulièrement de faire des manifs.

Samedi 23 octobre, je travaillais et je n’étais pas du tout au courant qu’il y avait une manif contre l’extrême droite. Vers minuit, je suis sorti d’un restaurant pour rejoindre une amie rue Pouteau, dans les pentes de la Croix-Rousse. J’étais à l’angle de cette rue quand j’ai vu débarquer 50 mecs super vénères qui allaient en direction de la place Colbert. Je les ai trouvés assez jeunes, environ 20 ans. J’ai tout de suite su que c’était des fafs, des militants d’extrême droite, personne d’autre ne monte vénère comme ça, à 50, à la Croix-Rousse.

Je me suis mis à les suivre parce que j’ai souvent des potes qui traînent place Colbert, dont un qui s’est fait agresser cet été par des fafs qui zonaient là-bas.

place Colbert Croix-Rousse Lyon extrême gauche antifas extrême droite
La place Colbert, traditionnel lieu de rassemblement des antifas des pentes de la Croix-Rousse.Photo : LB/Rue89Lyon

« Le mot « ratonnade » m’est vraiment venu à l’esprit »

Quand les fafs sont arrivés sur la place, il n’y avait personne. Ils ont commencé à invectiver les gens qui étaient là. J’étais à quelques mètres derrière eux, au téléphone. J’ai averti les gens qui étaient en terrasse, qui ne comprenaient pas. Je leur ai dit que c’était des fafs. J’aime beaucoup mon quartier, j’avais envie de protéger les gens qui étaient dans la rue. J’avais peur que quelqu’un se fasse agresser comme mon pote cet été.

Ensuite, j’ai eu beaucoup de chance. L’amie que j’avais plantée à l’angle de la rue Pouteau m’avait suivi en voiture. Au moment où les fafs ont commencé à se diriger vers moi avec véhémence, je suis monté dans la voiture et on s’est barrés. Je suis descendu de voiture un peu plus haut.

Je suis retourné place Colbert, pour voir si les fafs étaient encore là. Ils avaient formé des petits groupes et ils étaient partis. De la place Colbert, je les voyais par groupes de deux ou trois dans les rues adjacentes, avec des gens qui les insultaient par leurs fenêtres. Le mot « ratonnade » m’est vraiment venu à l’esprit. Ils étaient vraiment en train de faire la chasse à des gens, dans un quartier de Lyon, un samedi soir à minuit…

vidéo extrême droite Croix-Rousse Lyon
Samedi 23 octobre, des militants d’extrême droite se sont filmés en train de sillonner les rues de la Croix-Rousse. Capture d’écran de la vidéo publiée sur « Ouest Casual » le 27 octobre.

« Ils venaient de planter un gamin ! »

Je suis redescendu vers chez moi, plus bas, et là j’ai croisé un gamin qui venait de se faire planter. Il avait du sang de partout, il était soutenu par deux copines à lui. C’était impressionnant mais pas très grave. Il m’a raconté qu’il avait croisé des fafs, qu’il était un peu bourré, qu’il leur avait fait une réflexion et qu’eux avaient sorti une lame et l’avaient planté. Il devait avoir 18 ans, c’était un mec lambda.

J’étais vraiment énervé. Ils venaient de planter un gamin ! Je ne savais pas comment ça allait se finir cette nuit. Je ne me voyais pas rentrer chez moi. J’ai demandé au gamin où ça s’est passé. Il m’a indiqué une épicerie plus haut, j’y suis allé et je suis tombé sur trois fafs. Je les ai trouvés vraiment très jeunes, entre 16 et 18 ans, ça m’a choqué. Je me suis un peu embrouillé avec deux d’entre eux. J’en ai poussé un qui est allé heurter le mur. Le troisième a immédiatement sorti une lame. Je me suis dit que ça devait être celle avec laquelle il avait planté le gamin. Je me suis barré.

« Comment ça se fait que 50 fafs traversent les deux quartiers les plus fréquentés de Lyon, un samedi soir à minuit ? »

Le lendemain, j’avais le nez qui saignait donc j’ai dû prendre des coups mais je ne m’en souviens pas. Ça ne m’est pas venu à l’esprit d’aller porter plainte. Je n’ai pas confiance en la police, je n’aime pas aller la voir. Le gamin qui s’est fait planter, par contre, je lui conseille d’aller porter plainte. Il n’y a pas que des fafs et des antifas qui se tapent dessus, il y a aussi des gens qui n’ont rien à voir qui se font agresser.

Comment ça se fait que 50 fafs à moitié cagoulés, à moitié encapuchonnés, habillés tout en noir, traversent les deux quartiers les plus fréquentés de Lyon, un samedi soir à minuit ? Ils ont traversé Saint-Paul, la place des Terreaux, ils sont passés devant tous les pubs… C’est les endroits où il y a le plus de caméras à Lyon ! On repère des vols de téléphone mais pas une masse de 50 personnes comme ça ? C’est quand même bizarre.

Samedi, les fafs sont rentrés dormir tranquillement chez eux en se demandant quand est-ce qu’ils allaient revenir.

Moi, j’ai peur pour mon petit frère qui a le même âge que le gamin qui s’est fait planter. Qui sait s’il n’aurait pas fait la même réflexion et pris un coup de couteau, voire pire ?

J’ai l’impression que les violences de l’extrême droite, c’est pire qu’avant. Cet été, ils ont passé un cap. Il y a toujours eu des bagarres entre fafs et antifas mais là, ça touche des gens qui n’ont rien à voir. Quand tu rentres dans la Jeune garde ou dans une équipe comme ça, tu sais à quoi t’attendre, tu sais quels risques tu prends. Cet été, il suffisait d’être rue Mercière, en train de regarder un match tranquille avec ses potes pour tomber sur 50 fachos qui agressent tout le monde. Quand tu sors dans un bar d’une rue commerçante de Lyon, tu n’es pas censé te préparer à une bagarre.»

Qui pour acheter la paire de baskets Nike floquées « Lyon » ?

Qui pour acheter la paire de baskets Nike floquées « Lyon » ?

Est-ce bien ou mal de vouloir posséder cette nouvelle paire de sneakers lancée par Nike ? Elle affiche un « Lyon » floqué en toutes lettres sur le talon et la languette, et une vieille devise de la ville traduite en anglais dans la semelle de propreté. Chez d’ancien·nes élu·es de la Ville de Lyon, notamment, qui n’ont de cesse de clamer leur amour pour la ville, le débat a émergé sur les réseaux sociaux.

« Une paire de chaussures produites localement, sobres ? Non, pas du tout. Pour prendre l’argent des lyonnais il y a du monde chez Nike. Où on préfère exploiter des gens pour pas cher dans des pays défavorisés puis faire voyager ensuite ces chaussures et les revendre le prix de plus de deux jours de travail au SMIC français. Après le greenwashing, le localwashing », s’indigne un élu de l’aire Gérard Collomb.

Une de ses acolytes politiques de lui répondre :

« Et alors ? Ne porte plus rien car rien n’est fait ici ! Moi je vais me les acheter juste pour le magnifique nom de Lyon ! »

Rien de bien neuf sous le soleil lyonnais si ce n’est le cuir de cette nouvelle sneaker. Le débat qui agite gentiment le microcosme de certains profils Facebook locaux reste le même que celui qui pourrait traverser à peu près le monde entier : acheter les produits du géant Nike est-il éthique, admissible ou pas ?

Pour ce qui est de cette paire de la gamme -souvent qualifiée de culte- « Air Max Big Window » », c’est la boutique Shoez Gallery (dans le 1er arrondissement), bien connue des fanatiques de baskets à Lyon et au-delà, qui la vendra, en plus du site internet du fabricant.

Rue89Lyon s’était fait le relais d’un podcast passionnant portant sur la bulle spéculative qui se crée autour des sneakers. Hystérie mercantile dont cette boutique lyonnaise, positionnée de longue date sur le marché, a témoigné auprès de la journaliste (lyonnaise elle aussi).

« De Perrache à Pardav. À Marius Berliet sans tes lacets »

La basket Air Max "Big Window" floquée "Lyon". DR
La basket Air Max « Big Window » floquée « Lyon ». DR

La paire en question sera mise en vente à partir de ce vendredi 5 novembre, pour la somme de 140 euros.

Quatre villes ont par ailleurs été choisies par le géant des vêtements de sport, pour que leur nom soit floqué sur cette gamme « édition limitée » de sneakers : Pékin, Rotterdam, Los Angeles et Lyon. Unique ville française, donc.

Shoez Gallery, reine du marketing et de la règle basique d’une offre plus faible que la demande, a repris des codes culturels et topographiques sensibles à Lyon pour qui les connaît :

« On en a tous rêvé. On l’a tous imaginée à nos pieds, depuis 30 ans. Grands frères, mecs en bas des blocs : la paire des grands. De Perrache à Pardav. Des Minguettes à Gratte-Ciel. De Vaulx à Gerland. En bas des tours en complet Nike. L’icône de la street et sa Grosse Bulle. À Marius Berliet sans tes lacets. […] 69 LA TRIK PELO. »

La boutique lyonnaise Shoez Gallery écrit une ode « street », en version locale, à la marque.

On peut déjà parier que la boutique devrait à peu près mettre douze minutes et demi à vendre son stock de chaussures.

À Lyon, les anciens cadres du RN rejoignent Eric Zemmour

À Lyon, les anciens cadres du RN rejoignent Eric Zemmour

[Info Rue89Lyon] Plusieurs anciens cadres locaux du Rassemblement national ont pris des postes à responsabilité dans l’équipe de campagne 2022 d’Éric Zemmour à Lyon et en Auvergne-Rhône-Alpes. Ils avaient été mis à l’écart du parti de Marine Le Pen pour leur proximité avec Marion Maréchal, plus proche du polémiste et des identitaires que de sa tante.

« Le trio qui a coulé la Fédé RN du Rhône débarque chez Zemmour ! », déplore un ancien adhérent de l’association « Les amis d’Éric Zemmour ».

Les ex-cadres du RN remplacent les « zemmouristes » de la première heure

Ce partisan de Zemmour « de la première heure, lorsqu’il était à 3% dans les sondages », a souhaité garder l’anonymat.

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