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À Lyon : les victimes de fake news « fonctionnent comme tout le monde »

À Lyon : les victimes de fake news « fonctionnent comme tout le monde »

Valentin Guigon mène des recherches sur la capacité des gens à identifier ou non des fake news à Lyon. Le chercheur détricote les raisons qui poussent des internautes à croire aux fausses informations. Spoiler : il semblerait que tout le monde puisse tomber dans le panneau. Entretien.

Valentin Guigon est doctorant à l’Institut des sciences cognitives Marc Jeannerod (ISCMJ) et au Groupement d’analyse et de théorie économique (GATE) de Lyon. Sous la direction de Jean-Claude Dreher et Marie-Claire Villeval, il mène des recherches sur la capacité des personnes à identifier les fake news.

D’après ses premières conclusions, il semblerait que nous soyons tous et toutes aussi nul·les les un·es que les autres pour arriver à déterminer si une information (d’actualité) est vraie ou fausse. Et ce, quelque soit notre niveau d’études, nos opinions politiques ou notre âge, sexe, etc.

Il semble que cette incapacité à identifier les fake news soit particulièrement marquée lorsque les informations sont ambiguës. Or, accorder du crédit à des fake news débouche sur la construction de fausses croyances qu’il est ensuite difficile de démonter.

Tout ça pourrait expliquer en partie le succès de thèses plus ou moins farfelues sur le covid-19 ou les vaccins qui circulent allègrement sur les réseaux sociaux. Entretien.

Rue89Lyon : Comment définir une croyance ?

A Lyon, Valentin Guigon mène des recherches sur la capacité des gens à identifier ou non des fake news. Elles peuvent toucher tout le monde.
Valentin Guigon effectue des recherches sur les fake news à Lyon.Photo : Valentin Guigon

Valentin Guigon : Une croyance (en épistémologie), c’est une attitude selon laquelle une proposition sur le monde est plus ou moins vraie. On la vérifie par l’expérience ou par les théories. En recherche, on part du principe qu’on ne peut pas connaître l’état du monde jusqu’au fond du cosmos.

« La connaissance, en soi, c’est une croyance parce qu’on ne peut pas être sûr objectivement à 100% »

Par conséquent, nous ne faisons que des inductions, c’est-à-dire arriver à une théorie générale à partir d’éléments très spécifiques. Mais rien ne dit que demain quelque chose ne viendra pas falsifier nos hypothèses. Donc, la connaissance, en soi, c’est une croyance parce qu’on ne peut pas être sûr objectivement à 100 %.

Depuis quand est-ce qu’on s’intéresse aux fausses croyances ?

Des recherches existent depuis très longtemps chez les libraires et les bibliothécaires. Depuis probablement la Seconde guerre mondiale, voire avant, ils se sont demandés s’il fallait montrer, ou non, les fausses informations. Après la guerre, ils ont fait le choix conscient de continuer à les montrer. Selon eux, choisir de ne pas les montrer était une forme de propagande.

« Les gens ne sont pas très bons pour déceler les fausses et les vraies informations »

Vous menez des recherches sur la capacité des personnes à identifier des fake news, qui sont à l’origine de ces fausses croyances. Que constatez-vous ?

J’ai pris des informations « débunkées » sur le fact check de l’AFP, sur Les Décodeurs du Monde et sur Check News de Libération. J’ai 48 informations vraies et 48 fausses. J’ai environ 150 personnes réparties sur deux études qui sont représentatives de la population et je leur demande d’évaluer si les informations sont vraies ou fausses.

Ce qu’on trouve, c’est que les gens ne sont pas très bons pour déceler les fausses et les vraies informations, même s’ils sont un peu meilleurs pour déceler les vraies. Ils arrivent à déceler environ 60 % des informations justes et 40 % des fausses. Ils ne peuvent pas savoir si elles sont toutes vraies ou fausses, ils émettent un jugement à partir de leurs croyances préalables. En moyenne, les gens sont aussi doués que le hasard. Ils pourraient lancer une pièce, ce serait aussi efficace pour savoir si une information est vraie ou fausse.

Y a-t-il un profil type de personnes qui auraient plus de mal à déceler les fausses informations que les autres ?

Non. Ni l’éducation, ni l’âge, ni le sexe… C’est un profil assez commun. On a du mal à évaluer des informations parce qu’elles sont variées, parce qu’on a une expertise dans un domaine mais pas dans un autre…

« Ce qui explique que les gens se trompent (…) c’est l’ambiguïté »

Les gens qui tombent dans le panneau ne sont donc pas plus stupides que la moyenne ?

Non, pour moi c’est clair que non. Ils fonctionnent comme tout le monde. Je pense qu’ils se font avoir par leurs croyances, mais on est tous susceptibles de tomber dans une secte. C’est des gens comme tout le monde. On a tendance à ne pas vouloir le voir. Ce qui explique que les gens se trompent quand ils doivent déterminer si une information est vraie ou fausse, c’est l’ambiguïté.

Comment pouvez-vous déterminer si une information est ambiguë ?

Ça peut être l’ambiguïté sur la source de l’information. Par exemple, pour dire si les informations sont vraies ou fausses, il y a deux critères.

Premièrement : savoir à quel point il y a une volonté de tromper le lecteur. La satyre, par exemple, déforme les informations pour faire rire mais personne n’est dupe alors que la publicité, c’est plus dur à déceler. Il y a une volonté de tromper par le marketing.

Deuxièmement, il faut savoir à quel point l’information correspond à la réalité objective du monde. Forcément, les informations qui correspondent le moins sont celles qui sont le mieux identifiées comme fake news.

Lors d’une expérience, nous avons demandé à 11 personnes si elles jugeaient une information particulièrement ambiguës, ou non. Nous avons pu constater que des informations comme « Il existe des primes de retour pour les migrants » ou « Le terme de « féminicide » a une utilité sur le plan juridique mais peut brouiller les pistes » sont particulièrement ambiguës. Des informations comme « Le système de vote le plus fréquent en Europe est le « vote préférentiel », consistant à classer des candidats par ordre de préférence » ou « Au Danemark, 23% des aliments vendus dans les supermarchés sont bio, le taux le plus élevé du monde selon le gouvernement danois » sont jugées beaucoup moins ambiguës. 

Fake news : « Comme le monde est incertain (…) on va avoir d’autant plus besoin de se positionner »

Des scientifiques et des médias démontent pourtant régulièrement des fake news mais celles-ci continuent à circuler et les gens à y croire. Comment est-ce que cela s’explique ?

On peut d’abord prendre comme angle d’attaque pour comprendre cela la théorie de la dissonance cognitive (Léon Festinger, 1957), qui date des années 50. Elle suit le raisonnement suivant : Pierre aime le foot et sa femme, Marie, mais Marie, elle, n’aime pas le foot. Pierre doit résoudre ce dilemme parce qu’il y a une espèce de dissonance cognitive donc il va modifier ses attitudes et ses opinions, soit en déclarant qu’il n’aime plus Marie, soit qu’il n’aime plus le foot. Ça peut expliquer le fait que des gens cherchent à résoudre ce dilemme en éliminant une partie des sources, pour ne garder que les sources qui confortent leur opinion.

Je ne suis pas trop partisan de cette théorie. Je pense qu’il y a des manières plus simples de l’envisager. Globalement, le monde est assez incertain. Dans ma recherche, si on demande aux gens de dire si une information est vraie ou fausse, ils doivent dire à quel point ils sont sûrs de leur réponse. Le premier point, c’est qu’on trouve que les gens n’évaluent pas très bien. Qu’ils disent être sûrs de leur réponse à 10 %, 30 % ou 90 %, c’est pareil. Ils ont du mal à estimer et à prédire les événements.

Comme le monde est incertain, d’autant plus en ce moment avec le Covid, on a du mal à estimer la probabilité que les événements se déroulent. Mais, comme il est incertain, on va avoir d’autant plus besoin de se positionner, donc d’extrémiser notre confiance en notre jugement. Là où on devrait se dire qu’on n’est peut-être pas sûr de son jugement, les gens vont dire qu’ils sont très sûrs de leur jugement parce qu’ils ont peut-être besoin de choisir une position.

L’intolérance à l’incertitude est également importante pour expliquer le besoin d’arriver à une conclusion sur un élément, ce qui pousse à négliger le caractère justement incertain des infos qu’on a. Il y a aussi ce qu’on appelle le besoin de clôture : le besoin de clôturer un évènement, d’arriver à une conclusion. Face à une situation incertaine, la recherche d’une conclusion amène à prendre une décision sur un objet qui est incertain, donc pour lequel la conclusion n’est pas assurée.

Quand on est face à une information, on s’attend à un gain de savoir sur le monde de sa part. Une information a donc une valeur « épistémique », soit une valeur informative. La valeur d’une information est liée à sa capacité à réduire l’incertitude sur le monde.

Les individus décident d’aller vers une information ou de l’éviter selon l’incertitude sur le monde qu’ils souhaitent réduire ou conserver. Exemple : j’aime Nike mais Nike emploie des Ouïghours. Je peux désirer maintenir l’incertitude sur Nike et les Ouïghours pour pouvoir continuer de consommer du Nike. 

« Ceux que l’on va voir sur les réseaux, ce sont les extrêmes »

Les réseaux sociaux peuvent-ils avoir un impact ?

Il y a cet effet de réseau que Twitter représente très bien. On fréquente les gens qui sont autour de nous et on attribue plus de poids, plus de valeur à leur discours qu’à ceux qui sont loin de nous. Si on représentait la population sur une courbe de Gauss pour voir où ils se situent sur un spectre politique gauche-droite, on aurait une majorité de gens au centre, qui vont s’identifier de manière moins extrême à des mouvements politiques.

Peut-être que ceux qu’on va voir sur les réseaux sociaux sont aux extrêmes avec des croyances politiques fortes et du coup vont un peu motiver leurs croyances. Ils sont tellement anti-gouvernement, par exemple, que ça les pousse à négliger beaucoup de sources et à s’enfermer dans leur cercle.

A ceci est aussi mêlé l’effet de biais de confirmation. Les dynamiques de réseaux, au niveau social, sont complexes et impliquent généralement nombre de personnes avec lesquelles on est en lien, diversité du réseau, redondance de l’information dans le réseau, force du lien avec d’autres individus du réseau, etc. Toutes ces propriétés font les bulles de réseau où on peut se retrouver piégé dans des informations similaires. On ne verra plus d’opinions ou d’éléments contraires à nos croyances.

Donc si c’est le gouvernement qui donne une information, ils vont systématiquement en prendre le contre-pied parce que c’est le gouvernement qui le dit ?

Si c’est contraire à leurs croyances, oui. On peut être piégés par nos croyances. Il y a plein de gens qui n’ont pas de croyances ou qui n’ont pas de croyances extrêmes, mais ceux dont les croyances sont extrêmes, il faut qu’ils éliminent une partie des sources pour réconcilier ce qu’ils voient de l’environnement avec leurs croyances.

Le gouvernement est une source d’informations. Comme on assigne une crédibilité à une source d’information, si on n’a plus confiance dans le gouvernement, alors on va le décrédibiliser comme source, et décrédibiliser tous les autres éléments qui font partie de son réseau (ex : médecins, OMS, institutions publiques, ONG, etc.). 

On entend dire qu’il y a une crise de confiance dans le gouvernement. Si les gens n’ont plus confiance dans le gouvernement, ils n’auront plus confiance dans d’autres organismes qu’ils rattachent au gouvernement. Une des thématiques qui revient souvent, c’est que les gens qui font de la recherche sont vendus à l’État… Leurs croyances vont faire que s’ils n’ont pas confiance dans le gouvernement, ils ne vont pas avoir confiance dans ce que va dire Emmanuel Macron, ni dans ce que va dire le Conseil scientifique sur le Covid-19, lui-même nommé par le gouvernement.

Sur Twitter, beaucoup d’internautes se sont lancé·es dans des explications virologiques alors qu’ils et elles n’ont aucune formation dans ce domaine. Comment expliquer que certaines personnes leur accordent plus de crédit qu’à des scientifiques ?

Premièrement : parce qu’ils ont une place importante dans leur réseau social. Ils vont donc attribuer à ces sources des attributs positifs (et donc de la crédibilité). Mais, en dehors de ça, à un niveau individuel, c’est quand même très coûteux de se demander pour chaque information si on peut lui faire confiance, si la source est fiable… La solution serait de se dire qu’on ne sait pas parce qu’on n’a pas les éléments suffisants. Mais si on tombe sur une information qui nous dit, par exemple, que le covid n’existe pas, et qu’on avait déjà vu des informations qui disaient cela, le tout va juste être une preuve supplémentaire pour dire que le covid n’existe pas. Ça ne va pas être pondéré par la crédibilité de la source, mais par une personne de plus qui dit la même chose. 

C’est une forme de biais de confirmation. Ce biais se met en place parce que l’éviter est très coûteux. On n’a pas le temps d’adopter une démarche expérimentale, on voit l’information comme une preuve supplémentaire de ce qu’on pensait déjà, cette preuve est d’autant plus forte que la source nous semble crédible. C’est une approche probabiliste : la probabilité que l’info soit vraie augmente avec le nombre de sources qui sont d’accord avec. C’est donc une approche sensée. Le problème c’est que la crédibilité des sources et des informations sont mal évaluées.

Traitement médiatique : « On invite des experts, mais ne sait pas sur la base de quels critères ils le sont. »

Est-ce que le traitement médiatique de cette crise, qui a consisté en un défilé de nombreux spécialistes et des informations en continu, a pu avoir une incidence également ?

Il y a tellement d’informations et ça circule tellement vite qu’on a moins le temps de se poser sur chaque information qu’on voit. Quand on est dans une situation d’incertitude, comment on décide ? Chacun va avoir des heuristiques (des méthodes pour raisonner de manière plus rapide, des automatismes) et des biais de raisonnement. Ils sont optimaux quand il faut réagir vite, dans la vie de tous les jours, par exemple.

En dehors de ces situations, les heuristiques et les biais de raisonnement vont nous entraîner vers un raisonnement qui est inadapté parce qu’on devrait plutôt se poser et réfléchir. Et on ne le fait pas. On se fait un peu avoir et c’est profondément humain.

Il y a un problème dans le traitement médiatique. On invite des experts mais on ne sait pas sur la base de quels critères ils le sont. Leurs prédictions ne sont pas précises, ce qui leur permet de se rattraper lorsqu’ils se trompent. On ne peut pas quantifier leur expertise. Et comme leurs prédictions sont floues voire intestables, on ne peut pas les tenir responsables de leurs prédictions. Il faudrait des experts auquel on peut assigner un degré de crédibilité quantifiable et vérifiable. Enfin, il faudrait les tenir responsables de leurs prédictions ratées. 

Comment se fait-il que le fait que le gouvernement prenne des mesures de plus en plus contraignantes (le pass sanitaire notamment) ne vienne pas remettre en question ces fausses croyances ?

Je pense que ces gens ont déjà résolu le problème. Par exemple, ceux qui pensent que le covid n’existe pas vont décrédibiliser toutes les preuves qui montrent qu’il existe, tout en accordant du crédit à celles qui montrent qu’il n’existe pas.

Exemple avec les vaccins, notamment, il se trouve que ça rapporte, ce qui est vrai, ça c’est objectif. Eux, ils vont se dire que les médecins qui disent que le covid existe, c’est parce qu’ils se font payer pour vacciner les gens, donc ça décrédibilise ce que disent les médecins. Ça renforce leurs croyances. Généralement, face à des informations polarisantes, l’effet que ça peut avoir sur les opinions, c’est de renforcer les opinions de chacun. Ceux qui sont défavorables le seront plus ; ceux qui sont favorables le seront plus aussi. 

Le vaccin ? Un dilemme entre liberté et sécurité

Comment analysez-vous les mobilisations anti-pass sanitaire ? On n’y trouve pas que des personnes qui ont de fausses croyances sur le covid…

Sur YouTube, il y a un vulgarisateur en philo qui s’appelle M. Phi (Thibaut Giraud de son vrai nom). Il s’est penché sur la question des manifestations anti-pass sanitaire et il résumait ça à un dilemme entre la liberté et la sécurité, le fait d’abandonner des libertés pour plus de sécurité. Selon lui, les gens font un calcul et s’ils pensent que le gain sécurité sera trop faible donc ça ne vaut pas le coup d’abandonner sa liberté avec le pass sanitaire par exemple. Cette position me semble très rationnelle.

Le vaccin, c’est une question complexe. Les gens sont frileux donc je pense qu’ils en reviennent à cette position où il faut trancher entre liberté et sécurité. Ça me semble parfaitement humain. C’est la question de ce qu’on veut en tant que société. C’est logique qu’il y a ait un dissensus. C’est normal avec des gens qui appartiennent à plein de mouvements différents, avec des sensibilités politiques différentes…

Le problème, c’est quand il y a des fausses informations qui s’en mêlent et que les gens estiment mal le gain de sécurité qu’on pourrait avoir avec le pass sanitaire par exemple.

« Il faut peut-être reconnaître le caractère incertain de certaines informations »

Comment est-ce qu’on peut encourager des personnes à remettre en question les fake news auxquelles elles croient ?

C’est compliqué. Gordon Pennycook et David Rand ont fait beaucoup d’études pour essayer de trouver des mécanismes pour réduire l’apparition des fake news. Sur Facebook, un dispositif signalait les informations considérées comme non-validées par un fact-checker tiers via une petite pastille rouge. Le signalement a permis de diminuer la croyance des personnes en ces informations-là.

Les informations plus ambigües sont plus difficiles à cerner (donc pas de pastille rouge). Les gens qui ont vu des informations avec la pastille rouge qui indique qu’elles sont sûrement fausses vont moins avoir confiance en celles-ci mais ils vont avoir plus confiance en celles qui n’ont pas la pastille. Ils vont se dire qu’elles n’ont pas été identifiées comme fausses, donc c’est qu’elles doivent être vraies et qu’on peut leur faire confiance. Alors que des fois, c’est simplement qu’on n’arrive pas à déterminer si c’est vrai ou faux. Cette mesure-là avait tendance à diminuer la croyance des gens dans les informations dont on sait qu’elles sont fausses, mais à augmenter leur croyance dans celles dont on ne sait pas si elles sont vraies ou fausses.

Quelles solutions donc ? Peut-être reconnaître le caractère incertains de certaines informations. Ils s’agirait finalement d’accepter de ne pas trancher en faveur d’un jugement ou accepter que le jugement soit temporaire jusqu’au moment où on aura suffisamment de preuves pour trancher. Dans le processus d’évaluation des informations, Pennycook et Rand, avec leurs mécanismes testés sur les réseaux sociaux, se forcent à préciser au maximum les conditions dans lesquelles une affirmation est vraie. C’est peut-être déjà un début. 

Noyades à Lyon : un après-midi avec les sapeurs-pompiers du Rhône

Noyades à Lyon : un après-midi avec les sapeurs-pompiers du Rhône

[Série] Avec le beau temps et la chaleur à Lyon, les envies de baignades sont de retour. Les sapeurs-pompiers plongeurs du Rhône s’entraînent quotidiennement. Ils interviennent une centaine de fois par an en moyenne pour des noyades dans le département. Reportage.

sapeur-pompier sauveteur Rhône
Les sapeurs-pompiers plongeurs se rendent sur la Saône avec leur équipement et leur embarcation.Photo : PL/Rue89Lyon

Le départ est donné sur le quai Rambaud, à proximité de la caserne de Lyon-Confluence. En quelques minutes, cinq sapeurs-pompiers du SDMIS embarquent à bord d’un bateau polyvalent de secours sur la Saône.

Chacun sait ce qu’il doit faire et chaque geste est effectué avec précision.

Cet entraînement rythme le quotidien des sapeurs-pompiers plongeurs de la métropole de Lyon et du département du Rhône. De jour comme de nuit, quelque soit la saison, ils doivent s’exercer au sauvetage.

Ce mercredi 11 août, à la satisfaction générale, le thermomètre dépasse les 30 degrés et il n’y a pas un nuage à l’horizon.

120 sapeurs-pompiers dédiés aux noyades dans le Rhône

Le lieutenant Luc David, chargé de coordonner les cinquante plongeurs et les soixante-dix sauveteurs de surface des sapeurs-pompiers du Rhône met en avant la nécessité de l’entraînement en extérieur :

« Les sapeurs-pompiers plongeurs doivent être prêts à affronter toutes les conditions météorologiques. »

Crâne rasé et lunettes de soleil sur le nez, Luc David a d’abord été un passionné de plongée avant d’en faire son métier. Cet après-midi, c’est lui qui dirige l’exercice, donnant les ordres, sans jamais perdre sa bonhomie.

Le navire des pompiers
Les plongeurs s’équipent se préparent à partir en direction de la passerelle du palais de justice de Lyon.Photo : PL/Rue89Lyon

« La plongée est une spécialité exigeante »

Le moteur du bateau s’arrête face au Palais de Justice des 24 colonnes, sous le regard curieux des Lyonnais sortis profiter du soleil sur les berges.

C’est l’heure pour Stéphane et Neil, deux-sapeurs pompiers plongeurs, de se mettre à l’eau. Vêtus de leurs combinaisons de plongée, ils doivent porter un grand sac à dos de 17kg. Tout en chaussant ses palmes, Stéphane détaille :

« Il contient deux bouteilles qui nous permettent d’avoir plus de 3000 litres d’air sous l’eau. »

sac à dos sapeurs-pompiers plongeurs Rhône
Les plongeurs doivent pouvoir porter sur leur dos plusieurs kilos de matériel.Photo : PL/Rue89Lyon

Pour devenir plongeurs, les sapeurs pompiers doivent d’abord passer plusieurs tests. Leur corps doit pouvoir s’adapter aux contraintes physiologiques de la plongée, telles que la pression de l’eau. Leur rétine doit également être dans un état irréprochable, pour leur permettre de voir le plus loin possible.

Après une formation de plusieurs mois, les plongeurs bénéficient d’un important suivi médical, détaille le lieutenant Luc David. Devenir un pompier plongeur n’est pas à la portée de n’importe qui :

« La plongée est une spécialité très exigeante sur le plan technique et physiologique. »

Un plongeur pompier
Les plongeurs pompiers du SDMIS lors d’un de leur exercice quotidien.Photo : PL/Rue89Lyon

Exercice d’orientation dans la Saône

L’immersion de Stéphane et Neil est chronométrée. Pour cet exercice d’orientation, ils doivent faire un aller-retour entre les deux berges. Les plongeurs ont pour objectif de ressortir à un endroit précis, tout en ayant une marge d’erreur autorisée de quatre mètres.

Mais dans la Saône verdâtre, impossible de mesurer la profondeur de l’eau ou de voir à plus de deux mètres. Les plongeurs doivent s’orienter grâce à leurs sensations, à la direction du courant et à la position du soleil. Ils sont aussi munis d’une boussole.

pompier sauveteur plongée Saône noyade
Un sapeur-pompier plongeur en train de sauter dans la Saône à l’avant du bateau.Photo : PL/Rue89Lyon

Les minutes s’étirent et les deux plongeurs ne sont toujours pas réapparus à la surface. Pas de quoi inquiéter l’équipage à ce stade, rassure Luc-David :

« En regardant à la surface de l’eau on peut apercevoir la pluie de bulle que les plongeurs laissent sur leur passage. Si au bout d’un certain temps ils ne sont pas remontés, il faut engager des recherches pour les retrouver. C’est aussi pour cela que les plongeurs portent sur eux une balise qui nous permet de les repérer. »

Les plongeurs
Les deux sapeurs-pompiers plongeurs ont réussi l’exercice d’orientation du jour.Photo : PL/Rue89Lyon

La Saône et le Rhône : des eaux dangereuses

Les deux plongeurs finissent par remonter puis se hisser sur le bateau, après avoir nagé dans une eau à 20 degrés. Stéphane, plongeur depuis dix ans, s’exclame sous le regard complice de ses collègues :

« Quand l’eau est chaude comme ça, on peut y rester des heures ! »

Si à la surface la Saône semble calme, ses fonds cachent pourtant de nombreux dangers. Fils métalliques, débris de ponts et objets en ferraille sont autant d’obstacles que peuvent rencontrer ceux qui s’y aventurent.

S’immerger dans cette eau très polluée, signifie aussi s’exposer à certaines maladies, comme l’explique le sapeur-pompier plongeur Jean-Philippe :

« Il y a un risque d’être infecté par la leptospirose, alors les plongeurs sont vaccinés. »

Quand la baignade vire à la noyade

bateau polyvalent de secours des pompiers du Rhône
Les sapeurs-pompiers naviguent à bord d’un bateau pouvant accueillir jusqu’à 20 personnes.Photo : PL/Rue89Lyon

Interdite dans le Rhône et la Saône, la baignade dans ces eaux troubles continue pourtant d’attirer des baigneurs les jours de fortes chaleurs. Même constat pendant les beaux jours, dans le plan d’eau du parc de la Feyssine à Villeurbanne.

« Les baigneurs sont généralement des jeunes âgés de moins de 25 ans et qui n’ont pas accès à une piscine privée », note Luc David.

Lorsqu’elle croise des contrevenants dans l’eau ou prêt à faire le grand saut, l’équipe de sapeurs-pompiers met l’accent sur la prévention.

« En 2021 la météo a été salvatrice »

Peu de temps après l’amarrage du bateau, le téléphone des pompiers sonne. Stéphane, qui a toujours le mot pour rire, arbore soudainement un visage grave. L’équipe doit intervenir à Miribel pour sauver de la noyade un enfant de trois ans.

En quelques secondes, les cinq hommes remontent à bord de leurs véhiculent, allument les gyrophares et partent à toute allure en direction du lac. « On s’adapte », souffle le lieutenant Luc-David tout en gardant son sang-froid.

Dans le Rhône, les pompiers interviennent, en moyenne, une centaine de fois par an pour des cas de noyade. Il s’agit de la première cause de mortalité par accident de la vie courante chez les moins de 25 ans à l’échelle nationale.

« En 2021, la météo a été salvatrice, mais les températures remontent , remarque Luc-David, les pics de noyades ont lieu l’été. »

Des noyades liées au manque de vigilance

Des pompiers en opération
À droite, le lieutenant Luc David donne quelques consignes aux plongeurs sur le navire.Photo : PL/Rue89Lyon

Le lieutenant s’inquiète particulièrement des effets du confinements sur l’apprentissage de la nage chez les jeunes enfants :

« Les enfants qui n’ont pas pu apprendre à nager ou qui n’ont pas pu pratiquer la nage en 2020 ont plus de risque de se noyer cette année. »

Finalement ce mercredi, il n’y aura pas d’intervention en urgence, car l’enfant a été retrouvé. « Les fausses alertes sont rares mais peuvent arriver l’été à cause du manque de vigilance », soupire Luc-David, toujours le téléphone à la main :

« C’est typique, en général les gens se réveillent de leur sieste et ne voient plus leur proche dans l’eau. Ils pensent alors que la personne s’est noyée mais elle finit par être retrouvée. »

Chaque année le Rhône enregistre une cinquantaine de décès liés aux noyades, rapporte le lieutenant Luc David. La majorité surviennent dans les piscines de particuliers.

Les pompiers réquisitionnés par la police

La fin de journée approche, mais pas de répit pour l’équipe. Les sapeurs-pompiers doivent repartir en direction de la commune d’Oullins.

La police a sollicité l’aide des plongeurs pour une réquisition à la confluence du Rhône et l’Yzeron. C’est à cet endroit qu’un homme s’est noyé mardi 10 août alors qu’il tentait de sauver son neveu tombé à l’eau.

Un pompier de Lyon
Les pompiers plongeurs de Lyon travaillent parfois avec la police dans le cadre d’enquêtes.Photo : PL/Rue89Lyon

Les cinq pompiers ne font pas partie de l’équipe intervenue la veille pour venir en aide aux victimes. Mais ils doivent récupérer des échantillons d’eau et mesurer sa profondeur pour les besoins de l’enquête policière.

Un endroit où flotte détritus et restes de nourriture avariés. Stéphane ironise :

« Il y a un rat dans l’eau, ça donne envie.»

Finalement c’est Neil, vêtu de sa combinaison de plongée orange, qui se jettera à l’eau en serrant les dents et en avançant prudemment. Impossible de distinguer la profondeur de l’eau tant elle est boueuse.

Resté au bord, Jean-Philippe, surnommé « Jean-Phi » par ses collègues, revient sur les changements qu’il a observé au cours de ses plongées durant les vingt dernières années :

« Globalement les cours d’eau et les rivières sont plus propres qu’avant, en raison des obligations légales liées au traitement de l’eau et à la gestion des égouts.»

Pas le temps pour les sapeurs-pompiers plongeurs de s’éterniser à Oullins. Une fois la réquisition terminée, toute l’équipe repart à la caserne de Confluence. Juste le temps de reprendre sa respiration, avant la prochaine intervention.

#noyade

Annouck Curzillat, triathlète aux Jeux paralympiques grâce à un pompier de Lyon

Annouck Curzillat, triathlète aux Jeux paralympiques grâce à un pompier de Lyon

En août 2021, la rédaction de Rue89Lyon dressait le portrait de quatre athlètes de participant aux Jeux paralympiques de Tokyo. Trois ans plus tard, ils sont tous en course pour les épreuves de Paris, du 28 août au 8 septembre. À cette occasion, nous rediffusons leurs portraits. Ici, celui de la triathlète Annouck Curzillat. 

Annouck Curzillat n’est pas de celles qui cherchent à se faciliter la vie. À 29 ans, la jeune sportive de Lyon participe cet été à ses premiers Jeux paralympiques, à Tokyo. Non-voyante, elle va concourir dans une discipline complexe : le triathlon.

Au Japon, elle va réaliser une course comprenant 750 mètres de natation, 20 kilomètres de vélo et 5 kilomètres de course à pied. Pour cela, elle sera accompagnée d’une guide, Céline Bousrez, attachée à elle tout au long du parcours. Un défi de taille qui n’effraie pas la championne. 

Depuis toute petite, la triathlète a dû se battre pour faire du sport. Toute jeune, celle qui souffre d’une rétinite pigmentaire, a fait du ski et de l’équitation « à l’ancienne ». À l’époque, la plupart des clubs ne savent pas comment gérer son handicap.

« Toute ma vie, nous avons poussé des portes de clubs avec mes parents et nous sommes tombés sur des gens qui n’y connaissaient rien », se souvient-elle.

Sur les terrains de sport comme sur les pistes de ski, elle a pris l’habitude d’entendre des membres de sa famille ou des entraîneurs crier pour la guider. Peu à peu, elle a su s’adapter.

Annouck Curzillat de Lyon Jeux paralympiques
Les Lyonnais Alexandre Lloveras et Annouck Curzillat ont été sélectionnés pour les JO handisports de Tokyo.Photo : PL/Rue89Lyon.

« Je suis arrivée dans le triathlon un peu par hasard »

En 2014, le triathlon entre dans sa vie de façon inattendue après le coup de téléphone d’un sapeur-pompier de Lyon. Ce dernier a vu une course guidée en biathlon handisport. Sportif valide, il veut faire la même chose dans son sport, le triathlon, qui allie nage, vélo et course à pied. Il contacte le milieu du handisport et au cours de ses recherches il rencontre Annouck Curzillat.

Après coup, le pompier se rendra compte qu’il ne peut pas courir avec une femme, du fait du règlement de la fédération française handisport. Trop tard, la jeune femme a mordu au projet.

À l’époque, elle n’est ni une nageuse, ni une coureuse. Arrivée à Lyon pour ses études, elle est tout juste en train de terminer son diplôme pour être kinésithérapeute.

« Toute ma scolarité, le sport ça a été pour me détendre plus que pour faire de la compétition, relate-t-elle. Je suis arrivée dans le triathlon un peu par hasard. Je me suis dit : tiens, on va essayer. »

Rapidement, la discipline lui plaît. Celle qui n’aime pas s’ennuyer voit dans les alternances entre les trois disciplines un bon moyen de varier les plaisirs. Difficile, le sport devient incroyablement technique lors des changements de discipline pour la mal-voyante. Dans l’eau comme sur terre, elle est attachée à sa guide.

« Nous devons être séparées de 50 centimètres », décrit-elle.

En sortant, elle doit enlever sa combinaison, mettre un casque, ses lunettes noires, et enfiler des chaussures déjà accrochées aux pédales du vélo. Puis, 20 km plus loin, elle devra poser le vélo et courir jusqu’à ses baskets, le tout sans voir ce qui se passe autour d’elle. « C’est un peu un truc de fou », admet-elle. Mais ça lui plaît.

« Le triathlon est venu à moi. Mais il m’a bien trouvée. »

De Lyon aux Jeux paralympiques de Tokyo

Apparemment peu compétitrice, elle se laisse prendre par le sport. Six ans plus tard, la sportive de Lyon finit par être sélectionnée aux Jeux paralympiques de 2020 à Tokyo, décalés d’un an en raison de la crise sanitaire.

« Le report avec la crise du Covid-19 a été un choc, souffle-t-elle. Je commençais à compter les mois qui restaient avant la compétition. Et voilà que tout a été reporté. »

Cependant, elle l’assure : l’hiver lui a permis de passer des caps techniques, notamment en natation. Cinquième aux championnats du Monde, quatrième aux championnats d’Europe, la multiple championne de France espère faire une bonne position cette année.

Et après ? Dans un contexte particulier lié à la pandémie, beaucoup de coureurs français pensent plus aux Jeux de Paris 2024 qu’à ceux de Tokyo 2021. Pas elle.

« Certes, Paris, il y aura du public, la famille… Mais bon, ce n’est qu’à deux heures de train », pouffe la sportive, pas fan des petits projets.

À Lyon, Annouck Curzillat représente une des chances de médaille françaises aux Jeux paralympiques de Tokyo. Rencontre avec une battante.
Annouck Curzillat participera aux Jeux paralympiques de Tokyo.Photo : Facebook Annouck Curzillat

« Quand je sors, je ne vois pas clair (…) Je ne peux rien faire toute seule »

Sur le long terme, elle se pose la question de continuer une carrière de triathlète. Ne pas avoir de vacances, sacrifier sa vie privée… Elle se pose les mêmes questions que ses confrères « valides », avec des contraintes supplémentaires.

Contrairement à certains « professionnels » du sport, en plus de ses entraînements, la kiné travaille à l’hôpital de Givors, au sud de Lyon. Depuis 2019, elle est aidée par son statut de sportive de haut niveau.

« Cela me permet de travailler moins tout en conservant un niveau de rémunération », indique-t-elle.

Au cours d’une semaine classique, elle va s’entraîner entre 10 et 12 heures chez elle, à la piscine de Vaise ou sur les quais du Rhône. En stage, ses entraînements avec le Tandem club rhodanien la font s’entraîner entre 20 et 25 heures. Elle ne pourrait pas faire plus.

« Le problème n’est pas tant l’entraînement, mais la logistique autour, regrette-t-elle. Quand je sors, je ne vois pas clair. Je suis obligée d’avoir quelqu’un pour aller courir, nager, faire du vélo… Je ne peux rien faire toute seule. »

Régulièrement, cette habitante de Lyon depuis 11 ans répète manquer de confiance en elle. En termes de classement, elle semble ainsi prudente et estime pouvoir terminer troisième. « Cela dit, on ne sait jamais ce qui peut se passer, des filles peuvent tomber devant », avance-t-elle.

Ou alors, peut-être les dépassera-t-elle ? Pour le savoir, rendez-vous le 28 août. 

À Lyon, Annouck Curzillat représente une des chances de médaille françaises aux Jeux paralympiques de Tokyo. Rencontre avec une battante.
La liaison entre la natation et le vélo est un moment important de la course.Photo : World Triathlon Media
#Jeux olympiques

Deux manifestations à Lyon ce samedi contre le pass sanitaire

Deux manifestations à Lyon ce samedi contre le pass sanitaire

Deux manifestations contre le pass sanitaire auront lieu à Lyon ce samedi 14 août. Le premier cortège sera mené par le collectif « Coronafolie et Union essentielle ». Le deuxième rassemblement, prévu à la Confluence, n’a pas été déclaré en préfecture.

Nouveau week-end de mobilisation à Lyon contre le pass sanitaire. Pour la cinquième semaine consécutive, ses opposants se retrouvent pour faire entendre leur voix. Comme la semaine dernière , deux manifestations distinctes sont prévues.

Un rassemblement à Confluence contre le pass sanitaire et « les années de recul des libertés »

Un premier rassemblement aura notamment lieu sur l’Esplanade François-Mitterrand, en face de l’hôtel de Région.

Sur un post relayé, notamment, par la page Lyon Rébellion, les organisateurs indiquent manifester contre « une mesure hautement liberticide qui instaure une société de contrôle total. » Ils replacent cette mesure dans la continuité « d’années de recul des libertés » avec la mise en place de la loi de sécurité globale et loi sur le séparatisme. Ils évoquent également les réformes sociales à venir sur les retraites et l’assurance chômage.

Le rassemblement aura lieu à 14 h. Une première intervention des masques blancs, un collectif dénonçant des mesures sanitaires jugées liberticides, devrait avoir lieu à 11 h.

Contrairement à la semaine dernière, la manifestation n’a pas été déclarée en préfecture. Du côté du cabinet du préfet, on assure qu’aucun contact n’a été pris avec les services de l’État pour ce rassemblement.

Dans l’après-midi du 13 août, le préfet a annoncé la mise en place d’une interdiction de manifester sur la presqu’île, comme lors des précédentes manifestations. Plus strict par rapport à la semaine dernière, ce périmètre s’étend sur la place des Terreaux et la place Bellecour. Il est effectif de 12h à 21h.

Même parcours pour « Coronafolie et Union essentielle », l’autre manifestation contre le pass sanitaire à Lyon

Sur l’autre rive, un autre cortège s’élancera sur le même parcours que la semaine dernière. Il partira à 14 h des Brotteaux pour aller vers Jean-Macé. Il passera par la rue Garibaldi et le Cours Gambetta. Il a été déclaré en préfecture via le collectif « Coronafolie et Union essentielle. »

Un nom qui rappelle celui de la liste « Union essentielle » portée, lors des élections régionales, par Shella Gill, bien que cette dernière n’ait pas relayé l’appel.

La semaine dernière, le premier cortège avait rassemblé 1 700 personnes, selon la préfecture. Le deuxième, mené par « Coronafolie et Union essentielle », en avait rassemblé 700.

À Lyon le pass sanitaire devient obligatoire dans les centres commerciaux

À Lyon le pass sanitaire devient obligatoire dans les centres commerciaux

Vendredi 13 août, le préfet du Rhône a annoncé de nouvelles « mesures de freinage » pour éviter la propagation du Covid-19 à Lyon et dans le département. Parmi les mesures annoncées : l’obligation du pass sanitaire dans les centres commerciaux à partir du lundi 16 août et le retour du masque dans certains lieux publics.

La nouvelle était attendue après le Conseil de défense sanitaire du 11 août dernier. Le préfet du Rhône a annoncé de nouvelles mesures pour tenter de « freiner » la propagation du Covid-19 dans le département.

Mettant en avant le taux d’incidence important dans le Rhône, proche de 310 cas pour 100 000 habitants (où les hospitalisations sont de nouveau en hausse), il annonce l’obligation de présentation du pass sanitaire dans les grands centres commerciaux de Lyon et des environs. Ces mesures rentreront en vigueur à partir du lundi 16 août.

À Lyon et dans le Rhône : la liste des nouveaux lieux où le pass sanitaire est obligatoire

Il sera obligatoire pour les centres commerciaux de plus de 20 000 m2. Cela concerne :

    Auchan à Caluire,le centre commercial Grand Ouest à Écully,le centre commercial des Deux Vallées à Givors,la galerie marchande Saint-Genis 2 à Saint-Genis-Laval,le centre commercial Porte des Alpes à Saint-Priest,ceux des 7 chemins et du Carré de Soie à Vaulx-en-Velin,le Carrefour et le magasin Ikéa de Vénissieuxle Géant Casino de Villefranche-sur-Saône,ainsi que les centres commerciaux de Confluence et de la Part-Dieu à Lyon.

Au centre commercial de la Part-Dieu, l’accès au métro sera fermé. Une nouvelle décision qui ne devrait pas laisser indifférent. Des manifestations ont déjà eu lieu les quatre dernières semaines contre la mise en place du pass sanitaire. Ce dernier a un impact sur la fréquentation de plusieurs lieux culturels, dont les cinémas.

Le retour des masques dans certains espaces publics

Le masque fait aussi son retour. Obligatoire dans tous les établissements recevant du public, il l’est de nouveau à l’extérieur dans les files d’attente, les marchés, brocantes (ou ventes au déballage), dans les festivals et spectacles, dans tout rassemblement, manifestations et activités, organisées sur la voie publique, et dans un rayon de 50 mètres autour des écoles (lors des sorties de classe), des gares ferroviaires et routières, des espaces extérieurs des centres commerciaux et des lieux de culte au moment des offices.

Cette obligation s’applique pour des personnes âgées de 11 ans et plus.

#Rhôn

Réchauffement climatique à Lyon et dans le Rhône : regardez les températures augmenter dans votre commune

Réchauffement climatique à Lyon et dans le Rhône : regardez les températures augmenter dans votre commune

À Lyon et dans le Rhône, comme ailleurs, le réchauffement climatique se fait sentir. À Lyon, entre 1960 et 2018 la température moyenne annuelle a augmenté de 1,9°C. Dans les autres communes du Rhône, la hausse est d’environ 1,87°C sur le dernier demi-siècle. Parcourez la hausse des températures dans votre commune.

+1,92°C. C’est la variation de température annuelle moyenne entre 1960 et 2018 à Lyon. Durant la décennie 1960-1970, la température annuelle moyenne s’est élevée à 11,27°C. Elle a bondi à 13,19°C entre 2009 et 2018. Sans surprise, les dernières années ont été les plus chaudes. En 2018, dernière année étudiée ici, la température annuelle moyenne s’est établie à 14,33°. Soit plus de 3°C de plus par rapport à la période 1960-1970.

Lyon, la grande ville française où le réchauffement climatique se mesure le plus

Dans son dernier rapport publié lundi 9 août, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), doute de notre capacité à limiter le réchauffement climatique à +1,5°C. À Lyon, il est donc déjà dépassé sur le demi-siècle qui vient de s’écouler. Un travail d’analyse et d’enquête du réseau européen de datajournalisme EDJN réalisé en 2018, auquel nous avions participé, avait déjà montré une augmentation de +1,1°C en moyenne depuis l’an 2000 par rapport à la température moyenne au siècle précédent à Lyon.

C’est la grande ville française où les températures ont le plus augmenté. Lyon figure également dans la première moitié des villes européennes de plus de 500 000 habitants où les températures ont connu les plus gros coups de chaud. Un réchauffement qui est constant dans les chiffres depuis au moins la fin des années 1980.

Dans la suite de cette étude, basée sur les grandes villes européennes, le réseau EDJN a publié en fin d’année dernière, les données récentes sur l’ensemble des communes cette fois mais sur une période plus récente. On dispose d’un point de comparaison entre les années 60 et aujourd’hui. Ces données permettent surtout de s’intéresser aux communes du Rhône.

Dans le Rhône, les plus fortes variations de température ne sont pas toujours dans les plaines

Comme à Lyon, dans le reste du département, le réchauffement climatique s’est fait ressentir durant la fin du siècle dernier et le début du XXIe. Entre 1960 et 2018, la variation médiane des températures est de l’ordre de +1,87°C dans le Rhône. Yzeron est la commune qui a connu la plus forte variation (+2,37°C) alors que les petites communes de Chénelette, Marennes, Proprières et Azolette dans le Haut-Beaujolais ont connu les plus faibles (autour de +1,14°C).

La carte des variations de températures entre 1960 et 2018 dans le Rhône demeure relativement contrastée. Les plus fortes variations concernent parfois des zones limitrophes de celles ayant enregistré des variations plus faibles. Ainsi, à peine plus au sud, autour de Lamure-sur-Azergues, les variations de température annuelle moyenne avoisinent les +2,3°C entre 1960 et 2018.

On remarque que les augmentations les plus importantes concernent beaucoup de communes où la température annuelle moyenne est parmi les plus « fraîches » du département. C’est le cas du secteur des Monts du Lyonnais et au nord de Tarare autour de Cublize. En revanche, les communes les plus haut perchées connaissent des augmentations plus faibles comme Saint-Martin-en-Haut, à 730m d’altitude dans les Monts du Lyonnais ou Proprières, au pied du mont Saint-Rigaud qui culmine à 1000m d’altitude.

À Lyon et dans le Rhône, les années de canicule ne sont pas toujours les plus chaudes

Si les points les plus hauts sont davantage préservés, ce n’est pas toujours dans la plaine que les températures ont le plus augmenté. Ainsi, dans la métropole de Lyon, le secteur des Monts-d’Or et une partie du Val-de-Saône, enregistrent les plus fortes variations. Elles dépassent ou avoisinent les 2°C comme à Limonest ou Saint-Didier-au-Mont-d’Or.

Les données montrent par ailleurs que les années de grandes canicules ne sont pas toujours les plus chaudes. À Lyon, les années 2003, 2006 et 2017 figurent bien parmi les 10 années les plus chaudes depuis 1970. Mais d’autres années, moins ou pas marquées par des épisodes de grosses canicules, ont connu une température annuelle moyenne supérieure. Elles sont toutefois toutes récentes, signe d’une accélération du réchauffement climatique. Ainsi, depuis un demi-siècle à Lyon, neuf des dix années les plus chaudes sont postérieures à l’an 2000.

A Lyon, retour de la chaleur = pic de pollution à l’ozone

A Lyon, retour de la chaleur = pic de pollution à l’ozone

Depuis ce mercredi, sous l’effet du retour de la chaleur, Lyon connaît un deuxième pic de pollution à l’ozone de l’été. Pour l’instant, le niveau « information-recommandation » (mesures non contraignantes) a été déclenché par la préfecture du Rhône.

[Mise à jour le 16 août] L’alerte pollution a été levé le soir du dimanche 15 août par le préfet du Rhône

Mis à part un épisode mi-juin, Lyon avait été épargnée jusque là par la pollution à l’ozone qui est malheureusement désormais un classique de la vie en ville en été.

Comme cette pollution à l’ozone est une pollution secondaire d’été due à l’interaction entre les rayons du soleil et les polluants émis par les véhicules, la météo maussade de juillet a préservé l’agglomération de ce type de pic de pollution. Ce qui n’enlève pas une pollution de fond, beau au mauvais temps.

Particularité de cet épisode de pollution : le pic d’ozone devrait être combiné à un « épisode de poussières désertiques » à partir de jeudi, selon Atmo Auvergne Rhône-Alpes, avec des températures avoisinant les 35 degrés.

Outre le bassin lyonnais Nord Isère, la zone des coteaux, l’ouest de l’Ain, la vallée du Rhône, le bassin grenoblois et la zone alpine Isère sont concernés.

Pic de pollution ozone Lyon août
Pic de pollution à l’ozone mercredi 11 août. Capture d’écran Atmo Auvergne Rhône Alpes

Pic de pollution à Lyon mais pas de mesures contraignantes

En activant seulement le niveau « information-recommandation », le préfet du Rhône n’a pas, pour le moment, pris de mesures contraignantes (comme la limitation de la vitesse et/ou la circulation différenciée). Il s’agit seulement de « recommandations sanitaires et comportementales ».

Covid : les hospitalisations en hausse dans le Rhône

Covid : les hospitalisations en hausse dans le Rhône

Le point actualisé au 10 août sur l’évolution de l’épidémie de Covid à Lyon et dans le Rhône et des principaux indicateurs de suivi.

À Lyon et dans le Rhône, la reprise épidémique se ressent de nouveau à l’hôpital. La dynamique de l’épidémie, elle, semble légèrement se tasser. Après avoir fortement augmenté au cours du mois de juillet, notamment lors de la seconde quinzaine, le taux d’incidence se stabilise en ce début de mois d’août. Parallèlement, le dépistage a également ralenti.

Des hospitalisations encore relativement faibles en volume mais qui progressent fortement

Comme nous l’observions il y a deux semaines, l’épidémie de Covid fait repartir à la hausse les hospitalisations et admissions en réanimation. Au 9 août, 231 patients Covid avaient été hospitalisés en moyenne sur une semaine dans les hôpitaux du Rhône. Ils étaient 187 une semaine plus tôt et 151 en moyenne il y a deux semaines. Soit une progression en deux semaines de +53%.

Dans les services de réanimation du Rhône, la progression a été plus importante encore ces deux dernières semaines. Au 9 août, 57 patients Covid avaient été hospitalisés en réanimation en moyenne sur une semaine. Contre 38 la semaine précédente et 26 deux semaines plus tôt. Soit une une augmentation du nombre de patients moyen en réanimation de 120% sur 15 jours dans le Rhône.

On reste encore loin des pics des vagues précédentes. Pour rappel, 1200 patients Covid avaient été hospitalisés au plus fort de la vague du printemps 2020, près de 1900 à l’automne 2020 et 1200 au printemps dernier. Environ 300 patients avaient été admis en réanimation au plus fort de ces vagues précédentes dans le Rhône. La situation n’est donc pas comparable en volume mais le nombre de personnes hospitalisées progressent fortement.

Poursuite de l’augmentation des hospitalisations chez les 20-40 ans

À l’échelle de la région, les hospitalisations progressent fortement également. Au 9 août, 804 patients Covid avaient été hospitalisés en moyenne sur une semaine en Auvergne-Rhône-Alpes. Ils étaient 556 deux semaines plus tôt lors de notre dernier point de suivi. Soit une augmentation de 45% environ. Parmi eux, 123 avaient été hospitalisés en réanimation au 9 août contre 63 deux semaines auparavant (en moyenne sur une semaine). Soit une augmentation de 95%.

On constate que la progression des hospitalisations chez les jeunes se poursuit en Auvergne-Rhône-Alpes. Au 9 août, 32 patients âgés de 20 à 29 ans et 45 âgés de 30 à 39 ans avaient été hospitalisés en moyenne sur une semaine. Ils étaient respectivement 6 et 11 deux semaines auparavant. Même si les chiffres restent faibles, les hospitalisations chez les 20-29 ans ont triplé en quinze jours et ont été multipliées par 5 en un mois dans la région. L’évolution est quasiment identique chez les 30-39 ans.

Surtout, leur nombre est important à ce stade de la reprise épidémique actuelle, comparativement aux vagues précédentes. Au plus fort de la vague de l’automne 2020, la plus dure à ce jour, un peu moins de 50 patients Covid âgés de 20 à 29 ans avaient été hospitalisés dans la région. Ils étaient une centaine chez les 30-39 ans. Alors que le niveau global des hospitalisations est actuellement encore très bas comparativement aux vagues précédentes, le nombre de patients Covid dans ces tranches d’âge représente déjà 50% environ des valeurs maximales qu’elles ont connues auparavant.

Ralentissement de la vaccination contre le Covid dans le Rhône début août

La vaccination dans le Rhône marque le pas en ce début du mois d’août. Après les annonces d’extension du pass sanitaire à la mi-juillet, elle a connu un rebond jusqu’au 4 août environ. Passant de 5300 premières injections quotidienne en moyenne au 12 juillet à 10 860 au 4 août (+105%). Ces derniers jours, la vaccination était en recul dans le Rhône, d’environ 15%.

En juin, le rythme des premières injections avait fortement chuté (-60% environ sur le mois) dans le Rhône. Avec le décalage dû au délai entre les deux doses, cette chute se ressent désormais sur les secondes injections. Leur rythme subit donc actuellement les conséquences du mois de juin. Elles devraient repartir à la hausse d’ici quelques jours.

Au 8 août, environ 58% de la population du Rhône était complètement vaccinée. La proportion n’est que de 56% à l’échelle d’Auvergne-Rhône-Alpes. Le Rhône et la région se situe légèrement au-dessus de la moyenne nationale : environ 55% de personnes totalement sont vaccinées en France au 8 août selon Santé Publique France.

La vie sous bracelet électronique : les difficultés à « revenir du néant »

La vie sous bracelet électronique : les difficultés à « revenir du néant »

Dans ce deuxième article, l’ancienne « prisonnière » revient sur les difficultés du retour à la vie « normale », hors des murs. Du bracelet électronique aux problèmes plus intimes, elle continue à nous raconter un parcours semé d’embuches.

Les premiers pas avec le bracelet électronique sont faits. Avec succès ou non, il est encore trop tôt pour le dire. Une phase nouvelle s’entrouvre. Celle de l’installation dans un quotidien que je dois remodeler au gré des difficultés matérielles, et de celles plus intimes. Avec la même conviction : je n’ai pas le droit à l’erreur.

Commençons par la bonne nouvelle, quand il y en a une, c’est important de la souligner. Aucun nouvel incident technique n’est à déplorer, même si je suis prête à toute éventualité. Il est vrai que je manque de confiance en cette technologie qui me semble venu d’un autre siècle, notamment en comparaison avec ce qu’il est possible de faire aujourd’hui. Le calme est bienvenu de ce point de vue là, un peu de sérénité, quand bien même temporaire, est bonne à prendre. 

En quelques minutes, le concept de réinsertion vole en éclat

Malheureusement, tout n’est pas beau et rose, ce qui en soit me donne des choses à écrire… Tout de même, cette difficulté, j’aurais bien aimé la voir venir plus tôt. Une partie de mon projet si longtemps travaillé, étudié et réfléchi lorsque je me trouvais encore au sein de ces murs est tombé à l’eau. Quelques minutes pour faire voler en éclat le concept galvaudé de réinsertion.

Une partie des droits auxquels j’avais normalement accès ne se trouve, en résumé, plus du tout accessible. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir été accompagné par des professionnels censés répondre à ces interrogations. Je suis forcée de constater que les informations transmises étaient erronées.

Payer ses factures, la nouvelle priorité

Ma position est maintenant plus que délicate. Vont-ils payer mes factures le mois prochain ? Non, et ils s’en fichent bien. Pour autant, si je me loupe, ils ne manqueront pas de me le faire remarquer. Une fois cette nouvelle apprise, il faut agir. La recherche d’un emploi s’impose, sans pour autant tirer un trait sur mes ambitions premières. Un emploi, avec un bracelet électronique.. Moi qui était une habituée de l’intérim, avec mes horaires rien n’est simple. Mon cerveau semble bouillir sous les informations qui s’accumulent, sous le rythme de la vie. Le tourbillon m’emporte, il faut que je marque un temps d’arrêt.

Une fois cet arrêt effectué. Après une introspection sur moi-même. Je me dois d’aborder un angle plus personnel. Il me semble difficile à éviter, bien que complexe à écrire pour moi. Dans un monde tourné vers des générations qui confient leur intimité sur les réseaux, il s’agit pour moi d’un exercice nouveau. Je me lance.

Recommencer « l’air de rien » : une démarche bien compliquée

Impossible donc de ne pas parler de l’aspect psychologique d’une sortie de prison. Je dirais que ma construction, mon moi intérieur, rencontrent des secousses non prévues au programme. Après un parcours judiciaire lessivant, vidant, destructeur, comment retrouver la place souhaitée ? Après tout, quelle place je souhaite au juste ? Des questions existentielles que vous avez sûrement déjà rencontré. Revenir du néant et devoir recommencer l’air de rien me semble plus compliqué que prévu. 

Une partie de moi est vide, l’autre est rongée. Je ne sais pas comment assembler les deux. Mes rêves me semblent maintenant utopiques. Je ne sais pas arrêter de penser, ni me dire ce que je deviendrai. Le silence m’angoisse et me réconforte à la fois. Suis-je entrain de perdre pieds ou au contraire de reprendre vie?

Être accompagné, pour soi, comme pour la société

Le suivi psychologique des détenus sortant de prison est un sujet bien peu abordé. Il n’est pas rare de sortir sans aucune orientation précise. Une obligation de suivi psychologique est souvent demandée, certes, mais par qui? Où? Comment? Allez voir « quelqu’un » qui ne sait rien du monde carcéral ne sera constructif en rien, croyez moi sur parole. J’ai été étonné d’apprendre tardivement qu’il existait un Centre Médico-Psychologique axé sur ce public particulier.

Pourtant, il me semble incontournable de pouvoir être accompagné de manière correct. Pour soi, comme pour la société. D’autant, qu’il est rare de sortir de détention et d’être capable de payer des séances d’un psychologue libéral. Malheureusement, il est clair qu’il leur est impossible de traiter toutes le demandes. L’aspect « psychiatrique » est un domaine dans lequel les carences sont grandes, que l’on sorte de prison, ou non.

Des questionnements qui continueront de m’animer encore quelque temps. Peut être bien qu’un jour, je me reconnaîtrais enfin dans le miroir. Alors, les choses s’aligneront. La patience est sûrement mon meilleur allié sur ce chemin. Le parcours qui est le mien a sa part de complexité, je tâcherais de le retranscrire au mieux afin d’ouvrir une fenêtre sur nous, les invisibles aux bracelets.

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Vivre de récupération à Lyon : « Je n’ai pas fait les courses depuis trois ans »

Vivre de récupération à Lyon : « Je n’ai pas fait les courses depuis trois ans »

Felipe* (nom d’emprunt) est un aide-soignant de 32 ans qui habite Lyon, par intermittence. Il gagne 1400 euros par mois. En dehors de son loyer, il ne dépense jamais plus de 100 euros de son salaire. Il ne vit que de récupération.

Felipe est originaire de Valence dans la Drôme (26) et a habité à Lyon par intermittence depuis ses dix-huit ans. Après quatre années de fac qui l’ont laissé perplexe, il voyage six ans avant de rentrer en France. Et se lance dans une formation d’aide à la personne en alternance, à Paris.

C’est au cours d’une de ses marches quotidiennes dans la ville qu’il a une révélation.

« À Paris, je faisais des horaires de fou, je passais beaucoup de temps dans les transports… J’ai commencé à marcher des heures dans la ville en rentrant chez moi, pour me coucher en ayant fait quelque chose d’autre que travailler. »

Au détour d’une de ses longues marches, à la tombée du jour, Felipe bute sur un sac poubelle entrouvert devant une boulangerie.

« Elle était pleine à craquer de pains impeccables, encore très bons. »

Felipe se sert, et réfléchit. Le lendemain, à chaque fois qu’il passe devant un magasin d’alimentation, il en ouvre les poubelles. Chacune est remplie d’aliments encore consommables. Il rentre chez lui son sac à dos plein à craquer.

« On m’avait dit qu’un quart de la nourriture produite était jetée, je n’y croyais pas vraiment. En écumant la ville, j’ai découvert que c’était vrai. »

Felipe, adepte de la récupération, dans les rues de la Croix Rousse (Lyon 1er).
Felipe, adepte de la récupération, dans les rues de la Croix Rousse (Lyon 1er).

En quelques soirs de récupération, Felipe a déjà rempli son frigo et ses placards pour plusieurs semaines. Il continue ses balades et cette fois-ci collecte pour distribuer aux sans-abri.

« Les épiceries bio, elles laissent beaucoup de nourriture sur leur trottoir. Les grands supermarchés en revanche, ils cadenassent leur poubelles, il y en a même qui disposent des bouts de verre autour des bennes pour empêcher la récupération. »

À Lyon, la récupération comme mode de consommation principal

Après un an à Paris et quelques autres voyages, Felipe retourne à Lyon. Il s’établit dans le quartier Croix-Rousse (1er arrondissement) et reprend ses habitudes de récupération dans les poubelles.

« C’est partout pareil. Il faut surtout aller voir du côté des magasins bio et des boulangeries. »

Felipe croise régulièrement d’autres personnes pendant ses collectes, il discute un peu avec eux mais le contact n’est pas toujours facile. L’aide-soignant cherche des compagnons de récupération.

« J’ai découvert l’associatif, c’est vraiment chouette. Ce n’est pas exactement la même chose que ce que je faisais avant, on ne fouille pas dans les poubelles. C’est plutôt qu’on récupère les invendus ensemble. »

Felipe prend une part active dans deux associations de récupération : Les Éco-Charlie de Lyon ainsi que DLC Lyon (acronyme pour Détournement Libre de Consommable).

Avec les Éco-Charlie, Felipe part chaque semaine en vélo chercher les légumes invendus dans des magasins bio partenaires. Puis, il retrouve les autres associatifs pour partager équitablement le fruit de leur récolte.

Avec DLC, il récupère les invendus de grandes surfaces discount :

« On y va en voiture, les quantités de nourriture sont monstrueuses, il faut des coffres pour tout transporter. »

Comme il s’agit cette fois-ci de produits transformés, parfois issus de la production animale, les associatifs sont particulièrement attentifs à la fraîcheur des aliments.

« Là je remplis mon sac de randonnée de produits, j’essaye d’en prendre qui ne nécessitent pas de devoir cuisiner et je vais les donner à des sans-abri. En ce moment, je vais souvent en donner au bidonville à côté de l’IUT Feyssine [à Villeurbanne, le reportage a été réalisé début juillet, ndlr]. »

DLC distribue aussi à des associations de solidarité.

« Je ne m’habille qu’avec de la récupération à Lyon »

Avec son travail d’aide-soignant, Felipe n’est pas toujours disponible aux horaires de récolte. Quand c’est le cas, il repart s’approvisionner “à la sauvage” comme il aime le dire.

« Cela va faire quatre ans que je n’ai pas “fait les courses”, mais il y a quelques petites choses que je suis obligé d’acheter, comme le papier toilette. Les rasoirs et le dentifrice j’en trouve dans les poubelles. »

Et les vêtements ? Par exemple, Felipe arbore un sac de randonnée rouge qui semble à la fois solide et neuf.

« Ce sac aussi vient des poubelles. C’est incroyable ce qu’on peut trouver. Dans le 6e arrondissement de Lyon, j’ai trouvé de belles chemises qui avaient été jetées. Maintenant je vais au travail sapé comme un bourgeois ! »

Qu’en est-il des loisirs ?

« J’avoue que je ne vais pas beaucoup au théâtre, ou au cinéma. Mes activités associatives me prennent beaucoup de temps. Je lis beaucoup, j’utilise les “boîtes à lire” et j’échange mes vieux bouquins contre d’autres vieux bouquins. »

Felipe fait tous ses déplacements dans la ville en vélo, même pour distribuer des kilos de nourriture de l’autre côté de Lyon.

L’aide-soignant n’a au final qu’une seule dépense incompressible : son loyer. Son appartement sous les toits situé au cœur des pentes de La Croix Rousse (Lyon 1er) lui coûte 340 euros par mois avec les charges.

« J’aime mon appartement. C’est petit et il y fait chaud l’été mais je suis à un quart d’heure de mon travail. Et je peux y faire de la trompette sans déranger mes voisins. »

Au début, Felipe vit mal la dépendance que représente à ses yeux ce loyer à payer, mais il a déjà vécu en squat et ne souhaite pas réitérer l’expérience pour une longue période.

« Vivre en squat, c’est un combat permanent où tu peux te faire voler tes trucs, te faire dégager à tout moment. Tu ne peux pas vraiment choisir avec qui tu vis, des fois, il y a de la drogue. Donc je paye un loyer, au final j’aime beaucoup mon appartement. »

« Des gens croient que je suis sans-abri »

Quand il fait de la récupération, il arrive que Felipe subisse des regards noirs de la part des commerçants. Mais en général, personne ne l’embête. La plupart détournent les yeux.

« Il y aussi des personnes qui veulent me donner de l’argent parce qu’ils croient que je suis sans-abri. Ils ont toujours l’air un peu étonnés quand je leur dis que j’ai une maison, un salaire et que je n’aime juste pas le gaspillage. »

Felipe avoue n’avoir jamais porté trop d’attention à ce qu’on peut penser de lui. Rêveur dégingandé et très souriant il semble en effet n’obéir qu’à ses propres règles :

« Du temps où j’étais à la fac, ma vie manquait de sens, tout me semblait un peu faux, superflu, je me sentais en-dehors du monde. »

En revanche :

« Je ressens des émotions fortes quand je vois les richesses de ce monde à la poubelle. J’ai déjà vu des ananas par dizaines qui pourrissent aux ordures. Ils ont traversé la terre en cargo et finissent comme ça. Ça me rend malade. »

Felipe a conscience que la plupart de ses amis auraient des difficultés à vivre comme lui :

« Je ne crie pas non plus sur les toits que je vis de récupération. Ce n’est pas une source de fierté. Même quand mes amis ont voulu m’accompagner, ils n’ont pas su vaincre un sentiment de malaise. »

« Si on utilise des mots anglais pour décrire une pratique c’est qu’elle devient « cool » »

Pourtant, d’après Felipe, cette pratique qui suscitait de la gêne suscite aussi un intérêt, devient une curiosité presque « à la mode ».

« Depuis un an, il y a des personnes qui viennent me voir et qui me disent que je suis “freegan”, que je fais du “dumbster diving”. Je suis pas expert, mais j’ai l’impression que si on utilise des mots anglais pour décrire une pratique c’est qu’elle devient “cool”, non ? »

C’est notamment le parcours de vie de Felipe qui l’a poussé à vivre différemment. Il fait des études de géographie et de sciences politiques à Lyon avant de tout balancer, à la fin de son master 1.

« J’ai ciré les bancs de la fac pendant quatre ans. J’ai l’impression de n’avoir rien appris. J’ai clairement fait ces études pour rassurer mes parents. »

Il poursuit :

« Quand on m’a demandé de me projeter dans ma vie professionnelle, c’est là que je me suis dit qu’il fallait que je fasse quelque chose d’autre. Je me sentais tellement ignorant. »

Alors Felipe décide d’apprendre via des expériences plus concrètes :

« Pendant un an, j’ai vécu chez des amis, c’était sympa mais ça ne remplissait pas le frigo. J’ai fait un service civique. Je redorais le blason d’une grosse entreprise d’énergie pour un salaire de misère. Ce n’était pas génial non plus. »

Felipe travaille quelques temps comme bénévole aux Petits Frères des Pauvres de Grenoble avant de s’envoler vers de nouvelles aventures, cette fois-ci internationales.

La Nouvelle-Zélande, l’Australie, l’Inde, le Népal…

Muni de son seul sac à dos, il part pour six années à l’étranger. Les trois premières en Nouvelle-Zélande et en Australie.

« Je bossais dans la construction, les métiers manuels. C’était vraiment bien. En Nouvelle-Zélande, ces métiers là sont valorisés. En Australie, les chantiers participent au pillage des ressources des indigènes. Alors je suis parti. »

Cette fois-ci, cap sur l’Inde et le Népal. Felipe a mis de l’argent de côté, il décide donc de faire du bénévolat.

« J’en avais assez de ne penser qu’à moi. J’ai bossé pour des ONG, souvent dans l’aide à la personne. Je me suis senti vraiment bien, utile. »

Après trois ans, Felipe décide finalement de revenir en France.

« Si je restais un an de plus, je pense que je restais toute ma vie. Je voulais me reconnecter avec ma famille. »

« Mes conditions de travail m’ont dégoûté »

Rentré en France, il décide de se former à l’aide à la personne. Il trouve une formation en alternance à Paris pour passer l’équivalent du diplôme d’aide soignant. Il travaille dans un établissement pour personnes en situation de polyhandicaps.

« Ça a été la claque. Des horaires pas possibles dans des conditions vraiment dures. Au début, tu te demandes pourquoi les gens font autant la gueule dans le métro. Au bout d’un mois, toi aussi tu fais la gueule, parce que toi aussi, ta vie c’est ‘métro boulot dodo’. »

À la fin de cette année éprouvante, Felipe retourne à Lyon et travaille comme aide soignant intérimaire.

« Je bossais dans des maisons de retraite un peu trash. La façon dont sont traités les gens y est répugnante. On te demande de faire des gestes répétitifs et un peu violents avec des personnes déboussolées, délaissées. Ça m’a dégoûté. »

Après un an, il repart en voyage, cette fois-ci en Angleterre.

« J’ai passé beaucoup de temps avec des hippies qui essayaient d’éduquer leurs gamins par eux-mêmes, en autarcie. C’était vraiment bien. »

Felipe, adepte de la récupération, dans les rues de la Croix Rousse (Lyon 1er).
Felipe, adepte de la récupération, dans les rues de la Croix Rousse (Lyon 1er).

Il retourne à Lyon, pour travailler de nouveau en maison de retraite.

« C’était vraiment frustrant, il y avait les mêmes problèmes de fond que quand j’étais en intérim. Tu n’as pas les moyens de faire correctement ton travail, alors c’est un enfer. Tu ne traites pas bien les gens, pas aussi bien que tu aimerais car on te demande d’enchaîner les patients. C’est dur. »

Alors Felipe roule sa bosse, encore. Cette fois-ci, il va jouer de la musique quelques mois à Saint-Jacques-de-Compostelle en Espagne, puis part un mois faire du maraîchage. Il retente une dernière fois de s’établir entre Rhône et Saône, cette fois-ci avec succès.

« J’ai trouvé un job dans un établissement qui s’occupe de personnes qui sortent d’hôpital psychiatrique. J’y suis depuis trois ans. C’est moins crade que tous les établissements dans lesquels j’ai travaillé jusqu’ici. C’est quand même pas la joie, les patients ont des troubles lourds et on est en sous-effectifs, souvent un pour seize patients. »

Aujourd’hui, Felipe se sent bien à Lyon et envisage d’y rester encore quelques temps. Il met environ 1000 euros de côté chaque mois pour s’acheter notamment de nouveaux instruments de musique.

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