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Angélique Grimberg, « maman 2.0 » et youtubeuse à Lyon

Avec sa websérie humoristique sur le quotidien de parents, la youtubeuse Angélique Grimberg a dépassé le million d’abonnés sur sa chaîne YouTube. Un rêve éveillé mais aussi une véritable entreprise à gérer, pour celle qui se définit comme une « maman connectée », habitante de la banlieue de Lyon.

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Angelique Grimberg à Lyon

Angelique Grimberg à Lyon
La réalisatrice et productrice Angelique Grimberg sur les quais du Rhône à Lyon.Photo : ED/Rue89Lyon

Rue89Lyon : Quel a été votre parcours avant de devenir youtubeuse ?

Angélique Grimberg : Dès l’enfance, j’ai l’habitude de suivre ma mère comédienne sur des tournages. Je fais du théâtre et j’écris des sketches que je joue devant mes copains à la récréation. J’ai toujours aimé jouer la comédie, mais en grandissant j’ai un peu renié cette partie de moi.

Après des études d’information et de communication à Paris, je déménage aux Pays-Bas pour apprendre l’anglais. Je postule à un casting qui me permet de devenir la présentatrice d’un jeu télévisé diffusé en Belgique. Pendant deux ans, je travaille pour Yahoo Actualités le jour et je suis présentatrice le soir.

En 2009 je reviens en France où j’exerce le métier de rédactrice et conceptrice web à Lyon. C’est dans cette ville que je rencontre le père de mon fils, Hugo. A mon retour de congé maternité, je suis mise au placard par mon employeur. Cette expérience me dégoûte du statut d’employée. Mais être devenue maman me donne une force inimaginable. J’ai envie de créer mes propres projets.

Je deviens conseillère conjugale et je me consacre aussi à la création d’un outil de prévention santé pour les jeunes. Pour cela, je crée ma propre entreprise et je découvre à cette occasion l’entrepreneuriat. Mais le modèle économique que je choisis n’est pas le bon. Je perds beaucoup de temps et d’argent, mais je gagne en expérience.

L’année 2014 est un tournant, je vis un mal-être épouvantable. J’ai accumulé des dettes, mon couple bat de l’aile et mon père décède brutalement. En tant que conseillère conjugale, je me consacre à l’accompagnement des couples confrontés à l’IVG. Je suis alors entourée de deuils alors que j’ai besoin de parler de la vie.

« En tant que parents, nous nous mettons beaucoup de pression »

Pourquoi avez-vous décidé d’aborder dans vos vidéos le quotidien des parents avec humour et autodérision ?

C’est la fille d’une amie qui m’a fait découvrir les vidéos YouTube. A cette époque, je ne connaissais pas du tout cette plateforme, je n’étais même pas sur les réseaux sociaux.

Je me suis dis que YouTube pouvait être une manière de m’exprimer et de transmettre du positif aux autres. J’en avais besoin.

Alors j’ai économisé pour acheter un petit camescope. Ensuite j’ai écrit mes premiers textes, en m’inspirant de l’humour de la youtubeuse Natoo. Mais raconter ma vie ne m’intéressait pas. Moi, je voulais raconter des histoires.

En tant que maman, la maternité est devenue mon sujet de prédilection. Alors je m’inspire de mon quotidien mais aussi de celui des personnes qui m’entourent. Je trouve qu’il y a beaucoup de choses dans la vie de parents dont on peut rire. Mes vidéos permettent de dédramatiser certaines situations.

Votre chaîne YouTube « Angie maman 2.0 » a dépassé le million d’abonnés en 2020. Vous aviez anticipé un tel succès ?

Je ne m’attendais pas du tout à cette réussite !

Dès la sortie de ma première vidéo en 2015, il y a eu un petit buzz. En 24h j’avais atteint les 500 vues, je trouvais que c’était déjà beaucoup. Tout de suite, il y a eu un véritable engouement.

Dans les commentaires les gens réclamaient les prochaines vidéos, les amis de mes amis m’écrivaient pour m’encourager à continuer.

Selon vous, qu’est-ce qui plaît à votre public dans vos vidéos ?

Les gens me disent que c’est mon authenticité et ma spontanéité. Mes vidéos sont jouées et scénarisées, mais je suis une vraie maman avec son fils. Mon public est familial, les parents et les enfants me regardent.

Cet intérêt est aussi dû à l’angle humoristique avec lequel j’ai choisi d’aborder le sujet de la maternité. A l’époque on pouvait le voir à la télévision, mais sur YouTube c’était tout nouveau. En France, j’ai été la première à proposer ce type de contenu sur la plateforme. Cet aspect innovant a plu.

La vie de Youtubeuse : « Il n’y a pas de triche : c’est le public qui choisit ses créateurs »

Vous êtes à la fois entrepreneuse, youtubeuse et maman solo d’un petit garçon de 10 ans. Quelle est votre organisation au quotidien ?

Le lundi est consacré au tournage avec mon équipe, le comédien qui joue mon mari et le cadreur. Ensuite le mardi il faut monter la vidéo. En général, je délègue cette partie au monteur, pour pouvoir gérer d’autres aspects de mon activité.

J’écris le script de la vidéo suivante en échangeant avec mon assistante. J’ai 38 ans, elle est plus jeune que moi, ce qui me permet d’avoir un autre regard sur les sujets que j’aborde. Quand on publie une vidéo par semaine il faut avoir de l’inspiration.

La journée du mercredi est consacrée à mon fils mais en parallèle je réponds aux mails, je filtre les propositions de partenariats, je publie sur mes réseaux sociaux Instagram, Facebook et Tik Tok.

Entre la comptabilité, la préparation des nouveaux projets et l’organisation des tournages, je suis très occupée. Youtubeur, c’est une activité qui regroupe une dizaine d’autre métiers.

Je n’ai pas le temps de m’ennuyer, mais j’aime cette liberté que mon métier me procure !

illustration extraite du livre "Comment je suis devenue youtubeuse" d'Angélique Grimberg
Illustration extraite du livre d’Angélique Grimberg « Comment je suis devenue youtubeuse » (Albin Michel, 2021).Photo : Céline Charlès

Comment vos proches vivent-ils le fait que vous soyez devenue youtubeuse ?

C’est en accord avec ma personnalité et qui je suis. Ma famille sait que je vais à toute vitesse dans ma tête, que j’aime inventer et que cette activité est un moyen d’expression pour moi.

Certains proches regardent toutes mes stories sur Instagram et toutes mes vidéos YouTube. Ils m’aident en me conseillant et en me donnant des idées.

Ceux qui m’entourent se rendent compte qu’ il y a du sens et un gros travail derrière ce que je fais.

 « Etre youtubeur est un métier : il ne suffit pas de sortir son téléphone pour se filmer »

Aujourd’hui vous arrivez à vivre de votre activité sur YouTube ?

Lorsque j’ai crée ma chaîne YouTube en 2015, j’ai continué en parallèle à travailler comme conseillère conjugale. C’était un loisir, jusqu’à ce que mon demande des factures !

Après cette première année, j’ai eu tellement de potentiel de développement que j’ai décidé d’arrêter mon activité professionnelle. C’était une décision commune avec mon ex-compagnon. Il avait un emploi stable, ce qui m’a permis de me lancer dans l’entrepreneuriat sur YouTube.

J’ai réussi à me verser un salaire un an et demi après la création de ma chaîne. Aujourd’hui mon activité marche bien.

Auparavant mes sources de revenus étaient partagées entre les revenus publicitaires de YouTube et ceux issus des partenariats sponsorisés. Maintenant je gagne beaucoup moins avec les publicités. Avec la crise du Covid-19 il y aussi moins d’annonceurs. Mon revenu vient principalement des partenariats sponsorisés.

« J’ai fait un burn-out il y a deux ans, cela arrive à beaucoup de youtubeurs« 

Quelles sont les difficultés que vous pouvez rencontrer en tant que youtubeuse ?

Ce métier est nouveau et souvent mal compris. On m’a souvent demandé quel était mon vrai métier. Il n’est pas toujours évident d’être crédible, notamment auprès des banques !

Travailler sur YouTube est une activité qui peut être très chronophage, dans laquelle on s’investit corps et âme. Je réponds à mes messages le soir, parfois même la nuit. On peut vite se fatiguer. J’ai fait un burn-out il y a deux ans, cela arrive à beaucoup de youtubeurs.

Le confinement a été l’occasion de me reposer. J’étais si fatiguée que je n’avais plus la capacité à prendre du recul sur mon contenu. Sans cela on peut vite s’y perdre, ne plus fournir la même qualité de vidéos, et s’égarer dans les thématiques.

Il faut aussi faire attention à ne pas tomber dans le monde de l’image et de l’appât du gain. Il faut rester soi et garder les pieds sur terre. Sur YouTube on peut très vite gagner en notoriété mais aussi vite redescendre.

YouTube est un monde qui va très rapidement alors il faut être réactif.

illustration extraite du livre "Comment je suis devenue youtubeuse" d'Angélique Grimberg
Illustration extraite du livre d’Angélique Grimberg « Comment je suis devenue youtubeuse » (Albin Michel, 2021).Photo : Céline Charlès

« Mon fils est aussi capable de me dire ‘je ne veux pas que tu mettes cette séquence’ »

Dans certaines de vos vidéos vous mettez en scène votre fils, dans d’autres vous abordez certaines difficultés personnelles, comme votre recours à la procréation médicale assistée (PMA). Comment fixez-vous la limite entre votre vie privée et ce que vous dévoilez sur YouTube ?

La frontière est ténue entre la vie privée et la vie publique. L’équilibre entre les deux peut être instable.

Je suis très claire entre ce que j’ai envie de dévoiler et ce que je ne veux pas. J’ai toujours porté une grande attention à cela, je sais quelles thématiques je veux aborder publiquement et je n’y déroge pas.

C’est plus simple pour moi qui fait des vidéos basées sur de la fiction. J’ai pu aménager mon domicile en installant une annexe : c’est un studio dans lequel je peux réaliser mes vidéos.

Mais c’est vrai que plus on en dévoile sur notre vie privée et plus cela plait aux gens, surtout sur Instagram.

Concernant l’exposition de mon fils, je ne gère pas une chaîne YouTube d’enfant, donc il n’est pas au centre de mes vidéos. Il intervient en tant que comédien quand il a envie. D’ailleurs il est plutôt fier et content de jouer dans les vidéos.

Mais mon fils est aussi capable de me dire « je ne veux pas que tu mettes cette séquence » et je le respecte. Si plus tard il a honte et s’il veut que je supprime les vidéos dans lesquelles il apparaît, je respecterai son choix.

Pour son apparition plus régulière dans mes vidéos de vlogs sponsorisés, mon fils est inscrit dans une agence. Cela lui permet d’avoir ses propres cachets qu’il touchera à sa majorité.

Dans quelle mesure le fait d’être une Youtubeuse à Lyon et non à Paris a une influence sur votre activité ?

Le fait de vivre à Lyon n’influence pas vraiment mon activité, car tout se passe sur les réseaux sociaux. C’est l’avantage de ce métier : on peut le faire depuis n’importe quel endroit. Il m’arrive aussi de me déplacer, en allant à des salons, pour discuter avec des gens.

Je préfère tout de même vivre à Lyon plutôt qu’à Paris, surtout en famille. Il y a les avantages d’une grande ville, sans les inconvénients de Paris.

Mais j’ai déjà eu l’impression d’être à l’écart des autres youtubeurs parisiens. Notamment parce que les rencontres entre youtubeurs ont généralement lieu à Paris. L’avantage avec les confinements, c’est que les rencontres ont souvent eu lieu en visioconférences !

En dehors de la poursuite de votre websérie sur YouTube, quels sont vos projets ?

En mai 2021 j’ai lancé mon propre podcast :  « Angie story ». Comme un journal intime, je raconte le parcours que je traverse pour essayer d’avoir un second enfant, je partage mes ressentis et j’interroge des professionnels sur le sujet. J’ai décidé de parler de mon recours à la PMA, car j’ai si on parle beaucoup de la grossesse, j’ai remarqué qu’on évoquait peu « l’avant grossesse ».

Le gros projet sur lequel je travaille depuis trois ans est la création d’une série animée intitulée : « Théo et les bons tuyaux ». Actuellement je collecte des fonds pour créer le premier pilote de la série que je crée avec une société de production.

Cette série met en scène Théo, un petit garçon atteint de troubles autistiques. Ce personnage est confronté à des situations du quotidien qui sont autant d’occasion de grandir. C’est son imagination qui lui permet de trouver des clefs pour avancer dans la réalité.

L’objectif de cette série est d’être inclusive sans tomber dans les stéréotypes. Je veux montrer que la différence est une richesse.

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