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ZFE à Lyon : « L’industrie n’est pas prête pour le tout électrique »

Dans le cadre de la concertation sur l’élargissement de la Zone à faibles émissions (ZFE) que la Métropole de Lyon veut mettre en place, une réunion a eu lieu ce lundi, avec les entreprises de la région. L’occasion d’avoir quelques éclaircissements sur le futur de la zone pour les premiers concernés -et premiers inquiets.

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Zone à faibles émissions. Carte du Grand Lyon

On en prend des nouveaux, et on recommence. Ce lundi 18 octobre, la Métropole de Lyon organisait une « rencontre d’information entre les professionnels et les élus », dans le cadre du projet d’amplification de la Zone à faibles émissions (ZFE). Alors que le sujet, technique mais primordial, avait (très) peu attiré les habitants, cette nouvelle visioconférence a rencontré un certain succès auprès des professionnels.

Si 90 habitants avaient assisté à la première réunion de concertation, ils étaient 130 en ligne ce lundi en plein dans l’après-midi.

Et pour cause : le sujet les concerne déjà. Depuis le 1er janvier 2021, les poids lourds et véhicules utilitaires légers destinés au transport de marchandises (catégorie N sur la carte grise), classés Crit’Air 3, 4 et 5 ou non-classés ne peuvent plus circuler, ni stationner à l’intérieur du périmètre de l’actuelle zone (lire encadré ci-après).

Des dérogations ont pu cependant être accordées. Avec leur fin potentielle, les questions s’accélèrent. En voici quelques-unes qui ont été posées par des chefs d’entreprise dans une réunion-visio marquée (comme souvent) par quelques soucis techniques en début et en fin de réunion. Avantage (ou pas) de ce rendez-vous numérique, les échanges ont été plutôt calmes et mesurés, loin des crispations que peut entrainer habituellement ce sujet.

ZFE de Lyon : quel calendrier pour les professionnels ?

C’était certainement la question n°1 : quel temps reste-t-il aux entreprises pour changer de véhicules ? Quelles aides pourront-elles avoir pour cela ?

C’est à voir. Du côté de la Métropole, on assure que tous les dossiers seront analysés un par un.

« Si un forain a un véhicule depuis trois ans, Crit’Air 3, qu’il ne conduit que très rarement sur Lyon, ce serait une ineptie écologique de lui demander de changer de véhicule, prend comme exemple Jean-Charles Kohlhaas (EELV), vice-président de la Métropole en charge des déplacements, des intermodalités et de la logistique urbaine. Que ce soit pour les aides ou les dérogations, on verra vraiment au cas par cas. »

Idem sur un calendrier plus général pour l’élargissement de la ZFE à Lyon. En 2026, les professionnels seront concernés par la sortie des Crit’air 2 de son périmètre actuel (diesels notamment). Pour l’instant, aucune autre étape intermédiaire n’est actée. « Il se pourrait que d’autres marches se rajoutent pour gravir la montagne », indique l’élu.

Ces dernières devraient être en partie définies durant la concertation actuelle.

Jean-Charles Kohlhaas (EELV), 5ème vice-président, délégué aux déplacements, aux intermodalités et à la logistique urbaine, en charge de la ZFE de Lyon. ©HH/Rue89Lyon
Jean-Charles Kohlhaas (EELV), 5ème vice-président, délégué aux déplacements, aux intermodalités et à la logistique urbainePhoto : HH/Rue89Lyon

Élargissement de la ZFE : Faut-il avoir peur des amendes à Lyon ?

Apparemment, pas trop pour 2022.

« Je crains que l’Etat ne nous donne pas beaucoup de marge de manœuvre d’ici quelques mois, voire quelques années », a indiqué Jean-Charles Kohlhaas.

Déjà dans un entretien au Progrès, le président de la Métropole, Bruno Bernard (EELV) avait déjà menacé de porter plainte contre l’Etat si rien n’était fait sur le sujet. Visiblement, pour l’heure, les contraventions peuvent être seulement données lors de défauts de stationnement. Une solution avec radar pourrait être envisagée pour début (ou fin 2023).

C’est l’inquiétude majeure soulevée par Pierre Albrieux, élu à la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME).

« Aujourd’hui, nous avons une dizaine de milliers de petits véhicules de 5 m3, avec une charge utile de 1 tonne, à 1,4 tonne, qui circulent dans la Métropole pour des PME. Avez-vous conscience que 100 % de ces véhicules vont devoir être changés d’ici cinq ans ? L’industrie n’est pas prête. Il est aujourd’hui impossible économiquement de modifier notre parc auto à ce point compte tenu de l’énormité de la tâche ! », s’est-il inquiété.

Réponse de Jean-Charles Kohlhaas :

« Si on ne met pas d’ambition, on ira nulle part. »

Se disant conscient de la difficulté de la montagne « à gravir », l’élu s’est voulu conciliant.

« Si on doit faire une dérogation pour les professionnels parce que les véhicules mettent 10 mois à être construits, nous le ferons, approuve-t-il. Mais si nous baissons notre ambition, les constructeurs ne s’adapteront pas. »

Parc de bornes électriques : le territoire est-il prêt ?

Lyon est-elle prête pour du tout électrique ? Pas totalement visiblement. Pour s’adapter aux exigences de la ZFE, beaucoup d’entreprises se tournent vers les véhicules électriques. Sauf que, pour accompagner cela, le territoire ne dispose pas encore de suffisamment de bornes.

« On a un vrai problème », admet à propos Jean-Charles Kohlhaas.

Selon lui, il y a un point de blocage actuellement pour installer des bornes de recharges « rapides », notamment, à Lyon. Pour des raisons patrimoniales, le corps des architectes des bâtiments de France (ABF) s’oppose à l’installation de ces dernières. « Pourtant, elles ne sont pas beaucoup plus grosses que leurs consœurs », assure-t-il.

Est-ce qu’il ne faudrait pas arrêter les véhicules polluants à l’entrée de la Métropole ?

C’est une des possibilités pour éviter que les véhicules polluants entrent dans la ZFE : développer les hôtels de logistique urbaine. Ces sortes de « parcs-relais » pour spécialistes de la logistique permettraient de laisser les véhicules polluants à l’entrée de la Métropole pour terminer l’acheminement dans la Métropole en véhicule « vert ». Une solution proposée par Philippe Bossin, directeur logistique urbaine à LPA (Lyon Parc auto).

Avoir à Lyon trois « gros » hôtels de logistique urbaine

Selon Jean-Charles Kohlhaas, des projets peuvent être développés pour cela. Il rappelle le lancement d’un appel à manifestation d’intérêt pour le fluvial, avec le développement, notamment, de l’entreprise ULS prévue pour 2022. « Il faut qu’on arrive à multiplier ces types d’initiative », espère-t-il.

Pour l’élu, avoir trois « gros » hôtels de logistique urbaine serait une bonne chose pour le territoire. Un projet de ce type grand de 30 000 m2 est déjà en cours au port Edouard Herriot. Néanmoins, ce dernier a mis un certain temps à décoller et la question du foncier risque de se poser en développer d’autres sur la métropole.

« On pourrait aussi avoir une logistique propre en amont, commente Jean-Charles Kohlhaas. Cinq kilomètres propres en ville, c’est bien. Mais quand les 500 kilomètres avant le sont aussi, c’est mieux. »

Pour cela, l’élu remet en avant la nécessité de développer le ferroviaire via la mise en place, notamment, du Contournement ferroviaire de l’agglomération lyonnaise (CFAL). Un serpent de mer dont la réalisation dépend, pour le coup, de l’Etat.


#Emeline Baume

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