Laurent Wauquiez, président de la région Auvergne- Rhône-Alpes lors de ses voeux 2019. Le 28 janvier 2019 au musée des Tissus et des Arts Décoratifs.Photo : MG/Rue89Lyon
Ce jeudi 19 octobre, la cellule d’investigation de Radio France révèle que plusieurs salariés de la Région pourraient être soupçonnés d’emplois fantômes auprès de Laurent Wauquiez. Ce dernier a répondu en soupçonnant un ancien directeur d’avoir fourni de fausses informations à la chaîne publique.
L’article a été mis à jour le 19 octobre à 19h05 : à la suite d’un communiqué de la région.
Des personnes ont-elles été payées par la Région Auvergne Rhône-Alpes sans travailler pour elle ? C’est du moins, ce qui ressort d’une enquête publiée par nos confrères de France Info, ce jeudi 19 octobre.
La cellule d’investigation de Radio France s’est intéressée à quatre salariés du conseil régional. Parmi eux, le cas de Nawel G pose particulièrement question. Selon les informations de la chaîne publique, les services administratifs de la collectivité se sont étonnés en avril dernier, auprès du président Laurent Wauquiez (LR), de l’existence de ce poste qui « ne figurait dans aucun organigramme » et dont le contenu n’était pas connu des équipes. Celui-ci a pourtant été maintenu par le président de la région Auvergne Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez (LR). Avec un salaire mensuel net de 5000 euros par mois, Nawel G travaillait depuis Paris, où elle dirigeait une agence de conseil, dans un bureau loué par la Région plus de 12 000 euros par an. Toujours selon France Info, elle semble avoir été depuis peu démise de ses fonctions à la Région.
Des emplois fantômes pour que Laurent Wauquiez prépare Paris ?
Trois autres cas posent question, selon France Info. Tous les trois sont conseillers au sein du cabinet de Laurent Wauquiez, qui compte au total 16 collaborateurs. Parmi eux : un certain Arnaud B dont la rémunération mensuelle se situerait aux alentours de 10 000 euros brut mensuels, selon une source interne. Arnaud B. dispose d’un bureau attitré, le 5-040, au 5e étage de l’hôtel de région à Lyon. Mais, selon les éléments de l’enquête, il travaillerait en réalité à Paris et ne gérerait pas de sujets « locaux ». En tout cas, il serait presque inconnu à Lyon.
À côté de ses bureaux, à Paris, une autre collaboratrice de Laurent Wauquiez travaillerait avec lui. Cette dernière ne mentionnerait même pas son poste à la Région sur Linked In. Elle est pourtant bien rémunérée par la collectivité.
« Vous vous servez de la Région comme marchepied de votre ambition national avec des moyens qui ne sont pas les vôtres », l’a accusé Fabienne Grébert (EELV), présidente du groupe écologiste au Conseil régional, en pleine séance plénière du Conseil régional.
Une affaire un an après les dîners des sommets
Un an tout juste après les révélations de Médiapart sur les dîners des sommets, organisés par Laurent Wauquiez, cette enquête pose (une nouvelle fois) des questions sur la forte présence du président de la Région Auvergne Rhône-Alpes à Paris. Selon son agenda du printemps 2023, qu’a pu consulter la cellule d’investigation de Radio France, le patron de la Région Auvergne-Rhône-Alpes séjourne chez lui (en région) un à deux jours par semaine, au maximum trois. Une chose plutôt pratique pour préparer une campagne présidentielle, moins pour choyer l’électorat du Puy-de-Dôme.
Emplois fantômes : la Région réplique en attaquant un ancien directeur
Par l’intermédiaire du service presse de la Région, Laurent Wauquiez a réagi à ces révélations avec fermeté. « La présentation des faits relèvent d’une grande malhonnêteté intellectuelle (…) la Région a besoin d’une représentation à Paris », s’est défendue la collectivité dans un communiqué. Celui-ci répond point par point sur les faits dénoncés dans l’enquête et assure que le chiffre annoncé pour le loyer du bureau de Nawel G. à Paris est faux.
Enfin, et de façon assez surprenante, la Région a attaqué un ancien directeur général des services. À l’époque des faits, il s’agissait de Franck-Olivier Lachaud.
« Ce directeur général des services n’est pas resté très longtemps en poste après avoir rencontré des difficultés de gestion interne. Il est assez vraisemblable que ces fausses informations sur lesquelles se sont appuyés les journalistes (ceux de France Info, ndlr), ne soient pas étrangères à cette situation », tance la Région.
Dans une enquête publiée en mai, le site d’investigation Médiacités révélait que Franck-Olivier Lachaud s’était aussi rendu coupable « d’avoir froissé des élus proches de Laurent Wauquiez en retoquant des demandes de subventions qui sortaient du cadre légal ».
En tout cas, à la Région, on aime visiblement laver son linge sale en public.
Arnaque aux énergies renouvelables, les particuliers de la région lyonnaise sont loin d’être épargnés.Photo : LB/Rue89Lyon
[Enquête] Les énergies renouvelables s’invitent de plus en plus dans les foyers. Certaines sociétés spécialisées dans ces équipements profitent de cet essor pour flouer leurs client·es. Rue89Lyon a enquêté sur ces pratiques frauduleuses dans le Rhône et sur un fournisseur, Free Energie, qui cumule les griefs.
Ecorenove, fournisseur de panneaux photovoltaïques, n’aura pas su duper ses client·es sans se faire pincer. En 2019, le dirigeant de cette entreprise de Sainte-Foy-lès-Lyon a écopé de 18 mois de prison avec sursis pour « pratiques commerciales trompeuses » et de 600 000 euros d’amende. Le 15 décembre 2022, ses client·es ont finalement été dédommagé·es, comme le rapporte une décision de la Cour d’appel de Grenoble.
Une affaire comme il en existe bien d’autres depuis une dizaine d’années. Intéressés par un secteur où les aides de l’État se multiplient, des sociétés se lancent comme fournisseurs ou installateurs de panneaux solaires, chaudières à granulés, ou pompes à chaleur. Le tout en faisant bien peu de cas de leurs client·es une fois l’argent encaissé.
Sommes d’argent astronomiques, installations mal effectuées, promesses commerciales non-tenues ou encore SAV absent : ces client·es deviennent victimes de pratiques frauduleuses bien ficelées, similaires d’une société à l’autre.
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Les élu·es locaux réunis par l’association Villes & Banlieues, pour lancer « l’Appel de Lyon » pour les quartiers populaires.Photo : MA/Rue89Lyon
Réunis à Lyon à l’invitation de l’association Villes et banlieues, une quarantaine de maires ont lancé un « Appel » pour les quartiers populaires. Les édiles demandent à l’État d’y investir dans les domaines de l’éducation, de la sécurité ou encore de la transition écologique.
L’association Villes et Banlieues a choisi Lyon pour fêter ses 40 ans. En plus de souffler ses bougies, elle a aussi fait un vœu : que l’État se mobilise pour les quartiers populaires. Six ans après « l’Appel de Grigny de 2017 », c’est l’Appel de Lyon que l’association a adressé à Emmanuel Macron. Signé par une quarantaine d’élu·es locaux, on y retrouve Grégory Doucet (EELV), maire de Lyon, et Bruno Bernard (EELV), président de la Métropole de Lyon.
« Nous vous appelons à réimplanter des services publics locaux et nationaux au cœur des quartiers populaires », écrivent-ils. Les élu·es demandent au gouvernement d’agir sur cinq axes : l’éducation, la sécurité publique, la formation professionnelle et le plein emploi, la rénovation urbaine et la transition écologique et énergétique.
« Nous ne sommes pas uniquement dans la plainte mais aussi dans la proposition, soutient Gilles Leproust (PCF) président de l’association et maire d’Allonnes (72). Nous avons des expériences positives dans nos territoires, qui peuvent s’appliquer à plus grande échelle. Pour ça, nous avons besoin de l’appui de l’État. »
Un appel que Grégory Doucet lançait déjà dans nos colonnes, le 10 octobre dernier, dans une interview co-publiée avec Mediacités.
À Lyon, la colère des élu·es de quartiers populaires face aux reports du Comité interministériel des Villes
Les élus avaient ensuite un rendez-vous important… « Il faut y aller, la Ministre vous attend », a alerté une attachée de presse. « Nous on l’attend depuis plusieurs années ! », lui a répondu le président de Villes & Banlieues, avant de filer rejoindre Dominique Faure (Parti radical), ministre déléguée à la cohésion des territoires. Sur invitation de l’association, elle a donné un discours devant l’assemblée des élu·es, en remplacement de Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d’État chargée de la Ville. Elle y a fait une annonce particulièrement attendue :
« J’ai le plaisir de vous annoncer que le Comité interministériel des Villes (CIV), tant attendu et repoussé, se tiendra finalement le 27 octobre. »
Plus tôt dans la journée, les élu·es locaux avaient fustigé le report de ce CIV, d’abord prévu le 9 octobre, et qui avait déjà été repoussé à de nombreuses reprises auparavant. Ce comité coordonne plusieurs ministères et décide de la politique de la Ville, c’est-à-dire des actions à déployer dans les quartiers populaires. « Le CIV ne pourra pas être autre qu’historique, sinon il sera déceptif », a relevé Damien Allouch, maire (PS) d’Épinay-sous-Sénart (91), évoquant le contexte des émeutes et de la crise sociale que vivent ces quartiers.
« Attention à ce qui risque de se passer dans quelques mois ou quelques années, et surtout à l’aube des prochaines élections présidentielles. Il pourrait y avoir un vote contre nature des habitants », a-t-il prévenu. L’élu craint un potentiel passage à l’extrême-droite dans ces territoires, si rien n’y est fait.
À Rue89Lyon depuis 2022, aujourd’hui journaliste associée. Enquêter sur l’extrême droite, c’est lutter contre l’extrême droite.
J’écris aussi sur la politique, le sans-abrisme, le logement, les violences sexistes et sexuelles. Pour me filer une info ou me contacter, c’est par là : mallenou@rue89lyon.fr
Une parti de l’exposition d’artistes russes en exil, aux Ateliers du TNG, à Lyon. @Anastasia Korostelkina
Artem Arsenian et Nika Parkhomovskaya ont fui la Russie au printemps 2022, à la suite de l’invasion de l’Ukraine. À l’affiche d’une exposition dans les Ateliers du Théâtre nouvelle génération (Lyon 2e), ils racontent à Rue89Lyon leurs vies d’artistes en exil. Interview croisée.
L’exposition interactive Musée des histoires (non) imaginées du TNG, propose de multiples regards d’artistes d’origine russe anti-guerre ayant fui leur pays après l’invasion de l’Ukraine, le 24 février 2022. Artem Arsenian et Nika Parkhomovskaya sont les commissaires de cette exposition.
Une parti de l’exposition d’artistes russes en exil, aux Ateliers du TNG, à Lyon. @Anastasia Korostelkina
Rue89Lyon : Quand et pourquoi avez-vous quitté la Russie?
Artem Arsenian : Je suis parti en mars 2022. Je travaillais pour le festival Nouveau théâtre européen (NET). Nous avons reçu des menaces pour nos positions anti-guerre et on pensait qu’il pouvait nous arriver des choses, à moi et à l’équipe du festival. J’ai d’abord fui à Erevan, en Arménie, car j’ai des origines arméniennes. Ensuite le projet avec le TNG a démarré. On m’a proposé la résidence d’artiste à Lyon. J’y suis arrivé en octobre. J’ai retrouvé pas mal de personnes avec qui j’avais travaillé auparavant.
Nika Parkhomovskaya : J’ai pris la décision de partir dès l’invasion, mais je ne suis partie qu’en juin. Je ne savais pas où aller, même si j’ai beaucoup d’amis et de projets en Europe. Comme j’avais étudié le français à l’école, j’ai déménagé en juin en Bretagne. Je n’ai rien trouvé avant qu’on me propose la résidence à Lyon.
En exil à Lyon : « Ceux qui sont restés là-bas sont dans une forme de résistance »
Partir ou rester, le dilemme s’est posé pour de nombreux artistes russes. Comment vivez-vous le fait de vivre loin de vos proches?
Artem : Ma famille est restée en Russie, mais nous nous sommes revus plusieurs fois en Arménie et en Géorgie, où mon père est né. Malheureusement, je ne peux pas retourner au pays. J’ai encore aussi beaucoup d’amis la bas, même si beaucoup d’autres sont partis.
Nika : Ma mère vit toujours à Saint-Petersbourg où je suis née. Elle pourrait voyager, mais il n’y a plus de vols directs et l’ensemble dure près de 40 heures. Je me dis que je ne la reverrai pas avant longtemps, car j’ai pris la décision de ne pas revenir.
D’une part, je ne le souhaite pas et d’autre part, je continue à écrire des articles anti-guerre pour la presse européenne. Même si je le voulais, je ne pourrais pas rentrer. On connaît des gens qui sont retournés en Russie pour voir leurs parents et qui ont été arrêtés à la frontière. On sait que ça peut arriver.
Nika Parkhomovskaya et Artem Arsenian, deux artistes russes en exil à Lyon.Photo : Photo Elian Delacôte/Rue89Lyon
Vous comprenez ceux qui sont restés?
Nika : Certains sont restés en se disant que qu’il y avait quelque chose à faire là-bas, aider les gens en difficulté… Beaucoup de mes amis sont restés pour ces raisons. Je les comprends.
Artem : Ils essayent de rendre les choses meilleures, pour les personnes handicapées, les réfugiés, les déplacés d’Ukraine : ces groupes sont en danger là-bas. C’est un travail impressionnant. C’est une forme de résistance.
« J’ai compris que le monde que je connaissais s’effondrait sous mes yeux »
Comment avez-vous vécu vos premiers mois d’exil en tant qu’artistes?
Artem : Les premiers temps à Erevan [capital de l’Arménin, ndlr] ont été très difficiles. J’étais incapable de produire. Je regardais le infos et je comprenais que le monde que je connaissais s’effondrait sous mes yeux. Puis, petit à petit, une communauté s’est organisée à Erevan, avec des locaux. L’Arménie a une histoire traumatique avec l’Azerbaïdjan. On sait comment ce pays peut se sentir et on en parlait beaucoup avec les habitants.
J’ai compris que je voulais faire de nouveaux projets contre le colonialisme et le projet impérialiste russe. On a travaillé avec des amis rapatriés en Arménie, on a créé un festival à Erevan. J’ai eu envie d’agir… C’est comme ça que j’ai trouvé le moyen de me remettre au travail.
Nika: J’ai beaucoup perdu quand j’ai quitté la Russie. Je travaillais comme journaliste à la télé. Je travaillais avec des personnes handicapées, des prisonniers. Quand je suis arrivée ici, je savais que ça allait prendre du temps de me remettre au travail, d’autant que mon français n’est pas parfait.
Les premiers mois ont été compliqués. Je devais démarrer quelque chose de plus personnel. J’ai créé un groupe d’artistes russes exilés en France. Ça a commencé avec un petit groupe de quelques personnes sur Telegram. Aujourd’hui on est plus de 1500.
« En Russie, le manque de confiance est un problème »
Comment vous-êtes vous adaptés au contexte artistique français?
Nika : Les façons de fonctionner sont très différentes ici, c’est une autre approche à assimiler. On était connus en Russie. Ici, nous ne sommes personne. Peu importe ton âge ici, il faut toujours se renouveler. Pour moi c’était dur d’avoir encore des choses à prouver.
En Russie l’approche du travail est différente, il y a un gros manque de confiance entre les gens, ce qui nous amène à tout vouloir contrôler. Ici, on n’a pas à surveiller le travail des autres.
Ce manque de confiance est un problème. On ne croit pas en notre gouvernement, on ne croit pas les autres, on ne croit pas en nous même… La confiance est la chose la plus difficile à apprendre.
Artem : En Russie , c’est moins réglementé, tu peux travailler 12 heures par jour, les week-ends… Ici au TNG avec ce projet, les conditions de travail comptent. Mon univers de travail est respecté. C’était une belle découverte.
Nika : Oui, ici, les gens se respectent. On a appris à faire une pause déjeuner entre midi et deux (rires), c’est une manière de se respecter nous même ! En Russie, on peut oublier de manger pendant des jours quand on est concentré sur un projet. Ce sont des petites choses, ça nous plait, même si c’est parfois dur de s’ajuster.
À Lyon : « J’aimerais pouvoir parler d’autre chose que de l’exil et la guerre »
En tant que personnes ayant fui la Russie, vous sentez-vous forcés de n’exprimer votre art qu’au travers des thématiques de l’exilet de la guerre?
Artem : Je ne me sens pas prisonnier de la situation. C’est notre premier projet en France, les gens ne nous connaissent pas encore, l’idée c’est de parler de nous. Et ce qui nous concerne le plus en ce moment, c’est l’exil et la guerre. C’est important pour nous de faire connaître aux Français notre position la dessus. Mais j’aimerais aussi parler d’autre chose que de la Russie, et par exemple travailler autour du théâtre arménien, que j’aimerais faire connaître en France. Le théâtre occidental s’intéresse beaucoup à la Russie, mais moins aux anciens pays du bloc de l’est.
Nika : C’est une excellente question. Je continue mon travail de journaliste dans des médias suisses, et on me demande énormément de travailler sur des russes en exil, ou des opposants restés au pays. Ce n’est pas mon objectif de me concentrer sur ce sujet. Mais je suis en exil, j’ai besoin d’argent. C’est dur de refuser d’écrire sur la Russie. J’aimerais pouvoir parler d’autre chose, par exemple, travailler sur la question des migrations, partout dans le monde. Mais cette exposition reste très importante pour moi.
Musée des histoires (non) imaginées, jusqu’au 19 octobre aux Ateliers Presqu’île, 5 Rue Petit David, 69002 Lyon.
Originaire de Lorraine, je suis arrivé à Lyon en 2020, après plusieurs années à Paris. J’ai rejoint Rue89Lyon en 2023, avec le projet de reprise en coopérative. Désormais associé et rédacteur en chef adjoint du média, je suis plutôt branché justice et mobilités. J’aime bien titiller la Région aussi, quand l’occasion se présente. Si vous avez une info ou que vous souhaitez me joindre, c’est par là : edelacote@rue89lyon.fr
L’usine Arkema, de Pierre-Bénite, au cœur d’un scandale autour des perfluorés dans la métropole de Lyon.Photo : PL/Rue89Lyon
À la mi-octobre, l’État a fait un nouveau point sur les enquêtes en cours pour connaître l’ampleur de la pollution aux perfluorés au sud de Lyon, notamment dans l’eau. La préfecture maintient ses recommandation, notamment sur la consommation d’œufs.
Les comités de suivi se poursuivent, au sud de Lyon. Depuis les révélations de l’émission Vert de Rage, en mai 2022, les analyses s’enchaînent pour circonscrire l’étendue de la pollution aux perfluorés, au sud de Lyon. Se voulant rassurants, les services de l’État ont communiqué, jeudi 12 octobre, sur les résultats d’études réalisées sur les rejets aqueux des industriels.
Selon eux, les rejets émis par l’usine Daikin restent « faibles » tandis que les rejets produits par Arkema « respectent les paliers de réduction. » Pour rappel, l’État avait ordonné par arrêté préfectoral à l’usine de Pierre-Bénite d’arrêter sa production de perfluorés pour… décembre 2024. D’ici là, l’usine doit baisser progressivement cette production. Elle est, visiblement, dans les clous.
Des paroles qui ne devraient pas vraiment rassurer les associations et collectifs d’habitants du secteur. Certains auraient voulu que ces derniers interdisent totalement et immédiatement l’usage de ces perfluorés.
Perfluorés : un plan pour l’eau encore vaporeux…
À l’issue de ce même comité, la préfecture a annoncé un « plan d’action » à venir sur l’eau potable. Sur ce point, l’Agence régionale de santé (ARS) avait rendu des résultats peu reluisants, en juin. « Même si les chiffres sont légèrement au-dessus de la norme, l’eau reste potable », avait voulu rassurer Frédéric Le Louédec, un représentant de l’ARS lors d’une réunion publique à laquelle s’était rendu le Progrès.
De son côté le collectif Ozon l’eau saine, présent dans le pays de l’Ozon, au sud de Lyon, avait mené ses propres analyses. Réalisées sur les puits de Pierre-Bénite, Chasse-sur-Rhône, Communay, etc., ces dernières, effectuées avec l’expertise de l’Université de Montréal au Canada, avaient abouti à des concentrations systématiquement au-dessus de la réglementation européenne. Les concentrations relevées étaient également supérieures à celles des études faites par la préfecture.
Bref, autant dire que ce « plan d’action » était attendu. Mais, pour l’heure, ses contours restent flous. Les services de l’État parlent seulement de « nouvelles investigations » sur les rejets industriels et de « réalisation de travaux nécessaires au rétablissement de la qualité de l’eau. »
A quel point les perfluorés ont pollué l’eau ? C’est une des grandes questions du scandale en cours. Photo de septembre 2023.Photo : PL/Rue89Lyon
Œufs de particuliers : des mesures toujours en cours
La préfecture a également conservé ses « recommandations » concernant les poulaillers de particuliers. Pierre-Bénite, Saint-Genis-Laval, Irginy, Lyon 2e, Lyon 7e, Lyon 8e… En tout, il est toujours fortement déconseillé de manger des œufs « maisons » dans 18 communes du secteur. Pour rappel : l’État avait également fortement déconseillé la pêche au sud du Rhône. À noter que des prélèvements ont été également faits sur différents fruits et légumes d’un jardin de Pierre-Bénite, cet été. Celui-ci alimentait les cantines de la ville.
Tous les résultats sont en dessous des valeurs indicatives européennes, a voulu rassurer la préfecture. Hormis un léger dépassement constaté pour l’échantillon de carottes.
En parallèle, d’autres enquêtes sont effectuées sur l’environnement proche des usines. Le sol de jardins, mais aussi de 15 établissements scolaires, sont en phase d’analyse pour la pollution de 35 PFAS. Ses résultats, tout comme ceux de nouvelles enquêtes de la préfecture, devraient être connus d’ici la fin de l’année. De son côté, le collectif Ozon l’eau saine a relancé des études dont les résultats devraient être également connues d’ici fin 2023.
À noter que les installations de Daikin et d’Arkema ont connu une période d’arrêt depuis mi-septembre. Elles ont été mises en pause durant six semaines dans le cadre d’une vaste opération de maintenance.
Journaliste lyonnais fan de l’Ouest, je suis à Rue89Lyon depuis 2020. Aujourd’hui associé et directeur de publication, je couvre les questions sociales mais aussi écologiques (pollutions industrielles, scandale des perfluorés). Le travail, c’est la santé, à condition que le droit soit respecté. Un œil politique sur le Rhône. Pour me laisser une info, c’est ici plemerle@rue89lyon.fr.
L’usine Arkema, de Pierre-Bénite, au cœur d’un scandale autour des perfluorés dans la métropole de Lyon.Photo : PL/Rue89Lyon
Dans quelques jours, la justice doit rendre une décision concernant le scandale des perfluorés, au sud de Lyon. Un référé visait à faire payer Arkema pour sa pollution. À cette occasion, Rue89Lyon publie une tribune de syndicats et d’associatifs. Leur but ? Que la santé ne soit plus « sacrifiée sur l’autel des profits industriels. »
C’est à présent une question de jours. Cette semaine, le juge des libertés et de la détention devrait se prononcer sur une requête transmise début octobre par le Vice-procureur de la République. Cette dernière concerne un référé environnemental déposé contre Arkema, le 25 mai 2023. Objectif final : faire payer le groupe, responsable de la pollution aux perfluorés, notamment en vertu du principe de pollueur-payeur.
En amont, Rue89Lyon publie une tribune signée par une dizaine de syndicats et d’associations de défense de l’environnement allant de la CGT à Greenpeace. Pour eux, les autorités compétentes ne contraignent pas assez les industriels.
Perfluorés à Lyon : « Qu’allons nous encore accepter ? »
« Bisphénol A, Round up, Chlordécone… Les scandales sanitaires s’enchaînent depuis des décennies et le dernier en cours n’est que le reflet d’un problème systémique. Les PFAS, substances chimiques toxiques utilisées pour la fabrication de nombreux produits du quotidien, sont à l’origine d’une contamination sans précédent. Plus de 17 000 sites sont contaminés en Europe et 2100 le sont à des taux potentiellement dangereux pour la santé. Les prélèvements réalisés à différents endroits dans l’eau, le sol, l’air mais aussi le robinet, le lait maternel, les œufs de poules, les poissons… présentent des taux anormalement élevés de ces polluants.
Qu’allons nous encore accepter ? Un énième recul dans la protection de la santé publique environnementale ? À la manière du déni de Don’t Look Up, le président Emmanuel Macron regarde ailleurs en proposant à l’aube de ce scandale sanitaire une « pause réglementaire européenne » dans la réglementation environnementale. C’est pourtant une des causes de cette contamination massive.
Très peu réglementées, ces substances sont alors massivement rejetées en toute impunité dans l’environnement, à proximité des habitations comme c’est le cas dans le sud-ouest lyonnais, citée comme « la plus grave pollution » aux PFAS en France par le journal Le Monde. Au-delà des PFAS, même lorsque les substances sont réglementées, les rapports d’inspection rapportent de nombreuses négligences de la part des industries, causant de graves pollutions dont salarié·e·s et habitant·e·s proches sont les premières victimes. Les autorités compétentes restent trop faibles face aux industries et ne respectent pas leur première mission : la protection des citoyen·ne·s.
Les militant·es d’Alternatiba 69 devant le site industriel d’Arkema à Pierre-Bénité, le 18 juin 2023, pour dénoncer la pollution aux perfluorés au sud de Lyon.Photo : LR/Rue89Lyon
La santé environnementale : « Quoi qu’il en coûte »
Que voulons-nous collectivement ?
La santé environnementale – quoi qu’il en coûte – doit rester une priorité nationale devant tout intérêt économique. Avec des milliers de tonnes de molécules produites chaque année, nous devons exiger une production chimique sûre et durable. Face à toute négligence, l’État doit être intransigeant, et non plus céder à la voie de la négociation permanente. Les entreprises polluantes doivent être mises à contribution en termes de prévention et de réparation. Face à la tentation des profits et de la défense des intérêts économiques, la société civile demande une protection de son droit à vivre dans un environnement sain.
La santé environnementale – quoi qu’il en coûte, et pour tous·tes. Il ne faut pas oublier que les salarié·es de ces entreprises, en contact direct avec ces polluants, en sont les premières victimes. Les ordonnances Macron de 2017, en supprimant les CHSCT, les ont privés de leur capacité à intervenir et à proposer de réelles solutions alternatives dans le cadre de la prévention et la protection des salarié·es, comme des usager·ères ou riverain·es.
Il faut donner aux travailleurs et travailleuses les moyens d’intervenir sur les choix de production, du début à la fin du processus (conception, matériaux…). Il est nécessaire de rompre l’opposition entre la protection de l’environnement et la préservation des emplois. Des postes verts existent par milliers, ils continuent d’être développés et ce dans le respect de la réglementation environnementale. La réindustrialisation est possible tout en garantissant la protection de notre santé et de notre environnement. Ignorer, enfreindre la loi au nom du gain économique ne bénéficie qu’à une faible partie de la société.
Perfluorés à Lyon : « Un retard » français sur la réglementation
Le lien entre la société civile, le monde de l’industrie et l’État est une nouvelle fois ébranlé par la pollution aux PFAS. L’opacité autour des procédés chimiques utilisés n’est plus acceptable. Le silence et les logiques de délai de l’administration et du gouvernement sont insupportables. À l’instar des médicaments, toute nouvelle molécule utilisée dans des procédés de fabrications devrait être vérifiée, contrôlée et une enquête sur sa nocivité incluant les effets cocktails associés devrait être obligatoire. Le tout selon le principe de précaution inscrit dans la Charte de l’environnement.
La France accuse un retard non négligeable par rapport à ses voisins européens sur la connaissance de cette pollution et sa réglementation. La stupéfaction des riverain·es découvrant sur leur balcon, chez leurs poules, dans la cour d’école de leurs enfants ou encore dans leur eau contaminés, cette pollution, rappelle qu’à proximité des usines vivent des hommes, des femmes et des enfants, inquiet.es.
Pour un véritable « service public de la santé »
Signalons également les paysan.e.s découvrant leurs cultures contaminées, sans réparation, ni compensation, ruinant ainsi leurs efforts à nous nourrir correctement. Et pourtant, l’Union Européenne repousse la réforme du règlement REACH (qui encadre la production de produits chimiques, ndlr), retardant encore de plusieurs mois, voire des années l’interdiction de nouvelles molécules, dont les PFAS. Le problème étant global, il faut réduire l’exposition de l’ensemble des citoyen.nes à tous les polluants et prendre en compte la période d’exposition et non plus seulement la dose.
Unissons-nous, syndicats, associations et citoyen.ne.s, pour demander une industrie sûre et respectueuse du vivant. Cessons de négocier avec les pollueurs qui ne respectent pas la loi au détriment de notre santé, de celle de leurs salarié.e.s et de l’environnement. Demandons un véritable service public de la santé et de la protection de l’environnement, dont la fonction est de garantir notre droit à vivre dans un environnement sain ! La protection des intérêts industriels est avant tout un choix politique qui s’oppose à nos intérêts collectifs. »
La place des Terreaux et l’hôtel de ville de Lyon.Photo : Romain Chevalier/Rue89Lyon
L’intersyndicale de l’Éducation nationale du Rhône appelle à un rassemblement, lundi 16 octobre, à 18 heures à Lyon, pour rendre hommage à Dominique Bernard, professeur assassiné lors de l’attentat d’Arras vendredi 13 octobre, et à ses collègues blessés. Le rendez-vous est donné place des Terreaux (Lyon 1er).
Vendredi 13 octobre, presque trois ans après l’assassinat de Samuel Paty, la communauté éducative s’est de nouveau retrouvée endeuillée. Dominique Bernard, professeur de français au lycée Gambetta à Arras, a été tué d’un coup de couteau par un ancien élève du lycée, radicalisé et suivi par les services de renseignement.
Pour honorer sa mémoire, et en soutien à d’autres personnels du lycée qui ont été blessés lors de l’attaque, les syndicats de l’Éducation nationale du Rhône appellent à un rassemblement à Lyon. Il doit se tenir lundi 16 octobre à 18 heures, place des Terreaux (Lyon 1er). L’intersyndicale demande aussi « de s’abstenir de toute instrumentalisation ».
« Trois ans après l’assassinat de Samuel Paty, il est insupportable d’avoir à revivre le même effroi quand l’École devient une cible et que des professeur·es sont attaqué·es pour avoir fait leur métier. L’État doit prendre toutes les mesures pour assurer la protection des personnels et des élèves. »
Un autre rassemblement pour les victimes de l’attentat d’Arras prévu à l’hôtel de Ville de Lyon
Plus tôt dans la journée, à 14 heures, la Ville de Lyon organise son propre hommage « pour Dominique Bernard et en souvenir de Samuel Paty », dans la cour haute de l’Hôtel de Ville, en présence de Grégory Doucet (EELV), le maire de Lyon. Les Lyonnais et Lyonnaises y sont conviés, pour observer une minute de silence.
Une minute de silence organisée à la même heure que celle qui aura lieu dans toutes les écoles, les collèges et lycées de France, lundi 16 octobre. Le matin, les cours avaient repris presque normalement dans ces mêmes établissements – mise à part une rentrée décalée à 10 heures. Les professeurs étaient invités par le gouvernement à se réunir de 8h à 10h dans leurs établissements pour échanger sur la façon d’aborder le sujet de l’attentat, en classe avec leurs élèves.
L’intersyndicale Education du Rhône appelle de son côté l’Education Nationale à aller plus loin pour permettre « la prise en compte et l’expression des traumatismes de toute la communauté éducative ».
Rue89Lyon lance un tout nouveau site cette semaine du 16 octobre. Capture écran.
Rue89Lyon change de peau ! Notre média a travaillé avec une petite équipe pendant plus d’un an pour refonder entièrement le site. L’objectif est qu’il soit plus rapide, plus joli et plus participatif. Il est en outre doté d’une série de mini-services supplémentaires, dont certains sont réservés aux abonnés.
Le secret était bien gardé, mais les petites mains s’activaient en coulisse depuis plus d’un an… C’est maintenant fait : Rue89Lyon a un nouveau site ! Depuis dimanche 15 octobre, une nouvelle maquette est installée sur toutes nos pages. Plus claire, plus ergonomique, plus engageante et plus participative… Elle a été pensée par le designer Thomas Bonometti et codée par Geoffrey Brossard. François Werckmann a coordonné l’ensemble du projet, avec nos collègues de Rue89 Strasbourg et Bordeaux. Ces nouveaux atours doivent rendre la lecture plus agréable, tout en affirmant l’identité d’un site de presse engagé et déterminé comme le nôtre.
Plus ergonomique et plus beau
Commençons par les améliorations apportées. La manchette fait la part belle à l’image, plein pot. La « une » est modulable pour permettre à plusieurs informations d’être mises en valeur et clairement accessibles. Le « fleuve » s’organise ensuite selon les dates de parution. Fini le scroll infini : des liens nécessaires et pratiques se logent désormais en pied de page.
Plusieurs menus offrent diverses entrées à nos articles. Un accès (avec les petites vignettes) conduit aux grandes thématiques sur lesquelles nos journalistes ont travaillé, et qui sont accessibles à partir d’une page comportant un texte d’introduction. Un menu de tags offre lui des focus sur les sujets qui font l’actualité.
Les dossiers, quant à eux, bénéficient d’une meilleure mise en avant. Ils sont repérables plus facilement grâce à un encadré graphique qui leur est propre et qui contient un sommaire pour accéder plus facilement aux articles d’un même dossier.
De nouvelles fonctionnalités chez Rue89Lyon
Nous avons aussi profité de cette refonte complète pour ajouter une série de nouvelles fonctions. D’abord, tous les aspects liés au compte utilisateur et à l’abonnement sont bien mieux gérés, avec des pages dédiées et conçues pour être plus simple d’utilisation. Le parcours d’abonnement – soutien indispensable au développement d’une presse locale indépendante à Lyon – est fluidifié, et il est toujours aussi simple de se désabonner.
Une série de petits services émaillent le site désormais, dont certains sont réservés aux abonnés comme l’accès aux coulisses de certains articles. Parmi ces nouvelles fonctions, citons :
Sauvegarder des articles à lire plus tard. Il arrive qu’on tombe sur un article intéressant, mais que ce ne soit pas le bon moment. Un clic sur l’icône Signet et voilà l’article sauvegardé dans votre compte utilisateur.
Alertes par mail. Certains sujets peuvent vous intéresser plus que d’autres. Désormais, vous avez la possibilité d’être alerté immédiatement par mail dès qu’un sujet particulier est publié. Une prochaine évolution vous permettra d’être alerté par SMS.
Enfin, il restera toujours possible de signaler les coquilles ou les fautes d’orthographe ou de grammaire, (c’est même recommandé !) Vous pouvez sélectionner un paragraphe, signaler une faute à la rédaction en un clic et même proposer une correction.
La place des Gones, un outil pour le débat public
De plus, nous avons repensé le système des commentaires comme une nouvelle plateforme de discussions et d’échanges. Appelée La place des Gones, cet outil permettra à la communauté des lectrices et lecteurs de Rue89Lyon d’échanger sur des sujets d’actualité locale dans un environnement bienveillant. Nous espérons qu’elle accueillera une partie du débat public grâce à de nouvelles fonctions :
Il est désormais possible de commenter avec son identité réelle avec une photo de profil, ou avec un pseudo avec un avatar, voire de manière anonyme. Cette sélection disponible à chaque contribution permet à chacun de contribuer au débat, en choisissant le degré d’exposition qui convient au contenu du message.
Les utilisateurs pourront être alertés des réponses de leurs commentaires.
Les commentaires pourront être soutenus ou non, en fonction de leur qualité. Les meilleurs commentaires seront placés en Une du site et certains pourront être sélectionnés par la rédaction.
D’autres fonctions seront ajoutées prochainement, comme les abonnements suspendus, sur le principe des cafés suspendus. Il sera bientôt possible de payer un abonnement supplémentaire. Cet « abonnement solidaire » sera transféré à toute personne dont la situation financière est difficile et qui le fait savoir à notre rédaction.
L’objectif de la places des Gones est de permettre à chacun d’exprimer une parole, d’apporter une information, de la manière la plus libre possible. Ce sera aussi un outil d’écoute pour la rédaction, qui piochera une part de ses prochains sujets parmi les échanges. Leurs auteurs seront alors directement contactés par les journalistes.
Lorsque nous avons changé la maquette de Rue89 Lyon pour la dernière fois, c’était en 2016. Nous avions alors bénéficié du travail de l’agence Upian, qui l’avait réalisée pour Rue89.com, le média qui nous servait de modèle à l’époque. La fin progressive du média national nous a contraint à tout développer seuls cette fois. Un chantier titanesque pour nos trois éditions et qui n’a été possible qu’avec l’aide du Fonds stratégique du développement de la presse (FSDP) du ministère de la Culture, qui a pris en charge 70% des 160 000€ investis dans ce chantier. Nous avons pris la décision d’augmenter légèrement nos tarifs : l’abonnement mensuel passe de 4,9 à 5 euros et l’annuel de 49 à 50 euros. Soit un euro étalé sur un an (une affaire!).
Ce nouveau site vise à permettre à Rue89Lyon d’accueillir de nouveaux abonnés. Dans un contexte de plongée de nos revenus publicitaires, notre rédaction ne pourra continuer son travail de vigie démocratique locale que grâce au soutien direct de chacune et de chacun d’entre vous.
Malgré toute l’attention portée à l’installation de la nouvelle interface, quelques « bugs » peuvent survenir. N’hésitez pas à les signaler dans les commentaires ou par le formulaire contact. Nous sommes preneurs de vos remarques (et les compliments aussi) !
[Info Rue89Lyon] Jean-Michel Aulas est, avec son fils Alexandre, l’un des cofondateurs d’un terminal de luxe réservé aux jets privés à Miami, ouvert depuis février 2023. Étrangement, cette société qui opère sur le sol américain est domiciliée à travers un tortueux montage de sociétés offshores qui relie les paradis fiscaux du Delaware, des Îles Vierges britanniques et le Luxembourg.
Jean-Michel Aulas profitera-t-il de sa retraite pour visiter son aéroport privé ? L’ex-président de l’OL est l’un des cofondateurs d’Embassair Group International, une société anonyme domiciliée au Luxembourg qui exploite un terminal de luxe spécialisé dans l’accueil des jets privés, à Miami.
Situé sur le site de l’aéroport privé d’Opa-Locka en Floride, ce complexe réservé à une clientèle privilégiée a ouvert ses pistes le 1er février 2023. Il a été conçu par le célèbre architecte Jacques Rougerie et a coûté la bagatelle de 50 millions de dollars. Le terminal offre à ses clients un cadre « sécurisé », « luxueux » mais surtout « discret », vante Embassair.
Posé sur un terrain de quatre hectares, ses hangars peuvent accueillir jusqu’à six jets privés et deux avions. Le complexe se compose d’un grand hall et de quatre salles d’embarquement privées, d’un salon de restauration et de deux salles de conférence.
Parfait pour accueillir les « 800 milliardaires et 20 millions de millionnaires dans le monde », assure sa communication qui, dans un anglais douteux, assure être « équipé pour recevoir 140 passagers mais n’en accueille que 17 ». Les équipages disposent eux de trois suites pour dormir sur le site et d’une salle de sport pour se détendre entre deux vols.
Qui se trouve derrière Embassair ? À en croire la prose de l’aéroport, ils seraient « un groupe d’enfants passionnés d’aviation » qui « pouvaient passer des heures à regarder les avions décoller et atterrir » et « s’émerveiller devant les fabuleuses aventures des héros du ciel ».
Pour embrasser leur passion, ils ont « cré[é] le plus bel endroit pour accueillir ces avions qui les ont tant fait rêver. Un lieu qui offrirait les meilleurs services pour répondre aux besoins de chaque passager et aussi à ceux des pilotes qu’ils admiraient tant. C’est ainsi qu’Embassair est né… ».
Pour comprendre qui sont ces « enfants », il faut faire un tour de table de son conseil d’administration du 24 octobre 2017, lors de l’implantation du siège social d’Embassair International Group au Luxembourg. Son président, l’entrepreneur dijonnais Frank Devaux, est le fils de Franklin Devaux, le fondateur de la compagnie aérienne Proteus Airlines.
Il est assisté d’Alexandre Aulas, le fils de Jean-Michel, et de Damien Soulat. Jean-Michel Aulas est également présent autour de la table tout comme Patrick Bertrand, son fidèle lieutenant (aussi à la tête d’Holnest, la holding familiale des Aulas). Franklin Devaux, le père donc, est quant à lui président du conseil de surveillance.
Jean-Michel Aulas, ancien Président de l’Olympique Lyonnais. Photo prise en 2015.Photo : Pierre Maier
Dans son autobiographie publié en mars 2023, Aulas dévoile les coulisses de ce projet familial :
« Le concept [d’Embassair] a été développé par mon ami Franklin Devaux (l’inventeur de la carte vitale et de la valise de transport de fonds sécurisée, ex-administrateur de Cegid, NDLR), mais le projet a été mis en œuvre par son fils Franck et le mien Alexandre (…) Les choix stratégiques et technologiques sont faits par les pères, mais réalisés par les fils. Nous sommes très fiers de cette opération. »
Depuis2017, les Aulas entretiennent une participation active dans Embassair via leur holding familiale Holnest. Selon les informations de Rue89Lyon, ils ont investi au moins 1,1 million d’euros dans Embassair Group International, jusqu’en 2019, et possédaient alors 33,22 % des actions de catégorie A de la société.
Ce projet d’aérogare tranche avec les volontés affichées par l’ex-président de l’OL. Alors qu’il était encore aux manettes du club de foot lyonnais, Jean-Michel Aulas avait déjà publiquement déclaré vouloir réduire l’usage des jets privés pour lui et son équipe :
« On va tout faire, y compris en faisant des efforts, pour qu’il y ait moins de consommation, pour que, quand on peut éviter l’avion, on puisse prendre le train ou le car. »
Ce qui n’a pas empêché l’OL d’utiliser deux jets privés pour des trajets Lyon-Marseille : l’un pour les joueurs, le second pour Jean-Michel Aulas, ont révélé les journalistes de Complément d’Enquête. Car l’homme d’affaires a l’habitude de réaliser la majorité de ses déplacements en jet privé.
Sollicités, les Aulas n’ont pas souhaité répondre à Rue89Lyon sur leur participation à Embassair.
L’aviation de luxe, un marché fructueux et climaticide
Cet investissement tombe à point nommé. Selon l’étude menée par l’Institute for Policy Studies, la flotte mondiale de l’aviation de luxe a augmenté de 133 % au cours des deux décennies. Le marché connaît un boom financier depuis le début de la crise sanitaire et a brassé 34,1 milliards de dollars en 2022. Près de 5,3 millions de vols d’affaires ont traversé les airs en 2022, dont 4,6 millions rien qu’aux États-Unis. Autant d’engins qui nécessitent des espaces dédiés pour se garer.
Cette croissance florissante s’accompagne d’une augmentation démesurée de l’empreinte carbone. Aux États-Unis, l’essor de l’aviation de luxe s’est traduit par une hausse de 23 % de ses émissions depuis 2020. Selon la Fédération européenne pour le transport et l’environnement, les jets privés rejettent 5 à 14 fois plus de carbone que les vols commerciaux, et 50 fois plus que le train. Cet impact sur le climat est causé par une minorité d’usagers : à peine 1 % des passagers du secteur aérien seraient responsables de 50 % des émissions mondiales.
Mais revenons aux « enfants passionnés d’aviation ». En 2021, ils sont rejoints à la table du conseil d’administration par Michel Reybier, grand patron français touche-à-tout (vin, hôtelleries de luxe, clinique, etc.) et 58e fortune de France, selon le classement du magazine Challenges. Discret jusqu’ici, Michel Reybier était déjà présent en coulisse d’Embassair depuis longtemps.
Selon Le Monde, cet homme d’affaires aurait été le propriétaire de Moorhouse Development Limited, une société basée dans le paradis fiscal des îles Vierges Britanniques, qui aurait été utilisée en 2017 pour avancer les fonds d’Embassair au Luxembourg.
Des sociétés offshores imbriquées façon poupées russes
Le montage offshore d’Embassair Group est le fruit d’un étonnant jeu de poupées russes : Frank Devaux a fondé la société Fox Delta le 27 septembre 2016, qui a elle-même créé la société Kofilux le 30 septembre 2016, qui a enfanté Embassair Group le même jour. En 2019, Kofilux a été liquidée et ses avoirs transférés à Fox Delta. Pourquoi ce jeu d’écran de fumée ?
Contacté par Rue89Lyon, Frank Devaux n’a pas souhaité nous l’expliquer, mais ce truchement de sociétés offshores pourrait opacifier les remontées d’argent. Ces sociétés ont pour administrateurs les membres du ParFi Group, un cabinet luxembourgeois qui offre des services de domiciliation et de comptabilité.
Une astuce pratique et bien connue : ce sont les avocats fiscalistes luxembourgeois qui se chargent de la paperasse dans le Grand-Duché. Ils permettent ainsi à leurs clients de n’avoir jamais à y mettre les pieds pour profiter de ses avantages fiscaux : une TVA et un régime d’impôt sur les sociétés très attractifs.
Reprenons. C’est donc Embassair Group qui a fondé Embassair Group International au Luxembourg, en octobre 2017. Embassair Group International a développé Embassair Group US Inc. dans le paradis fiscal du Delaware en mars 2018, qui a elle-même déployé une branche en Floride en avril 2018. On retrouve à la tête de cette branche américaine Frank Devaux, Damien Soulat et Alexandre Aulas.
Le trio fonde quelques mois plus tard Gate 301 Miami Inc, filiale d’une société du même nom basée dans le Delaware, qui a elle négocié un bail foncier de 35 ans pour louer le terrain d’Opa-Locka et y construire l’aérogare de luxe.
Sollicités pour comprendre la logique de leur montage, aucun des acteurs d’Embassair n’a souhaité répondre à Rue89Lyon.
L’intérêt de ce montage international pourrait être de faire remonter les bénéfices réalisés en Floride vers le Delaware. Cet État américain dispose d’une politique fiscale très avantageuse pour les entreprises : elle n’exige pas le nom du bénéficiaire réel lors de l’enregistrement et protège ainsi l’identité de ses propriétaires.
Si une société enregistrée au Delaware mène des opérations hors de l’État, elle ne paye pas d’impôts sur le revenu mais verse à la place un impôt de franchise plus modéré. Les bénéfices peuvent également poursuivre leur chemin vers le Luxembourg où ils seront peu imposés.
Surprise : on retrouve également au conseil d’administration d’Embassair en Floride et de Gate 301 Miami un employé du groupe public Aéroports de Paris (ADP). Selon son rapport financier de 2022, ADP participe en effet à 39,66 % au capital de la filiale d’Embassair logée à Miami.
Le groupe ADP finance-t-il un aéroport de luxe avec l’argent du contribuable alors que ses bénéfices remontent vers des paradis fiscaux ? Interrogé depuis juin, ADP n’a pas été capable d’expliquer à Rue89Lyon l’origine de ce partenariat, ni les sommes investies dans Embassair ou sa connaissance de ce curieux montage.
À Lyon, l’Année Lumière, unique hojskole de France, école d’inspiration danoise, a fait sa rentrée début octobre. En quatre ans, 240 jeunes ont pu faire une pause dans leur parcours et expérimenter le droit à l’exploration et à l’erreur.
Ce mercredi matin d’octobre, ils sont une quinzaine à faire leur rentrée devant Marion, coordinatrice à l’Année Lumière. Le groupe se prête au jeu de la « carte d’identité » pour se présenter et faire connaissance. Deux jours plus tôt, la semaine d’intégration a commencé pour la nouvelle promotion de cette école pas comme les autres.
Pas de classe par niveau ou par tranche d’âge, tous les jeunes sont mélangés. Dans la salle, les tables sont installées en U pour favoriser les échanges. Au mur, aucun tableau périodique ou carte géographique, mais des mots clés de développement personnel et un slogan : « L’Année lumière, éclaire ton avenir ». Si besoin, les jeunes peuvent, de temps à autre, occuper la salle de sieste meublée d’énormes poufs, pour se reposer.
L’Année lumière a d’abord pris ses quartiers dans la Maison des compagnons du devoir, dans le 9e arrondissement avant de déménager sur le campus de la SEPR dans le 3e. Elle est l’unique « hojskole » (prononcé hoye-sko-le, « haute école » en danois) de France et propose à des jeunes âgés de 16 à 25 ans de prendre une année pour faire une pause et reprendre pied dans leur parcours scolaire ou professionnel. Fondées dans les années 1830 par Nicolaj F.S. Grundvig, écrivain et pédagogue danois, les hojskoles mettent l’accent sur la curiosité intellectuelle et la créativité.
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