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Perfluorés à Lyon : un appel à la santé « quoi qu’il en coûte »

Dans quelques jours, la justice doit rendre une décision concernant le scandale des perfluorés, au sud de Lyon. Un référé visait à faire payer Arkema pour sa pollution. À cette occasion, Rue89Lyon publie une tribune de syndicats et d’associatifs. Leur but ? Que la santé ne soit plus « sacrifiée sur l’autel des profits industriels. »

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Arkema, Pierre-bénite
L’usine Arkema, de Pierre-Bénite, au cœur d’un scandale autour des perfluorés dans la métropole de Lyon.

C’est à présent une question de jours. Cette semaine, le juge des libertés et de la détention devrait se prononcer sur une requête transmise début octobre par le Vice-procureur de la République. Cette dernière concerne un référé environnemental déposé contre Arkema, le 25 mai 2023. Objectif final : faire payer le groupe, responsable de la pollution aux perfluorés, notamment en vertu du principe de pollueur-payeur.

En amont, Rue89Lyon publie une tribune signée par une dizaine de syndicats et d’associations de défense de l’environnement allant de la CGT à Greenpeace. Pour eux, les autorités compétentes ne contraignent pas assez les industriels.

Perfluorés à Lyon : « Qu’allons nous encore accepter ? »

« Bisphénol A, Round up, Chlordécone… Les scandales sanitaires s’enchaînent depuis des décennies et le dernier en cours n’est que le reflet d’un problème systémique. Les PFAS, substances chimiques toxiques utilisées pour la fabrication de nombreux produits du quotidien, sont à l’origine d’une contamination sans précédent. Plus de 17 000 sites sont contaminés en Europe et 2100 le sont à des taux potentiellement dangereux pour la santé. Les prélèvements réalisés à différents endroits dans l’eau, le sol, l’air mais aussi le robinet, le lait maternel, les œufs de poules, les poissons… présentent des taux anormalement élevés de ces polluants.

Qu’allons nous encore accepter ? Un énième recul dans la protection de la santé publique environnementale ? À la manière du déni de Don’t Look Up, le président Emmanuel Macron regarde ailleurs en proposant à l’aube de ce scandale sanitaire une « pause réglementaire européenne » dans la réglementation environnementale. C’est pourtant une des causes de cette contamination massive.

Très peu réglementées, ces substances sont alors massivement rejetées en toute impunité dans l’environnement, à proximité des habitations comme c’est le cas dans le sud-ouest lyonnais, citée comme « la plus grave pollution » aux PFAS en France par le journal Le Monde. Au-delà des PFAS, même lorsque les substances sont réglementées, les rapports d’inspection rapportent de nombreuses négligences de la part des industries, causant de graves pollutions dont salarié·e·s et habitant·e·s proches sont les premières victimes. Les autorités compétentes restent trop faibles face aux industries et ne respectent pas leur première mission : la protection des citoyen·ne·s. 

perfluorés Lyon Arkema
Les militant·es d’Alternatiba 69 devant le site industriel d’Arkema à Pierre-Bénité, le 18 juin 2023, pour dénoncer la pollution aux perfluorés au sud de Lyon.Photo : LR/Rue89Lyon

La santé environnementale : « Quoi qu’il en coûte »

Que voulons-nous collectivement ?

La santé environnementale  – quoi qu’il en coûte – doit rester une priorité nationale devant tout intérêt économique. Avec des milliers de tonnes de molécules produites chaque année, nous devons exiger une production chimique sûre et durable. Face à toute négligence, l’État doit être intransigeant, et non plus céder à la voie de la négociation permanente. Les entreprises polluantes doivent être mises à contribution en termes de prévention et de réparation. Face à la tentation des profits et de la défense des intérêts économiques, la société civile demande une protection de son droit à vivre dans un environnement sain. 

La santé environnementale – quoi qu’il en coûte, et pour tous·tes. Il ne faut pas oublier que les salarié·es de ces entreprises, en contact direct avec ces polluants, en sont les premières victimes. Les ordonnances Macron de 2017, en supprimant les CHSCT, les ont privés de leur capacité à intervenir et à proposer de réelles solutions alternatives dans le cadre de la prévention et la protection des salarié·es, comme des usager·ères ou riverain·es.

Il faut donner aux travailleurs et travailleuses les moyens d’intervenir sur les choix de production, du début à la fin du processus (conception, matériaux…). Il est nécessaire de rompre l’opposition entre la protection de l’environnement et la préservation des emplois. Des postes verts existent par milliers, ils continuent d’être développés et ce dans le respect de la réglementation environnementale. La réindustrialisation est possible tout en garantissant la protection de notre santé et de notre environnement. Ignorer, enfreindre la loi au nom du gain économique ne bénéficie qu’à une faible partie de la société.

Perfluorés à Lyon : « Un retard » français sur la réglementation

Le lien entre la société civile, le monde de l’industrie et l’État est une nouvelle fois ébranlé par la pollution aux PFAS. L’opacité autour des procédés chimiques utilisés n’est plus acceptable. Le silence et les logiques de délai de l’administration et du gouvernement sont insupportables. À l’instar des médicaments, toute nouvelle molécule utilisée dans des procédés de fabrications devrait être vérifiée, contrôlée et une enquête sur sa nocivité incluant les effets cocktails associés devrait être obligatoire. Le tout selon le principe de précaution inscrit dans la Charte de l’environnement.

La France accuse un retard non négligeable par rapport à ses voisins européens sur la connaissance de cette pollution et sa réglementation. La stupéfaction des riverain·es découvrant sur leur balcon, chez leurs poules, dans la cour d’école de leurs enfants ou encore dans leur eau contaminés, cette pollution, rappelle qu’à proximité des usines vivent des hommes, des femmes et des enfants, inquiet.es.

Pour un véritable « service public de la santé »

Signalons également les paysan.e.s découvrant leurs cultures contaminées, sans réparation, ni compensation, ruinant ainsi leurs efforts à nous nourrir correctement. Et pourtant, l’Union Européenne repousse la réforme du règlement REACH (qui encadre la production de produits chimiques, ndlr), retardant encore de plusieurs mois, voire des années l’interdiction de nouvelles molécules, dont les PFAS. Le problème étant global, il faut réduire l’exposition de l’ensemble des citoyen.nes à tous les polluants et prendre en compte la période d’exposition et non plus seulement la dose.

Unissons-nous, syndicats, associations et citoyen.ne.s, pour demander une industrie sûre et respectueuse du vivant. Cessons de négocier avec les pollueurs qui ne respectent pas la loi au détriment de notre santé, de celle de leurs salarié.e.s et de l’environnement. Demandons un véritable service public de la santé et de la protection de l’environnement, dont la fonction est de garantir notre droit à vivre dans un environnement sain ! La protection des intérêts industriels est avant tout un choix politique qui s’oppose à nos intérêts collectifs. »


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