Davantage de « déserts médicaux » à Lyon ? Le zonage de médecine générale 2022 de l’Agence régionale de santé fait apparaître davantage de secteurs de la métropole de Lyon en forte tension par rapport à 2018.
Au cours du mois de janvier, l’Agence régionale de santé (ARS) d’Auvergne-Rhône-Alpes, a publié la nouvelle version du zonage de médecine générale. Ce document cartographie le territoire régional afin d’identifier les zones en tension pour accéder facilement à un médecin généraliste. Ce zonage permet d’activer alors des dispositifs d’aides à l’installation de praticiens.
Davantage de déserts médicaux, une tendance régionale
Comment a évolué la situation ces dernières années dans la région ? Mal.
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Caché dans Lyon 6e, le cinéma Bellecombe a traversé une Seconde guerre mondiale, survécu à l’arrivée de la télévision et à la pandémie de covid. Le ticket est l’un des moins chers de Lyon, à 6 euros en « tarif normal ». Reportage.
Il fait humide, gris et froid en cette fin de mois de décembre. Un temps idéal pour aller voir un film au cinéma. Justement, un petit ciné de quartier se cache au 61 de la rue d’Inkermann, blotti tout contre l’église Notre-Dame-de-Bellecombe, dans le 6e arrondissement de Lyon.
Depuis la rue, il passe inaperçu derrière un haut portail en fer. Pourtant, le cinéma Bellecombe tourne depuis 1935.
Le cinéma Bellecombe se cache derrière ce portail, qui abrite aussi la cour de l’école privée voisine.Photo : OM/Rue89Lyon
A 60 ans, Françoise Adrien habite dans le quartier depuis 20 ans. Cette informaticienne à l’allure dynamique, de grandes lunettes perchées sur le nez, est également « trésorière, projectionniste et caissière » au cinéma Bellecombe, depuis six ans.
« Un jour, je suis allée voir avec une copine si le cinéma de quartier avait besoin de bénévoles », raconte-t-elle en ouvrant l’imposant portail qui masque l’entrée du cinéma.
Derrière, les enfants de l’école primaire voisine suent à grosses gouttes en courant autour de la piste d’athlétisme peinte sur le goudron. La porte d’entrée du cinéma se découpe en rouge vif sur une façade crème, au fond de la cour.
« Le dimanche, il y a des gens qui promènent leur chien et entrent dans la cour. Ils nous disent qu’ils ne pensaient pas que le cinéma serait ouvert », commente Françoise Adrien en riant.
A Lyon 6e, un cinéma de quartier depuis 1935
Une fois le seuil du cinéma franchi, avant même de voir un film, c’est un voyage dans le temps qui attend les spectateurs. A gauche de l’entrée, une vénérable caisse enregistreuse mécanique distribue des tickets colorés et numérotés. Dans la salle, d’une capacité de 270 places, des rangées de sièges en cuir rouge et en bois, alignés sur un beau parquet à chevrons. Un lourd rideau rouge camoufle l’écran, encadré par un piano droit et une vieille caméra sur pied.
En dehors des périodes de crise sanitaire, une ouvreuse passe dans la salle pour vendre des glaces.
L’aventure de ce petit cinéma de quartier commence à la fin du XIXe siècle. A cette époque, la paroisse de Notre-Dame de Bellecombe, du nom de l’église qui jouxte le cinéma, fait construire une salle de théâtre grâce aux dons de familles de Lyon.
Pendant la Première guerre mondiale, la salle est transformée en annexe de l’hôpital des Charmettes. Dans l’entre-deux guerres, l’association de bienfaisance des Charmettes (ABC), qui gère toujours le cinéma, voit le jour. En 1935, la salle de théâtre fait aussi office de cinéma, une fonction qu’elle gardera jusqu’à aujourd’hui. Dans les années 1970, elle devient un cinéma à part entière, même si une scène existe toujours, sous le rideau rouge.
« Ce cinéma a survécu à la Seconde guerre mondiale et à l’arrivée de la télévision, s’amuse Françoise Adrien en grimpant d’un pas vif l’escalier qui mène à l’étroite cabine de projection. Son but, c’est d’être un cinéma de quartier pour le public local, avec une programmation pour tous les âges. On n’augmente pas les prix, on essaie plutôt d’augmenter le nombre de spectateurs. »
Françoise Adrien est bénévole au cinéma Bellecombe depuis cinq ans.Photo : OM/Rue89Lyon
« Un noyau dur d’habitants du quartier qui s’investissent dans le cinéma »
Pour faire tourner le cinéma, pas moins d’une trentaine de bénévoles de l’association ABC s’activent à la caisse, à la projection ou au contrôle des pass sanitaires, depuis l’arrivée du coronavirus. Chaque séance nécessite ainsi impérativement la présence d’au moins trois personnes. D’autres sont en charge de l’édition du programme sur internet, des affiches ou encore des réseaux sociaux.
Heureusement, le cinéma Bellecombe peut compter sur des nouvelles recrues régulièrement.
« Nous avons des jeunes qui ont la vingtaine ou la trentaine, qui sont venus par hasard une fois et qui sont restés, précise Françoise Adrien. Il y a notamment un jeune homme de 21 ans en études de gestion qui fait très bien la caisse.
Nous avons un bon noyau dur d’habitants du quartier qui ont entre 45 et 65 ans et qui s’investissent dans le cinéma depuis environ cinq ans.
Et il y a aussi des anciens. Nous avons une bénévole qui a tenu la caisse jusqu’à ses 80 ans ! »
Pour Françoise Adrien, cet investissement est largement récompensé par ce moment « magique » où elle s’assoit sur un strapontin au fond d’une salle silencieuse, attendant que les premières notes du générique du film retentissent.
« On ne veut pas concurrencer l’Astoria, on vise les gens du quartier »
Des séances bon marché et des films pour tous les goûts, voilà la recette miracle du cinéma Bellecombe. En 2019, il a explosé son record avec 11 626 entrées sur dix mois.
Le cinéma propose cinq séances par semaine, réfléchies en fonction des goûts et des habitudes des habitant·es du quartier.
« Le mercredi soir, c’est le soir des cinéphiles où on va passer le dernier Almodóvar par exemple, explique Françoise Adrien. Le vendredi, c’est la soirée des ados et leurs parents donc ce sera plutôt un Marvel. On a en moyenne une trentaine de spectateurs par séance. Le dimanche, à 17h, c’est là qu’il y a le plus de monde. »
Au cinéma Bellecombe, chaque ticket est unique.Photo : OM/Rue89Lyon
A l’affiche en cette fin du mois de décembre, le biopic « House of Gucci » et le dessin animé Disney « Encanto », que l’on retrouve dans la programmation des cinémas Pathé, ou encore le western « Cry Macho » de Clint Eastwood. Début janvier, le dernier Almodóvar, « Madres paralelas », et le dernier Spielberg, « West Side Story », sont au programme ainsi que « Mystère », un film d’aventure tourné dans le Cantal.
En cohérence avec l’ambiance surannée des lieux, le cinéma Bellecombe a utilisé un vieux projecteur 35 mm à bobines jusqu’en 2012, date à laquelle une subvention régionale leur a permis d’investir finalement dans du matériel numérique. Comme une pièce de musée, le vieux projecteur trône toujours dans la cabine, entouré de bobines.
Dany Boon au cinéma Bellecombe : « C’est génial, vous êtes le seul multiplexe à une salle ! »
Chaque mois, les bénévoles se réunissent pour choisir les films qui seront diffusés le mois suivant. En raison de son faible nombre de séances hebdomadaires, le cinéma Bellecombe reçoit les films tardivement, quatre mois après les sorties officielles.
Un décalage qui ne gêne pas les bénévoles, au contraire.
« On est un peu maîtres de notre programmation, affirme Françoise Adrien, penchée sur l’ordinateur qui diffusera le film d’aujourd’hui. On ne veut pas concurrencer l’Astoria, on vise les gens du quartier. »
Des étoiles dans les yeux, elle raconte la venue dans leur petit cinéma de quartier de Dany Boon pour l’avant-première du film « Le Dindon », en 2019.
L’acteur se serait alors exclamé : « C’est génial, vous êtes le seul multiplexe à une salle ! »
L’ancien projecteur est parfois encore utilisé, mais seuls deux bénévoles savent le faire fonctionner.Photo : OM/Rue89Lyon
Un cinéma qui s’adapte au quartier Bellecombe, en pleine mutation
Depuis les années 1930, le quartier Bellecombe a bien changé. Françoise Adrien, qui y habite depuis 20 ans, l’a vu se transformer à toute vitesse ces dernières années. L’hôpital des Charmettes a été détruit, et les anciennes blanchisseries des HCL ont été reconverties en appartements. De nouveaux immeubles poussent comme des champignons, attirant des jeunes couples et des familles avec des enfants en bas âge.
Le cinéma Bellecombe compte bien proposer une programmation sur-mesure à ces nouveaux habitants-là aussi.
« On essaie d’attirer ces trentenaires avec leurs enfants, de leur dire qu’ils ont un appartement dans le quartier, et le cinéma avec ! sourit Françoise Adrien. On propose par exemple des séances de 40 minutes pour les enfants à partir de 3 ans. »
Pour faire connaître le cinéma, les bénévoles ne lésinent pas sur leurs efforts. La grande enseigne lumineuse du cinéma a été réparée et brille désormais le soir au-dessus de la rue d’Inkermann. A gauche du grand portail, des panneaux vitrés ont été apposés pour présenter les films à l’affiche. Les bénévoles écument chaque mois les commerces du coin pour y déposer le programme.
« On est bien implantés dans le quartier, assure Françoise Adrien. Si on a du retard, les gens nous réclament le programme. »
Les sièges en cuir sont d’époque. Quand ils rendent l’âme, les bénévoles laissent souvent l’espace vacant pour accueillir des personnes à mobilité réduite.Photo : OM/Rue89Lyon
L’association ABC entretient des liens étroits avec la paroisse, tout comme avec la mairie du 6e arrondissement de Lyon.
« On dépose des programmes au fond de l’église, ça marche bien. On a même organisé une séance avec la paroisse, on a projeté le film « Fatima ». Pour Noël, la mairie du 6e offrait une séance pour le dessin-animé « Niko le petit renne ». »
Régulièrement, le cinéma accueille les élèves de l’école privée voisine Notre-Dame-de-Bellecombe, ainsi que ceux de l’école publique Antoine Rémond, à deux pas de là.
« Le but du cinéma Bellecombe, c’est de rassembler les gens »
Comme pour beaucoup de structures, la crise sanitaire a été rude pour le cinéma Bellecombe. Françoise Adrien se souvient encore de l’annonce brutale de la fermeture des cinémas, le 14 mars 2020, juste après la séance du samedi, et de la quantité de glaces qu’il a fallu vendre dans le quartier pour écouler le stock.
« Nous avons eu des aides du CNC, comme les autres cinémas, tempère-t-elle. Quand nous avons pu rouvrir, nous avons fait en sorte d’espacer les séances, au cas où. Les gens se sont bien mis au masque, au gel et au pass sanitaire. Nous n’avons jamais eu de problème ou de scandale à cause de ça. »
Au-delà de la projection de films, le cinéma Bellecombe tient un rôle social dans le quartier, qui a été mis à mal pendant la crise sanitaire.
« On a des gens qui viennent tous seuls, des personnes isolées, âgées, avec qui on prend le temps de discuter. Il y en a même qui ont leur place favorite, comme dans leur salon ! Le but de ce cinéma, c’est de rassembler les gens. »
Alors, pendant la fermeture du cinéma, les bénévoles ont organisé des distributions de paniers de producteurs dans la cour.
Ni la Seconde guerre mondiale, ni la télévision, ni l’arrivée massive du numérique, ni la crise sanitaire ne seront venus à bout du petit cinéma de quartier. Dès sa réouverture, les habitué·es ont retrouvé leur siège, et les bénévoles comptent bien étoffer leur programmation pour attirer de nouveaux spectateurs·rices.
Françoise Adrien n’est pas inquiète pour la suite.
« Il survit, ce cinéma, » lance-t-elle en riant avant d’aller s’enquérir du prochain film à faire tourner.
Le cinéma Bellecombe peut accueillir 270 spectateurs.Photo : OM/Rue89Lyon
[Podcast] Tout au long de la campagne de l’élection présidentielle 2022, les trois sites d’info Rue89Locaux (Lyon, Bordeaux et Strasbourg) font se rencontrer et débattre des citoyen·es sur des thèmes de société. Quatrième épisode à Saint-Émilion où l’on discute d’une agriculture plus respectueuse de l’environnement et des impacts du changement climatique.
Le quatrième épisode de notre podcast nous emmène à Saint-Émilion dans ce vignoble mondialement connu près de Bordeaux. En culture « éco-dynamique » depuis plus de 10 ans et en bio depuis 2020, Denis Pomarède sait que le changement climatique est incontournable pour les viticulteurs comme lui.
« Quand on plante un pied de vigne ou quand on change un cépage, c’est pour les 50 ans à venir », raconte l’exploitant.
À gauche, Denis Pomarède, viticulteur à Saint-Émilion face à Olivier Bidault, maraicher. Photo : JBLG / Rue89 Bordeaux
Face à lui, Olivier Bidault s’est lancé un peu par hasard. C’est en voulant quitter Bordeaux et en trouvant « une maison trop grande et avec beaucoup trop de terrain » qu’il s’est finalement lancé avec sa compagne en tant que maraîchers sur une toute petite surface, un demi-hectare.
Et ça marche, le couple néophyte « dépasse le SMIC au bout de 2 ans », ce qui est plus rapide que les modèles économiques habituels « Une grosse satisfaction fierté ». Ils racontent comment le changement climatique impactent leurs réflexions, le modes de production et le modèle économique. Des préoccupations qu’ils aimeraient davantage voir chez les candidats à l’élection présidentielle.
En arrivant aux manettes en 2020, le maire de Lyon, Grégory Doucet, s’est engagé à ne laisser aucun enfant dormir à la rue. Un vœu pieu ? Non-compétente directement sur le sujet, la Ville tente bon an mal an de proposer des solutions, comme la Métropole et l’Etat. Elles restent cependant insuffisantes pour reloger l’ensemble des familles précaires de Lyon et de l’agglomération.
Comme un air de kermesse, ce jeudi 10 février, devant l’école élémentaire Gilbert Dru (Lyon 7e). Une cinquantaine de personnes se sont rassemblées à l’appel du « Collectif Associations Unies ». Rassemblant 39 associations (lire par ailleurs), cette union née de la lutte des enfants de Don Quichotte est venue à Lyon pour alerter sur la situation des enfants à la rue. A deux mois de l’élection présidentielle, l’objectif est de faire entendre la voix des enfants à la rue dans une campagne où la question sociale est absente.
Symboliquement, ils ont choisi une école souvent occupée par le collectif Jamais sans toit pour loger des familles sans-abri. Rien que cette année, le collectif s’est mobilisé dix fois à Gilbert-Dru pour venir en aide aux enfants et à leurs parents. La veille du point presse, l’une d’elles, sans solution d’hébergement, dormait dans l’établissement.
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Journaliste lyonnais fan de l’Ouest, je suis à Rue89Lyon depuis 2020. Aujourd’hui associé et directeur de publication, je couvre les questions sociales mais aussi écologiques (pollutions industrielles, scandale des perfluorés). Le travail, c’est la santé, à condition que le droit soit respecté. Un œil politique sur le Rhône. Pour me laisser une info, c’est ici plemerle@rue89lyon.fr.
Six Neuf Médias, société éditrice de presse, recherche pour la rédaction de Rue89Lyon un ou une journaliste. Le poste, basé à Lyon, est à pourvoir dès la mi-mars 2022.
Résumé du poste
Rue89Lyon cherche un ou une journaliste pour renforcer sa capacité d’enquête et sa production d’investigations, d’informations portant sur le territoire de Lyon, de son agglomération et du Rhône.
Missions
Production éditoriale
Proposition de sujets originaux, décorrélés de l’actualité ou en lien avec une alerte, capacité à produire des dossiers en plusieurs articles et sur un temps long,animation d’un réseau de contacts, de sources et de lanceurs d’alertes,rédaction d’enquêtes et d’articles de différents formats en lien avec la rédaction en chef.
Édition numérique
Assurer, en fonction d’un planning, la responsabilité d’éditions quotidiennes (planification d’articles, préparation de la newsletter quotidienne, diffusion sur les réseaux sociaux…),réception des productions, relectures, corrections et mise en ligne selon les prévisions.
Profil recherché
Principales qualités requises
Formation master de journalisme et/ou démonstration d’un engagement personnel en faveur du journalisme local,bonne culture générale, appétence pour l’actualité, capacité à comprendre les rouages en politique, excellente expression écrite et rigueur, sens pour détecter les sujets qui méritent d’être suivis, une empathie et un sens du contact pour déverrouiller les situations et permettre aux sources d’informer en toute sécurité,envie de creuser les sujets, d’aller au bout des histoires et une capacité à ne pas se satisfaire des réponses immédiates,bonne connaissance des mécanismes de la sécurité informatique et numérique.
Qualités secondaires appréciées
Le travail se situant quasi-entièrement dans un univers numérique, une bonne pratique de l’informatique, des ordinateurs, des smartphones et d’une manière générale des équipements numériques,pratique de la photographie journalistique et de l’édition photographique,pratique de la vidéo, de l’enregistrement sonore et du montage audiovisuel,connaissance des mécanismes et présence sur les réseaux sociaux.
Type de contrat proposé
CDI avec période d’essai de trois mois renouvelable, à partir de début avril 2022. Rémunération 1800 € brut + mutuelle part employeur + prise en charge des frais.
Poste basé à Lyon.
Candidater
Vous pouvez envoyer votre candidature par mailà partir du 28 février 2022 avec une lettre d’intention, un curriculum vitae à l’attention de Dalya Daoud, rédactrice en chef(avec pour objet : « candidature journaliste »).
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[On l’a repéré pour vous]Pour un épisode de « La Série Documentaire » sur France Culture, à écouter en podcast, l’écrivain François Beaune a allumé son micro à Vaulx-en-Velin, pour parler amour et sentiments. L’occasion de déconstruire quelques clichés mais aussi de faire des rencontres étonnantes, de se poser 58 minutes avec ces vaudais·es qu’on entend se confier sans tabou.
Il s’agit d’un épisode de la très bonne série intitulée « la vie ordinaire dans nos cités » ; il est signé François Beaune et réalisé par Yvon Croizer. Ça se passe en banlieue de Lyon, à Vaulx-en-Velin, pour y causer amour et sexualité.
Ce podcast-fleuve qui donne à des vaudais de tous les âges l’occasion de raconter leurs aventures amoureuses, de celles qui ont duré une nuit comme celles qui ont duré des années. Des histoires tendres ou plutôt violentes, aux prises avec les traumatismes de l’enfance, la timidité, les barrières mentales ou les conventions sociales, culturelles. À ne pas écouter en présence de jeunes oreilles.
« Je ressens de la tendresse mais ce n’est pas bien car c’est faible »
L’écrivain François Beaune a grandi à Lyon, et il a eu l’occasion d’enseigner l’histoire et la géographie à Vaulx-en-Velin. À l’époque, il rencontre l’association Dans tous les sens, qui organise des ateliers d’écriture dans la ville. Il y retourne récemment pour une résidence d’écriture. C’est là qu’il a l’idée de saisir d’une autre manière les mots et les émotions des vaudais·es qu’il avait pour certain·es déjà rencontré·es.
Des émotions souvent calfeutrées derrière d’épais murs de solitude. Ce podcast, passionnant, s’ouvre d’ailleurs sur la confession d’une des femmes interviewées :
« J’ai beaucoup d’amour, d’émotions et d’affection au fond de moi. Je ressens de la tendresse mais ce n’est pas bien car c’est faible et dangereux. »
Et qui conclut :
« J’ai peur d’être vraiment seule en fait. »
Hommes et femmes ne racontent pas les mêmes craintes. Pour celles de Morjiane, Selma et Anaïs, on soupèse le poids de la famille et des conventions sociales qui les a empêchées de vivre pleinement leurs amours. Anaïs ressent ce poids dès le collège :
« Déjà, quand mon frère a appris que j’étais amoureuse de quelqu’un en 3è, il a voulu me frapper. »
« Une fois mariée, l’impression d’avoir pris perpète »
On rencontre, Anaïs, en terminale. Elle est tombée amoureuse et sortie avec un garçon pendant 6 mois. Même si elle n’a pas eu de relation intime avec son copain, ses parents dissuadent celui-ci de poursuivre la relation. Si la jeune fille aborde cet amour naissant avec nostalgie, elle déclare être fière d’avoir préservé sa virginité jusqu’à ses 27 ans :
« Une fois la bague au doigt, je pourrai faire tout ce que je veux, en attendant j’ai d’autres plaisirs. Je suis très gourmande, je mange des pâtisseries, des gâteaux. »
Selma est sortie avec un premier garçon avant de rencontrer Nabil. Avec son premier ami, avec qui elle est restée huit ans, elle avait eu peur du décalage culturel. Quand elle a rencontré celui qui serait son futur mari, elle s’est dite soulagée :
« Pour une fois, ma mère était très fière de moi. Elle appelait tout le temps ses copines pour parler du mariage. »
Une fois mariée, Selma réalise vite que Nabil avait caché un pan de sa personnalité, il lui fait du mal. Elle tombe dans une dépression :
« Je me sentais piégée, je n’avais plus peur de l’enfer parce que je vivais l’enfer. J’avais l’impression d’avoir pris perpète. »
Selma a vécu comme un traumatisme sa vie de couple avec Nabil. Elle a réussi a divorcer de lui au prix d’une longue et éreintante bataille judiciaire.
« Souvent elles viennent de l’autre côté du périph’ de Vaulx-en-Velin, du bon côté »
Anaïs, elle, rencontre des hommes qu’elle « matche » sur Tinder :
« Il y avait eu ce garçon, dans sa biographie il avait marqué ‘déconstruction’. C’était un mec super space, tout ce que j’aime. »
Anaïs raconte son premier rencard avec le mystérieux blond de Tinder, où la tendresse était au rendez-vous, sans pour autant que ne le soit le sexe.
Ryad et Mounir ont eu de nombreuses conquêtes. Pourtant, ils se disent blasés, difficile pour eux de trouver « la bonne ». Ryad a une idée très précise de son idéal :
« Dans ma tête il y a la femme préservée, à marier, et à côté les il y a les « plans cul » avec les femmes qui se donnent. »
En quête de la femme parfaite mais toujours bredouille, il raconte ses aventures « en attendant » :
« Souvent elles viennent de l’autre côté du périph’, mais du bon côté. Je suis vachement sapiosexuel et elles m’apprennent plein de trucs. »
Il ajoute :
« J’aime les féministes qui parlent de la banlieues et des injustices. Ce qu’elles aiment chez moi, ce doit être mon côté bad boy. »
« J’ai dû faire l’amour comme un gorille, sans tendresse »
Cette injonction à être un « bad boy viril », c’est ce qui a dégoûté Mounir des relations amoureuses, intramuros ou extramuros de la cité. Il raconte une soirée terrible au micro de France Culture, une soirée où il s’est senti obligé d’avoir des relations sexuelles car il est homme et qu’il a une « fonction ». Un récit glaçant :
« J’ai dû faire l’amour comme un gorille, sans tendresse. Ça m’a dégoûté, je me suis dit : ‘qu’est-ce que je fais, c’est pas moi’. Je me suis senti sale. »
Finalement, il y a aussi Othmane, un homme qui se décrit comme un « vieux lion qui a des cicatrices ». Il débite une série de techniques de dragues plus ou moins recommandables pour mettre une femme dans son lit, en partant de son terrain de chasse préféré : le Carrefour de Vénissieux. Il enchaîne avec de brillantes théories sur ce que sont, au fond, les femmes, « qui n’attendent qu’une seule chose, c’est de se faire accrocher ». Un entretien peut-être un peu moins introspectif.
Le podcast de 58 minutes adopte une posture de plus en plus en vogue dans les productions radiophoniques, une création brut, sans filtre avec très peu de commentaire du journaliste qui réalise le reportage. Un micro ouvert qui laisse place à l’inattendu et surtout à l’intime. À écouter ici.
[Quitter ou aimer le restaurant à Lyon ? 2/2] Depuis la fin du premier confinement, le milieu de la restauration peine à recruter à Lyon comme dans de nombreuses villes en France. Pour comprendre les raisons d’un désamour, Rue89Lyon a rencontré des professionnels dans une ville où ces métiers revêtent une charge très symbolique.
Guillaume, cuisinier à la recherche d’un restaurant à Lyon qui serait un «lieu de travail bienveillant », témoigne.
A 25 ans, Guillaume [le prénom a été modifié] travaille en cuisine depuis plusieurs années. Espérant se spécialiser dans ce qu’on appelle la bistronomie, il raconte s’être confronté plusieurs fois à des chefs violents, au moins verbalement.
Guillaume revient sur des expériences qui peuvent expliquer, en partie, pourquoi le secteur de l’hôtellerie-restauration a perdu 237 000 travailleurs entre février 2020 et février 2021.
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Journaliste lyonnais fan de l’Ouest, je suis à Rue89Lyon depuis 2020. Aujourd’hui associé et directeur de publication, je couvre les questions sociales mais aussi écologiques (pollutions industrielles, scandale des perfluorés). Le travail, c’est la santé, à condition que le droit soit respecté. Un œil politique sur le Rhône. Pour me laisser une info, c’est ici plemerle@rue89lyon.fr.
[Quitter ou aimer le restaurant à Lyon ? 1/2] Depuis la fin du premier confinement, le milieu de la restauration peine à recruter à Lyon comme dans de nombreuses villes en France. Pour comprendre les raisons d’un désamour, Rue89Lyon a rencontré des professionnels dans une ville où ces métiers revêtent une charge particulièrement symbolique.
Mat est un cuisinier à la recherche d’un « lieu respectant le code du travail ».
À 30 ans, Mat (le prénom a été modifié) travaille depuis 12 ans dans la restauration. Loin d’être dans la complainte, ce Lyonnais nous a rencontrés avec sa copine. C’est elle qui l’a persuadé que sa situation n’était pas normale. Présente tout le long de l’entretien, elle a complété certains aspects du témoignage où le cuisinier, toujours en activité, tendait selon ses termes à « minimiser ».
Dans son témoignage à lire ci-dessous, Mat raconte six ans de travail pour un restaurant asiatique, apprécié des Lyonnais et des entorses régulières au code du travail.
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[2/2] La population de la métropole de Lyon progresse sur le même rythme et selon certaines caractéristiques similaires à la population de la seule ville de Lyon. Cette progression est pour beaucoup due aux naissances -et pas vraiment le fait d’un nombre d’entrées sur le territoire supérieur à celui des départs.Suite de notre analyse réalisée notamment à partir des chiffres de l’Insee.
La métropole progresse au rythme de la ville de Lyon
Comparer Lyon aux autres grandes villes de France trouve certainement davantage de sens à l’échelle de leur métropole respective. Certaines évolutions sont comparables entre la ville centre et sa métropole. Sur la période récente, 2013-2018, la métropole de Lyon a vu sa population progresser de 0,9% par an en moyenne. Là aussi, cette progression est dû au solde naturel et non migratoire.
Évolution de la population des grandes métropoles de France dont celle de Lyon entre 2013 et 2018. Tableau Insee
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Ça s’est passé à Lyon cette semaine. Passage en revue d’événements et infos qui ont filé à si vive allure que vous ne les auriez pas vus.
Pourquoi les écologistes ont-ils provoqué une telle colère suivie d’une grève dans les TCL ?
Difficile de faire des transports en commun l’alpha et l’omega d’une politique écologiste pour Lyon et sa métropole, tout en omettant de ménager les acteurs en place au sein du système. L’idée du président écologiste du Sytral (syndicat mixte gestionnaire des TCL) est de découper ce marché des transports, c’est ce qu’on appelle l’allotissement, pour qu’il soit éventuellement pris en charge par plusieurs opérateurs. Et cela, dans le but d’« améliorer le service » jusque là détenu en totalité par l’opérateur Keolis.
Ou comment faire jouer la concurrence en divisant la grosse machine des transports par autant de secteurs que de potentiels candidats à leur gestion. Bruno Bernard ne dit pas autre chose, il veut éviter le risque du « monopole privé ». Keolis, maître à bord, s’en inquiète -le contrat que l’opérateur a jusque là détenu pèse plus de trois milliards d’euros. Une grève très suivie par les agents s’est tenue ce mercredi 9 février, malgré un « socle social » promis par les équipes de l’écologiste Bruno Bernard. Le président du Sytral ne cesse de vouloir rassurer : « les salariés ne sont pas des variables d’ajustement », promet-il.
Le contrat avec Keolis, en cours et renouvelé depuis 2017 doit prendre fin courant 2024. L’allotissement doit être acté en mars 2022. De nouveaux opérateurs sont d’ores et déjà prêts à dégainer pour se positionner : RATP Dev, Trans Dev, et Keolis bien entendu. De nouvelles grèves pourraient être lancées.
Le projet d’un café-vélo orienté vers les femmes à Villeurbanne
Ce sont deux femmes qui s’associent pour monter ce projet de café-vélo, présenté comme un futur lieu convivial mais aussi de réparation DIY (Do It Yourself, ndlr) des vélos, à Villeurbanne. Encore un, direz-vous, n’y en a-t-il pas suffisamment à Lyon et alentours ?
L’intérêt de ce « Ponyo Café Vélo » est que Zoé, Loli et Ève, ses fondatrices, le veulent « bienveillant, chaleureux, safe, inclusif, pluriel ». Beaucoup d’adjectifs que ces cyclistes chevronnées revendiquent. Elles ont en effet eu l’occasion de constater que « le monde du vélo est encore un domaine très largement investi et dominé par les hommes ».
« Difficile de ne pas subir de mansplaining, d’injonctions aux stéréotypes, de normes patriarcales dans les ateliers de mécanique cycle. Le vélo c’est la liberté, surtout si on sait s’en occuper », estiment-elles.
Zoé, Loli et Ève, fondatrices de Ponyo Café Vélo.
Pour monter leur projet, elles ont lancé un crowdfunding qui a déjà dépassé son objectif de 10 000 euros. C’est à croire qu’il y a de la demande.
Étienne Blanc, l’écriture inclusive ou la flemme d’aller au conseil municipal
La dernière fois qu’on a entendu Étienne Blanc s’exprimer, il tentait bon an mal an de se défendre d’être un relais local des propos vaseux d’Eric Zemmour sur le régime de Vichy. Le sénateur du Rhône Les Républicains avait encore auparavant milité en faveur d’une primaire à droite incluant le candidat d’extrême droite.
Cette fois, Étienne Blanc se saisit d’une question qui semble le révulser, celle de l’écriture inclusive. Le parlementaire souhaite déposer une proposition de loi interdisant son usage dans les documents administratifs : elle permettrait ainsi de les rendre nuls et caduques s’ils sont « rédigés en langue inclusive ».
Dans son communiqué, l’utilisation du mot « langue » est notable, ayant pour but affiché de donner à cette écriture un caractère « étranger » à la langue française. Cet élan protecteur est animé par une préoccupation nouvelle chez Étienne Blanc, en tout cas qu’on ne lui connaissait pas jusque là.
Il a décidé de s’engager contre l’inégalité qui se logerait dans le seul point médian. Selon le sénateur, « seules les personnes bénéficiant d’un certain niveau de lecture sont capables de déchiffrer les textes rédigés en langue inclusive ». C’est bien la première fois que l’on entend l’ancien conseiller régional, ex-bras droit de Laurent Wauquiez, s’inquiéter de la question des inégalités éducatives. La question de la « rupture entre l’écrit et l’oral » est presque plus intéressante. Ce qu’il dénonce est écrit en gras dans son communiqué : il s’agit de « l’éclatement et [de] la pulvérisation du masculin à portée générique ». C’est vrai que c’est là l’objectif principal de l’écriture inclusive. De quoi s’étrangler car, « de fait, l’usage du point médian revient à promouvoir une langue qui ne se parlerait plus et ne s’écrirait plus qu’au féminin ».
En tant que conseiller municipal d’opposition à Lyon, Etienne Blanc voit passer les documents municipaux internes contenant de l’écriture inclusive. Si sa proposition de loi aboutissait, il pourrait rendre nulles les convocations au conseil municipal auquel il n’a peut-être plus envie de se rendre, depuis qu’il a dû quitter la présidence du groupe d’élus de droite. Beaucoup d’agitation pour un petit coup de flemme ?