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Rillieux-la-Pape : une élection de confirmation pour l’ « étoile montante de la droite », Alexandre Vincendet ?

La figure de proue des Républicains dans le Rhône, Alexandre Vincendet, brigue un second mandat. Après six ans à la tête de Rillieux-la-Pape, un bilan de rénovation urbaine record et une politique sécuritaire aux accents de droite dure, l’ancien poulain de Jean-François Copé a la ferme intention de poursuivre la métamorphose de sa ville.

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Alexandre vincendet, maire de Rillieux-la-Pape et président des LR du Rhône. ©Assia Mendi

2008, Alexandre Vincendet, a 24 ans et quitte Bourg-en-Bresse « baluchon » à la main, direction la capitale pour ses études en sciences politiques. Jeune stagiaire, il rencontre deux de ses idoles : Nicolas Sarkozy, alors président, et Jacques Chirac, dont il a entendu parler « matin, midi et soir » à table toute son enfance. Six ans plus tard, leur portrait figurent accrochés au mur du bureau du jeune édile.

« J’arrive dans une ville de banlieue réputée inarrachable à la gauche, je deviens patron de ma famille politique dans le Rhône et je suis secrétaire générale adjoint des Républicains, donc responsable national », s’enorgueillit-il.

Une success story en partie imputable au contexte politique de l’époque et au repérage très jeune dont il a fait l’objet de la part des responsables de droite.

Stagiaire d’Étienne Blanc en licence, il est « le seul parmi la quarantaine d’autres stagiaires » que le député gardera sous son aile, affirme-t-il aujourd’hui. Un coup de pouce qui lui permet de gravir les échelons. Jean-François Copé puis le maire de Caluire-et-Cuire Philippe Coché le mettent en orbite.

Lorsqu’il arrive à Rillieux-la-Pape en 2014, après avoir travaillé au cabinet du maire de Caluire, Alexandre Vincendet est inconnu au bataillon. Quand on l’interroge sur les raisons qui ont poussé les Rilliards à l’élire, il préfère contextualiser :

 « On était en pleine vague bleue avec ma famille politique, l’UMP. C’était la première fois depuis la Ve république qu’un parti remportait autant de villes. »

À peine trentenaire au moment de son sacre, il réalise un véritable coup de maître en arrachant la ville aux mains du parti socialiste. Profitant d’un désaccord politique interne à la gauche entre Renaud Gauquelin, maire sortant, et son adjoint Jean-Christophe Darne, qui les mène à présenter deux listes, Vincendet lui, décide de faire front uni avec Julien Smati, candidat étiqueté divers droite.

La gauche en paiera le prix fort, avec respectivement 39% et 11% des voix pour ses deux listes, contre 48% pour l’unique liste Union de la droite.

« Il y avait un pouvoir qui était usé après trois mandats sous la même étiquette politique, combiné avec la candidature de quelqu’un qui représente la nouvelle génération », souligne t-il, insistant sur la volonté de « dégagisme » et la demande de renouvellement exprimée par la population.

Alexandre Vincendet dans son bureau le 17 février 2019. ©Assia Mendi

Un projet de rénovation urbaine faramineux

Un mandat plus tard, il se félicite d’avoir appliqué les mesures phares de son programme de 2014. Il se réjouit notamment d’avoir enclenché un exceptionnel plan de renouvellement urbain à hauteur de 320 millions d’euros (45 millions de la mairie, 150 millions des bailleurs, 100 millions de l’ANRU et 21 millions de la  Métropole) qui ont servi à financer de nouveaux équipements publiques : nouvelle piscine, agrandissement du cinéma, nouveau centre culturel,  réhabilitation ou reconstruction d’écoles, réhabilitations et reconstructions de logements de bailleurs, et le remodelage du nouveau centre-ville.
La clé de ce qu’il définit comme un succès repose sur sa capacité à investir « intelligemment ».

« Non seulement on a tenu nos promesses, mais on est allé beaucoup plus loin. Tout le monde me riait au nez quand je parlais de 180 millions. J’en ai obtenu 320, soit le plus gros budget qu’ait jamais connu une commune sur la métropole », se targue-t-il.

Côté actions sociales, on dénombre plusieurs initiatives parmi lesquelles la création d’une « Épicerie sociale et solidaire », le retour de l’accession à la propriété dont ont pu bénéficier 125 familles depuis fin 2015,ou encore le dispositif « deuxième chance ».

Créé  en octobre 2014 avec l’aide du préfet de la région, cette « politique sociale innovante » selon lui, a pour but d’aider les jeunes des quartiers « sortis des écrans radars ». Une trentaine de jeunes âgés de 18 à 25 ans avec des parcours judiciaires ont ainsi été pris en « file active ». Le concept : les aider à trouver un logement, financer leur permis de conduire, et leur trouver une formation qualifiante débouchant sur un CDD de longue durée ou un CDI.

« Notre plus bel exemple c’est un jeune qui était SDF, et qui après avoir suivi ce programme est père de famille, en CDI dans le bâtiment et a son propre logement.» assure-t-il.

Un HLM de la Ville Nouvelle. ©Assia Mendi

Autre leitmotiv : le « désenclavement des quartiers ». À Rillieux, la ligne de front entre quartiers aisés et cités populaires est délimitée par la Route de Strasbourg, que le maire lui même qualifie de « frontière assez brutale ».

Un bilan social décrié

Dans les années 1970, il faut faire face à l’urgence du besoin en logements: la population va passer de 18 000 à 30 000 habitants avec l’afflux massif de pieds noirs chassés du Maghreb. Rillieux-la-Pape voit ainsi le jour. S’ensuit un vaste chantier de construction de logements, sociaux essentiellement. Ainsi, dès 2004, le parc social locatif représente 56% des habitations, un taux inchangé depuis.

Le quartier qui incarne le mieux cet exemple, c’est justement le quartier des Alagniers, qui compte 100% de logements sociaux. Le maire explique vouloir « en finir avec ces barres inhumaines » et souhaite bâtir de nouveaux logements sociaux non différentiables des logements classiques. Du côté des habitants du Quartier prioritaire de la politique la ville  QPV, la crainte de ne pas pouvoir être relogés rapidement ou de devoir déménager plusieurs fois augmente.

Quand on fait un tour dans la Ville Nouvelle, le huitième plus grand Quartier prioritaire de la politique la ville de France, où s’entassent dans des tours de bétons 18 000 habitants -soit un Rilliard sur deux- on comprend vite pourquoi l’enthousiasme est en demi-teinte. Le principal reproche adressé à Alexandre Vincendet ? La suppression des neuf « Maisons de Quartiers », aussi appelées « Maisons pour Tous ».

« C’était des lieux de médiation et de création de lien social pour la population. On encadrait les adolescents. Mieux vaut qu’ils soient dedans que dehors, à la rue » se lamente Marc Cachard, leader de l’opposition de gauche et candidat à l’élection municipale de 2020.

Un avis partagé par Sofia*, 49 ans et mère au foyer résidant dans la Ville Nouvelle :

« Avant, on se retrouvait entre mamans dans les locaux pour des ateliers cuisine et de couture tous les mardis après-midi. Il nous reste quoi nous ici à la ZUP ? Même la garderie ils l’ont fermé. »

Son fils Samy*, 18 ans, dénonce lui aussi le manque d’encadrement des jeunes depuis la fermeture des locaux des Alagniers:

« Quand j’étais gamin, j’y allais tout le temps. On faisait des sorties à Walibi, au bowling, on jouait au foot. Aujourd’hui, plus rien, les gamins jouent dehors en bas des blocs alors que ça deal du shit. S’ils étaient dans la maison des jeunes avec des éducateurs ils auraient plus de cadre. »

Alexandre Vincendet se défend quant à lui de toute fermeture des dits locaux :

« Je n’en ai pas fermé une, quand on est arrivés elles n’existaient déjà plus dans les faits. De toute façon, la Maison de quartier j’y crois pas. On propose d’ouvrir une maison et on met un baby foot au foot milieu, c’est insensé. »

La privatisation de l’ancienne piscine municipale – dont la fréquentation aurait sensiblement augmenté- est également décriée par les Rilliards en situation de précarité, frustrés de voir le prix du ticket d’entrée passe du simple au double: 4,5 euros contre 2 euros auparavant.

En plein cœur du quartier, force est de constater que le nouveau cinéma, doté de trois salles et d’écrans en résolutions 4K est lui aussi déserté par les jeunes banlieusards.

Dans le secteur des Alagniers, Karim Abou Ayoub 18 ans, Abdel Slimani, 17 ans tiennent les murs en bas des blocs depuis qu’ils ont arrêté l’école.

« Dans ce quartiers les petits sont finis, il n’y a pas d’avenir pour eux. Avant avec Gauquelin (ndlr: Renaud Gauquelin, ancien maire), quand on lui proposait un projet, il nous écoutait. On lui demandait par exemple de nous mettre à disposition un minibus pour aller au ski et il nous aidait. Maintenant la mairie ne nous écoute plus. On l’a jamais vu ici dans les quartiers », témoigne Karim.

Carte blanche pour la police municipale

Leur ami, Ishak, 23 ans, reproche -comme beaucoup de jeunes du quartier- à Vincendet d’avoir donné les pleins pouvoirs à la police municipale, qu’il accuse d’abus :

« Avant ils faisaient la circulation, et passaient dans les commerces pour savoir si tout se passait bien ou en cas de problèmes de voisinage. Ils dialoguaient beaucoup plus, et s’ils n’arrivaient pas à régler le problème avec la parole, ils appelaient la police nationale. Depuis qu’ils sont sur-armés, ça se passe très mal. Ils sont beaucoup plus violents et se prennent pour le GIGN. »

En janvier 2018, un jeune de 13 ans s’était par ailleurs fait mordre par un chien de la brigade canine. L’enquête est encore en cours et les élus du conseil municipal ont voté pour une indemnisation à hauteur de 7500 euros.

Une des 70 caméras installées partout dans la ville sous le mandat d’Alexandre Vincendet. ©Assia Mendi

Rendre Rillieux plus attractive en changeant l’image de la ville, ternie par les débordements à répétitions qui font régulièrement couler l’encre de la presse locale, est l’autre grande priorité du maire.

Cela passe par le « retour en force des lois la République dans les quartiers », selon lui, et il ne lésine pas sur les moyens pour y parvenir. Installations en 2015 d’un Centre du supervision urbain (CSU) relié aux 70 caméras de vidéo-protection, policiers équipés de caméras portatives afin de lutter contre les incivilités et outrages à agents, doublement des effectifs policiers, création d’une brigade canine et d’une brigade moto.

Toutes ces mesures lui ont valu de remporter la « Marianne d’Or de la Sécurité » un an après son arrivée au pouvoir. Il assume donner les pleins pouvoirs aux services de police, citant un policier ayant par le passé travaillé à Bron:

« Il m’a dit que « la différence entre Bron et Rillieux c’est que la bas le maire nous demande de fermer les yeux pour pas faire de vague alors qu’ici vous nous laisser régler le problème » On a une politique de tolérance zéro », explique Alexandre Vincendet.

Tolérance zéro

Adepte de la rhétorique de la droite dure -qui n’est pas sans rappeler celle l’ancien chef de l’État Nicolas Sarkozy- pendant son premier mandat, on pouvait lire sur certains de ses tweets que «la peur doit changer de camp » et qu’il ne «ne cèdera pas à la pression des voyous qui veulent imposer leur loi ».

Alors qu’il a fait de la lutte contre la délinquance son cheval de bataille -4% du budget municipal est alloué à la lutte contre l’insécurité- il n’hésite pas à mettre en place des mesures fortes afin de lutter contre les incivilités de ceux qu’il qualifie de « petits caïds ». La plus symbolique: la suspension des aides municipales pour une durée d’un an aux familles de délinquants multirécidivistes qui refusent d’être accompagnées.

« Quand on fait des enfants on les assume, on touche de l’argent de l’Etat c’est l’esprit de solidarité. Mais à côté des droits, il y a aussi les devoirs: être le premier éducateur de ses enfants.» souligne t-il.

Renaud Gauquelin, ancien maire de la ville, et ex-chef de l’opposition regrette cette décision :

« Couper les vivres d’une famille, leur retirer les coupons sport et culture qui permettaient à ces gosses de s’amuser, ça pénalise des familles entières. C’est digne d’un parti d’extrême droite» déplore-t-il, avant d’ajouter qu’il était à l’origine du projet d’équipement des caméras portatives sur les policiers, récupéré par Alexandre Vincendet après son élection.

Outre la réponse pénale et judiciaire, il a donc mis en place cette mesure administrative, qui selon lui sert à les obliger à se déplacer dans son bureau, où il insiste sur le fait de les recevoir en personne. Seulement deux familles sur une quinzaine ont refusé selon lui.

Autre mesure encore : la signature de « charte de bonnes conduites » pour les futures mariés leur rappelant leur droits et devoirs, afin de lutter contre les dérapages.  Il avait effectivement interdit en 2017 à une centaine d’invités d’assister à la cérémonie d’un mariage dans la salle de l’Hotel de Ville pour « troubles à l’ordre de publique ».

Arrêtés municipaux mettant fin aux barbecues sauvages, ouverture -inédite- d’une brasserie franchouillarde en plein cœur de la Ville Nouvelle, multiplications des contrôles sanitaires dans les snacks : l’objectif est clair, redorer le blason du quartier. Certains habitants l’accusent même de racheter tous les commerces, et de les bloquer à la vente, afin de limiter l’ouverture d’établissement jugés trop sectaires, comme des kebabs.

Une campagne plus fédératrice

Avec sa nouvelle campagne, sous le nom « Ensemble, nous sommes Rillieux-la-Pape », Alexandre Vincendet se veut cette fois beaucoup plus inclusif, avec au premier plan la jeunesse et un panel de candidats pour représenter tous les quartiers de la ville.

Avec une liste renouvelée à 50%, il vante même l’exploit de compter parmi ses colistiers deux élus de gauche, Corine Bozon-Guillot et Gilbert Dandel, et des gens n’ayant voté pour lui ni aux municipales, ni aux législatives.

À l’approche du prochain scrutin, les 15 et 22 mars prochain, les divisions au sein de l’opposition, qui présentera une fois encore deux listes, sont toujours palpables. Mais Marc Cachard ne désespère pas :

« On s’est à minima entendu sur le fait que la liste qui arriverait 3e au soir du premier tour se désisterai et appellerait à voter pour l’autre. On progresse par rapport à il y a six ans. »

Optimiste, il poursuit :

« Sans prétention aucune, s’il craint quelqu’un, c’est moi.  Il y a un fort rejet de ses politiques non participatives et limite autoritaires, en plus d’un fort accroissement des inscriptions sur les listes électorales des habitants de la Ville Nouvelle. Tout ça laisse à penser qu’il y a match. »

S’il est réélu, Alexandre Vincendet espère peser de tout son poids, avec ses homologues de Caluire et Sathonay pour son autre projet phare d’étendre la ligne B du métro. Son objectif: que tout soit acté d’ici le prochain mandat, et que les travaux commencent pour le suivant.
Une bonne solution structurelle au développement durable selon lui, qui permettrait en plus de réduire de moitié le trafic routier de sa commune.

Alexandre Vincendet met aussi avant un volet écologie. Rillieux-la-Pape a été labellisé Cit’Érgie, aux côté des 54 autres collectivités les plus en pointe sur la politique climat-air-énergie en 2019.  Il évoque également son projet de Parc linéaire urbain, avec 5000 plantations, qui permettra de traverser tout Rillieux plateau-Nord en vélo ou à pied.

En matière de développement économique, Alexandre Vicendet affirme avoir créé 2000 emplois grâce à la vente de terrains à des entreprises. Il évoque la création de 1000 autres dans le quartier militaire d’Ostérode racheté en début de mandat, et dont les travaux débuteront dans un an.

Une ombre au tableau de sa success story, sa défaite à l’élection interne aux Républicains pour mener liste aux élections métropolitaines :

« Ça n’est pas un échec, personne me connaissait il y a six ans. Qui aurait cru que je sois un candidat à la candidature crédible ? Personne. J’ai un avantage par rapport à beaucoup de monde dans cette métropole c’est que je suis jeune et que donc j’ai l’avenir devant moi.»

Alexandre Vincendet, peut effectivement compter  sur un atout que peu de ses adversaires politiques possèdent : sa jeunesse.

* les prénoms ont été modifiés.


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Alexandre Vincendet-Rillieux-la-Pape/Crédits: Damien Mounia / Lyon Bondy Blog

Photo : Damien Mounia / Lyon Bondy Blog

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