
Ce 9 novembre 2016 est une date particulière pour notre média et, dans d’autres proportions, pour le monde dans lequel il évolue. L’ère politique Trump a démarré bien avant l’élection de ce jour et bien avant l’ascension du Républicain à la tête des États-Unis. Elle ne repose pas sur la seule personne de « Donald » pas plus qu’elle ne se limite aux frontières de son pays.
En tant que média local et au sein du territoire que nous couvrons, nous la reniflons et tentons de l’analyser souvent.
Ces dernières semaines, ceux des médias américains inscrits dans une très ancienne et solide tradition journalistique de « neutralité » ont décidé de la rompre, à l’occasion de la campagne électorale américaine. Et ils se sont engagés pour… Hilary Clinton, donnée gagnante par eux tous et qui, comme on le sait désormais, a finalement perdu.
Désormais, les mots ne sont pas assez forts pour décrire cette victoire comme celle du « populisme », de « la bêtise », de la simplification de la réalité, du racisme, de la misogynie etc. etc. -et le clavier qui ne fonctionne plus, forcé de frapper tous ces gros mots.
Today’s front cover — HOUSE OF HORRORS: https://t.co/r9VgoiUhyK
– Trump seizes Divided States of America pic.twitter.com/YEfTxgyn9Y— New York Daily News (@NYDailyNews) November 9, 2016
En tant qu’observateurs de la vie politique locale non exempte de certaines de ces tares (à plus ou moins grosse dose), on se demande jusqu’à quel point la victoire de Donald Trump va renforcer les pulsions centrifuges chez les élus et aspirants. Car elle ne manquera pas de le faire.
Où l’on reparle de Laurent Wauquiez (quoi, encore ?)
Prenons l’exemple le plus observé sur le territoire depuis bientôt un an et rappelons que Laurent Wauquiez, numéro 1 du parti français Les Républicains et président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, avait consenti à Donald Trump de vraies qualités politiques, inspirantes pour lui, sans en faire toutefois « un modèle ».
Dans un communiqué publié ce matin, le président de région a sobrement pris acte de la victoire de Donald Trump, l’envisageant comme un prochain interlocuteur en cas de victoire du candidat de la droite en 2017, à la présidence de la République.
La trumpisation du propos politique ou, en tout cas, sa radicalisation, est un phénomène que l’on relève chez un petit paquet d’élus ou de figures locales qui la choisissent de façon cynique et/ou pragmatique, comme axe de com’ et de marketing politique très fructueux.
Donald Trump leur donne raison et nous oblige à nous positionner. Quelle attitude adopter ? Celle du combat ? De l’analyse distanciée qui continue à laisser ouvertes toutes les portes ?
« Bien-pensants » et autres postures
Le journal Le Monde, comparable à certains de ces gros médias américains prônant la neutralité, a récemment annoncé qu’il ne publierait aucune tribune de Marine Le Pen, présidente du Front national, dans le cadre de la campagne électorale qui démarrera bientôt en France.
Objectif : la « prendre au mot » pour enrayer sa stratégie de banalisation.
Est-ce le bon choix ? La candidate du parti d’extrême droite déjà largement annoncée au second tour des élections présidentielles pourra dénoncer l’exclusion dont elle est victime, tout comme Donald Trump a dénoncé les partis pris de la presse américaine, accusée de malhonnêteté.
On parie que Marine Le Pen conservera sa posture dans tous les cas, avec ou sans la possibilité de s’exprimer dans Le Monde et les autres médias « bien-pensants ». Ceux que ces candidats (et l’un d’eux a transformé l’essai ce jour) associent à l’establishment, contre lequel les électeurs ont sans doute voté aussi.
Rue89Lyon a toujours montré sa volonté non pas de neutralité mais d’intransigeance. L’enjeu de l’indépendance est fort pour la presse locale, proche dans son quotidien des acteurs politiques et économiques du territoire.
Putain, cinq ans
Ce 9 novembre 2016, nous réaffirmons notre volonté de tenir un propos progressiste (si l’on doit y aller toujours fort sur les gros mots), non partisan, qui s’appuie sur l’analyse, le témoignage, sur un ton que l’on s’autorise décalé, ouvert aux apports non journalistiques émanant des nombreuses sources aujourd’hui disponibles.
Rue89Lyon a donc cinq ans aujourd’hui. Nous poursuivrons notre travail éditorial qui étend nos allées et venues à travers Lyon et son agglo, mais nous balade aussi de Genève où l’on a rencontré les partis populistes les plus inquiétants, à l’Auvergne avec les nouveaux contours de la région, en passant par Grenoble et sa vie politique mouvementée.
Nous ouvrirons bientôt un blog avec les étudiants en journalisme de Sciences-Po Lyon, dans lequel nous reprendrons le principe des portraits d’électeurs, afin d’aller à votre rencontre et de vous demander comment et pourquoi vous votez -ou ne votez pas.
Rue89Lyon a réussi à atteindre l’équilibre économique en 2015 et en 2016 ; il s’agit pour autant toujours d’une micro rédaction locale en constante tension entre ses moyens et sa forte ambition. Le site d’info porte la marque nationale Rue89 mais appartient à une SARL lyonnaise, détenue en majorité par deux journalistes co-fondateurs.
Nous comptons donc mener notre travail en l’interrogeant davantage. Nous espérons ne pas naviguer dans un entre-soi, en ouvrant le meilleur espace de débat de la ville et de la région, par le biais de ce site ou encore des réseaux sociaux, où l’on se croise souvent. À tout à l’heure donc !
François
J'ai beau être grenobloise, je ne lis pas que les articles sur ma bonne ville ;)
Heureusement, vous n'êtes pas obligés de prendre le virage de la revnum imposé par l'Obs à la Rue historique.
Bonne continuation.
"Les thèmes de la revnum', qui font partie de l'ADN originel de Rue89"
je ne suis pas d'accord avec vous. Je suis une riveraine de la première heure (mai 2007). C'était la grande époque des articles politiques, c'était vraiment un site indépendant à 3 voix. Et puis, les problèmes financiers aidant, les rachats, les riverains mis sur la touche, ces empêcheurs de changer en rond. Les journalistes ont défendu leur liberté, ils ont même fait grève, soutenus par une pétition initiée par des riverains. Et puis, le resserrage sur la RevNum, le départ de journalistes géniaux, plus de sport, plus de Camille, plus de jardinage, plus de politique si ce n'est à travers Facebook ou Twitter ou Internet d'une manière plus générale. Les journalistes ont beau être bons, ce n'est plus la culture politique des débuts.
Peut être la Rue a-t-elle trouvé un autre public ? Mais l'esprit de 2007 est bel et bien perdu.
Beaucoup de riverains sont partis. Les anciens qui restent maintiennent des fils de commentaires comme on n'en voit nulle part ailleurs. C'est souvent là qu'on se "cultive" et qu'on apprend beaucoup, souvent plus que dans les articles forcément limités.
Alors, Rue89 Lyon, j'espère que vous pourrez garder votre indépendance.
:-))
Autant j'ai pu écrire pas mal d'articles sur les migrants du temps de la Rue, maintenant c'est fini, parce que ce n'est pas RevNum, je peux seulement en parler parfois dans les commentaires. Et il n'y a pas que les migrants, mais aussi plein de sujets d'actualité et de société qui ne passent pas forcément par internet.
Camille ne pourrait plus publier son blog sur Alain, en semi liberté, il n'y a plus rien sur NDDL et le combat des zadistes, qu'est-ce qu'il y a eu sur Calais et sa "jungle" et les No borders ? Comment ont été traitées la loi sur le travail et les manifestations et la violence policière ? les stratégies d'enfermement comme vous avez traitées celles de la place Bellecour et les provocations ?
Franchement, ça craint.
Je n'ai pas réussi à tourner vraiment la page. Le gouv mène une politique de droite et on lit des articles traduits de l'américain ... dommage que la Rue soit une Rue connectée déconnectée de ce qui se passe ici, qui est pourtant hyper grave pour la démocratie.
Bon j'arrête ;-)
Bonne nuit à Rue89