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Établissements d’enseignement artistique, « les oubliés des oubliés »

Voici un récit d’acteur culturel recueilli à la site de l’appel à témoignages que Rue89Lyon a lancé. Celui d’Alexis Monniot, directeur de l’Établissement d’enseignement artistique « EM7 », situé dans le 7ème arrondissement de Lyon. Ce professeur de violon nous fait part de ses craintes concernant tout autant la reprise des cours que la survie de son école de musique.

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Établissements d'Enseignement Artistique

Pour de nombreux élèves et professeurs, cette période de confinement a totalement bouleversé les pratiques et les apprentissages. Les contacts physiques sans lesquels il est très dur d’enseigner les instruments ont du être réinventés.

Pour certains Établissements d’enseignement artistique qui en avaient les moyens, des cours collectifs ont évolué en cours individuel à distance, mais certains cours n’ont pû être dispensés. Si la reprise est autorisée par l’Etat, elle ne s’avère pas facile à mettre en place. Comment peut-elle s’organiser ? Et surtout, quel avenir pour ces écoles associatives qui tentent difficilement de joindre les deux bouts financièrement ? Ci-après le témoignage d’Alexis Monniot.

« On entend maintenant un peu plus parler des établissements de diffusion culturelle, et pourtant les établissements qui se consacrent à la transmission par l’enseignement restent dans l’ombre.

Nombreux sont associatifs, à Lyon, et c’est peut être la raison d’une impossibilité à briser le silence. Impossible de prendre le temps de la parole lorsqu’une structure est déjà à bout de souffle en temps normal…

Pour comprendre ce raisonnement il faut se pencher d’un peu plus près sur la situation de bon nombre de ces établissements :

Ceux-ci ne reçoivent pas ou peu de subventions. Elles n’ont pas ou peu de salariés pour assurer les tâches administratives ou de communication. Et il est difficile de trouver des bénévoles dans une société de plus en plus consumériste.

Le résultat est que ces structures proposent à leurs adhérents, en temps normal, un service déjà supérieur à leurs capacités de gestions, un service déjà supérieur aux coûts des cotisations, possiblement déjà très élevées.

« Les associations sont en surrégime »

Actuellement le financement de l’EM7 est à l’équilibre avec ses dépenses et se répartit comme suit :

  • 3% subventions de fonctionnement de la Ville et de la Métropole
  • 2% subventions de projets de la Métropole
  • 95% par les cotisations et ventes de gâteaux/programmes
L'Établissement d'Enseignement Artistique
L’Établissement d’Enseignement Artistique lyonnais : l’EM7 a du adapté ses cpurs pendant la période de confinement..
CC EM7

Les associations sont donc en surrégime permanent et tiennent la cadence grâce aux rares bonnes volontés enracinées dans des convictions humanistes. Souvent en manque de compétences ciblées, elles surfent sur leur marge des possibles et une priorisation permanente.

Comment ajouter à ce fonctionnement quotidien saturé la charge de se faire entendre ? Comment ajouter la charge des démarches de demandes de chômage partiel si la priorité est mise sur l’organisation des protocoles sanitaires pour une future reprises (ou inversement) ?

On pourrait prolonger la liste indéfiniment, la réponse ne peut être que pécuniaire ou bénévole.

« La priorité a été donnée aux cours individuels qui génèrent moins de contraintes »

Pour tous ces établissements c’est la double peine car l’enfermement du fonctionnement lié à la surcharge,  pour faire baisser les coûts, coupe en plus des moyens mis en place pour proposer de soulager ces structures. Un cercle vicieux dont il est difficile de sortir sans un réel investissement financier couplé d’une confiance politique afin de permettre à ces écoles de révéler leur véritable potentiel jusqu’à présent toujours étouffé.

Aujourd’hui, l’EM7, qui compte 350 élèves, a partiellement rouvert ses portes depuis le lundi 8 juin. En ce qui nous concerne, pendant le confinement, les cours individuels ont été transposés en visio, et les cours collectifs segmentés en visio également.

Les protocoles impactent fortement la répartition des temps de cours dans les plannings ainsi que l’utilisation des espaces. La priorité a donc été donnée aux cours individuels qui génèrent moins de contraintes. Les cours collectifs restent donc sur la touche.

Durant le confinement, ce sont ces mêmes cours individuels pour lesquels le suivi a été le plus simple à mettre en place.

Pour autant, un fort investissement des équipes salariées a permis de proposer des solutions de continuité pour 90% des heures d’enseignement ,notamment en assurant le suivi des cours de Formation Musicale. Ce chiffre reste à modérer avec le fait que nous n’avons réussi à toucher que 75% des familles.

 » Il faudra des aides financières extérieures pour supporter les coûts supplémentaires »

Néanmoins pour la reprise partielle, aux protocoles imposés par l’Etat, il faut penser à ajouter les préconisations spécifiques liées à l’enseignement des disciplines artistiques.

En effet, beaucoup d’informations contradictoires circulent sur la toile concernant les risques de transmission par aérosol via les micros gouttelettes (instruments à vent, chant…) les études sortent au compte goutte et sont parfois en décalage avec les réalités de terrain (études faites avec des musiciens professionnels qui maitrisent parfaitement leur instrument contrairement à nos élèves débutants).

Tout cela génère un climat d’incertitude sur les réels risques de propagation du virus lors de nos cours et une certaine anxiété chez les professeurs.

Nous sommes confiants sur la reprise d’activité en septembre, les présomptions de réinscriptions sont les mêmes que les années passées et les nouvelles demandes semblent constantes.

Pour autant si les protocoles ne sont pas adoucis à la rentrée, il faudra des aides financières extérieures pour supporter les coûts supplémentaires. »


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