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20/03/2024 date de fin
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Législatives : face à Bruno Bonnell, Najat Vallaud-Belkacem ne joue plus sur du velours à Villeurbanne

« Les législatives à Villeurbanne ne se résument pas à deux candidatures contrairement à ce que les journalistes aiment dire ».

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Une affiche collée à l'Espace Tonkin. ©Rue89Lyon

Ce mercredi soir, lors de sa première « conférence de proximité » à Villeurbanne, Najat Vallaud-Blekacem n’a pas caché son agacement à voir la campagne se résumer, « par la presse », à un duel l’opposant au chef d’entreprise Bruno Bonnell. Et pourtant.

S’il y a bien 12 candidats sur la 6è circonscription du Rhône (qui a la particularité d’épouser parfaitement les contours de la ville de Villeurbanne), Najat Vallaud-Belkacem va devoir ferrailler plus durement que ce que l’on pouvait imaginer, sur ce fief socialiste. L’investiture confirmée ce jeudi de Bruno Bonnell, sous l’étiquette La République en marche, va sérieusement lui compliquer la tâche.

Si Bruno Bonnell promet, à Rue89Lyon mais surtout à ses adversaires PS et France Insoumise, qu’il ne sera pas « dans une attitude belliqueuse », il décoche les premiers coups. Et il les a réservés à Najat Vallaud-Blekacem :

« Le vrai match, c’est entre quelqu’un qui fait de la politique depuis qu’elle est sortie de l’école et quelqu’un qui n’en a jamais fait. Elle est arrivée à Villeurbanne avec beaucoup d’énergie, c’est vraiment bien, c’est honorable. Mais moi, ça fait 50 ans que je suis à Villeurbanne, j’y ai entrepris toutes mes études et j’y ai monté toutes mes entreprises.

Mes amis me disent que je suis obsédé par Villeurbanne. »

Bruno Bonnell est investi officiellement depuis ce jeudi mais il travaille en réalité à sa campagne depuis quelques temps déjà, préparant même quelques punchlines. Tandis que la ministre a choisi de mettre en avant ses initiales NVB pour signifier une fusion de son prénom avec le nom de la ville, « NajatVilleurBanne », le candidat d’En Marche réplique :

« Moi j’ai deux N et deux L dans mon nom, ça fait encore plus de lettres en commun avec Villeurbanne. »

Une marche lancée comme une cavalerie sur un fief socialiste

La candidate PS se retrouve dans une situation inédite, celle de devoir enrayer la marche de son ancien collègue de gouvernement Emmanuel Macron- lequel cherche en toute logique la majorité présidentielle la plus solide. En marge de sa conférence de proximité de ce mercredi 10 mai à l’espace Tonkin de Villeurbanne, la ministre de l’Éducation nous a lâché :

« Il ne s’agit pas de relations interpersonnelles qui n’ont rien à faire là-dedans, il s’agit de politique. En Marche est un mouvement qui est amené à devenir un parti. »

Et d’ajouter :

« Il ne vous aura pas échappé qu’il y a un enjeu financier énorme lorsqu’on fait un parti ; ils ont donc besoin d’élus. »

Bruno Bonnell nous a déclaré vouloir attendre qu’Emmanuel Macron fasse ses annonces ministérielles ce dimanche avant de lancer un quelconque acte de campagne.

Najat Vallaud-Belkacem a quant à elle lancé sa campagne depuis longtemps. Dès septembre 2015, elle organisait une omniprésence sur le terrain, afin d’entamer la prise de relais de la députée socialiste Pascale Crozon qui ne se représente pas. Et qui avait été réélue en 2012 sur cette 6è circo avec plus de 62% des voix. Un vrai fief du PS, tenu par le maire de la ville, Jean-Paul Bret, qui anime un vivier militant très actif. Parangon du socialisme municipal.

Sauf qu’à regarder de plus près les résultats de l’élection présidentielle (donnés dans leur totalité à la fin de cet article), rien n’est simple en 2017.

Ils ont été catastrophiques pour le PS, 6% pour Benoît Hamon sur l’ensemble du territoire et 9% à Villeurbanne. Au premier tour, c’est Emmanuel Macron qui est arrivé en tête (27,7%), talonné de près par Jean-Luc Mélenchon (26,4%).

La France Insoumise a réalisé un très bon score, ce qui ne manquera pas d’entrer en ligne de compte dans ce nouveau scrutin. Laurent Legendre, candidat mélenchonniste, ne veut donc pas entendre parler de « choc entre électoral entre Najat Vallaud-Belkacem et le candidat d’En Marche ».

Thomas Dossus, secrétaire du groupe EELV Lyon, analyse quant à lui :

« Face à Najat, dans un second tour, les électeurs de droite risquent de voter contre elle et, donc, pour le candidat En Marche, vu le ressentiment autour de sa personne. »

NVB dans l’opposition… ou pas

« NVB » en campagne à Villeurbanne.

Dans son propos, la ministre très bousculée Najat Vallaud-Belkacem ménage tous les bords.

D’abord, elle souhaite « le succès de ce quinquennat pour faire avancer la France » et sous-entend qu’il n’y aura pas de sa part, si elle est élue députée, d’opposition de principe à Emmanuel Macron.

Ensuite, si elle n’a pas suivi le mouvement En Marche ! et a voulu rester fidèle à un PS affaibli par ses luttes intestines, elle ne s’improvise toutefois pas hamoniste. Pas prévu d’amender le projet du camarade Benoît, de lancer un nouveau mouvement élargi à gauche.

Enfin, elle promet de combattre certains des choix annoncés par Emmanuel Macron ou de défendre certains droits :

  • contre la suspension des allocations pour un chômeur refusant deux propositions d’emploi,
  • contre l’annulation du compte pénibilité,
  • pour le maintien du tiers payant.

« Si vous m’invitez dans votre appartement, je viens »

Sur la campagne, les méthodes varieront selon les candidats. Emmanuelle Haziza, candidate Les Républicains, encore essoufflée d’une journée militante, nous le dit tout net ce jeudi :

« Je vais continuer à faire ce que je fais depuis plus d’un an : du terrain, du terrain, du terrain. Je ne me préoccupe pas des autres candidats. Et si tout le monde annonce un duel, moi je vous dis « prudence », ce n’est pas si simple.

À Villeurbanne, on n’aime pas les gens qui arrivent avec des certitudes. Il y a une âme villeurbannaise, je suis là pour la défendre au niveau national. »

La ministre de l’Education s’est elle aussi lancée dans un conquête de proximité. En plus de réunions citoyennes régulières, elle a promis mercredi aux habitants venus l’écouter :

« J’irai chez vous, si vous me le demandez, pour expliquer mieux encore ce que je porte. Si vous m’invitez dans votre appartement, je viens. »

Une façon de « se ressourcer », a évalué Najat Vallaud-Blekacem.

Bruno Bonnell va-t-il lui aussi aller dans les appartements, battre le pavé pour convaincre ?

« Je suis un chef d’entreprise, je ne suis pas un politique et je n’use donc pas de leurs techniques. La première leçon, pour un chef d’entreprise, c’est de ne pas dévoiler sa stratégie. »

Mais Najat Vallaud-Belkacem était catégorique déjà, pour sa part, à la veille de l’annonce des investitures d’En Marche :

« Ils [les candidats de La République en marche, ndlr] vont tous faire campagne de la même façon : ils vont mettre leur tête sur les affiches à côté de celle d’Emmanuel Macron, et c’est tout », prévient Najat Vallaud-Belkacem.

Tandis que Bruno Bonnell peut compter sur une forme de vote légitimiste, qui aurait pour but d’offrir à Emmanuel Macron les moyens de gouverner et de réformer, Najat Vallaud-Belkacem voudrait quant à elle compter sur la figure qu’elle incarne, particulièrement appréciée à Villeurbanne.

Du FN mal fagotté et réchauffé

Les 300 personnes réunies à l’espace Tonkin mercredi soir lui ont montré un accueil plutôt enthousiaste et favorable. « NVB » a pu dérouler son bilan à la tête de l’Éducation nationale tout en faisant part de façon très personnelle de son expérience gouvernementale de cinq ans (comprenant un passage au ministère des Droits des femmes et une mission de porte-parolat).

Son appartenance au gouvernement Hollande ne lui a pas été reproché. Il s’agit toutefois d’un élément biographique qui ne manquera pas d’être rappelé par les autres candidats de cette 6è circo très disputée. Notamment par les écologistes qui présente une candidate bien connue du territoire, élue à la Métropole de Lyon, Béatrice Vessiller.

Infatigable opposante aux divers mastodontes socialistes de la Métropole, et particulièrement au maire PS Jean-Paul Bret, elle estime que l’écologie politique doit être représentée :

« D’autant plus qu’on a appris que le programme du PS allait renoncer à plusieurs points qui justement nous avaient fait soutenir Benoît Hamon à la présidentielle, comme la sortie du nucléaire ou la sortie du diesel. Nous aurons donc des différences à faire valoir dans le débat auprès des villeurbannais », a-t-elle déclaré au micro de Jazz Radio.

Côté FN, qui a fait 13% au premier tour et 20% au second,, pas de grande nouveauté. En 2017, on reprend le même  -et pas des moindres- et on recommence. C’est Stéphane Poncet qui s’y colle, comme aux législatives de 2012 et aux municipales de 2014.

Il se situe sur la frange extrême du FN (c’est dire s’il se situe à l’extrême droite), et représente exactement ce type d’élus que le FN prétend vouloir écarter du fait de « dérapages » racistes et illégaux avérés, mais que le parti de Marine Le Pen conserve et ré-investi à chaque nouvelle élection.

 

Les candidats aux législatives 2017 sur la 6è circonscription :

Mohamed Barchi (Mouvement 100 %)
Bruno Bonnel (En Marche!)
André Dubois (Debout la France)
Mathieu Gouttefangeas (DVD et Parti Chrétien Démocrate)
Emmanuelle Haziza (Les Républicains)
Claire Lainez (Lutte Ouvrière)
Laurent Legendre (France Insoumise)
Najat Vallaud-Belkacem (Parti Socialiste)
Hervé Morel (DVD)
Mathieu Soares (Parti Communiste Français)
Béatrice Vessiller (Europe Écologie Les Verts)
Stéphane Poncet (Front National)

 

Les résultats du 1er tour de la présidentielle sur la ville de Villeurbanne (en % des suffrages exprimés)

Emmanuel Macron : 27.73
Jean-Luc Mélenchon : 26.48
François Fillon : 16.59
Marine Le Pen : 13.1
Benoît Hamon : 9.15
Nicolas Dupont-Aignan : 3.44
François Asselineau : 1.2
Philippe Poutou : 0.92
Jean Lassalle : 0.62
Nathalie Arthaud : 0.58
Jacques Cheminade : 0.17
Abstention (en % des inscrits) : 26.12
Vote blanc (en % des suffrages exprimés) : 1.5

Les résultats du deuxième tour sur la 6è circo (Villeurbanne)

Emmanuel Macron 79.51 %
Marine Le Pen 20.49%
Abstention 29.82 % des inscrits
Vote blanc 7.25 % des votants

>> Lire aussi : Les candidats de la République en marche ou le verrouillage politique de Gérard Collomb à Lyon <<

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