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Le nouveau centre de rétention administrative encore pire que le premier pour le barreau de Lyon

Ce mardi 18 avril, des membres du barreau de Lyon ont partagé leurs constats à la suite d’une visite au nouveau centre de rétention administrative, situé à côté de l’aéroport de Saint-Exupéry. Ils s’alarment de conditions de rétention catastrophiques

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L'entrée du centre de rétention administrative (CRA) de Lyon. ©AD/Rue89Lyon

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« Les violences qui ont lieu dans ce Centre de rétention administrative ne sont pas liées au changement de population. C’est la structure qui est responsable. »

Ce constat simple, c’est celui fait par le barreau de Lyon à propos du nouveau centre de rétention administrative (CRA), construit à côté de l’aéroport Saint-Exupéry. Ce mardi 18 avril, le sénateur EELV Thomas Dossus, la bâtonnière du barreau de Lyon et plusieurs membres de l’ordre ont fait été de graves dysfonctionnements dans le nouveau bâtiment.

Toilettes avec des portes battantes empêchant une quelconque intimité, 30 minutes chaque jour pour aller manger au réfectoire, des cours pour s’aérer qui ressemblent à des cages… 

« On a l’impression que la rétention est là pour punir, ce qui ne devrait pas être le cas, grince la bâtonnière, Marie-Josèphe Laurent. Tout est anxiogène là-bas. »

L'entrée du centre de rétention administrative (CRA) de Lyon. ©AD/Rue89Lyon
L’entrée du premier bâtiment du centre de rétention administrative (CRA) de Lyon.Photo : AD/Rue89Lyon

Le deuxième centre de rétention de Lyon : « Il y a de quoi regretter la prison »

Pour parler de l’enfermement en CRA, il est d’usage de parler de « rétention » et non de « détention ». C’est du moins ce que prône le jargon administratif, préférant le premier terme qui laisse moins penser à une prison. Les personnes « retenues » le sont effectivement pour des motifs administratifs et non-pénaux (Obligation de quitter le territoire français notamment de moins d’un an, décision d’expulsion, etc.). Pourtant, au « CRA 2 », les conditions de vie sont pires qu’en détention, pour les membres du barreau.

« Pour certains anciens détenus, il y a de quoi regretter la prison », constate Frédérique Paoli, secrétaire général de l’ordre des avocats de Lyon.

Ces personnes vivent ainsi à 20 dans des blocs avec des chambres. Aucune d’elles n’a de clef pour fermer, donc aucune intimité la nuit. Ils n’ont le droit qu’une heure par jour de se rendre dans la zone d’action contrôlée (ZAC) où ils peuvent faire tout leur travail administratif avec Forum réfugiés, voir leurs amis, leurs familles, le médecin… Durant 23 heures, ils ont largement le temps de devenir fou.

« Tout est pensé comme un système carcéral, mais avec une oisiveté totale, sans activité », constate la bâtonnière.

Au centre de rétention de Lyon : devenir fou en trois mois

Spécificité du centre de rétention administratif par rapport à son voisin : il accueille davantage de personnes en situation irrégulière ayant été condamnées pour délinquance. Cependant, ces dernières y arrivent après avoir purgé leurs peines. Elles peuvent rester sur place jusqu’à 90 jours (trois mois). Au bout de cette date, leur santé mentale peut être gravement touchée.

« Forum Réfugié le voit bien. Quand certains détenus arrivent, ils peuvent être dans de bonnes conditions. Puis, leur état psychique se détériore de plus en plus », reprend l’avocat Morgan Bescou, de la commission droit des étrangers au barreau de Lyon.

Pas de doute : pour les membres du barreau, ce deuxième CRA est bien pire que le premier. Une chose qui ne relève pas de l’évidence. Au cours de différentes enquêtes et reportages, Rue89Lyon avait déjà documenté à quel point les conditions de vie du « CRA 1 » étaient difficiles. Initialement, ce nouveau bâtiment était d’ailleurs censé proposer une meilleure capacité d’hébergement.

Des échéances législatives à suivre

« Le niveau de dégradation est très élevé au bout d’un an et demi », constate Thomas Dossu, sénateur EELV.

Il alerte sur un risque : ce centre de rétention doit servir de « pilote » pour la construction d’autres bâtiments du même type en France. Autant dire que, si tel devait être le cas, l’effet serait dramatique.

« Il faut se poser la question de l’image de la France que cela renvoie à l’international, quand ces personnes parlent à leurs consuls, etc. », ajoute Morgan Bescou.

Pour se faire entendre, le barreau interpelle la préfecture. Un rapport a été transmis à l’administration. Le contrôleur général des lieux de privation de liberté a également été saisi fin 2022. « Il y a une loi immigration qui se prépare, rappelle également Thomas Dossus (EELV). Un travail législatif sera donc à mener, même s’il se fera dans un climat qui ne sera pas simple… » Mise de côté par le chef de l’État, cette dernière réforme devrait être remise sur le devant de la scène par le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin.


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