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A Lyon, le Comité contre les violences policières harcelé par une IP du ministère de l’Intérieur

Le Comité contre les violences policières de Lyon est victime d’un démarchage commercial insistant depuis février 2020. L’adresse IP qui en est à l’origine appartient au ministère de l’Intérieur. Mais les données personnelles permettant d’aller plus loin ont été effacées quelques semaines avant le début des investigations.

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C’est une histoire d’appels publicitaires à répétition, de démarchage et de courriels envahissants. Une histoire qui pourrait être banale si elle ne concernait pas de près le ministère de l’Intérieur.

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Photo d’illustration – The Average Tech Guy sur Unsplash.

A Lyon, « des manœuvres d’intimidation contre le Comité contre les violences policières »

En février 2020, le Comité lyonnais contre les violences policières publie un article sur un policier de la BAC de Lyon. Ce dernier serait l’un des agresseurs d’Arthur Naciri, passé à tabac il y a deux ans lors d’une manifestation. Le Comité s’étonne de croiser à nouveau le policier sur le terrain, qui plus est un LBD à la main, et demande des comptes à la préfecture et à trois services de la direction départementale de la sécurité publique (DDSP) du Rhône : la direction, le service communication, et le pôle commandement, discipline et déontologie de la DDSP.

Le lendemain soir, le téléphone de Lionel Perrin, membre du Comité, commence à sonner un peu trop régulièrement. Au bout du fil, des commerciaux lui proposent différents produits et services. Peu à peu, Lionel se pose des questions : 

« J’ai pensé que quelqu’un s’était trompé de numéro, puis un des interlocuteurs m’a appelé par mon nom. Nous avons aussi reçu des centaines de mails sur l’adresse du Comité lyonnais contre les violences policières. »

Lionel et le Comité font tout de suite le lien avec leur article sur le policier de la BAC de Lyon et les mails qu’eux-mêmes ont envoyés à la DDSP du Rhône et à la Préfecture pour avoir des informations à son sujet. En bas de ces mails, un numéro de téléphone pour pouvoir recontacter le Comité : celui de Lionel Perrin. Et une adresse mail, celle du Comité. 

« Ce sont des manœuvres d’intimidation envers le Comité. On le prend comme tel. »

A l’origine des faits, une adresse IP du ministère de l’intérieur

Le Comité glane auprès des démarcheurs quelques informations : leur adresse mail et le numéro de téléphone de Lionel auraient été rentrés sur divers sites web avec une demande de rappel. Une fois l’adresse IP à l’origine de ces inscriptions récupérée, un petit tour sur internet et le Comité découvre qu’elle provient de la Direction des services numériques de l’Etat (DINUM).

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Capture d’écran d’un site permettant d’identifier la provenance d’une adresse IP.

Le 7 juillet 2020, le Comité décide de porter plainte. Une enquête est ouverte par le procureur de la République de Lyon. La machine judiciaire se met donc en branle et s’arrête. En septembre, le parquet de Lyon se déclare incompétent. L’affaire est immédiatement envoyé au parquet de Paris. Et y reste un temps. 

Il faudra attendre sept mois pour que l’affaire retourne au parquet de Lyon, qui s’en saisit en mars 2021. L’enquête est alors confiée à la police judiciaire qui demande des informations à la DINUM. Lors de son audition le 9 avril dernier, les enquêteurs apprennent à Lionel que l’adresse IP provient bien du gouvernement, et plus précisément du ministère de l’Intérieur.

Les données effacées quelques semaines avant les premières investigations

Mais voilà, impossible d’en savoir plus. Quand la PJ ouvre le dossier, nous sommes déjà le 22 mars 2021. Or, les données personnelles de l’adresse IP à l’origine du harcèlement ont été effacées un an après les faits, conformément à la loi. C’est-à-dire le 12 février 2021. Soit quelques semaines seulement avant que le parquet de Paris ne retourne l’affaire à celui de Lyon, après sept mois de silence.

Contacté par Rue89Lyon, le parquet de Paris n’a pas encore répondu à nos sollicitations pour expliquer ce délai.

Lionel Perrin, lui, trouve la coïncidence troublante :  

« Pourquoi ne pas avoir renvoyé le dossier au parquet de Lyon plus tôt ? Comme par hasard, c’est pile au moment où les données ont été effacées. La coïncidence est frappante ! »

De son côté, son avocat Yannis Lantheaume a relancé le parquet de Lyon le 14 avril dernier pour demander la poursuite des investigations. Le Comité contre les violences policières espère obtenir plus d’informations pour identifier la ou les personnes qui auraient utilisé cette adresse IP du ministère de l’Intérieur.

L’avocat suggère de restreindre les recherches aux services contactés par le Comité en février 2020 : le parquet et le pôle commandement, discipline et déontologie de la DDSP. Des indications géographiques permettraient déjà de faire un grand pas en avant. 


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