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Variole du singe à Lyon : où en est-on de la prise en charge et de la vaccination ?

La variole du singe continue de circuler à Lyon. L’accès à la vaccination s’améliore, mais certains publics restent difficile à protéger.

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Malou, l'infirmière du centre de santé sexuelle le griffon, vaccine un patient contre la variole du singe. ©MA/Rue89Lyon

Pendant plusieurs semaines cet été, trouver un créneau de vaccination contre la variole du singe à Lyon s’avérait mission impossible. Seuls deux centres de vaccination étaient ouverts, au sein des Hospices civils (HCL). Depuis le 5 septembre, le centre de santé sexuelle du Griffon, dans le 1er arrondissement, a rejoint le dispositif de l’Agence régionale de santé (ARS) et propose de se faire vacciner le soir.

Si le nombre de cas semble décroître légèrement, les autorités de santé et les associations restent très vigilantes à Lyon et poursuivent leurs efforts pour lutter contre l’épidémie. En Auvergne-Rhône-Alpes au 6 septembre, on comptait 243 cas confirmés de variole du singe dont 167 (69%) dans le département du Rhône.

Un seul centre de dépistage de la variole du singe à Lyon

Comme partout en France, la première étape pour un patient lyonnais qui pense souffrir de la variole du singe est de s’isoler et d’appeler le 15. Le Samu le mettra ensuite en relation avec un des deux CeGIDD (Centre gratuit d’information, de dépistage et de diagnostic) des HCL.

Des médecins vont ensuite guider le patient et établir un diagnostic à partir d’une description des symptômes et de photos. S’il y a un doute, le patient pourra être amené à se présenter au CeGIDD pour un prélèvement. C’est le seul lieu à Lyon qui réalise un dépistage. Le Dr Laurent Cotte, responsable du CeGIDD Croix-Rousse, spécialisé en maladies infectieuses explique pourquoi :

« La variole du singe est un agent de classe 3, donc des précautions particulières sont prises pour le prélèvement et le traitement en laboratoire. Cette famille de virus est résistant dans le milieu extérieur, la variole est une des maladies avec contamination indirecte via une surface. »

La variole du singe : une maladie bénigne qui peut être douloureuse

Il n’existe pas de traitement pour soigner la variole du singe. Le patient doit s’isoler trois semaines. Et il faut attendre la cicatrisation totale des lésions.

« Le seul traitement est avant tout de garder les lésions propres et sèches. La mortalité est très faible. En France il n’y a pas eu de décès. Des personnes peuvent être hospitalisées mais pour des surinfections ou pour des localisations très douloureuses qui nécessitaient une prise en charge importante pour traiter la douleur. »

Yvan Couto, militant d’Aides (association de lutte contre le Sida, impliquée dans la santé des personnes LGBTI), pointe la difficulté que peuvent avoir certains patients à se faire aider lors de douleurs.

« J’ai des retours de personnes qui souffrent beaucoup. On dit que c’est bénin, mais il y a des gens qui ne pouvaient plus manger pendant une semaine parce qu’elles avaient mal aux lèvres. Dès que ça se complique, c’est parfois difficile d’accéder à une prise en charge. »

La vaccination contre la variole du singe devient plus accessible à Lyon

Alors pour éviter ces trois semaines d’isolement et les possibles souffrances liées à la maladie, la première protection déployée reste la vaccination. Tout le monde peut se faire vacciner. La Haute autorité de santé a diffusé un message recommandant de vacciner « de manière préventive » : les personnes trans et hommes qui ont des relations sexuelles avec les hommes multipartenaires, les travailleur·euses du sexe, et les professionnels exerçant dans les lieux de consommation sexuelle.

Actuellement, les CeGIDD des HCL vaccinent plus de mille personnes par semaine à Lyon. Du côté du centre de santé sexuelle Le Griffon, les volumes sont plus modestes avec 10 vaccinations par jour, mais les horaires proposés, de 18h à 21h, sont prisés.

Malou, l'infirmière du centre de santé sexuelle le griffon, vaccine un patient contre la variole du singe. ©MA/Rue89Lyon
Malou, l’infirmière du centre de santé sexuelle le griffon, vaccine un patient contre la variole du singe.Photo : MA/Rue89Lyon

Colette Coudeyras est présidente de l’association Virage Santé qui a monté ce centre impliqué pour la santé des personnes LGBTI. Elle détaille les étapes qui ont mené à leur implication dans la vaccination :

« L’ARS est venue nous chercher parce qu’on avait une expérience de vaccination lorsqu’il y avait eu une épidémie d’hépatite A chez les HSH en 2017. La vaccination contre le Monkeypox c’est une mission de santé publique et ça correspond à notre public cible. On n’aurait pas pu refuser, ça aurait été indécent de ne pas participer. »

Aux CeGGID, de nouveaux créneaux ont été ouverts. Début septembre, la prise de rendez-vous peut se faire du jour en lendemain, insiste le Dr Laurent Cotte. Priscilla Jermini, militante de l’association Enipse (Equipe Nationale d’Intervention en Prévention et SantE), souligne cette amélioration :

« Au début de l’épidémie, c’était très difficile d’avoir un créneau. Il fallait se connecter tôt le vendredi matin et c’était quasi impossible. Maintenant, avec les nouveaux créneaux, et les horaires du centre le Griffon, c’est beaucoup plus facile. »

Son association se rend dans les établissements LGBT et les lieux multipartenaires ou libertins. Les bénévoles font de la prévention et peuvent inscrire directement les personnes qui le souhaitent sur des créneaux de vaccination. L’autre pan de leur action se situe sur les réseaux sociaux et sites de rencontres, où ils proposent le même service, pour toucher le plus grand nombre de personnes.

Ouverture de la deuxième dose de vaccination contre la variole du singe à Lyon

Après une hausse des contaminations cet été, les contaminations semblent diminuer en France et dans le Rhône. L’Agence régionale de Santé reste prudente face à ces données :

« Un pic a été observé mi-juillet – puis un plateau les trois semaines suivantes et une baisse du nombre de nouveaux cas est enregistrée depuis le 15 août. Cette tendance à la baisse observée ces dernières semaines reste à confirmer compte-tenu d’une possible sous-déclaration pendant la période estivale. »

Le militant d’Aides, Yvan Couto, prend aussi cette baisse avec des pincettes :

« Il y a des personnes avec peu de symptômes qui ne vont pas consulter. Elles se sont isolées mais ne sont pas allées se faire dépister. »

Vaccination variole du singe lyon
Chaque fiole de vaccin contre la variole du singe contient une seule dose.Photo : MA/Rue89Lyon

Régulièrement, des réunions se tiennent avec l’ARS pour faire le point sur l’épidémie et les moyen de lutter contre les contaminations. Le mercredi 7 septembre, l’ARS a donné son feu vert pour l’administration d’une seconde dose du vaccin. Un décision particulièrement attendue, selon Colette Coudeyras :

« On a eu beaucoup d’appels de personnes qui souhaitaient une seconde dose, mais on ne pouvait pas leur donner de rendez-vous. On va devoir les rappeler pour leur proposer »

Stigmatisation et publics plus difficiles à protéger de la variole du singe

Cibler la communication et la prévention autour de la variole du singe n’est pas forcément évident. Si le virus circule pour le moment en grande majorité chez des hommes qui ont des relations avec des hommes (HSH), la maladie pourrait s’étendre plus largement dans la population. D’autant plus que la variole du singe n’est pas une IST. Yvan Couto s’inquiète :

« C’est un peu compliqué parce que ce sont des publics déjà stigmatisés par ailleurs et ils ont l’impression qu’on les montre du doigt à nouveau. Est-ce qu’il faut attendre que tous les publics soient touchés pour faire une communication générale ? Il faut essayer d’étendre la vaccination plus largement parce que le risque c’est que ça se propage. »

Aujourd’hui les hommes gays semblent les mieux informés et les plus mobilisés contre la variole du singe selon les différents acteurs interrogés. Priscilla Jermini, de l’association Enipse, pointe la difficulté de protéger d’autres communautés.

« Les hommes bis se cachent plus. Ils ne sont pas forcément présents dans les lieux communautaires, mais sont plus présents sur les applications de rencontre comme Grindr. Ils sont moins au courant de ce qui existe pour se protéger du Monkeypox »

Autre population plus difficile à atteindre : les travailleur·euses du sexe (TDS). Yvan Couto détaille les enjeux qui entoure ce public à risque face à la variole du singe :

« Ce n’est pas toujours évident pour elles de faire les démarches. Les TDS qui sont dans des camionnettes dans des petites routes ne vont pas venir dans Lyon pour se faire vacciner. Si les médecins qui vont les voir en maraude pouvaient les vacciner, ce serait plus simple et c’est ce qu’on demande. »

« Aller vers ». Cette stratégie pour lutter contre la variole du singe est dans la bouche de tous ceux que nous avons interrogés. À Lyon, elle reste pour l’instant limitée aux associations.


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