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Perquisition pour des tags à la craie chez Warren Dalle, candidat LFI aux législatives

Une perquisition a été effectuée au domicile du candidat aux législatives LFI Warren Dalle. Les gendarmes y ont cherché puis trouvé des bombes de craie.

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Warren Dalle, à la préfecture du Rhône le 12 juin 2022 ©HH/Rue89Lyon

Ancienne figure de proue du mouvement Gilets jaunes à Lyon, Warren Dalle, candidat suppléant LFI (La France insoumise) de Michèle Edery (Parti socialiste) battue au second tour dans la 10e circonscription du Rhône, se souvient du choc à l’arrivée à son domicile qu’il partage avec sa grand mère, lundi aux alentours de 8h :

« Je rentrais de week-end et j’ai trouvé ma grand-mère de 89 ans en pleurs, dans un chaos difficile à décrire. Quatre gendarmes fouillaient méthodiquement mon appartement. »

Photo prise au domicile de Warren Dalle après la perquisition.
Photo prise par Warren Dalle à son domicile après la perquisition.

Présents sur les lieux depuis 7h30, les forces de l’ordre ont dans un premier temps refusé de dire ce qu’ils cherchaient dans l’appartement du militant.

« Je me doutais un peu que c’était à cause des tags à la craie que nous avions réalisés pendant la campagne électorale des législatives. Le maire de Chaponost [Damien Combet, divers droite, ndlr] m’a menacé à l’époque, il m’a dit qu’il allait m’arriver ‘des choses’. »

Le jeune homme explique ne s’être pas inquiété outre mesure à ce moment. Les tags incitant à voter pour la Nupes sont effectués avec des bombes à craie, les inscriptions sont donc censées disparaître après une averse. Il dit, acide :

« Si on me condamne pour des dessins à la craie, je me ferai le représentant de toutes les cours de maternelle de France. »

Perquisition chez Warren Dalle : « C’était lunaire »

Au bout d’une heure de perquisition, les gendarmes ont demandé à Warren Dalle où trouver son matériel pour taguer. Ce dernier a donc ouvert le coffre de sa voiture, dans lequel se trouvaient bombes à craie et pochoirs.

« J’ai tweeté pendant la perquisition, un gendarme a reçu un coup de fil et ils m’ont intimé de ne plus le faire. Ils m’ont dit ne pas aimer le fait que j’écrive ‘acte de répression politique’. »

Il pique :

« C’est normal, personne n’aime être instrumentalisé. »

Warren Dalle s’est par la suite rendu à la gendarmerie de Brignais pour une audition qui aurait duré trois heures :

« Ils m’ont montré les vidéos où j’apparaissais. Ils m’ont posé des questions qui n’avaient aucun sens. Pourquoi autant de couleurs, est-ce que le « V » de la Nupes est une incitation à la haine. C’était lunaire. »

Les équipes de militants (entre deux et trois personnes généralement) ont tagué à la craie des bancs, des trottoirs, des passages piétons ou des poubelles municipales.

Pour Warren Dalle, « si des perquisitions se multiplient, les citoyens vont craindre de militer »

Les gendarmes finissent par annoncer que ce sont effectivement les maires de Chaponost et Brignais, respectivement Damien Combet (divers droite) ainsi que Serge Berard (divers droite) qui ont porté plainte contre lui pour délit de détérioration ou dégradation d’un bien culturel du domaine public mobilier commis en réunion.

Warren Dalle poursuit :

« Je n’en veux pas à la police. Eux-mêmes semblaient blasés, dans l’incompréhension. »

Une fois l’audition terminée, les pièces à conviction ont été mises sous scellés et Warren Dalle a pu rentrer chez lui.

« C’est honteusement exagéré. On ne peut pas laisser ces procédures disproportionnées avoir lieu sans rien faire. C’est une dérive très inquiétante de notre système judiciaire. »

Exemple d'un tag effectué à la bombe à craie. 6 ont été saisies durant la perquisition au domicile de Warren Dalle.
Exemples des tags de la NUPES réalisés à la bombe à craie. Photo par Warren Dalle.

L’ancien membre du groupe des gilets jaunes à Lyon dénonce une instrumentalisation des forces de l’ordre et imagine ensuite :

« Si ce type de procédures à l’aveugle se multiplient, les citoyens vont avoir peur de militer. Ça me rappelle les Gilets jaunes, beaucoup ont arrêté de manifester parce qu’ils avaient peur de perdre un œil, une main, ou de devoir endurer une comparution immédiate. »

« On ne fait pas de perquisition pour des tags »

Pour Ugo Ivanova, l’avocat du militant initialement spécialisé en droit de l’urbanisme et environnement, la perquisition était exagérée :

« Au début je n’ai même pas compris comment ils ont pu faire une perquisition sans consentement pour de la détérioration de bien public. »

Sauf dérogation du juge des libertés et de la détention, on ne peut se passer de l’accord d’une personne pour réaliser une perquisition : une dérogation ne peut pas être demandée pour un délit passible de moins de trois ans de prison. Et la détérioration ou dégradation d’un bien public n’est passible que de deux ans de prison.

L’avocat de Warren Dalle expose :

« Comme ils étaient plusieurs, il s’agit d’un délit commis en réunion. Ce qui est passible de cinq ans de prison, mais dans ce cadre là, on parle de faits bien plus graves, de la destruction pure et simple par exemple. »

L’avocat se remémore les peines dont les tagueurs de mairie écopent généralement :

« C’est souvent un rappel à la loi, au pire une amende, mais on n’ouvre pas une enquête qui nécessiterait une perquisition. Et ce, même si ça avait été de la peinture. »

D’après Ugo Ivanova, il est peu probable que la procédure débouche sur une condamnation du militant :

« Ils se sont trompés sur le matériel de base, ils pensaient que c’était indélébile. Le contenu des messages ne pose pas de problème non plus normalement. »

« Même si c’est de la craie, on n’a pas à faire ça car demain ce sera de la peinture ! »

En revanche, il évoque la possibilité pour Warren Dalle de poursuivre les maires à l’origine de la plainte :

« On peut par exemple penser à une plainte pour dénonciation calomnieuse. »

Interrogé dans les colonnes du Progrès, le maire de Chaponost Damien Combet soutient que les zones de tags choisies par les militants LFI n’étaient pas adéquates :

 « Les règles sont les mêmes, quel que soit le parti. Pour nous, craie naturelle ou pas, c’est pareil, on respecte le code électoral. »

Il en va de même pour son homologue de Brignais, Serge Bérard :

« Même si c’est de la craie, je considère qu’on n’a pas à faire ça. Car demain ce sera de la peinture ! »


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