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20/03/2024 date de fin
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Le nouveau Rhône va-t-il tenir sur ses jambes sans la Métropole de Lyon ?

« Le nouveau département sera jeune et dynamique », c’est ce que croit Danielle Chuzeville, actuelle présidente du conseil général du Rhône qui, à partir du 1er janvier 2015, se retrouvera à la tête d’un département amputé de toute l’agglomération lyonnaise. Celle-ci deviendra Métropole de Lyon, autonome et puissante. Autour, un territoire que l’élue aimerait promouvoir : le Nouveau Rhône.

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Carte de la densité de population par EPCI, qui montre que la majorité des habitants du Nouveau Rhône est localisée autour de l'agglo lyonnaise et le long de la Saône. Source : Insee.

Il n’est pas fréquent que l’Insee (Institut national de la statistique et des études économiques) fasse conférence de presse commune avec un élu. Mais ce jeudi, pour faire de la prospective (et de la retape du côté du politique), le directeur régional de l’Insee s’est assis aux côtés de Danielle Chuzeville et de son directeur adjoint des services.

Danielle Chuzeville, présidente du Département du Rhône, entouré de son directeur adjoint des services, Patrick Martinez, du directeur régional de l'Insee, Pascal Oger, et de Philippe Bertrand, chef du projet "Nouveau Rhône" au sein de l'Insee.
Danielle Chuzeville, présidente du Département du Rhône, entouré de son directeur adjoint des services, Patrick Martinez, du directeur régional de l’Insee, Pascal Oger, et de Philippe Bertrand, chef du projet « Nouveau Rhône » au sein de l’Insee.

Motif : faire le portrait en bosses du département tel qu’il se présentera au 1er janvier 2015, dès lors que l’agglomération lyonnaise, en devenant Métropole de Lyon, le quittera.

 

Et le plus fort, en province, est…

Carte de la densité de population par EPCI, qui montre que la majorité des habitants du Nouveau Rhône est localisée autour de l'agglo lyonnaise et le long de la Saône. Source : Insee.
Carte de la densité de population dans le Nouveau Rhône, qui montre que la majorité de ses habitants est localisée autour de l’agglo lyonnaise et le long de la Saône. Source : Insee.

Si l’on estime que les grosses agglomérations urbaines sont des moteurs, notamment en termes fiscaux, pour les territoires ruraux qui les entourent, comment s’en sortira le Rhône ?

L’Insee a récolté pendant six mois, avec l’aide des services du département, des données sur le futur Rhône, et les a comparées à un « territoire fictif ». Soit huit départements français eux aussi amputés, uniquement pour l’occasion, de leur grosse agglomération urbaine. Comme, par exemple, le département du Bas Rhin mais sans la communauté urbaine de Strasbourg, ou encore les Bouches du Rhône mais sans la communauté urbaine « Marseille Provence Métropole », etc.

Et face à de très nombreuses questions économiques, démographiques, et de développement, qui c’est le plus fort ? Ce serait le Rhône.

Par exemple, dans la nouvelle version du département, le chômage touche 8% de ses 429 000 habitants, contre 11% des habitants de la zone de référence (c’est à dire dans les huit autres départements fictifs, que l’Insee a imaginés pour pouvoir faire ses comparaisons). C’est aussi trois points de moins que dans le Rhône actuel qui comprend l’agglo lyonnaise.

Les revenus y sont plutôt élevés : le net imposable par foyer fiscal s’élève à 26800 euros, supérieur de 15% à celui constaté dans la zone de référence.

Vu dans sa globalité, le nouveau Rhône présente une réalité sociale relativement confortable. Mais à la loupe, des foyers de précarité noircissent le tableau.

 

Transports complexes, précarité : le Rhône pourra-t-il assumer ?

Amputé de Lyon et des villes importantes en taille de l’agglo, le Rhône nouveau conservera quand même quelques pôles urbains importants, comme Belleville, Villefranche et Tarare. Ceux-là mêmes qui rencontrent des gros problèmes de précarité (plus du quart des habitants des zones désignées vit avec un bas revenu et le taux de chômage y est supérieur à 16%). Il s’agira donc toujours d’un territoire dans lequel l’aide sociale restera importante.

L’Insee a également mesuré les mouvements des habitants de ce territoire, en direction de l’agglo, mais aussi en son sein, et vers d’autres territoires hors du département. Elles sont dans l’étude évaluées comme une preuve de dynamisme ; les flux domicile-travail se répartissent ainsi : parmi les 191 000 actifs, 48%, soit près de la moitié, sortent du Rhône et principalement pour se diriger dans le Grand Lyon.

Danielle Chuzeville veut avoir confiance dans ce territoire. Mais la présidente devra quand même faire avec une zone où les transports ne répondent pas exactement aux besoins variés de tous les habitants. Pascal oger, directeur régional de l’Insee, détaille :

« Il y a beaucoup de mouvements périphérie-centre, mais aussi centre-périphérie et périphérie-périphérie, ce qui complexifie beaucoup la mise en place du réseau des transports. Même s’il y en a beaucoup sur le territoire, cette situation oblige beaucoup d’actifs à utiliser leur voiture. »

Transports à développer avec une cohérence à étendre jusque dans la Métropole, de l’aide sociale pour des foyers précaires identifiés de longue date : deux compétences coûteuses qui incombent au département, alors que ses recettes ne seront évidemment plus les mêmes, une fois la Métropole partie sur ses propres rails. Le futur budget du Nouveau Rhône s’élèvera à 440 millions d’euros –contre 1,7 milliards d’euros aujourd’hui (si on exclut la dette, dont on vous parle plus bas dans cet article).

 

Des vignobles, de la pollution, c’est aussi ça le Nouveau Rhône

Le nouveau Rhône connaît un phénomène de péri-urbanisation classique pour toutes les zones jouxtant les grosses villes, mais particulièrement fort ici.

« Beaucoup d’actifs de l’agglomération lyonnaise partent vivre en périphérie pour profiter d’un cadre plus calme », décrit Pascal Oger de l’Insee.

Environ 3500 logements neufs sont réalisés chaque année, et la moitié d’entre eux correspond à du logement individuel, consommant beaucoup d’espace. Il s’agit, dans le pourtour du Grand Lyon, d’une population plus jeune (familles avec enfants notamment).

L’Insee peint un tableau connu : le Rhône c’est aussi les vignobles du Beaujolais. L’agriculture (lait et viticulture plus exactement) occupe deux tiers du territoire. Amenant avec elle une pollution assez forte, en plus de celle du chauffage au bois (issues entre autres des maisons individuelles, évoquées plus haut). Danielle Chuzeville a déclaré vouloir entrer en discussion avec les agriculteurs pour discuter de ces problématiques de pollution de l’air et de l’eau, que la présidente du Département semble avoir découvertes dans leurs vraies proportions grâce à l’Insee.

 

Silence radio sur la dette

L’Insee a très sobrement intitulé son étude « Nouveau Rhône : un territoire contrasté en interaction avec les voisins ». Mais Danielle Chuzeville, elle, a plutôt tiré la conclusion que le futur Rhône incarnerait « une nouvelle génération de Départements ». A la pointe.

On ne sait pas encore avec quels moyens ni avec quelles innovations politiques. Danielle Chuzeville n’a pas caché que Michel Mercier, ancien président UDI du Département, restait à la manoeuvre. C’est lui qui a conçu sur mesure avec Gérard Collomb, président PS du Grand Lyon, ce projet de Métropole désormais inscrit dans la réforme territoriale. Elle estime même que l’ »on peut compter sur Michel Mercier pour trouver les bonnes solutions ».

« Il n’y aura pas de mur entre le département et la Métropole. (…) D’autant moins que l’organisation de l’Etat restera unique sur les deux territoires. »

Des questions fondamentales pour l’avenir de ce nouveau département sont toutefois restées sans réponse. Le département est très fortement endetté et sa présidente ne compte pas partir avec la totalité de cette somme dans ses valises. La répartition de la dette entre elle et Gérard Collomb a été faite, mais pas question de communiquer dessus ce jeudi 23 octobre. « On attend l’ordonnance financière du gouvernement », qui doit amender le deal.

Même chose pour l’indemnité compensatoire que devra verser la Métropole au nouveau Département. La nouvelle grosse machine lyonnaise devra en effet passer à la caisse avant de parader seule. A deux mois du lancement des deux nouvelles entités territoriales, nous n’avons pas fini (loin s’en faut) d’en faire le tour.

 

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#Gérard Collomb

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Musée des Confluences à Lyon. Crédit : JB/Rue89Lyon.
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