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Perfluorés : la CGT met de côté le « chantage à l’emploi » pour défendre la santé des salariés

Alors que l’industriel Seb organisait une manifestation devant l’Assemblée nationale contre un projet de loi réglementant l’usage des perfluorés pour défendre ses salariés, ce mercredi 3 avril, le comité régional CGT de la région Auvergne Rhône-Alpes s’est opposé à cette initiative. Un choix stratégique qui n’allait pas nécessairement de soi.

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perfluorés sud de Lyon
Les militant ·es d’Alternatiba ANV 69 devant le site industriel d’Arkema à Pierre-Bénite.

Cela pourrait ne paraître rien, un mail parmi d’autres, noyé dans la masse. Pourtant, il acte un choix stratégique profond. Mardi 2 avril, le comité régional CGT Auvergne-Rhône-Alpes a communiqué sur la pollution aux perfluorés, s’opposant au groupe Seb.

Ce mercredi, l’industriel, bien connu pour sa cocotte-minute et ses autocuiseurs, a organisé une manifestation avec des centaines de salariés à Paris. Son but : protester contre le projet de loi anti-perfluorés porté par le député écologiste de Gironde Nicolas Thierry, destructeur d’emplois, selon lui. La CGT ne l’a pas suivi. Ce faisant, elle marque son attachement à défendre la santé des salariés plutôt que l’emploi à tout prix.

Le syndicat est clair : il s’oppose au « chantage à l’emploi pour masquer et fuir leurs responsabilités [celles des dirigeants, ndlr] en sacrifiant sur l’autel du productivisme et du profit la santé du monde du travail et celles des classes populaires. »

Perfluorés : la CGT se pose du côté de la santé des salariés

Certes, la chose n’est pas tout à fait nouvelle. L’union départementale CGT du Rhône fait partie de l’alliance écologique et sociale du Rhône, qui mène notamment une difficile action en justice contre Arkema. Les Cégétistes se sont également largement investis dans la lutte contre la pollution à l’amiante, un sujet qui a considérablement touché la santé des salariés.

Néanmoins, la chose ne fait pas toujours consensus chez les syndicats. Ce mercredi 3 avril, il y avait ainsi des syndiqués CFE-CGC auprès de la direction de Seb à Paris contre la proposition de loi. Force ouvrière (FO) avait également exprimé son inquiétude à ce sujet. Et, même côté CGT, les choix à faire sont parfois difficiles.

En 2021, peu avant les débuts de ce scandale sanitaire au sud de Lyon, Rue89Lyon avait contacté la section locale du syndicat dans le cadre d’une enquête sur l’industriel Arkema, aujourd’hui visé comme responsable de cette pollution aux PFAS. À l’époque, les échanges avec des sources syndicales avaient été complexes. Le syndicat craignait pour l’avenir des salariés et parlait déjà de « chantage à l’emploi ». Il avait refusé de s’exprimer sur la politique d’Arkema.

Certes, à l’époque, il n’était pas question du « scandale » connu aujourd’hui. Mais Arkema était déjà dans le viseur des agents de la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal). L’entreprise avait reçu six visites de la Dreal en dix mois, avec de façon quasi-systématique le relevé de problèmes de « non-conformités » (cinq en tout). Et de 2017 à 2019, l’usine avait été mise quatre fois en demeure…

Bref, les problèmes n’ont pas commencé avec les perfluorés. Bien que les problématiques des salariés soient connues, personne n’avait voulu parler des risques créés par l’usine. Trop dangereux, trop glissant… Sur ce point, les représentants du personnel semblaient soumis aux mêmes problématiques que celles connues par certains élus locaux, soucieux de préserver l’emploi local.

Perfluroés : tuer physiquement ou tuer socialement ?

Visiblement, les choses évoluent, même si le communiqué de la CGT fait toujours état de ce choix cornélien :

« Faute d’un travail préventif effectif, de recherche et de développement, de transformation de l’appareil productif respectueux de l’humain et de la nature, de transitions des métiers et des compétences, le dilemme est impossible à résoudre : si l’entreprise continue à polluer, elle tue physiquement. Si elle ferme, elle tue socialement. »

Mais le choix est clairement d’aller contre l’usage des PFAS. La CGT va même (bien plus) loin que la proposition de loi. « Il convient de repérer puis de supprimer les PFAS ou de les remplacer par des substances moins dangereuses, en disposant de données toxicologiques solides, non-nocives pour les personnes, la nature et la biodiversité, afin de préserver la santé, l’environnement, les sites industriels et les emplois. » Pour rappel : pour l’heure, la proposition du député de Gironde, Nicolas Thierry, demande (seulement) le remplacement des PFAS remplaçables.

Bref, le syndicat va plus loin, conscient de la portée du scandale. Une prise de conscience appuyée et poussée par la forte médiatisation de celui-ci. Ce faisant, il joue à plein (à l’échelle de la Région) la carte de l’union écologique et sociale.


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