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La marche à pied en recul à Lyon, bonne ou mauvaise nouvelle ?

[Série 3/3] Dans la métropole de Lyon, la pratique de la marche pour se rendre au travail recule quasiment partout y compris dans Lyon. Une évolution qui traduit en partie la progression du vélo ou des transports en commun. Mais qui a changé notamment depuis la pandémie de Covid.

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Le jeudi 19 mars, jour 3 du confinement à Lyon. ©LB/Rue89Lyon.

12 sur 59. C’est le nombre de communes de la métropole de Lyon où la marche à pied n’a pas reculé depuis 2008. Soit un cinquième des communes. Partout ailleurs, la proportion de la marche dans les trajets domicile-travail a diminué entre 2008 et 2018. Même dans certains secteurs où on l’imaginerait plus importante.

La marche à pied diminue plus faiblement dans Lyon qu’en périphérie

La rue piétonne Victor Hugo, qui donne sur la place Carnot, Lyon 2è. ©LS/Rue89Lyon
La rue piétonne Victor Hugo, qui donne sur la place Carnot, Lyon 2è.Photo : LS/Rue89Lyon

À première vue, « on peut être déçu et surpris de la réalité de ces chiffres », commence de Pierre Rauzada, président de l’association « Les droits du piéton », basée à Lyon depuis 1975.

Les chiffres de l’Insee montrent notamment une faible part modale de la marche à Lyon -une commune pourtant très dense. Dans le 6e arrondissement, 8,19% des actifs se rendaient au travail à pied en 2018. C’est la proportion la plus importante dans Lyon. Ailleurs, la marche est parfois quasiment inexistante :

  • 1er arrondissement : 0,98% des actifs
  • 2e arrondissement : 0,91%
  • 3e arrondissement : 3,7%
  • 4e arrondissement : 3,17%
  • 5e arrondissement  : 1,82%
  • 6e arrondissement : 8,19%
  • 7e arrondissement : 0,49%
  • 8e arrondissement : 2,15%
  • 9e arrondissement : 1,88%

Les deux tiers des arrondissements de la ville font partie des secteurs où la marche est la plus faible, au sein de la métropole de Lyon. Elle est moins utilisée qu’à Jonage (2,38% des actifs), Charly (3,6%), Mions (4,3%) ou Genay (4,54%).

Plus proche de Lyon, la marche est plus développée à Villeurbanne (13,87% des actifs en 2018), à Rillieux-la-Pape(10,69%), à Vénissieux (9,4%) ou àOullins (13,3%). La marche est aussi relativement développée dans certains secteurs des Mont-d’Or (Poleymieux, Couzon, Saint-Cyr ou encore Champagne).

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La marche à pied s’efface-t-elle derrière les transports en commun et le vélo à Lyon ?

Métro ligne B à Lyon
Rame de métro de la ligne B dans la station Jean Macé à Lyon. Photo Mélany Marfella/Rue89Lyon

Ces chiffres sont-ils une mauvaise nouvelle ? Pas forcément si l’on se place dans une perspective de développement des modes doux ou collectifs. Les chiffres de l’Insee semblent plutôt montrer une corrélation entre la progression de la part modale des transports en commun ou du vélo et la diminution de la marche.

« S’il y a moins de piétons mais davantage d’usagers des transports en commun ou de cyclistes, ça ne me gêne pas. On voit qu’il y a un effet de vases communicants avec le vélo et les transports en commun. La période 2008-2018 est celle de l’essor du vélo et de la culture vélo à Lyon. Il y a eu aussi des créations ou des prolongements de lignes de transports en commun dans la métropole. »

Pierre Rauzada, président de l’association Les droits du piéton

Une analyse qui semble se vérifier dans Lyon et certaines communes de la proche périphérie. Entre 2008 et 2018, la marche à pied est globalement en retrait. C’est le cas dans les 1er, 2e, 5e et 7e arrondissements de Lyon. Ou encore à Vénissieux (-2,12 points), à Bron (-2,55 points), à Vaulx-en-Velin (-2,4 points) ou à Décines (-2 points).

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La marche à pied, un mode de déplacement des employés dans la métropole de Lyon ?

La part modale de la marche semble donc directement liée à l’offre de transports en commun ; mais aussi à l’éloignement du lieu de travail. Ainsi, la part modale de la marche est faible dans Lyon où les transports en commun sont très denses. Elle est également faible dans une sorte de seconde couronne, notamment à l’est, où les transports en commun sont peu nombreux et où les actifs travaillent souvent dans une autre commune que celle de leur résidence.

Elle semble aussi liée à la catégorie sociale. Les chiffres de l’Insee montrent que dans la métropole de Lyon, elle se caractérise par une forte proportion d’employés. En 2018, 41,5% des actifs de la métropole de Lyon se rendant au travail à pied étaient des employés. C’est deux fois plus que les professions intermédiaires et près de trois fois plus que les cadres.

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La marche n’est toutefois pas le mode de déplacement professionnel le plus répandu chez les employés. Ils étaient 11% dans l’ensemble de la métropole de Lyon à se rendre au travail à pied en 2018. La voiture reste le moyen de transport le plus utilisé par cette catégorie socio-professionnelle. C’est toutefois celle qui l’utilise le plus.

Les chiffres de la marche à pied relativement élevés dans l’est lyonnais peuvent s’expliquer par ce marqueur socio-économique. En regardant une carte de la répartition des employés dans la métropole de Lyon, on voit assez nettement une forte présence dans le 8e arrondissement de Lyon, à Vénissieux, à Bron ou certains secteurs de Villeurbanne et de Vaulx-en-Velin.

Après les employés, ce sont les professions intermédiaires (6%) et les cadres (5%) qui se rendent le plus à pied au travail dans la métropole de Lyon. Une situation qui peut expliquer en partie la part modale élevée dans certaines communes de l’ouest lyonnais et des Monts d’Or. Elles constituent les rares endroits où la part modale de la marche progresse.

La marche à pied en augmentation après le Covid à Lyon ?

Le jeudi 19 mars, jour 3 du confinement à Lyon. ©LB/Rue89Lyon.
Le jeudi 19 mars 2020, jour 3 du confinement à Lyon.Photo : LB/Rue89Lyon. La Rue de la République déserte

La marche est-elle trop invisibilisée ? Sûrement en partie du fait des biais statistiques. Seul le mode de transport dit le plus « lourd » est retenu par l’Insee (voir ci-dessous). Par ailleurs, les données les plus récentes sur la mobilité professionnelle issues du recensement de la population datent de 2018. Ils ne prennent donc pas encore en compte la crise du Covid et ses conséquences.

Elles sont réelles. On sait par exemple que que sur le réseau TCL, tous les voyageurs ne sont pas revenus. La baisse de fréquentation du réseau a été très importante en 2020 (de l’ordre de 35% environ) et en 2021. Elle était jusqu’ici en augmentation constante. Le Sytral estime à 2024 ans un potentiel retour à la fréquentation de 2019.

Pour l’heure, on ne connaît pas celle sur la marche à pied. Dans un contexte de baisse de la fréquentation des transports en commun, de développement du télétravail mais aussi d’un retour à la voiture, seront-elles positives pour la marche ?

« C’est possible que le mode piéton ait repris de l’importance dans les déplacements domicile-travail », estime Pierre Rauzada.


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