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Homophobie : des agressions en augmentation, peu de poursuites

En l’espace d’une semaine, deux agressions homophobes ont eu lieu à Lyon.

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20e édition de la Marche des fiertés à Lyon, pont de la Guillotière. ©Hétéroclite

Ces derniers mois, ces agressions semblent se multiplier. Après l’acte, vient le moment de recourir à la police et la justice. Souvent une autre épreuve pour les victimes.  

Dans la nuit de samedi à dimanche, à la sortie d’une boîte de nuit, trois hommes ont été roués de coup dans le 6ème arrondissement. Une semaine avant, dans la nuit du 27 au 28 septembre, un autre couple avait été passé à tabac par un groupe, quai de la Pêcherie. Maire de Lyon, préfet du Rhône et président de la Métropole ont tous apporté leur soutien aux victimes sur Twitter. Des agressions connues et médiatisées comme d’autres au cours de cette année 2019.

Un autre couple d’hommes avait été insulté et frappé en juillet à Villeurbanne.

Quelques mois plus tôt, en mars, deux femmes avaient aussi été agressées à la sortie d’un cinéma à la Part Dieu. Ces dernières ont porté plainte. Elles ont été entendues par le juge chargé de l’instruction judiciaires, et, selon Le Progrès, sont ressorties en larmes avec « l’impression d’une désinvolture de la justice », l’investigation n’ayant « pas avancé » et le caractère homophobe de l’agression étant « remis en cause ».

Une circonstance aggravante qui passe à la trappe

Depuis la loi du 27 janvier 2017 (article 132-77 du code pénal), pour tous les crimes et délits, la LGBTphobie peut être une circonstance aggravante et alourdir la peine encourue. La justice la retient cependant rarement quand elle traite des cas d’agressions, comme l’explique Maxime Larcher, co-délégué de SOS Homophobie à Lyon :

« C’est un critère compliqué à faire valoir. Il n’a été retenu que 14 fois en France en 2017. C’est hallucinant ».

14 fois, soit une goutte d’eau au milieu des 1 905 cas d’actes LGBTphobes recensés par SOS Homophobie pour l’année 2018 en France. Un chiffre à rapprocher également de ceux du ministère de l’Intérieur, cités par l’AFP : 262 plaintes ont été déposées entre janvier et septembre 2018, soit 15% de plus qu’en 2017.

Cette situation, la Fondation Jean-Jaurès et la Dilcrah la regrettent également :

« Les outils législatifs existent mais c’est souvent leur mise en œuvre qui pose problème ».

20% des victimes portent plainte

Pour expliquer le peu de poursuite, il faut se revenir au début de la procédure déclenchée la plupart du temps par une plainte. Très peu de victimes d’agressions vont jusqu’à porter plainte. 20% portent plainte, 27% signalent les faits aux forces de l’ordre et 19% ont recours aux associations, selon l’étude réalisée en 2019 par l’IFOP pour la fondation Jasmin Roy Sophie Demasrais, en partenariat avec la fondation Jean Jaurès et la Dilcrah.

Pourquoi si peu ? Maxime Larcher s’interroge :

« Il y a plusieurs explications. Parfois les victimes ne sont simplement pas prêtes, elles sont sous le choc de l’agression. Il y a parfois des gens qui ne sont pas out. D’autres ont peur des représailles de la part de la personne qui a commis l’agression ou de ses proches. Les victimes se disent aussi « Ça va servir à quoi ? ». A la base, il y a du découragement, une défiance envers la justice. Les gens se disent que leur plainte va être classée sans suite, ils ne voient pas l’intérêt, ni personnel, ni pour la cause ».

Un dépôt de plainte pourtant indispensable pour l’association SOS Homophobie, pour qui ne rien dire est faire le jeu des agresseurs :

«  Il faut en parler, considérer que ce n’est pas une simple agression. Elle est encore plus intolérable car elle est homophobe, il faut dénoncer les faits. A un moment, si la justice et l’Etat voient que c’est massif, répété, que ça remonte à chaque fois, à un moment ils vont peut-être réagir et s’en emparer ».

L’accueil réservé aux victimes qui viennent porter plainte est essentiel. Dans certains commissariats, quelques personnes peuvent être formées, notamment par le FLAG, l’association LGBT+ des policiers et gendarmes. Mais là encore, cela n’est pas suffisant.

Comment adapter l’arsenal pénal à la réalité de l’homophobie ?

Au niveau des procureurs de la République, comment résoudre ce problème de la qualification d’« agression homophobe » que la justice ne retient que dans de rares cas ? SOS Homophobie essaie de s’organiser, comme l’explique Maxime Larcher :

« C’est la question que tout le monde se pose. C’est un vrai point qu’il faut qu’on creuse. »

SOS Homophobie veut également travailler au niveau de la police municipale et nationale. Elle doit ainsi rencontrer très prochainement Jean-Yves Sécheresse, adjoint à la sécurité de la Ville de Lyon, après avoir rencontré des représentants du préfet du Rhône.

En attendant, l’association renvoie sur son site, vers un guide pratique, une ligne d’écoute anonyme ainsi qu’un formulaire pour témoigner.


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