
Au micro, le secrétaire de l’union départementale CGT, João Pereira Afonso, annonçait « plus de 700 personnes » présentes tandis que la police communiquait sur 750 personnes. Police et CGT était raccord. Mais uniquement sur ce point.

Plus de 700 personnes réunies places Louis Pradel à Lyon, ce jeudi 12 mai, contre la loi travail. ©LB/Rue89Lyon
La place Louis Pradel bouclée par la police
Pour le reste, le secrétaire de l’UD CGT dénonçait une « présence policière démesurée encore une fois » :
« C’est de la provocation, nous explique-t-il. Le but est de semer la zizanie dans le mouvement ».
Le dispositif d’ordre public était impressionnant :
- La place de la Comédie (entre l’hôtel de ville et l’opéra) était interdite d’accès par arrêté municipal. Les organisations syndicales ont dû se rabattre sur la place d’à côté.
- Pour accéder à la place Louis Pradel, les policiers et gendarmes mobiles faisaient ouvrir les sacs des passants et des manifestants.
Selon la police, les contrôles étaient opérés sur réquisition du procureur de la République, notamment pour mettre la main sur des projectiles afin de prévenir les mêmes incidents que la précédente manifestation syndicale.
D’après la même source, deux personnes ont été interpellées suite à ces contrôles. L’une pour « possession de faux billets » et l’autre pour des « stupéfiants et un couteau ».
Vers 14 heures, une troisième personnes a été interpellées en lien avec les dégradations commises lors de la manifestation sauvage de mardi soir.
Rassemblement contre #loitravail sous haute sécurité. Fouille des sacs avant l’accès place de la Comédie #Lyon pic.twitter.com/ylurCKZzfn
— Rue89Lyon (@Rue89Lyon) 12 mai 2016
« La grève générale, ça se constate »
Même si la présence policière a pu être dissuasive, ce n’était pas l’affluence des grands jours. L’intersyndicale lyonnaise l’avait anticipé. CGT, FO, FSU, Solidaires, Unef, CNT et CNT-SO n’envisageaient qu’un rassemblement et non une manifestation.
Frédéric Volle, du bureau de l’union départementale FO, explique la démarche :
« à l’origine, on voulait faire un rassemblement pour interpeller les parlementaires du Rhône dont certains siègent à l’hôtel de Ville (on pense au sénateur-maire Gérard Collomb, ndlr). Mais avec le recours à l’article 49-3 changer la nature du rassemblement ».
Pour ce syndicaliste, le « 49-3 cristallise la colère » :
« 70% des Français sont contre cette loi et le gouvernement préfère le passage en force au débat parlementaire. On n’est pas minoritaire ! »
La CGT est sur la même ligne.
Les deux centrales syndicales appellent à la tenue d’assemblée générale dans les entreprises avec, à l’ordre du jour, la grève reconductible.
João Pereira Afonso, le secrétaire de l’UD CGT :
« Aujourd’hui, ce rassemblement doit être un tremplin pour la semaine prochaine. On va appeler à la grève reconductible. La grève générale ne se décrète pas, elle se constate, entreprise par entreprise ».
Selon Frédéric Volle de FO, des secteurs « déterminants pour l’économie » sont concernés par de potentielles grèves reconductibles :
- la SNCF, à partir du 18 mai
- le transport routier, à partir du 17 mai
- la chimie, à partir du 17 mai
Deux rendez-vous cruciaux la semaine prochaine
En clair, la semaine prochaine, l’intersyndicale jette toutes ses forces dans la bataille plutôt que de procéder par « journées d’action » éparpillées.
En fonction de la mobilisation, d’autres secteurs pourraient embrayer, comme l’Éducation nationale qui, jusqu’ici, est restée très en retrait malgré la présence au sein de l’intersyndicale de la FSU.
Deux journées de manifestation sont décidées. A Lyon, ce sera en direction de Bellecour mais avec des heures et des départs différents.
- Mardi 17 mai, à 11h, au départ de l’ancienne gare des Brotteaux
- Jeudi 19 mai, à 11h, au départ de la Manufacture des tabacs.
Un syndicaliste CGT se voulait confiant :
« Depuis 20 ans, on n’a pas vu autant de secteurs concernés en même temps par des préavis de grèves reconductibles ».
Il n’en faudrait pas moins pour faire reculer le gouvernement alors que, jusque là, hormis le 31 mars, les manifestations sont restées bien en deçà de celles qu’on a connues contre le CPE en 2006 ou contre la réforme des retraites en 2010 .
Désormais adoptée sans vote par le recours au 49-3, la loi travail va poursuivre son parcours devant les sénateurs.

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La loi travail peine à mobiliser contre elle au delà des milieux qu'elle concerne pourtant peu. Le mouvement perd son souffle. Le français ne comprend pas vraiment ce qu'est la "hiérarchie des normes" et, s'il se renseigne, il découvre que le message de l'intersyndicale est un mensonge (la loi travail ne renverse pas la hiérarchie des normes. Elle renverse uniquement accord d'entreprise et de branche dans des cas précis.)
Surtout nous sommes mi-Mai. Les vacances se profilent et le travailleur français ne peut pas se permettre de perdre plusieurs jours de salaire. Les examens se profilent pour étudiants, lycéens et collégiens. La mobilisation ne comptera plus qu'une majorité de chômeurs, fonctionnaires et intermittents, ce qui ne suffira pas.
Enfin il faut revenir sur le service minimum. On le réalise plus mais depuis son vote sous Sarko la grève a totalement perdu son impact.
Bref, une victoire du gouvernement en perspective et un énième échec des syndicats.
Les salariés ne peuvent sans doute pas perdre une journée pour faire grève et les étudiants sont en période d'examen. La police fait ce qu'il faut pour dégouter les gens d'aller manifester en gazant tout le monde, même les enfants accompagnés et en tapant à tour de bras.
Le gouvernement ne doit pas oublier que les élections auront lieu dans un an et que les français, tout nocs qu'ils soient, ont de la mémoire.