Dans la tribune que nous publions, le collectif lyonnais Jamais sans toit, qui s’est fait connaître par ses occupations d’écoles, répond à ces déclarations.
La problématique de l’accueil des réfugiés n’a pas attendu septembre 2015 et les images médiatisées de tragiques noyades pour devenir une question vive dans les rangs du Collectif Jamais sans toit. Et c’est avec colère que nous réagissons aux déclarations récentes des membres du gouvernement et de certains élus locaux.
Le Collectif Jamais sans toit est né en juin 2014 de l’indignation et de l’inquiétude d’équipes éducatives, de syndicats, d’associations et de parents d’élèves de nombreuses écoles de l’agglomération lyonnaise.
Notre action a eu pour origine le fait que de jeunes élèves scolarisés dans plusieurs établissements du premier degré de l’agglomération lyonnaise vivaient dans la rue. Un an après, nombre d’entre eux sont toujours dans la même situation, même si des jugements ont été rendus en leur faveur au titre de la loi DALO.
Parmi les familles des enfants à la rue figurent des ménages de nationalité française en situation de grande précarité, mais la majorité sont des familles de migrants sans droit de travail.
Aujourd’hui, plusieurs dizaines de familles vivent toujours à la rue
En cette rentrée 2015, alors que les responsables politiques nationaux et locaux effectuent des déclarations publiques aux accents de générosité, plusieurs dizaines de familles avec jeunes enfants appellent en vain quotidiennement les services du 115. Parents, enfants et nourrissons dorment encore chaque jour dans les rues de l’agglomération lyonnaise, dans des voitures, dans des parcs ou dans des bidonvilles.
Notre colère naît du décalage entre la générosité soudaine qui déborde des discours des responsables politiques et les fins de « non-recevoir » que la Préfecture et certains élus locaux ont dressées et dressent toujours face aux revendications du Collectif quand il s’agit de passer à l’action.
Jean-François Carenco et Michel Delpuech, les deux préfets qui se sont succédé dans le Rhône, ont refusé d’utiliser leur droit de réquisition pour mettre en sécurité et à l’abri les enfants et leurs familles. A la plus grande satisfaction de Gérard Collomb, président de la Métropole de Lyon, aucune réquisition n’a été faite parmi les nombreux immeubles inoccupés de l’agglomération : ni celle d’un collège désaffecté du 1er arrondissement, ni celle des logements de fonction pour instituteurs laissés vacants.
l’Etat ne doit pas oublier tous les autres
Face à l’absence de solution de l’administration, le collectif Jamais sans toit n’a eu d’autres choix que de recourir à des occupations d’école pour mettre à l’abri dans des conditions de fortune les 200 enfants sans toit recensés dans le Grand Lyon à l’automne 2014. Certaines de ces occupations, comme celles des écoles Gilbert Dru (Lyon 7ème), Painlevé (Lyon 3ème), Ampère (Oullins) et Mazenod (Lyon 3ème) ont duré plusieurs mois.
Durant toute l’année, les membres du Collectif n’ont pas cessé d’interpeller les pouvoirs publics, ne souhaitant pas couvrir leur désengagement en hébergeant les familles dans les écoles et les gymnases dans le silence.
Aujourd’hui, nous sommes inquiets que, lors du déblocage de moyens d’urgence pour les réfugiés nouvellement arrivés, l’Etat oublie tous les autres.
Dans l’attente des effets concrets qui devraient faire suite aux déclarations médiatiques
Nous pensons que la triste actualité pose des questions fondamentales à l’échelle internationale et nationale, mais qu’elle devrait aussi conduire à repenser complètement la politique qui maintient sur le sol français des familles et des enfants dans la plus grande pauvreté, sans abri.
Nous resterons toujours aux côtés des enfants et des familles sans toit afin de les soustraire aux dangers et violences propres à la rue. Nous resterons à leurs côtés pour leur apporter un accès à une hygiène minimum, à la santé, à la dignité et au repos. Nous resterons à leurs côtés qu’ils soient français ou non, réfugiés, migrants, exilés ou autres, en situation régulière ou non, nouvellement arrivés ou déjà présents.
Et si la solidarité citoyenne doit être au rendez-vous, elle ne peut en rien se substituer aux garanties que l’Etat est tenu d’apporter en matière de respect des droits humains fondamentaux. C’est donc avec la vigilance citoyenne la plus extrême que nous attendons les effets concrets qui devraient faire suite aux déclarations médiatiques de ce début de mois de septembre 2015.
Nous continuerons d’alerter l’Etat sur la question des enfants sans toit, et de lui rappeler ses devoirs en nous référant toujours à la Convention Internationale des Droits de l’Enfant et au Code de l’action sociale et des familles qui prévoit que « Toute personne en situation de détresse a accès, sans aucune condition de régularité de situation, à tout moment à un hébergement d’urgence».
Pour que soit appliqué le droit inconditionnel au logement.
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