
Privés d’armes à feu et bientôt de caméras, les policiers municipaux de Grenoble mécontents
Le lendemain de son élection, Eric Piolle annonçait la suppression des caméras de vidéosurveillance. Le corollaire de cette annonce précipitée (le démontage n’est pas pour tout de suite) consistait à « réorienter ces moyens afin d’assurer une présence humaine dans les quartiers pour prévenir la délinquance ».
Neuf mois après, alors que la police municipale est progressivement réorganisée, les agents expriment leur malaise dans l’exercice de leurs fonctions, sous pression constante, disent-ils, des administrés et des commerçants. Après la question de la vidéosurveillance, c’est aussi l’armement qui leur est passé sous le nez.

À son arrivée en mars à la mairie de Grenoble, Eric Piolle est revenu sur l’armement partiel des policiers municipaux. Une mesure qui passe mal auprès des agents. Crédit/DR
Tout était prêt. Les pistolets commandés et les recrutements de formateurs lancés. Dans ses derniers mois de mandat, l’ex-maire socialiste de Grenoble Michel Destot, et son adjoint à la sécurité Jérôme Safar, avaient engagé l’armement nocturne des policiers municipaux, hors zone de sécurité prioritaire (ZSP). Mais la décision ne faisait l’unanimité ni dans la majorité, ni dans l’opposition.
Alors, en arrivant aux manettes de la ville en mars dernier, l’écologiste Eric Piolle est aussitôt revenu sur cette mesure comme il s’y était engagé, laissant aux policiers municipaux le goût amer de l’inachevé. Marc Brouillet, délégué CFDT du service et porte-parole de l’intersyndical réclamant l’armement, renvoie désormais le nouveau maire à ses responsabilités.
« Ils sont revenus sur l’armement par pure idéologie. La moitié des policiers municipaux français sont équipés d’une arme pour leur sécurité et il n’y a pas plus de bavures que dans les services de l’Etat. Les agents n’ont pas fait le deuil de cette promesse qui leur a été faites. Maintenant, on espère seulement qu’il ne va rien se passer car la tension est forte sur le terrain. Je ne voudrais pas être à la place du Maire quand il annoncera des mauvaises nouvelles aux familles des collègues ».
« Le linge sale se lave en famille »
Depuis cette passe d’armes, les policiers municipaux restent sur leurs gardes, car leurs missions sont amenées à évoluer dans le cadre d’une réorganisation qui devrait être effective en septembre prochain. En substance : davantage d’îlotage et moins de maintien de l’ordre.
Plusieurs agents évoquent de « l’incompréhension » et « un service mal à l’aise ».
L’un d’eux, ayant « plus de 10 ans d’ancienneté » s’épanche sous couvert d’anonymat.
« Je ne comprends pas le projet du Maire. On hésite sur notre rôle et nos missions. J’ai l’impression que le service est délaissé. C’est comme s’il ne s’intéressait plus à la sécurité ».
Car de « sécurité », il n’est plus question. En conséquence, la délégation endossée par la 1ère adjointe, Elisa Martin (Parti de gauche), a été rebaptisée « tranquillité publique ». La bataille lexicale sonne surtout comme un rappel de l’Etat à ses fonctions régaliennes. À la ville la charge de la prévention et de la police administrative, à l’Etat celle de la sécurité.
Contactée pour réagir à ce sentiment de « délaissement », Elisa Martin ne cache pas son étonnement.
« Je suis extrêmement surprise car cela ne correspond pas à notre retour. Déjà, le linge sale se lave en famille, pas par voie de presse. Ensuite, nous avons répondu à la demande des agents de rénovation de leurs vestiaires et de leur dojo d’entrainement. Vous voyez que le délaissement est vite relativisé ».
Une rencontre collective tardive entre le maire et les policiers municipaux
Après huit mois de mandat, alors que le maire annonçait qu’il allait « discuter avec tout le monde pour construire une politique de tranquillité publique », une rencontre s’est finalement tenue le 12 décembre entre Eric Piolle, Elisa Martin et une assemblée générale de la police municipale. Seulement une trentaine d’agents sur les 97 que compte le service ont répondu présents.
Une rencontre « apaisée et cordiale », selon Elisa Martin.
« Ils n’étaient pas debout sur les estrades à applaudir mais ils ont perçus que nous étions clairs sur notre vision politique ».
De son côté Marc Brouillet de la CFDT note l’effort, mais regrette l’approche.
« Un vendredi soir, ce n’est pas l’idéal pour réunir du monde. On aurait aimé avoir des explications plus tôt. Il y a déjà eu des visites de nos locaux ou de la patrouille de nuit, mais c’était la première rencontre collective. Les discours ont été à la fois flous et volontairement rassurants, sans doute pour éviter un conflit. Nous attendions par exemple de la clarté sur nos missions dans les ZSP et sur le quartier Mistral en particulier où nous sommes régulièrement pris à partie. S’il n’y a pas d’armement, nous attendons que les missions soient mises en adéquation avec nos moyens ».
« Un service choyé »
Au lieu d’investir dans l’armement et les caméras de vidéosurveillance – qui ne sont aujourd’hui plus réparées en cas de panne -, Eric Piolle proposait durant la campagne de « renforcer la présence humaine dans les quartiers afin de prévenir la délinquance ».
Marc Brouillet s’appuie sur cette promesse pour porter la bataille sur les effectifs. Il n’écarte pas une mobilisation à ce sujet « après les fêtes ».
« Le ratio efficace est d’un policier municipal pour mille habitants. Nous sommes aujourd’hui 97 agents pour plus de 157 000 habitants. On est loin du compte ».
Si Elisa Martin s’engage à ne pas supprimer de postes, pas question pour autant de les augmenter.
« La présence humaine en lien avec la tranquillité publique, ça peut être la police municipale. Mais ça peut aussi être des correspondants de nuit, des animateurs-prévention ou des fonctions que nous n’avons pas encore imaginées ou expérimentées ».

La police municipale de Grenoble compte un effectif de 97 agents que les syndicats souhaiteraient le voir porter à 150. Crédit/DR
Depuis le début du mandat, Jérôme Safar, l’opposant socialiste et ancien adjoint à la sécurité est resté discret sur cette thématique, pourtant chère à son bilan. Dénonçant, conjointement « une application dogmatique d’un programme et un détricotage de 20 ans de travail », il sort de cette réserve d’observation qu’il s’était imposé.
« Quand j’en avais la charge, le service de la police municipale était choyé en terme d’équipements et de management. L’incompréhension, les policiers municipaux la prennent en pleine poire car les citoyens et les commerçants mécontents ne manquent pas de leur signaler les dysfonctionnements ».
Vers des « milices commerçantes » ?
Quels sont ces « dysfonctionnements » ? Christian Hoffmann, président de l’association Label Ville regroupant les unions commerciales de Grenoble, assure les faire remonter chaque semaine à la municipalité, sans réponse.
« C’est l’augmentation flagrante de la mendicité, des groupes de marginaux avec des chiens occupants l’espace public ou des actes d’incivilité et de dégradation. Tout ça n’instaure pas un climat serein, ni pour les commerçants, ni pour les riverains ».
Faute de réponse satisfaisante de la municipalité à leurs yeux, plusieurs unions commerçantes disent étudier le recours à des sociétés de gardiennage pour tranquilliser les clients dans les artères les plus commerçantes de la ville, la Grande rue ou la rue Alsace-Lorraine.
Une nouveauté perçue d’un mauvais oeil par Marc Brouillet, délégué CFDT des policiers municipaux, qui conclue :
« Cela nous choque énormément. Va-t-on voir des sortes de milices commerçantes ? C’est notre mission de surveiller la tranquillité et le bon ordre de la voie publique. Ce n’est pas leur métier. Si la compétence de la sécurité n’intéresse pas la municipalité … ils devraient la transférer à la métropole elle-aussi ».

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Les policiers municipaux ne sont pas les policiers nationaux ; s'ils ont besoin d'être ainsi armés, c'est parce qu'on leur fait remplir des missions qui relèvent normalement de la police nationale, en profitant du fait qu'ils sont moins chers.
Par conséquent, si on rend à la police municipale ses vraies tâches, lui confier des armes à feu est à la fois inutile et dangereux.
Forcément avec une majorité gauche/écolo/citoyenne ya plus de punk à chien dans les rues, ya plus de feuilles dans les parcs, ya plus de tags sur les murs... jolis clichés que voilà !
Mais au delà des fantasmes : des chiffres ? des constats objectifs ? Ba non, les moyens sont les mêmes qu'avant.
Et si le malaise des polices municipales partout en France venait d'abord du fait qu'on les a progressivement poussées à se substituer à la Police Nationale que l'Etat a délaissée ... mais sans les moyens et la formation pour cela.
Voilà une jolie enquête que pourrait faire Rue89 ...
Peu de temps après l'élection de Piolle, la police municipale se croyait encore tout permis, jusqu'à faire des contrôles d'identité et demander des cartes d'identité ... comme sous Destot. C'est sûr que ça les embête de devoir rentrer dans le rang et d'avoir moins de pouvoir !
Les agents de police municipale sont investis de missions de police administrative et de missions de police judiciaire.
Les missions de police administrative
Depuis l’intervention de la loi n° 99-291 du 15 avril 1999 relative aux polices municipales, de nombreuses dispositions sont intervenues pour accroître les missions des agents de police municipale et les moyens dont ils disposent pour les assurer, en particulier la loi no 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne, la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, la loi no 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure et la loi no 2006-396 du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances.En vertu de l’article L. 2212-5 du CGCT, les agents de police municipale, sans préjudice de la compétence générale de la police nationale et de la gendarmerie nationale, exécutent, dans la limite de leurs attributions et sous l’autorité du maire, les tâches que ce dernier leur confie en matière de prévention et de surveillance du bon ordre, de la tranquillité, de la sécurité et de la salubrité publiques (exécution des arrêtés de police du maire, constatation, par procès-verbaux, des infractions à ces arrêtés).Les missions des policiers municipaux en matière de surveillance générale de la voie et des lieux publics s’inscrivent dans le cadre d’une police de proximité, ce qui nécessite une étroite coordination, formalisée dans une convention, avec les services de la police et de la gendarmerie nationales.
Les missions de police judiciaire
Aux termes de l’article 21 du code de procédure pénale, les policiers municipaux ont des attributions de police judiciaire sur le territoire de la commune.C’est ainsi que les agents de la police municipale ont notamment pour mission :de seconder, dans leurs fonctions, les officiers de police judiciaire ;de rendre compte à leurs chefs hiérarchiques de tous crimes, délits ou contraventions dont ils ont connaissance ;de constater, en se conformant aux ordres desdits chefs, les infractions à la loi pénale et de recueillir tous renseignements en vue de découvrir les auteurs de ces infractions ;de constater, par procès-verbal, les contraventions au code de la route dont la liste est fixée par le décret no 2000-277 du 24 mars 2000 (absence du titre justifiant l’autorisation de conduire le véhicule, de carte grise...) ;de constater, par rapport, les délits prévus par l’article L. 126-3 du code de la construction et de l’habitation (voies de fait et menaces de commettre des violences dans l’entrée, la cage de l’escalier ou les parties communes d’un immeuble collectif...).Les policiers municipaux sont chargés de verbaliser plusieurs catégories d’infractions, notamment les infractions :aux arrêtés de police du maire ;au code de l’environnement en ce qui concerne la protection de la faune et de la flore, la pêche, la publicité...,à la police de conservation du domaine routier (dommag
La police dans les campagnes
Les agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux 1° bis, 1° ter, 1° quater et 2° de l'article 21 sont habilités à relever l'identité des contrevenants pour dresser les procès-verbaux concernant des contraventions aux arrêtés de police du maire, des contraventions au code de la route que la loi et les règlements les autorisent à verbaliser ou des contraventions qu'ils peuvent constater en vertu d'une disposition législative expresse.
https://secure.avaaz.org/fr/petition/Monsieur_Denis_Thuriot_Maire_de_Nevers_Pour_larmement_des_Policiers_Municipaux_de_la_ville_de_Nevers/edit