Birdy, d’Alan Parker (1984)
Appelons-le Monsieur R. Ce vendredi 24 février, ce détenu incarcéré au centre de détention de Roanne sera représenté par son avocat devant le tribunal administratif de Lyon. Une procédure de référé-suspension pour « faire stopper les fouilles systématiques » dont il est l’objet après chaque parloir.
Comme lui, il sont nombreux à ne plus supporter cette mise à nu devant les surveillants à chaque fois qu’ils ont un parloir ou une relation directe avec le dehors. Certains préfèrent même limiter ces rares contacts familiaux, comme témoigne ce détenu de la prison de Bourg-en-Bresse :
« J’ai annulé un parloir et je vais demander à mon épouse de venir me voir une fois par mois au lieu de tous les quinze jours, pour limiter cette mise à poil systématique. Agé de 72 ans et demi, je trouve ce procédé dégradant. C’est une atteinte à la dignité humaine ».
Une poignée de détenus échappent à la fouille
Régulièrement condamnées par la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) pour « traitement inhumain ou dégradant », la France a changé l’encadrement de l’usage des fouilles à nu. Désormais, elles ne peuvent plus être systématiques mais adaptées aux nécessités de la sécurité et à la personnalité des personnes détenues », selon la loi pénitentiaire de 2009.
Forts de cette évolution législatives, quelques détenus ont commencé en 2011 a saisir les tribunaux pour ne plus subir de fouilles. Surtout, depuis le mois d’août 2011, l’Observatoire Internationale des Prisons (OIP) a lancé une campagne pour appuyer ces recours individuels. Du centre de détention de Salon-de-Provence (pour lequel a été déposé le premier recours) aux autres taules, le mot passe.
Dans l’immense majorité des cas, les tribunaux ont donné raison aux détenus. Pour Monsieur JP, du centre pénitentiaire de Bourg-en-Bresse, le juge administratif de Lyon note par exemple dans une ordonnance du 8 février 2012 :
« L’établissement pénitentiaire en cause n’établit pas que sa situation justifierait, pour tous les détenus sans distinction, une fouille corporelle intégrale répétée à la sortie de chaque parloir autorisé ».
Par conséquent, Monsieur JP bénéficie depuis la date de ce jugement de l’absence de fouille. Mais pas les autres.
La « stratégie d’évitement » de la pénitentiaire
Depuis un arrêt du Conseil d’Etat du 9 septembre 2011, l’OIP a changé de stratégie, en cherchant à faire sanctionner les réglements intérieurs et autres consignes qui organisent ces fouilles intégrales systématiques. Afin que tous les prisonniers d’un même établissement ne soient plus soumis à cette procédure de sécurité.
Depuis septembre 2011, les directions des prisons de Rennes, Oermingen (Bas-Rhin) et Poitiers-Vivonne ont ainsi été condamnées.
A la suite de ces condamnations, nous aurions voulu savoir si ces prisons ont mis en oeuvre ces décisions de justice. Mais l’administration pénitentiaire ne communique pas sur le sujet.
Selon l’OIP, seul le centre de détention pour femmes de Rennes ne pratiquerait plus ces fouilles à nu de façon systématique. Pour les autres, les pratiques illégales continueraient.
C’est aussi le sens de l’intervention de Jean-Marie Delarue, le Contrôleur général des lieux de privations de liberté (autrement dit l’autorité indépendante qui contrôle les prisons). Il a placé au coeur de son rapport annuel rendu public le 22 février, cette thématique. Pour lui, l’interprétation d’une circulaire d’avril 2011, a permis de conserver le caractère systématique, ce que confirme un directeur de prison de l’ouest de la France, sous convert d’anonymat à La Croix :
« Concrètement, il suffit que je trouve quelques objets illicites au sein de la prison pour pouvoir recourir à ces fouilles pendant une période de trois mois. À la fin de cette période, il suffit que je fasse une nouvelle prise pour renouveler le dispositif ».
C’est exactement ce qu’a fait le chef d’établissement du centre de détention d’Oermingen en mettant en avant de « récentes et nombreuses découvertes de produits stupéfiants et de téléphones portables » pour justifier de fouilles intégrales du 18 janvier au 18 février 2012. C’est à dire le lendemain du jugement du tribunal administratif de Strasbourg annulant les fouilles intégrales systématiques des détenus à l’issue des parloirs.
Cliquer pour accéder à notefouille18022012.pdf
Nicolas Ferran, juriste à l’OIP, explique :
« Depuis la multiplication des recours devant les tribunaux, il semble se mettre en place une statégie d’évitement. Une des modalités possibles étant de multiplier les notes de service de courte durée. Le temps que le juge se prononce sur une note en particulier, même si c’est en urgence, une nouvelle note aura été prise ».
« Les surveillants ne se laisseront pas faire »
L’administration pénitentiaire freine d’autant plus des quatre fers pour appliquer la loi, que tous les syndicats de surveillants (sauf la CGT) sont vent debout contre la fin des fouilles intégrales systématiques. Au nom de l’efficacité de telles procédures, comme l’explique Pascal Rossignol, le secrétaire général de l’UFAP-UNSA Justice en Rhône-Alpes :
« Supprimer ces fouilles systématiques, c’est dangereux pour la sécurité des surveillants et des détenus eux-mêmes. On prend le risque de faire rentrer des armes. Si on fait des prisons passoires, je ne vois pas l’intérêt de mettre des personnes entre quatre murs pour créer des zones de non-droit ».
Les syndicats de surveillants avancent deux solutions :
- Une réécriture de la loi. Mais cela ne paraît guère envisageable compte tenu des décisions de la Cour Européenne des Droits de l’Homme.
- Investir massivement dans des scanners corporels, comme on trouve dans les aéroports.
Le remplacement des fouilles à nu par des scanners corporels a été une solution évoquée lors des débats parlementaires sur la loi pénitentiaire. C’est clairement ce qu’avaient en tête les rapporteurs de la loi en estimant que les équipements de détection « permettront certainement la suppression des fouilles intégrales ».
En ces temps de disette financière, le ministère de la Justice n’aurait investit que dans deux scanners, actuellement en expérimentation.
Révolutionner le métier de surveillant ?
Mais la solution ne peut qu’être technique car la fouille à nu est au coeur du métier de surveillant et de leur autorité. Le Contrôleur général des prisons, Jean-Marie Delarue en convient dans son dernier rapport :
« Ordonner une fouille, c’est rappeler le pouvoir exorbitant de celui qui l’ordonne. C’est montrer de quel côté se trouve l’autorité; autorité d’autant plus grande que la consigne consiste justement à « désarmer » l’autre, en le rendant vulnérable; autorité d’autant plus générale qu’est elle sans rapport nécessaire avec le comportement mais seulement avec des situations : toute personne détenue provenant d’un parloir passe par la fouille intégrale, qu’elle soit calme ou violente ».
Pour le Contrôleur général des prisons, la solution doit donc passer par un changement des pratiques des surveillants :
« La clé d’un emploi justifié, donc minoritaire, des fouilles intégrales réside dans la manière dont les agents sauront distinguer les véritables fauteurs de trouble (minoritaires) et les autres (…) qui doit passer par une approche attentive et quotidienne de la vie des personnes détenues et par la capacité à régler les tensions qui s’y manifestent ».

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La détention fait partie d'un jeu, qui a ses règles : pour le détenu, se dépatouiller face à l'administration pénitentiaire ; pour l'A.P., faire en sorte que le détenu ne puisse pas se dépatouiller. Point.
La fouille à poil au retour des parloirs obéit aux règles de ce jeu : si les détenus ne profitaient pas des parloirs pour passer quelques bricoles, il n'y aurait pas de fouille. Et inversement !
Il y a quand même des choses plus importantes que ça, en ce qui concerne les prisons. Ne serait-ce que l'application de la loi pour les libérations conditionnelles, la véritable individualisation des peines, et la suppression du prétoire, notamment....
Bien sûr que si. Au nom du « risque ». C'est comme pour la garde-à-vue.
on soupçonne les détenus de faires passer des choses et le matons alors!! comment il est entré en prison le pistolet lors de la dernière évasion!! certainement pas avec les parloirs car si vous saviez de qoi vous parler vous sauriez que les gents qui vont au parloir passent au detecteur et que même une bague on doit l'enlever! alors ou vous ne savez pas de quoi vous parler ou vous faites partie du système pénitentiairer et la je comprends que pour vous c'est un jeu! mais si vous saviez ce qui se passe réellement vous auriez peut être une autre opignion!!!
on soupçonne les détenus de faires passer des choses et le matons alors!! comment il est entré en prison le pistolet lors de la dernière évasion!! certainement pas avec les parloirs car si vous saviez de qoi vous parler vous sauriez que les gents qui vont au parloir passent au detecteur et que même une bague on doit l'enlever! alors ou vous ne savez pas de quoi vous parler ou vous faites partie du système pénitentiairer et la je comprends que pour vous c'est un jeu! mais si vous saviez ce qui se passe réellement vous auriez peut être une autre opignion!!!
La solution serait de resocialiser les détenus en leur donnant un travail encadré dans l'enceinte carcérale, les bénéfices dégagés serviraient à rémunérer plus de gardiens et mieux, et d'investir dans ces "cages" délabrées indignes de notre pays, là, tout le monde y gagnerait.
Espérons que les candidats ont un projet pour cette part de notre société.
C'est vrai pener un peu à ces pauvres prisonniers...
Après tout s'il sont en prison c'est pour 80 % d'entre eux à cause d'une enfance difficile....
Mais où sont les SPA ? l'accès aux hautes technologies gratuit et illimité ? Les repas chaud 3 fois par jours ? Le confort d'un bon lit et d'un toit chauffé ??
Et le tout aux frais de l'Etat ??
Serieusement ? C'est ça la prison ?
Pas étonnant que les prisons françaises soient surpeuplés, un si grand luxe à si petit prix.....
On nous rabâche toujours "la loi c'est la loi, faut la respecter".
Et bien respectons-la, appliquons-la. Si on estime que c'est une loi injuste, alors c'est un autre débat, et il appartient aux législateurs d'y travailler. Mais en attendant, la plupart des prisons françaises sont de fait hors la loi. Si c'est pas une belle hypocrisie ...
Tournez les choses comme vous le voulez : oui, 80% des prisonniers (à la louche) ont connu une enfance difficile. Et par enfance difficile, je n'entends pas être privés de PS3 et de Nike dernier cri. J'entends DDASS, abus sexuels, maltraitance, violences intrafamiliales etc... Ce n'est pas une excuse, mais une constatation. Les endroits où l'on trouve proportionnellement le plus de victimes, ce sont les prisons.
Et personne ne demande ce que vous préconisez sur un ton ironique, même si un lit autre qu'une paillasse merdique ne serait pas du luxe, tout comme une nourriture correcte. Même pas par humanisme boboisant : par prophylaxie sanitaire et souci d'économie. Personne n'a intérêt à voir les détenus ressortir avec la gale, la tuberculose, le dos cassé ou l'estomac en compote.
Campusliber,
Oui, c'est un jeu, et un jeu malsain. Parce que l'Administration pénitentiaire en général et les surveillants en particulier savent bien que ces fouilles ne sont pas faites pour des raisons de sécurité. Soyons sérieux trente secondes : les téléphones ne franchissent que très rarement les murs dans les cachettes anales, pas plus que la came et les shooteuses (et, entre nous, si l'AP luttait contre les stups en prison, ça se saurait...), mais par largage, ou dans la poche de surveillants ripoux. Quant aux armes blanches, les détenus savent très bien comment en fabriquer avec une brosse à dents, des lames de rasoir Bic ou un couteau à tartiner.
Arrêtons 5 minutes de les plaindre ou de s'appitoyer sur leur sort ...
Arrêtons de faire du "social" ...
Et arrêtez de parler de choses que vous ne connaissez pas, ou alors très mal !!!
Merci
Et, si, le personnel pénitentiaire, du moins celui qui prend son travail au sérieux, est en grande partie là pour faire "du social" (et de l'éducationnel, et du psychologique).
Ce n'est pas s'apitoyer sur le sort des détenus que d'énoncer une évidence. Mais il est encore des gens pour préférer transformer des petits cons en bêtes fauves sous des prétextes fumeux. Et qui ensuite viennent chouiner sous prétexte qu'on leur a volé leur portable.
Soyons réalistes, et arrêtons de croire tout ce que l'Etat nous dit "Eux, ce sont les méchants, on les enferment, on les isolent, ne vous inquiétez pas on s'occupe de tout.". Arrêtons d'être aussi naïfs.
Je ne suis pas contre la fouille, elle peut être utile, mais il y a bien d'autres solutions quand même que les conditions dans lesquelles cela se déroule actuellement.
Et puis, surtout, n'oublions pas qu'à l'heure d'aujourd'hui, tout le monde peut aller en prison, vous comme moi. Suffit d'une minute d'inattention en voiture, un gamin renversé et votre vie est finie. Sans parler des gens qui volent pour nourrir leur famille, eux aussi l'ont "bien mérité"?
Tu "dis stop" et t'arrête pas: tu te contredis.
Et tu dis des conneries, et t'en dis des tellement grosses qu'on peut pas marcher dedans avec toi: c'est pas vrai, ça porte pas bonheur, c'est merdeux et puis c'est tout.
Tu connais quoi de la prison? La tenue bleue, la cravate, la tenue blanche, ou... vu à la télé?
Un conseil: quand le pélot au bistro te cause "prison = hautes technologies gratuit et illimité, avec repas chaud 3 fois par jours, confort d'un bon lit et d'un toit chauffé", n'attends pas: dégaine tout de suite ton poing dans sa g***, sans rien dire, f*** lui une branlée illico, crache lui à la fig*** ou mords lui les couil*** jusqu'au sang, tu seras plus proche du réel que lui.
"Et le tout aux frais de l'Etat ?"
- Non Ducon, c'est sans commune mesure: ça, c'est juste des miettes pour les gogos. Car pendant que des matons se prennent des insultes et des coups de boule à longueur de journée parce qu'ils travaillent dans des conditions minables, avec des pauvres types qu'on renforce dans le vice et la débilité en les transformant de demi-brutes en brutes minables, pendant ce temps de cache-misère général , l'Etat-mère chouchoute des banquiers aux fins de mois somptueuses et des banksters de première classe, l'Etat-Papa fait des cadeaux fiscaux aux nantis des jolis quartiers et aux héritiers des belles villas, et la Providence ouvre des niches maousses aux toutous de la Bourse: quelles valeurs montent, quelles valeurs baissent? - Ouaiche, "Veolia c'est de la bonne ou pas de la bonne? Et Suez, t'en pense quoi, c'est un bon coup?"
"Les amis du grand luxe à si petit prix", Ducon, connaissent pas trop la crise, encore moins le zoo de la prison alors que, eux, ils ont l'argent plus facile que toi et les tiens: te trompe pas de combat!
Ceci dit, quoiqu'on en fait, on est prison pour payer sa dette, si on veut qu'une réinsertion ultérieure focntionne, ce n'est pas en traitant les gens comme des animaux. On contraire, ça renforce la haine du système.
Juridiquement cela tient la route et coute pas bien cher (pas besoin d'un portique mais d'un simple détecteur à main que les prisons ont déjà)...
Ce n'est pas la fouille intégrale qui est prohibée, mais le fait qu'elle soit systématique ou à la vue de tous...
Ben non... Comme l'ont montré les historiens, du temps des bagnes de Guyane, alors qu'il n'y avait aucune possibilité de "passer des bricoles", qu'il n'y avait aucune "saisie", on recourrait parfois jusqu'à 14 fois par jour, à la fouille à nu. Le but, avoué par l'administration de l'époque était de "maintenir le condamné dans un état de respect".
La fouilla à nu est avant tout un moyen d'humiliation. Que certains surveillants (qu'on appelait matons à Cayenne) y prennent leur pied est autre chose. Que des responsables syndicaux la défendent est inacceptable.
Ils sont prisonniers certes. Ils n'ont pas respecté la loi, soit. Mais de quel droit pouvons-nous dire que c'est bien fait pour eux? Comment pouvons-nous prendre parti, nous qui sommes en liberté et qui n'en supporterait pas les trois quart? Que demain, ceux qui plébiscites ces fouilles intégrales et systématiques se retrouvent en garde à vue et se voient fouiller sans raison apparentes et on en reparlera?
Ces avec des idées comme ça que les extrêmes se retrouvent au pouvoir. Prisonniers d'accord, et encore. Pas sûr que les problèmes soient réglés en remplissant les prisons. Dégradés, humiliés, non.
Tu oublies la CGT, la seule qui est digne parmi les syndicats de matons.
Et dire que les autres syndicats ont avancé les scanners corporels, avec leurs doses massives de rayons X. À gerber.