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Faucheurs de chaises : rappel à la loi après une action dans une agence HSBC à Lyon

[Article mis à jour] le 9 novembre dernier, une dizaine de militants ont « emprunté » trois fauteuils au siège régional de la banque HSBC à Lyon. Pour ces « faucheurs de chaises », l’argent nécessaire aux mesures pour lutter contre le changement climatique est « à trouver dans les paradis fiscaux ». Ils ont terminé au poste de police. Trois jours plus tard, le 12 novembre, des membres d’Attac ont eux aussi « réquisitionné » trois nouvelles chaises dans une agence BNP de Lyon.

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Faucheurs de chaises : rappel à la loi après une action dans une agence HSBC à Lyon

Ce mercredi 20 janvier, on apprend que les onze militants interpellés après l’action dans l’agence HSCB de Lyon ont écopé d’un rappel à la loi assorti d’un sursis de deux ans.

> Article initialement publié le 9 novembre 2015

Les "Faucheurs de chaises", avec au premier plan Julien Bayou et Corinne Morel-Darleux, après avoir "emprunté" trois fauteuils dans l'agence HSBC rue de la République à Lyon. © BE/Rue89Lyon
Les « Faucheurs de chaises » avec, au premier plan, Julien Bayou et Corinne Morel Darleux, qui ont « emprunté » trois fauteuils dans l’agence HSBC (rue de la République à Lyon). © BE/Rue89Lyon

L’agence n’a pas été choisie par hasard. La banque HSBC est pour ces militants « un champion de l’évasion fiscale ». Une enquête, baptisée depuis « Swissleaks », dévoilait il y a quelques mois un gigantesque système d’évasion fiscale dont la filiale suisse de la banque, HSCB Private Bank, était un des principaux acteurs.

C’est justement une agence de cette filiale qui se trouve rue de la République à Lyon.

Ce lieu présentait un deuxième intérêt pour une action programmée en début de semaine : elle est ouverte le lundi.

L’agence ainsi que ainsi que les confortables sièges disposés dans son espace d’accueil avaient été repérés au préalable par des militants. Peu avant 16 heures ce lundi, une dizaine d’entre eux ont pénétré dans l’agence, calme et presque vide à cet instant.

A leur tête Julien Bayou, conseiller régional d’Île-de-France et porte-parole national d’Europe-Ecologie et Corinne Morel-Darleux conseillère régionale Parti de Gauche et porte-parole de la liste d’union Le Rassemblement menée par l’écologiste Jean-Charles Kohlhaas.

Sur le trottoir, pour la photo

Au guichet, ils ont expliqué leur démarche à une employée de la banque, pendant que le reste de la troupe s’est chargée de « faucher » les trois fauteuils et de les disposer à l’extérieur, sur le trottoir, pour une petite photo souvenir.

Les militants repartent avec les trois fauteuils disposés dans l'accueil de l'agence. © BE/Rue89Lyon
Les militants repartent avec les trois fauteuils disposés dans l’accueil de l’agence. © BE/Rue89Lyon

L’opération a duré à peine quelques instants, à peine perturbée par le passage difficile des fauteuils un peu larges pour la porte d’entrée de l’agence. Pas de franche opposition du côté de la banque. Tout s’est passé dans le calme.

Un militant note toutefois que l’employée «a déclenché le système d’alerte sous son bureau ».

Les trois fauteuils, symboles des « banques assises sur le système d’évasion fiscale », ont été dirigés vers une camionnette pour être transportés.

C’est là, à l’angle des rues Gentil et Sallès, qu’ils ont été interpellés par la police. Julien Bayou et Corinne Morel-Darleux, partis dans une autre direction pour rejoindre le point de rendez-vous post-opération, ont rejoint la troupe en courant. Tous seront finalement interpellés dans le calme.

« Pour beaucoup, c’était une première action »

Avant de monter dans le panier à salade, Benjamin, militant chez Europe Ecologie, reste étonné de sa première action :

« Je filmais l’action, heureusement j’ai pu refiler la caméra discrètement avant qu’ils ne m’arrêtent. Je suis atterré qu’il y ait autant de flics pour une dizaine de militants, pas bien méchants. »

A ses côtés, de jeunes militants d’Europe-Ecologie, du Parti de Gauche et de Nouvelle Donne. Julien Bayou, qui fût actif il y a quelques années au sein du collectif Jeudi Noir, explique :

« Pour beaucoup c’était une première action. C’était important qu’on soit là avec eux, pour engager la discussion et faire redescendre la pression. J’espère en tout cas que l’arrestation ne va pas les dissuader d’en faire d’autres. »

Avant de revenir à l’objet de l’action :

« En tout cas, je veux bien faire un peu de garde à vue si le patron de HSBC en fait aussi. »

Un militant, conducteur de la camionnette de location, prévient :

« Si vous n’avez pas de mes nouvelles, vous appellerez Ada (la société de location de véhicules, ndlr) pour leur dire que je serai un peu en retard ! »

196 sièges qui réapparaîtront au moment de la COP 21

L’action symbolique vise à dénoncer le système d’évasion fiscale des banques. A quelques jours de la conférence pour le climat – COP21– à Paris, les « faucheurs de chaise » estiment que c’est là qu’il faut aller chercher l’argent :

« Les 100 milliards pour le climat, ils sont à trouver dans l’évasion fiscale », déclare Julien Bayou.

Cet argent permettrait notamment selon lui de financer le fonds vert de l’ONU, créé en 2010 et qui doit aider les pays les plus pauvres à entamer une transition énergétique.

Ce mouvement des « faucheurs de chaises » a débuté du côté de Bayonne en février. Là-bas, des membres de l’organisation Bizi ! avaient fauché des chaises dans une autre agence HSBC. Depuis, le mouvement a pris une certaine ampleur et des opérations non-violentes similaires ont été menées à Toulouse, Bordeaux, Marseille ou encore Strasbourg la semaine dernière où un journaliste de Rue89 a été placé en garde à vue et son matériel dégradé.

A Lyon, la dizaine de militants interpellés a été entendue par la police puis relâchée en début de soirée, sans être placée en garde à vue.

Le mouvement s’est aussi structuré autour d’organisations politiques, ou transversales et citoyennes comme Alternatiba qui sillonne la France pour alerter sur l’urgence climatique.

En septembre, une tribune a été publiée dans Libération et notamment signée par Olivier Besancenot, Edgard Morin ou Jean-Luc Mélenchon afin de soutenir l’initiative. Un objectif est fixé : emprunter 196 chaises partout en France pour symboliser les 196 Etats participant à la COP21.

« On leur rendra leurs sièges quand ils auront rendu l’argent caché dans les paradis fiscaux », indique une militante.

Ces 196 chaises et sièges réapparaîtront au moment de la COP21, à Montreuil, pour un « contre sommet » intitulé « Sommet citoyen pour le climat ». La semaine dernière le compteur affichait 102 chaises fauchées -105 aujourd’hui avec les trois « lyonnaises ».

Ce lundi soir, les sièges de l’agence HSBC de la rue de République sont au local de campagne de la liste Rassemblement, union régionale (entre autres) du Parti de Gauche et d’Europe Ecologie.

« La police nous a laissés repartir avec. Maintenant, on ne sait pas s’il va y avoir une perquisition au local pour les récupérer », s’inquiète-t-on du côté des militants.

Un nouveau fauchage et un rappel à la loi

(MàJ) Ce jeudi 12 novembre, une nouvelle opération de fauchage de chaises a eu lieu à Lyon. C’est le collectif altermondialiste Attac qui s’est rendu à l’agence de la banque BNP-Paribas place Jean Macé dans le 7e arrondissement. Là, des membres de la section du Rhône ont « réquisitionné » trois nouvelles chaises. Ils indiquent dans un communiqué que leur action ne constitue pas un vol mais un « acte de désobéissance civile » et que :

« Les sièges seront rendus à la BNP lorsqu’elle aura fermé les 7 filiales qu’elle détient aux Îles Caïmans ».

Pas d’interpellation pour les membres d’Attac ce jeudi contrairement aux militants de la liste Rassemblement lundi 9 novembre. Parmi ces derniers, sept d’entre vont être appelés à comparaître devant un juge pour vol en réunion.

Ce mercredi 20 janvier 2016, la section du Rhône d’Europe Ecologie Les Verts, fait savoir que les onze militants interpellés le 9 novembre dernier après l’action dans l’agence de la banque HSBC rue de la République à Lyon sont convoqués au commissariat pour un rappel à loi assorti d’un sursis de deux ans. Dans son communiqué la section départementale du parto écologiste regrette cette « interdiction pendant deux ans de contester l’évasion et l’optimisation fiscales par des actions joyeuses et symboliques » et « la volonté manifeste de dissuader ici et là l’expression publique de la contestation écologique et sociale.

> Article mis à jour jeudi 12 novembre après l’action du collectif Attac Rhône et la diffusion de leur communiqué

> Article mis à jour mercredi 20 janvier après l’annonce du rappel à la loi signifié aux militants interpellés

 


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