Avait-il vraiment envie d’y aller ? Semblant presque contraint par la stratégie nationale de la France insoumise, Mathieu Garabedian (LFI) a officialisé sa candidature aux élections municipales de Villeurbanne, ce lundi 29 septembre. Au côté du truculent député du coin Gabriel Amard, l’adjoint de Cédric Van Styvendael (PS) à la mairie a assuré vouloir penser sa candidature « comme un seul combat politique » à mener, à l’échelle locale comme à l’échelle nationale.
Pourtant, l’élu insoumis n’avait jusqu’ici pas affiché de désaccord profond au sein de la majorité de gauche plurielle composée autour de « CVS », partie unie dès le premier tour en 2020.
Son groupe politique s’est certes opposé sur des sujets tels que la vidéosurveillance ou encore le projet de syndicat mixte (public et privé) pour rénover et gérer l’Astroballe, « un bien commun de Villeurbanne ». Depuis quelque temps, le député Gabriel Amard renforçait le clivage avec la majorité municipale, par exemple au sujet du désarmement de la police municipale.
La gauche villeurbannaise victime des querelles nationales
Les considérations nationales ont finalement eu raison de cette union, puisque que LFI prévoit de lancer autant de listes qu’elle le peut pour les municipales de 2026. Au moment d’annoncer sa candidature ce lundi, Mathieu Garabédian paraissait un peu gêné aux entournures de se présenter face à son actuel N+1. Il ne l’a d’ailleurs pas ouvertement attaqué, préférant mettre l’accent sur l’accès au logement et à l’emploi des jeunes de Villeurbanne, ville la plus dynamique de l’agglomération.
« Nous allons mettre en place dans les prochaines semaines des ateliers d’écriture pour écrire le programme avec les habitants », a développé le candidat LFI, tentant d’apporter un peu de local dans un conflit qui se joue plus à Paris que dans la plus grande banlieue de France.
Tout le contraire de Gabriel Amard, député LFI de Villeurbanne, qui a joué à plein son rôle pour tirer à boulets rouges sur le PS et ses alliés. « C’est nous, le vrai Nouveau front populaire, on veut juste appliquer ce programme », a martelé le gendre de Jean-Luc Mélenchon, poussant presque le candidat Garabédian de sa tribune. « On ne va pas s’excuser alors qu’on incarne la première force dans la Métropole de Lyon », enchaîne l’élu national à propos de la candidature fratricide.
À Villeurbanne, LFI en position de force
Il faut dire que sur ce point, LFI est bien aidé par les derniers scrutins nationaux. Lors des élections européennes, le parti insoumis est arrivé largement en tête à Villeurbanne avec plus de 25%, près de 9 points de plus que le RN et le PS. LFI a fait encore mieux au premier tour des législatives, fin juin 2024. Gabriel Amard y est arrivé largement en tête avec plus de 46% des voix… contre à peine 20% pour Jean-Paul Bret, son premier poursuivant.

Seulement voilà : au deuxième tour, l’ancien maire, candidat dissident, a réussi à attirer tous les grognards derrière lui, parvenant presque à damer le pion au gendre de Jean-Luc Mélenchon. Depuis, Jean-Paul Bret s’imagine à nouveau un destin municipal.
Farouche opposant de LFI, l’ancien maire et ancien député (PS) de la ville n’a jamais pardonné à Cédric Van Styvendael, son poulain en politique, sa « mésalliance » avec les insoumis. Ceux-ci le lui rendent bien : ce lundi, Gabriel Amard a qualifié son opposant aux dernières législatives de « succursale du macronisme ».
Toujours pas officiellement candidat, Jean-Paul Bret devrait bientôt annoncer son entrée en campagne. Alors qu’il menaçait jusque-là d’y aller dans le cas où le PS local repartirait avec LFI, cette annonce de listes séparées ne lui a pas suffi. « C’est LFI qui quitte le navire, pas Cédric van Styvendael qui quitte LFI », a justifié l’ancien baron socialiste.
Trop de gauche tue la gauche ?
« La décision des insoumis est un camouflet pour le maire actuel. La situation lui échappe », affirme celui qui veut « incarner une alternative à gauche », avec « d’anciens socialistes, dans une union qui va jusqu’au centre-gauche ». Maire de 2001 à 2020, l’homme de 79 ans assure être là « pour gagner ». « Beaucoup de Villeurbannais sont insatisfaits et seraient contents de me revoir. Je n’incarne pas une candidature « poil à gratter ». Ou alors, je suis un très gros poil à gratter », appuie encore le probable futur candidat.
Pas encore entré en campagne, Cédric Van Styvendael a préféré temporiser, refusant d’entrer en scène avant les trois coups. « Chacun est libre de ses choix. […] Qu’un mouvement ayant ses propres sensibilités et un agenda national souhaite présenter un projet aux électeurs fait partie de l’exercice démocratique », a réagi l’actuel maire auprès de Rue89Lyon, à propos de la candidature insoumise.
À Villeurbanne, les classements du premier tour seront primordiaux pour définir les unions et désunions de la future majorité municipale. « Si je suis devant, les gens présents sur la liste de Cédric Van Styvendael vont devoir se positionner. Je ne veux pas porter la responsabilité de la division », a d’ores et déjà averti Jean-Paul Bret.
LFI a joué la même partition, ce lundi : l’union, pourquoi pas, mais à condition d’arriver en tête au premier tour. « Vous êtes en train de nous dire que vous accepteriez que Cédric Van Styvendael soit votre adjoint ? », taquine un journaliste. Mathieu Garabédian acquiesce.
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