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Sécurité à Vaulx-en-Velin : « Plus il y a de monde sur l’espace public, moins les points de deal pourront s’y installer »

La mairie de Vaulx-en-Velin lance un nouveau plan de lutte contre le narcotrafic. Le projet renforce les moyens alloués à la sécurité, tout donnant l’opportunité aux habitants de se réapproprier l’espace public en proposant des activités collectives et des aménagements urbains.

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Sur l'Esplanade de la Tase, mardi 8 juillet 2025, une association propose des cours de boxe gratuits aux enfants du quartier qui ne partent pas en vacances.
Sur l’Esplanade de la Tase, mardi 8 juillet 2025, une association propose des cours de boxe gratuits aux enfants du quartier qui ne partent pas en vacances.

C’est un début de soirée paisible sur l’esplanade de la Tase, ce mardi de juillet. Au coeur du quartier de la Soie, à Vaulx-en-Velin, des membres de l’association Pigilistik’ montent un ring gonflable sur le béton. Laëtitia, boxeuse professionnelle, se prépare à animer la session du soir, tandis que de jeunes enfants et des adolescents désœuvrés sont venus se défouler. « Ils n’ont pas la chance de partir en vacances, donc on les divertit plutôt qu’ils ne fassent des conneries », sourit la sportive.

L’association organise son activité tous les soirs cette semaine, en prévision d’un grand tournoi de boxe organisé dimanche 13 juillet au stade Edouard-Aubert. De quoi occuper les jeunes lors de cette période estivale souvent tendue à Vaulx-en-Velin, habituée des violences urbaines. Mais aussi de quoi occuper l’espace public d’une façon plus « positive », selon les mots de la maire (socialiste), Hélène Geoffroy.

Car depuis quelques années, les points de deal fleurissent dans les parcs, les parkings, et même au pied des immeubles de certains quartiers de cette ville de l’Est lyonnais. Pour lutter contre ce phénomène de prédation sur les jeunes Vaudais, la municipalité lance, en partenariat avec les associations et les habitants, un projet de réappropriation des espaces publics pour « chasser le narcotrafic ». Et cela commence aussi simplement qu’en installant un ring de boxe.

Se réapproprier l’espace public face au narcotrafic

Cela faisait un moment que les habitants démunis réclamaient des moyens pour lutter à leur échelle, en parallèle de la répression policière. En réponse à cette demande croissante, Hélène Geoffroy leur apporte une réponse : c’est à eux de « faire de l’espace public des lieux de vie et se les réapproprier pleinement ». Le 30 juin dernier, la maire a donc présenté à la presse son nouveau « plan communal d’action pour des espaces publics apaisés ».

Le plan, qui mobilise associations et habitants, repose beaucoup sur le bénévolat : organisation d’activités, occupation des parcs et lieux de rencontre en soirée et le week-end, mobilisation citoyenne… La Ville se targue aussi d’avoir mis en place le premier « fonds de parentalité » municipal de France : un budget de 400 000 euros a été débloqué, dédié au financement d’initiatives citoyennes anglées sur la prévention des addictions, l’aménagement d’espaces publics, ou encore l’accompagnement des familles.

« Plus il y a de monde sur l’espace public, plus on sera en capacité d’empêcher les points de deal de s’y installer et de prospérer », assène Hélène Geoffroy.

La mairie souhaite mobiliser la jeunesse vaudaise en la mettant aussi à contribution. Un budget de 200 000 euros a été réservé pour financer des appels à projets culturels, sportifs ou écologiques, initiés par des jeunes.

Les habitants, premières victimes du narcotrafic

Une habitante du Mas du Taureau, qui tient à garder son anonymat, est plutôt satisfaite de cette proposition. « C’est complètement en cohérence avec ce qu’on avait demandé, acquiesce-t-elle. Il faut que tout le monde s’implique, c’est notre quartier, notre ville, il ne faut pas fuir le problème. »

Ce problème, cette représentante de parents d’élèves le connaît bien. Il l’a même touchée de très près, le 7 avril dernier. Ce matin-là, à deux pas de l’école primaire Angelina-Courcelles, un jeune homme de 19 ans est tué par balles dans un règlement de comptes. Son fils, cartable sur les épaules, est à 50 mètres du tir. Un traumatisme pour la jeune mère et pour le quartier tout entier. « Il nous a bien fallu quinze jours pour refaire surface », souffle-t-elle.

Habitante du Mas depuis toujours, elle attendait avec impatience ces nouveaux moyens alloués à la sécurisation. Mais la mère de famille tient à le souligner : « On veut bien se réapproprier l’espace public, mais s’il n’a pas déjà été « nettoyé » par les forces de l’ordre et qu’il y a toujours des dealers sur les promenades en bas de chez nous, c’est compliqué. »

Un besoin de plus de sécurité à Vaulx-en-Velin

Un enjeu que semble avoir saisi Hélène Geoffroy. Le troisième axe de son plan d’apaisement de l’espace public, plus sécuritaire, est le mieux doté : 5,3 millions d’euros. Au programme : augmentation des effectifs de policiers municipaux (50 agents en plus d’ici 2026), renforcement de la vidéosurveillance (27 caméras en plus en 2025), ou encore l’aménagement des parcs et parkings afin de les fermer au public la nuit.

« On veut rendre l’espace moins confortable pour les points de deals, en passant notamment par le réaménagement urbain », affirme la maire.

Car si des points de deals sont régulièrement démantelés à Vaulx-en-Velin – quatre en 2024, selon la préfecture –, ils se reforment quasi-systématiquement, soit au même endroit, soit à un autre. En additionnant réappropriation de l’espace par les habitants et augmentation de la répression par les forces de l’ordre, la municipalité espère donc enrayer le phénomène.

« Ce plan répond seulement en partie au problème, temporise Jaafar Greinch, président du Centre social du Grand Vire. En vérité, la plus grosse partie n’est pas dans les mains de la Ville, mais de l’État. Et il y a un manque criant de ce côté-là. »

L’associatif est cependant satisfait du développement des activités proposées aux jeunes. Selon lui, il est important de proposer une alternative pour éviter de tomber dans la petite délinquance.

L’expérimentation commence donc dès la pause estivale, avec le programme Activ’Eté, dont fait partie le gala de boxe du 13 juillet. Sur l’esplanade de la Tase, les combats ont commencé entre les jeunes. Une mère de famille observe ses enfants attendre impatiemment leur tour. « Chaque année, on a de plus en plus d’activités qui sont proposées, se satisfait-elle. Si on pouvait en avoir encore plus, ce serait pas mal. »

D’ici six mois, la mairie réunira tous les acteurs engagés dans le plan – associations et habitants – afin d’établir un premier bilan de l’efficacité du projet. Avec un espoir : que la volonté collective permette aux Vaudais, enfin, de se réapproprier leurs espaces et de chasser la drogue de leurs rues.


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