Ils étaient 10 000 (6 500 selon la préfecture) à Garibaldi (Lyon 3e), au matin de ce 1er-Mai ensoleillé. Un chiffre moindre que l’année dernière sur un parcours pour le moins inhabituel – avec une marche se terminant à Jean Macé.
Dès le départ, 10 h 30, le mot d’ordre est donné : « soutien à nos camarades », scande le cortège de tête mené par la CGT. Une solidarité tout droit dirigée vers les collectifs antifascistes de La Jeune Garde et d’Urgence Palestine, qui clôturent la marche. Les deux organisations sont visées par une procédure de dissolution lancée par le ministre de l’Intérieur. La Jeune Garde, collectif fondé à Lyon en 2018, est notamment dans le viseur pour des publications au sein du groupe Telegram « Antifasquad » où certains de ses membres sont mis en avant pour des agressions sur des militants d’extrême-droite.

À Lyon, un 1er-Mai avec un fort soutien à la Jeune Garde
« En s’attaquant à nous, [Bruno] Retailleau s’attaque à toutes les organisations politiques, syndicales et antiracistes qui nous soutiennent, assène Zine-Eddine Messaoudi, le porte-parole de la Jeune Garde à Lyon. Il essaye de détourner l’attention du vrai problème, qui est l’attentat terroriste islamophobe qui a tué Aboubakar. On ne va pas se laisser faire ! «
La Jeune Garde et ses sympathisants sont venus en force ce matin, et sont rapidement rejoints par le député Raphaël Arnault (LFI), fondateur du mouvement, arrivé tout droit de Paris. À leur suite, le collectif Urgence Palestine, lui aussi visé par une dissolution, demande le même soutien. Le ministre de l’Intérieur veut le dissoudre pour « taper [sur] l’islamisme » afin de « protéger nos compatriotes musulmans », selon ses mots. Des paroles incompréhensibles pour les manifestants.
« C’est une attaque aux droits démocratiques les plus fondamentaux, scandent les manifestants. Nous appelons à la solidarité la plus large possible. »


Dans le cortège, Mounir agite un drapeau palestinien. Il parle de la Palestine et s’émeut de ce qu’il voit comme une « injustice » : « On défend la cause d’un peuple sans voix face aux puissances internationales colonisatrices. » Une cause qui avait largement rassemblé l’année dernière et que l’on retrouve dans l’appel à manifester de l’intersyndicale pour ce 1er-Mai. Dans un communiqué, les organisations enjoignaient à la lutte contre l’extrême droite, l’urgence climatique, le recul des droits et la « surenchère guerrière ».
Une volonté d’unité et de convergence des luttes dans laquelle se retrouve Clémence, lyonnaise habituée de ce grand rendez-vous annuel. « Ça permet de se dire qu’on n’est pas toute seule, de marcher avec tous ces gens », sourit-elle. La jeune femme s’étonne cependant du tracé du parcours de cette année, qui longe le quai Claude Bernard avant de tourner en direction de Jean-Macé, au lieu de s’achever, comme habituellement, sur la place Bellecour. « On est très comprimés dans un périmètre restreint », constate-t-elle.


Des affrontements avec les forces de l’ordre
Ce nouveau parcours n’aura en tout cas pas empêché des tensions entre les forces de l’ordre, mobilisées en nombre, et le bloc de tête. À un autre endroit que les années précédentes. Habituellement, les frictions se font sentir au niveau de l’Hôtel-Dieu, ancien hôpital devenu haut-lieu du luxe, à l’entrée de la rue de la Barre. Cette dernière est interdite aux manifestants lyonnais depuis 2020.
Cette année, c’est à un autre croisement qu’ont eu lieu les affrontements. Vers midi, alors que l’avant du cortège, mené par le service d’ordre de la CGT, vient de tourner à l’angle de l’avenue Berthelot et du quai Claude Bernard, des membres du bloc décident de vandaliser une agence immobilière, brisant les vitres et pénétrant à l’intérieur. La police intervient pour tenter de disperser la foule à coup de gaz lacrymogènes, auxquels certains répliquent par des tirs de mortier.


Le cortège est alors divisé : seul subsiste un camion de la CGT en tête et quelques manifestants, séparés du reste de la cohorte bloquée sur les quais. Malgré les appels à reformer un cortège dense et unifié, le syndicat ne parvient pas aussitôt à calmer les tensions. Tout le long de l’avenue Berthelot, les affrontements entre militants et forces de l’ordre continuent, jusqu’à une charge soudaine des policiers. Des coups de tonfa (les matraques utilisées par la police) sont abondamment distribués. Après un énième tir de gaz lacrymogène dans la foule mêlée de manifestants pacifiques et de militants prêts à en découdre, le service d’ordre de la CGT parvient à ramener l’apaisement.
Vers midi et demi, les gaz se sont dissipés et la tête du cortège arrive enfin sur la place Jean-Macé, rejointe par le reste des manifestants. « On y est arrivés, et à peu près en un seul morceau », se réjouit le speaker de la CGT, alors que la foule se rassemble au son de L’Internationale. Arrivés les derniers dans l’ambiance musicale festive qui envahit alors la place, la Jeune Garde termine sa marche sous de nombreux applaudissements. Elle a été accompagnée par des marques de soutien, tout le long du parcours.
En fin de journée, trois personnes ont été interpellées et la préfecture fait état de trois blessés légers chez les policiers. De leur côté, les organisateurs n’ont pas encore communiqué de bilan.


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