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Saint-Etienne : un eldorado pour qui ne veut plus habiter Lyon ?

En quête d’une affaire immobilière plus avantageuse ou d’un cadre de vie différent, de plus en plus de personnes vivant à Lyon, de longue date ou non, auraient envie de quitter la ville pour rejoindre… Saint-Etienne. Une attractivité dopée par l’évolution du marché immobilier de Sainté. Petit tour d’horizon jusque dans la Loire.

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Saint-Etienne : un eldorado pour qui ne veut plus habiter Lyon ?

« Si nous étions restés à Lyon nous n’aurions peut être pas pu acheter une maison », avance Fatma, une infirmière lyonnaise qui a fait le choix d’habiter à Saint-Etienne.

Suite à une opportunité d’embauche de son mari près de Roanne, elle décide avec sa famille de quitter la commune de Grigny, au sud de Lyon. En 2012, ils posent leurs cartons à Saint-Etienne. Un compromis entre Roanne et Lyon, où Fatma travaille dans une clinique en médecine post-urgence.

« En 2014 on a acheté une maison dans le quartier Montplaisir (à l’Est de Saint-Etienne) : ça a été le coup de cœur », raconte Fatma.

La mère de deux enfants se dit satisfaite d’avoir trouvé un logement « à la fois près des grands axes routiers et des transports en commun, mais avec de la verdure ».

Pour 200 000 euros, Fatma et son mari sont devenus propriétaires d’une maison avec trois chambres et 500 m2 de terrain.

« Lyon c’était un peu intouchable. Nous n’avons jamais trouvé un bien qui corresponde à nos critères et à nos moyens », explique cette désormais ancienne habitante de Lyon.

« On nous contacte pour acheter des immeubles entiers à Saint-Etienne »

Confrontés à l’explosion des prix de l’immobilier à Lyon, ses habitants sont de plus en plus nombreux à lorgner du côté de Saint-Etienne. Un pied-de-nez pour la ville connue pour sa rivalité historique avec la capitale des Gaules.

« Pour 150 000 euros, les lyonnais peuvent acheter à Saint-Etienne un appartement de 100 m2. A Lyon, pour le même prix ils ont un 50 m2 » , pointe Pascal Ridoux, directeur des agences immobilières Citya Loire Sud.

A Saint-Etienne, le prix moyen du m2 avoisine les 1200 euros. Pour certains biens, le m2 peut grimper jusqu’à 2000 euros. Un montant encore loin derrière Lyon, qui affiche un prix moyen au mètre carré de 5 385 euros, selon le baromètre du site seloger.com. Mais certains quartiers vont bien au-delà, jusqu’à 10 000 euros récemment pour la Croix-Rousse.

« Les lyonnais qui investissent à Saint-Etienne, ce n’est pas un phénomène nouveau. Mais leur arrivée s’est accentuée à partir de 2019. Désormais, certains investisseurs venus de Lyon nous contactent afin d’acheter des immeubles entiers », explique Pascal Ridoux.

« L’investissement des lyonnais à Saint-Etienne n’est plus une chimère », confirme Me Alain Courtet, membre de la Chambre des notaires de la Loire dans un article du Progrès.

Cet intérêt pour l’immobilier stéphanois a eu pour conséquences la hausse du volume des transactions dans la région, suivie par celle des prix de l’immobilier dès la fin de l’année 2019. En deux ans, le prix moyen à l’achat a augmenté de 20% à Saint-Etienne.

Pascal Ridoux, directeur des agences immobilières Citya Loire Sud détaille cette évolution :

« Au départ, la hausse des prix a touché les petites surfaces, comme les studios en location. Avec le contre-coup de la pandémie, de plus en plus de gens ont voulu acquérir un logement avec un extérieur. Cela a contribué à faire flamber les prix des moyennes et grandes surfaces. »

Les logements avec extérieur plébiscités

Dans le secteur locatif, le prix du m2 carré avoisine les huit euros à Saint-Etienne. Un prix en hausse pour les biens qui présentent « des caractéristiques prisées », ajoute Patrick Ridoux. Particulièrement plébiscités par les lyonnais : les logements avec balcons, terrasse ou jardin.

« Les lyonnais viennent à Saint-Etienne pour le cadre de vie et achètent des maisons, généralement pas très loin de la gare », remarque le directeur d’agences immobilières.

Le marché de la location possède un autre marqueur : l’installation d’étudiants venus de Lyon, à Saint-Etienne. Plusieurs écoles lyonnaises ont ouverts des antennes stéphanoises. A l’image du campus de l’EM Lyon crée en 2014 ou celui de Sciences po Lyon en 2017. La ville de Saint-Etienne compte aujourd’hui 25 000 étudiants. Elle espère en accueillir 40 000 d’ici 2030.

« Les jeunes aiment Saint-Etienne car ils disent que c’est une ville conviviale et à taille humaine ! », se réjouit Jean-Pierre Berger, adjoint à l’urbanisme et au logement de la mairie de Saint-Etienne.

Saint-Etienne, cette ville dont l’image a changé

Saint-Etienne n’a pas toujours connu ce dynamisme. L’ancienne cité industrielle a longtemps été perçue comme une ville sinistrée et désertée. Une image véhiculée jusque dans la presse nationale, comme dans cet article du journal Le Monde dédié à Saint-Etienne. Un « Saint-Etienne bashing » jugé injuste et dénoncé par un collectif de professionnels de l’urbanisme, dans une tribune publiée par Rue89Lyon.

« Si les habitants partaient de Saint-Etienne, c’est qu’ils ne trouvaient pas chez nous ce qu’ils trouvaient ailleurs. Les classes moyennes et supérieures sont parties avec les entreprises, ce qui a crée beaucoup de vacance dans les logements et une certaine paupérisation », reconnait toutefois Jean-Pierre Berger.

Alors que le nombre d’habitants à Saint-Etienne était en berne jusqu’en 2015, l’arrivée de nouveaux arrivants apparait comme une aubaine pour la ville. Entre 2015 et 2021 près de 3 600 habitants se sont installés. Aujourd’hui, Saint-Etienne compte près de 175 000 habitants.

Un chiffre qui conforte la municipalité dirigée par Gaël Perdriau (Les Républicains) dans sa stratégie de « reconquête de la ville ». La mesure phare de ce plan consiste à réhabiliter les logements sociaux et privés afin de les remettre au niveau du marché.

« Notre volonté est d’attirer en centre-ville les seniors stéphanois qui avaient déménagé en périphérie, fixer les classes moyennes et accueillir de nouveaux habitants », détaille Jean-Pierre Berger.

Un nouveau souffle pour la ville, qui semble séduire d’anciennes lyonnaises, comme Fatma :

« Saint-Etienne a beaucoup changé. J’ai connu la ville il y a vingt ans. C’était gris, assez fermé voire glauque. Maintenant il y a le train, plein de commerces et de nombreuses infrastructures pour les jeunes. Je me sens bien dans cette ville et mes enfants aussi. »

« Certaines maisons sont vendues en 24h »

Corrélée à la hausse des prix de l’immobilier, l’arrivée des lyonnais commence à générer quelques crispations.

« Des acheteurs venus de la région lyonnaise arrivent avec un pouvoir d’achat plus élevé. Certains stéphanois se rendent compte que le marché est devenu plus tendu. Ils sont dépités parce que certaines maisons sont vendues en seulement 24 heures », remarque Cédric Chomat, stéphanois d’origine et habitant de la commune de Saint-Just-Saint-Rambert, située à une vingtaine de kilomètres de Saint-Etienne.

Un constat qui n’étonne pas Pascal Ridoux, directeur des agences immobilières Citya Loire Sud :

« Les stéphanois ont longtemps eu l’habitude d’être en position de force face à la concurrence dans le secteur immobilier. C’est fini. Désormais, les vendeurs sont en position de force. Les stéphanois sont forcés d’adapter leur stratégie. »

Toutefois, l’arrivée des lyonnais à Saint-Etienne n’est pas comparable à « un raz-de marée », tempère Jean-Pierre Berger, adjoint à la mairie de la ville. Sur le plan immobilier, selon Pascal Ridoux, Saint-Etienne reste encore une ville dans laquelle l’offre de logements est supérieure à la demande.

« Nous n’en sommes quand même pas encore au stade de la ville de Bordeaux confrontée à l’installation des parisiens et à une flambée des prix de l’immobilier », conclut le directeur d’agences immobilières.


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