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Le végétarisme est-il possible dans les cantines de Lyon ?

Rue89Lyon a reçu le témoignage de Fanny dont la fille, élève dans une école maternelle à Lyon, n’a pas la possibilité de manger en fonction du régime alimentaire familial, le végétarisme, à la cantine.

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Plat végétarien. Un plat qui peut être servi à la cantine à Lyon

Un menu dit « végétarien » existe de longue date dans les écoles de Lyon : il s’agit d’une option non modifiable à choisir en début d’année. La version végétarienne du menu n’est toutefois proposée que deux jours par semaine. Les deux autres jours, ce menu dit « sans viande » contient du poisson -c’est à dire de la protéine animale que la famille de Fanny ne mange pas.

La nouvelle municipalité écologiste avait affiché dans ses promesses de campagne un menu végétarien possible chaque jour dans les écoles. Au-delà du temps mis pour instaurer un système en adéquation avec les annonces, le témoignage de cette lyonnaise évoque la façon dont est encore perçu le végétarisme au sein de l’institution.

Il a été recueilli par la rédaction à la suite d’échanges, et il est à lire ci-après.

« Je suis mère d’une petite fille de trois ans que nous avons fait le choix d’élever dans le cadre d’un régime végétarien, étant moi même devenue végétarienne à l’âge de sept ans en prenant conscience de la souffrance animale et en étant viscéralement touchée. J’ai fait ce choix dans une pleine démarche éthique et écologique alors que mes parents ne l’étaient pas, dans les années 1990 et dans un petit village.

Jamais on ne m’a forcée à avoir de la viande ou du poisson dans mon assiette. Jamais de toute ma scolarité. On a respecté mon choix sans forcément le comprendre. Mon pédiatre me soutenait et m’accompagnait dans ma démarche. J’ai toujours été en très bonne santé, je me suis toujours adaptée sans rien demander à personne.

Ma fille a passé une année en crèche municipale où le personnel s’est tout de suite montré compréhensif et à l’écoute, et ne lui a jamais servi de viande ou poisson sans le moindre stress.

Comme si la rentrée en maternelle n’était pas assez particulière cette année, quelle surprise de découvrir que cela pouvait être encore plus anxiogène. Ma fille est inscrite au « menu sans viande » à la cantine, qui comporte à Lyon du poisson deux jours sur quatre.

En septembre, je remercie innocemment la directrice de l’école d’indiquer au personnel de cantine que nous avons fait ce choix et donc de ne pas lui servir de chair animale. On me répond qu’on ne sait pas si on pourra « répondre à ma demande ».

« Toute ma vie n’a été qu’une adaptation, en silence »

Je découvre assez vite que ce n’est pas du ressort de l’école mais de la municipalité.

En fait, parallèlement à plusieurs semaines de silence et de non-réponse à mes mails, envoyés à Stéphanie Léger (adjointe au nouveau maire de Lyon, en charge de l’Éducation) et Grégory Doucet (le maire de Lyon lui-même, étiqueté EELV, ndlr), je vois que j’ai affaire au service de la Direction de l’Éducation de la Ville de Lyon, où les fonctionnaires en place ne sont pas nécessairement sensibles aux enjeux de la municipalité.

J’ai donc eu la Direction de l’Éducation au téléphone, qui me propose comme unique solution de servir la chair animale et, au mieux, de ne pas forcer ma fille à la manger puis de la jeter. L’opposé radical du combat revendiqué par la municipalité contre le gaspillage alimentaire. Pour moi, aucune différence de traitement n’aurait existé dans une municipalité étiquetée Rassemblement National ou Les Républicains, au hasard.

Je ne demande pas immédiatement l’option végétarienne quotidienne. Elle était d’ailleurs au programme du maire lorsqu’il était candidat. Mais pour quand ? Car j’entends les enjeux logistiques. Mais il me paraît essentiel à l’instant T de respecter les convictions éthiques des gens et tout simplement de ne pas servir de force des aliments quelque peu traumatisants.

Je précise que la directrice de l’école, sous réserve d’un accord de la Ville, donnera le feu vert aux ATSEM (Agents Territoriaux Spécialisés des Écoles Maternelles, ndlr) pour ne pas lui servir de chair animale.

Cela fait quatre mois que je me bats. J’ai envoyé une dizaine de mails à l’adjointe Stéphanie Léger qui sont restés sans réponse. L’Association Végétarienne de France, via son dispositif « végécantines » qui accompagne les municipalités dans la transition végétale, leur a écrit pour en discuter. En ce début d’année 2021, le délégué au maire de Lyon, en charge de « l’alimentation locale et de la sécurité alimentaire », m’a contactée, déclarant « réfléchir à une solution ».

Toute ma vie n’a été qu’une adaptation, en silence, à un mode de consommation dans lequel je ne me reconnais pas et que je ne comprends pas, or, je n’impose rien à personne ».

« La même violence que pour les enfants de certaines religions »

En 2020, quel message est envoyé aux enfants ne pouvant pas être accueillis tels qu’ils sont à la cantine ?

C’est pour nous d’une grande violence, tout comme ça le serait pour un enfant de se voir servir par obligation un animal qu’il ne mange pas pour des raisons religieuses.

La surconsommation de viande est absolument vertigineuse, elle tue la planète, le végétarisme n’est pas une sorte de croyance « philosophique » comme c’est souvent présenté, mais un véritable choix de vie engagé et réfléchi, humain, pour la planète et pour l’avenir de nos enfants.

Je refuse de soumettre ma fille à une norme qui est mauvaise en tout point : écologique, éthique, voire pour notre santé. Et c’est actuellement à une enfant de 3 ans de gérer ce stress au quotidien car elle n’est pas accompagnée avec bienveillance.

Une municipalité écologiste en 2020 devrait être capable d’entendre cela et d’y répondre, me semble-t-il.

D’autres pays et villes françaises l’ont fait bien avant, d’autant que la surconsommation de protéines animales dans les cantines a été dénoncée dans de nombreux rapports.

« De nombreux parents végétariens abdiquent tout simplement »

Nous avons monté une délégation lyonnaise de l’AVF (association végétarienne de France), afin de faire avancer les choses à échelle locale. Toute personne intéressée peut rejoindre ce groupe en contactant avf69@vegetarisme.fr

Cette situation est souvent passée sous silence alors qu’elle laisse beaucoup de gens impuissants et en souffrance. J’ai constaté que de nombreux parents végétariens ou vegans abandonnaient leur volonté pour leur enfant face à toutes ces complications. Ils abdiquent tout simplement.

Pourtant, le tribunal administratif de Melun a déjà indiqué (dans une décision rendue en 2017, ndlr) que si une municipalité n’est pas prête à fournir un repas végétarien quotidien légalement, elle doit respecter les convictions profondes et fournir une assiette conforme en retirant ce qui ne veut pas être consommé pour raisons éthiques.

Mon souhait est d’être entendue car c’est très difficile et je sais que je ne suis pas seule. Je suis dans l’évitement. Ma vie professionnelle en souffre puisque je n’ai pas de solution de garde pendant la pause méridienne pour ma fille de ces deux jours par semaine avec poisson. Et ma santé aussi, cette situation étant source de stress important et de troubles du sommeil.

Je ne demande pas la lune, juste du respect.


#Végétarisme

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Extrait du texte d'Alexis Jenni, Les patates farcies
Margaux Létang, lauréate du concours "Lyon, des nouvelles de 2050". ©Rue89Lyon

Photo : Rue89Lyon

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