Actualités, enquêtes à Lyon et dans la région

Il y a 40 ans, le début d’une décennie magique : 10 bombes punk made in Lyon (1978-1988)

Alors que l’on fête tout juste les 40 ans du premier album de Starshooter -incontestablement un monument du punk français- il est bon de rappeler que l’époque punk, a produit en France et particulièrement en province, une scène extrêmement vivifiante.

Vidéo

Cet article est en accès libre. Pour soutenir Rue89Lyon, abonnez-vous.

Starshooter : Starshooter est sort en 1978, édité par Pathé/EMI

A Lyon, malgré l’absence de structures, la région a quand même engendré quelques perles punk sur cette première décennie. Voici 10 disques produits à Lyon redécouverts dans le fonds « Mémoire des Musiques Lyonnaises ».

Article à lire en écoutant notre playlist « Punk à Lyon 1978-1988 »

1. Starshooter : Get baque (1978)

Repérés en 1977 en première partie d’Higelin par Philippe Constantin et Michel Zacha, Starshooter devient rapidement un phénomène du rock français. Constantin les signe sur Pathé Marconi / EMI et sort rapidement leur premier 45 tours « Pin-up blonde » qui passe relativement inaperçu. Ce deuxième essai « Get baque » , reprise du « Get back » des Beatles est un pamphlet assassin contre les petits gars de Liverpool. Il est devenu le titre le plus controversé du groupe.

Deuxième album du groupe Starshooter, "Get-baque" édité par Pathé/EMI et sorti en 1978.

« On veut plus des Beatles et d’leur musique de merde
bonne à faire danser les minets
les radios nous bassinent pour assurer leurs salaires
j’en ai rien à foutre qu’ils crèvent !
get baque, get baque…. »

Les paroles témoignent du fossé qui s’est créé entre le vieux rock et la nouvelle génération issue du punk anglo-saxon. Problème :  EMI est aussi le label qui distribue les Beatles en France. Le 45 tours est retiré du marché au bout d’une semaine et ne sera pas retenu sur l’album édité le mois suivant. Génial coup de pub ou provocation ? « Get baque » restera un titre assumé par la bande à Kent et sera un des titres forts du groupe sur scène.

2. Starshooter : Starshooter (1978)

Ce premier album éponyme de Starshooter est à classer dans le top 10 des albums punk français. On y retrouve toutes les qualités du groupe : des mélodies percutantes et des riffs accrocheurs mais surtout des paroles pertinentes toujours empreintes d’humour et de dérision qui seront leur marque de fabrique. L’album est sous-titré  « Un groupe efficace et dynamique dans une société saine », preuve qu’ils prennent en même temps le contre-pied de l’ancien rock mais aussi de la nouvelle génération.

Même si les titres « Quelle Crise, Baby », « Betsy Party » ou « Inoxydable » sont devenus des titres emblématiques du punk français de la première génération, le reste de l’album est tout aussi réjouissant.

Starshooter : Starshooter est sort en 1978, édité par Pathé/EMI

Il reçoit d’ailleurs un très bon accueil de la presse spécialisée (4 pages dans rock’n folk) et on voit poindre l’une des revendications primordiales de la scène rock en province : la reconnaissance des critiques rock parisiens. Les concerts s’enchaînent et Starshooter défend sublimement son premier album sur scène.

Premier album réussi et naissance d’un grand groupe de rock français ? Pourtant Starshooter jettera l’éponge après 3 autres albums qui malheureusement n’ont pas trouvé suffisamment leur public.

3. Electric Callas : Kill me two times (1978)

Plus connu pour son sublime titre new-wave « So Chic » (1979), les premiers titres d’Electric Callas étaient très influencés par le punk. « Kill me two times » est la première trace discographique de cette formation à géométrie variable dirigée par le chanteur Jangil Callas. On retrouve cette composition dès 1978 dans la compilation « Skydog commando » du label Skydog de Marc Zermati dont voici les notes de pochette :

« Les Stooges de Lyon et leur apocalypse portative rendent hommage à James Bond ! On ne meurt que deux fois nous expliquent les Callas, avec toute l’attaque et tout le punch qui soutinrent, voici quelques siècles, la révolte des canuts. »

Kill me two times, d'Electric Callas (1978)

En 2016 le label londonien Soul Jazz, référence absolue en rééditions pointues, a choisi aussi ce titre parmi 18 autres pour illustrer la scène punk française dans la compilation « Les punks : the french connection« .

D’autres titres épars de la première période d’Electric Callas méritent une redécouverte que ce soit les titres « Sex, 77 » ou la reprise des Stooges «  I wanna be your dog« .

4. Rotters : Synthemar (1978)

A peine plus d’un an d’existence pour les Rotters (Pourris, en français) pour qui l’année 1978 a engendré plus de désillusions que d’espoirs. Bien qu’originaires de Villefranche, c’est à Lyon qu’ils ont fait leurs armes. Ils auront connus des espoirs en étant programmés au mythique club lyonnais Rock’n roll Mops (mai 1978) mais aussi sur les scènes parisiennes (Golf Drouot, Rose Bonbon). L’enregistrement de maquettes avec des majors ne s’étant pas concrétisé, seul un 45 tours auto-produit est aujourd’hui introuvable témoignait alors de l’énergie et l’efficacité du combo caladois. Il faut saluer l’initiative du label parisien Caméleon qui a réédité, il y a deux ans, une version luxe de ce disque avec deux inédits.

Synthemar, des Rotters, sorti en 1978.

5. Dialyx / Safety : Pochtron – fidèle au poste (live) (1979)

Encore une rareté ! Ce split single entre deux groupes lyonnais, Dialyx et Safety sorti à l’été 1979 est aussi introuvable. Ce 45 tours « flexi » (disque flexible bon marché) est sorti à l’époque sur le label Fluo production / CRS records, créé pour l’occasion, et qui avait pour ambition de sortir un 45 tours par mois de groupes du cru. Il semble qu’ils se soient arrêtés là…

L'album Pochtron-fidèle au poste des lyonnais Dialyx et Safety, sorti en 1979

Safety a déjà une petite réputation sur la scène lyonnaise. A peine bacheliers leur jeunesse et leur énergie les avantagent. On peut les voir en mai 1978 au Rock’n’roll Mops en première partie de Starshooter avec qui ils sympathisent. « Fidèle au poste », enregistrement live à l’arrache, leur permet tout de même d’être affublés de petits frères de Starshooter. Seul titre gravé à l’époque, là encore c’est le beau travail d’archiviste de la part du label Caméléon qui nous permet de découvrir 4 titres inédits, enregistrés à l’ENTPE (Vaulx-en-Velin).

La face B propose le titre « pochtron » de Dialyx. On connaît peu de choses sur ce groupe, si ce n’est qu’ils s’appelaient à l’origine Diamand mais un contentieux avec le groupe parisien Diamant les oblige à changer de nom. Le titre pochtron ici présent s’oriente vers un rock nerveux façon Bijou. Même si les paroles semblent plus coller aux activités des Kids de 79, musicalement le groupe reste très influencé par le 60’s garage.

La Bibliothèque de Lyon recherche activement un exemplaire de ce 45 tours (à bon entendeur).

6. Pacte noir : Vacuum (1983)

Formé en 1977 autour des frères Daniel et Denis Mariotte, le Pacte noir propose un univers cabaret punk où l’esthétique visuel importe autant que la musique.

Deux titres présents sur l’obscure compilation « Prinzip Products – Lyon Compilation » (1983) présentant 6 groupes lyonnais de l’époque, constituait avant internet le seul témoignage musical de cette formation baroque et barrée.

Vacuum, du groupe Pacte noir, est sorti en 1983.

7. Sexe à Pile : Pas vraiment méchant (1984)

Formé en 1977 par Marco Tedesco (chant) ; Thierry Rabadan (batterie) ; Jen Paul Lenté (guitariste) et Claude Moissonier (basse), le groupe lyonnais Sexe à Pile tire son nom de la contraction de Sex Pistols et de P.I.L.

C’est le label parisien Born Bad, dont la réputation n’est plus à faire, qui a déterré ce morceau en 2013 sur la compilation « Paink : french punk anthems 1977-1982 » . Il semblerait que le 45 tours d’origine (Pas vraiment méchant : Magic show) date plutôt de 1984.

L'album Pas vraiment méchant du groupe Sexe à Pile est sorti en 1984.

8. Haine brigade : Sauvages (1987)

Des gamins de banlieue (Bron) parachutés dans un lycée de bourges au centre de Lyon, la découverte des Sex Pistols et des Clash, il n’en faudra pas plus pour que ces rebelles de 15 ans décident de se couper les cheveux, de fabriquer des tee-shirts maison et de monter un groupe. On est en 1981, Haine Brigade est né : Laurent Zine et Alexa au chant, Gilles Garragos (guitare). Fort d’une union qui fut d’abord politique, pendant 6 ans ils écument les concerts de soutien (anarchistes, squatteurs, antifascistes…). Quelques titres sortent sur des compilations K7 et ils commencent à se faire un nom dans le réseau punk. L’esprit DIY (do it yourself) est à son apogée. Ils rédigent d’abord un fanzine, Kanaï, organisent des concerts puis montent un label Bébé Rose sur lequel outre leur propre production on trouve un live du groupe canadien D.O.A. enregistré à Lyon. L’album « Sauvages » sort en 1987 et contient 12 titres proches de l’univers de leurs homologues parisiens les Bérurier noir… Une bonne production en moins.

L'album Sauvages du groupe Haine brigade est sorti en 1987.

Ils enregistrent dans la foulée un split single avec Bérurier Noir qui ne sortira qu’un an plus tard. Disque de soutien à la revue « Noir Et Rouge », le 45 tours contient deux inédits.

9. 69 K-rats : Légion connerie (1986)

Sans crier gare et sans aucun concert auparavant le trio lyonnais 69 K-rats sort ce maxi 45 tours à l’automne 1986 intitulé « Légion connerie« . Cette année-là le punk français est franchement au creux de la vague mais les Lyonnais renouent avec l’esprit de 1977 à travers des textes nihilistes voire pessimistes. Musicalement les introductions atmosphériques se rapprochent des productions cold-wave.

L'album Légion connerie du groupe 69 K-rats est sorti en 1986.

10. Pariapunk : Pariapunk (1988)

Issu du mouvement anarcho-punk, le groupe est formé en 1986 par le chanteur Martial Delattre (ex-Les Despotes du couvent), Corinne Monnet (basse, chant), Frédéric Guyard (guitare) et le batteur Norbert Grimme (ex-Social Negative). Les textes sont politiques allant de l’antifascisme au féminisme ou au végétalisme, 30 ans avant que cela ne devienne à la mode.

« Ce disque n’est pas un produit de consommation, mais un moyen d’expression et de communication ».

Cette phrase qui introduit chaque production du groupe Pariapunk illustre la frange la plus radicale du punk lyonnais. Ces titres exécutés dans l’urgence ne dépassant pas les 3 minutes, préfigurant la scène hard-core lyonnaise, font d’abord l’objet d’un 45 tours 6 titres sorti en 1988 après leur dissolution.

L'album éponyme des Pariapunk est sorti en 1988.

Une dizaine d’année plus tard l’édition en cd d’un album rétrospectif propose les 13 titres du groupe agrémentées d’une biographie et des textes des chansons.

Un article publié à l’origine sur L’influx le 4 juin 2018.

Pour aller plus loin :

Rock français (1977-83) chronique d’un rendez-vous manqué

Nyark Nyark fragments de scènes punk et rock alternatif en France (1976-1989)


#Rebelles du terroir

Activez les notifications pour être alerté des nouveaux articles publiés en lien avec ce sujet.

Autres mots-clés :

#Bibliothèque municipale de Lyon#Culture#grouppes lyonnais#Musique#Punk#Rebelles du terroir
Partager
Plus d'options