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Du Delaware à San Antonio, Bruno Bonnell et Najat Vallaud-Belkacem explosent les frontières de Villeurbanne

Sur la carte de France des circonscriptions les plus disputées, on plante un drapeau rouge sur la 6e circo, l’une des rares qui épouse les exactes frontières d’une ville, Villeurbanne. S’y présentent pour le PS l’ancienne ministre de l’Education, Najat Vallaud-Belkacem, opposée au chef d’entreprise télégénique et En Marche Bruno Bonnell. Match de titans avec relais médiatique national et dossiers chauds.

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Bruno Bonnell à l'Anticafé le mardi 16 mai 2017 lors de la présentation des candidats de la République En Marche ! aux élections législatives 2017. ©HH/Rue89Lyon

Fort d’un sondage émis par la presse locale qui le plaçait il y a quelques semaines en tête au premier et au second tour des élections législatives (ces 11 et 18 juin), devant Najat Vallaud-Belkacem et sur une terre pourtant acquise au PS, Bruno Bonnell pouvait commencer à se frotter les mains. Et à se projeter dans l’Assemblée nationale, loin de son bus spécialement affrété pour la campagne et floqué la République en Marche.

Cette dernière semaine de campagne lui donne pourtant du fil à retordre.

Des documents concernant une partie de son système d’entreprises ont été mis sous le nez de quelques journalistes lyonnais et parisiens, visant à montrer une partie des activités de Bruno Bonnell et la création de deux sociétés au Delaware, état américain qui ne taxe pas les entreprises. Un choix fait d’après les conseils de son avocat, plaide l’hyperactif entrepreneur, qui a repris le rôle de Donald Trump dans l’adaptation française du show de téléréalité The Apprentice.

Ces créations de société pourraient traduire a minima un manque de patriotisme dans le choix des implantations (pour une activité de création de communautés de jeux en ligne). Mais d’elles émane une odeur sulfureuse d’optimisation fiscale dans un contexte de moralisation de la vie politique. Pour autant, aucun système d’évasion fiscale n’a été mis au jour.

Un autre événement de la vie professionnelle (mouvementée) de Bruno Bonnell a dû être justifié : une condamnation de l’autorité des marchés financiers (téléchargeable ici) datant de 2008, infligée à Infogrames, son ancienne société. Soit une amende de 40 000 euros, relativement faible. En cause, non pas une tentative de manipulation des cours de la bourse (ce que l’AMF a un temps soupçonné), mais un défaut d’information aux actionnaires, dans le cadre d’une tentative très malhabile des dirigeants de sauver les meubles, lors d’une période compliquée pour l’entreprise.

L’un des autres documents est un jugement de la cour d’appel de Lyon datant de 2011, exhumé par le candidat de la France insoumise, et tiré du procès qui a opposé Bruno Bonnell à son ex-femme dans le cadre de leur divorce. On y trouve une accusation de ne pas vouloir payer de pension alimentaire et, pour cela, d’avoir organisé son endettement afin de ne pas non plus payer l’impôt sur la fortune. Elle est avancée par l’avocat de son ex-épouse.

Mais Bruno Bonnell réfute, lui qui a reçu 2,2 millions d’euros d’indemnités de licenciement lorsqu’il a quitté le Groupe Infogrames.

Bruno Bonnell à l'Anticafé le mardi 16 mai 2017 lors de la présentation des candidats de la République En Marche ! aux élections législatives 2017. ©HH/Rue89Lyon
Bruno Bonnell à l’Anticafé le mardi 16 mai 2017 lors de la présentation des candidats de la République En Marche ! aux élections législatives 2017. ©HH/Rue89Lyon

Au regard des scuds envoyés, le candidat a vacillé et s’est même mis à dire des choses telles que « je vais vous dire la vérité, rien que la vérité » (à Libération).

Dans le Progrès que le candidat de la République en marche donne quelques explications. Pour la plupart, elles se résument au fait qu’il n’a pas souhaité continuer les procédures (devant l’AMF ou la cour d’appel), même s’il possédait les arguments à opposer aux décisions défavorables.

6 heures du mat’, à San Antonio : « Allô ? »

En face, Najat Vallaud-Belkacem a mis un peu de temps à se saisir de ces dossiers qualifiés de « boules puantes » par le principal intéressé. La candidate a fini mercredi par demander pudiquement à Bruno Bonnell de « faire toute la lumière » sur les zones d’ombre planant sur ses méthodes d’entrepreneur. Puis c’est son parti, le PS, qui a exhorté le mouvement En Marche ! à lui retirer l’investiture.

L’ex-ministre de l’Éducation et ex-collègue d’Emmanuel Macron au gouvernement, a voulu apparaître réglo, elle qui a vu arriver sur la circo une candidature de la République en Marche alors qu’elle aurait pu espérer le même traitement de faveur que d’autres anciens ministres socialistes, comme Manuel Valls.

Elle a donc mené une campagne de terrain, affaiblie par les sombres prévisions d’un sondage et l’annonce d’une vague macroniste difficile à enrayer, même pour elle, à Villeurbanne, terrain qu’elle ratisse depuis au moins deux ans.

Dix jours après le sondage, la candidate socialiste, qui montre l’ambition de restructurer son parti, a dû essuyer un autre coup dur -celui qui nous renvoie aux Etats-Unis.

Le mercredi 31 mai, toute l’équipe de Najat Vallaud-Belkacem se réjouit d’annoncer le soutien officiel et pesant son poids de Tony Parker, propriétaire depuis 2014 du club de l’Asvel à Villeurbanne et meneur des Spurs, club de NBA basé à San Antonio.

Tout s’écroule dès le lendemain. Adieu veau, vache, panier à trois points. Le joueur dément avoir apporté un quelconque soutien. L’équipe de Najat Vallaud-Belkacem avance des échanges de SMS avec l’avocat de « TP » et soupçonne des pressions faites au joueur.

« TP » explique que son soutien était personnel et qu’il n’a jamais fait de politique jusque là mais que, ayant reçu le coup de fil très (trop) tôt à San Antonio, il y aurait eu comme une incompréhension matinale. Avant l’heure du café.

Ce dimanche aura lieu le premier tour des législatives. La candidate prévoit de rester chez elle au moins jusque 23 heures, et de ne prendre une parole publique que tard le soir, à son QG de Villeurbanne.

Les candidats aux législatives 2017 sur la 6e circonscription :

Mohamed Barchi (Mouvement 100 %)
Bruno Bonnel (En Marche!)
André Dubois (Debout la France)
Mathieu Gouttefangeas (DVD et Parti Chrétien Démocrate)
Emmanuelle Haziza (Les Républicains)
Claire Lainez (Lutte Ouvrière)
Laurent Legendre (France Insoumise)
Najat Vallaud-Belkacem (Parti Socialiste)
Hervé Morel (DVD)
Mathieu Soares (Parti Communiste Français)
Béatrice Vessiller (Europe Écologie Les Verts)
Stéphane Poncet (Front National)

 

 


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