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Antoine, autoproclamé « social-libéral », votera Emmanuel Macron

Ingénieur de formation, Antoine est cadre dirigeant dans l’industrie de l’énergie. Il a toujours voté « à gauche ou apparenté ».

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Antoine, autoproclamé « social-libéral », votera Emmanuel Macron

Sympathisant trotskiste dans sa jeunesse, il se définit aujourd’hui, à 53 ans, comme un « social-libéral » au sens où l’entend le chercheur Luc Rouban, c’est-à-dire votant à gauche tout en souhaitant une politique économique libérale. Une synthèse qu’il juge pleinement incarnée par Emmanuel Macron.

Fils d’un médecin généraliste, gaulliste, et d’une femme au foyer ayant exercé comme assistante sociale et votant plutôt socialiste, Antoine a toujours voté à gauche ou apparenté depuis les municipales de 1983.

Benjamin d’une fratrie de sept frères et sœurs, il affirme avoir grandi dans un climat de grande ouverture intellectuelle et politique. Après avoir longtemps vécu à Paris, ce père de trois enfants a emménagé à Vienne (Isère) il y a une quinzaine d’années.

Le quinquagénaire aux tempes grisonnantes et au regard vif nous confie avoir côtoyé les milieux trotskistes quand il était étudiant :

« à l’époque, j’étais très cérébral. Pour un intellectuel, c’est très séduisant les structures, mais j’ai vite senti que ça sentait un peu le renfermé quand même. »

« Le bilan de Hollande n’est pas aussi nul qu’on se plaît à le dire. »

Il a voté Hollande en 2012, « par anti-sarkozysme ». A la différence d’une large part de l’électorat PS, il ne s’est pas senti trahi par le virage libéral pris par le gouvernement de Manuel Valls.

D’après lui, le Hollande du début était « un peu immobile, coincé dans des postures de gauche type Guy Mollet, très archaïsant, très marxisant. »

Il affirme ne pas se reconnaître dans certaines valeurs de la gauche : se méfier a priori de l’entreprise, par exemple, lui semble dépassé.

Pour résorber le chômage et redynamiser l’économie ultra-tertiaire qu’est celle de la France, la politique de l’offre lui semble être la seule solution :

« Le marché n’est pas social. Le marché, c’est simplement une puissance de force dont on n’a pas trouvé beaucoup d’équivalent pour produire de la richesse. »

Le marché a en effet été clément avec lui. Il a évolué dans son entreprise et triplé son salaire depuis qu’il y a été embauché en 1989. Aujourd’hui, il gagne environ six fois le SMIC, mais paye scrupuleusement ses impôts. Il concède :

« Les inégalités, le déséquilibre des pouvoirs dans un monde capitaliste, la redistribution… Le marché ne le fait pas tout seul. »

En ce sens, il pense que le bilan de Hollande n’est pas « aussi nul qu’on se plaît à le dire ». Il salue des réformes fiscales « assez courageuses ». Il souligne que le taux d’imposition global est supérieur à 50%, l’une des parts les plus élevées du monde :

« c’est le même niveau qu’en Suède, mais nous ne constatons pas le même niveau de redistribution et d’égalité. »

« Les politiques ne peuvent pas assumer les questions radicales »

Il reconnaît tout de même que notre système social a permis d’amortir la crise car les inégalités ont cru beaucoup moins vite qu’ailleurs. Mais il questionne :

« Est-ce que le service rendu est à la hauteur du prix qu’on paye ? Est-ce qu’on peut-on le revoir ? L’amender ? C’est fait en catimini par le gouvernement alors qu’on devrait pouvoir se questionner : pourquoi autant de fonctionnaires à Bercy ? Pourquoi, dans l’enseignement, la solution, c’est toujours plus de personnel ? »

Selon lui, la gauche est prise dans un « piège idéologique » :

« les politiques ne peuvent pas assumer un certain nombre de questions radicales, qui sont pourtant dans l’intérêt populaire. »

Il regrette qu’un certain nombre de réformes aient été engagées sur le tard, « sans forcément les expliquer, ni les assumer ». Ainsi, même s’il soutenait la loi travail, il regrette son passage en force.

A ses yeux, Emmanuel Macron, qui n’a jamais été encarté, n’a pas de « vaches sacrées » et « pourra se permettre de poser des questions un peu tabous qu’on n’ose pas trop se poser à gauche. »

Quant à son passage chez Rothschild, il le voit « plus comme un atout que comme un handicap » :

« D’une certaine manière, c’est mieux que d’avoir été uniquement haut fonctionnaire », dit-il.

Pour lui, Macron a une vision du « monde économique réel. »

« Macron est moins intégriste et laïcard et idéologue que Valls »

Finalement, si Macron obtient ses faveurs, c’est parce qu’il est « libéral, au sens anglo-saxon du terme ». C’est-à-dire que son libéralisme n’est pas seulement économique mais aussi éthique, culturel et social. Il le trouve ouvert, philosophiquement et politiquement.

Plutôt que le virage libéral pris pendant le mandat de Hollande, ce sont les questions sécuritaires, le débat sur la déchéance de nationalité ou la laïcité excluante qu’il déplore.

Macron lui apparaît « beaucoup moins intégriste, laïcard et idéologue » que Manuel Valls.

C’est d’ailleurs dans le souci de défendre une société ouverte, la liberté et l’égalité reconnue à tous qu’il a participé aux primaires de la droite et du centre :

« ce n’était pas lié à mon vote positif mais pour sortir Sarkozy ». Au deuxième tour, il réitère, « parce que je trouvais que le programme et les discours de Fillon étaient assez réactionnaires et sentaient un peu le moisi, la vieille France. »

Antoine admet enfin qu’il est pour l’instant plus séduit par le personnage que par son programme, qui souffre encore de quelques angles morts. Sur la question écologique par exemple, il concède qu’il ne voit pas bien comment Emmanuel Macron conciliera des objectifs environnementaux contraignants avec « cette vision libérale très entrepreneuriale ».

Selon le chercheur Luc Rouban, cet électorat « social-libéral » dont fait partie Antoine ne représenteraient que 6% de l’électorat français. Et le politiste de conclure :

« Rien ne permet donc d’affirmer qu’il existerait un espace de recomposition de la vie politique française pouvant réunir les réformistes de droite et de gauche. »

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