Actualités, enquêtes à Lyon et dans la région

Aidez-nous à réunir 300 nouveaux abonné·es avant le 20 mars 2024 !

Soutenez un journalisme de terrain qui se fait avec vous. Aidez-nous à réunir 300 nouveaux abonné⋅es avant le 20 mars 2024.

20/03/2024 date de fin
1 046 abonné⋅es sur 1 300

Ils ont voté pour lui, ils manifestent aujourd’hui contre Hollande

Bonne nouvelle pour le gouvernement, les manifs contre la réforme des retraites ont faiblement mobilisé à Lyon comme ailleurs. Mauvaise nouvelle, nombreux étaient les manifestants à avoir voté pour Hollande dès le premier tour. Rue89Lyon en a rencontré une brochette.

Cet article est en accès libre. Pour soutenir Rue89Lyon, abonnez-vous.


Par Lucile Jeanniard et Laurent Burlet

 

Ce mardi, ce n’était pas l’affluence des grands jours dans les rues de Lyon. Ils étaient 4 000 manifestants selon la police et 8 500 selon les organisateurs (CGT, FSU, FO et Solidaires) à marcher de la Manufacture des tabacs jusqu’à la place Bellecour.
Ce nombre de participants est à rapprocher de la précédente « grosse » manif, le 5 mars, contre une réforme menée par le gouvernement, à savoir l’Accord National Interprofessionnel (ANI) sur la sécurisation de l’emploi, qui avait rassemblé 7 000 personnes selon les syndicats.

Le fait nouveau de cette manif « pour les salaires, l’emploi et les retraites », outre la participation de FO, semble être la présence d’un grand nombre de déçus de François Hollande. Ceux qui ont voté socialiste aux deux tours de l’élection présidentielle. Nous les avons rencontrés, sans grandes difficultés. Morceaux choisis.

 

Nathalie : « Hollande avait promis que l’âge de la retraite ne bougerait pas »

Nathalie-2-Manif-Retraite-sept13

À 47 ans, c’est rare que Nathalie se rende à une manifestation. Et pourtant cette fois, la factrice a décidé de se mobiliser.

« Là je me fais du souci », lâche-t-elle. « Dans les entreprises, à 50 ans, on est déjà trop vieux pour travailler, et pourtant le gouvernement rallonge la durée de cotisation… Il y a quand même un paradoxe. »

Nathalie regrette les promesses non tenues de François Hollande.

« J’ai voté pour lui. Il avait promis que l’âge de la retraite ne bougerait pas. Et pourtant aujourd’hui, je vais devoir travailler six mois de plus avec cette nouvelle réforme. Et ce n’est pas fini, d’ici que j’arrive à la retraite, ça peut encore changer ! »

Et d’ajouter, inquiète : « Je suis factrice, donc c’est assez physique. Plus j’avance en âge, plus les cinq étages à monter pour faire signer le recommandé sont difficiles à monter. » Il y aura bien ce compte pénibilité que veut créer le gouvernement, « mais sur quels critères vont-ils se baser pour déterminer si un travail est pénible ou non ? », s’interroge Nathalie.

 

David : « La déception est totale »

David-Manif-Retraite-Lyon

David Kilic est prof de dessin industriel dans un lycée professionnel d’Oyonnax, dans l’Ain. Il a 37 élèves par classe et n’a quasiment plus la possibilité de dédoubler ses effectifs depuis la réforme de la filière professionnelle sous Sarkozy. Ses conditions de travail se sont donc dégradées et son salaire n’a pas été revalorisé.

« La promesse de François Hollande d’embaucher 60 000 profs en cinq ans a fait naître beaucoup d’espoir. Tout comme la promesse de revenir sur la réforme de la filière professionnelle. Mais c’est la deuxième rentrée de Peillon et notre déception est totale sur les recrutements, les rémunérations ou la formation initiale des profs ».

Il a toujours voté à gauche, « pour des partis de gouvernement ». Mais pour la première fois, il en viendrait presque à regretter de n’avoir pas voté Mélenchon.

« On a beaucoup souffert des années Sarkozy mais, au moins, à titre personnel, il y avait aussi la défiscalisation des heures supp’ et des intérêts d’emprunt. Je savais qu’en votant Hollande, on allait perdre tout ça. J’ai fait ce choix pour une meilleure répartition des richesses ».

Ce syndicaliste FO de 37 ans, responsable pour l’académie de Lyon du SENETAA a toujours voté socialiste. Il a « conscience » qu’après les élections, il y a la « real politik ». Mais là, il n’en peut plus :

« Je n’arrive plus à être convaincu par le discours sur la crise et l’absence de marges de manoeuvre. Cela fait des dizaines d’années qu’on nous le sort ».

 

Franck : « La croissance, c’est un mythe »

Franck-Manif-Retraite-Lyon-sept13

Franck, quant à lui, est venu manifester avec un collègue. Ingénieur dans le privé, il avoue :

« Nous ne sommes pas censés être là, nous sommes censés travailler. Nous rattraperons nos heures par la suite. »

Pour lui, François Hollande est clairement « en déphasage » avec ses promesses de campagne :

« Depuis qu’il a été élu, il n’a rien fait véritablement de gauche. Quand Sarkozy a repoussé l’âge de départ à la retraite, le PS criait au scandale. Et maintenant ils ajoutent 1 an et demi de durée de cotisation. »

L’ingénieur de 41 ans rappelle l’accord sur la sécurisation de l’emploi « passé en douce au moment de la réforme sur le mariage homo » :

« Depuis cet accord, les employeurs peuvent par exemple baisser les salaires ou le temps de travail sans demander l’avis du salarié. Et ils peuvent même licencier plus facilement. »

Franck est catégorique : si François Hollande se représente en 2017, il ne votera pas pour lui cette fois-ci.

« Mais je ne pense pas qu’il se représentera. À moins que la croissance reparte. Mais ça, c’est un mythe. »

 

Monique : « Il fallait se débarrasser de Sarkozy »

Monique-Manif-Retraite-Lyon-sept13

« Je savais en votant Hollande qu’il ferait une politique de merde », s’emporte Monique, une secrétaire à la retraite depuis 5 ans. À 66 ans, elle cultive un certain franc-parler et assure avoir voté François Hollande en 2012 « pour éviter le coup de 2002 avec Chirac contre Le Pen » :

« Il fallait se débarrasser de Sarkozy, et je savais que beaucoup de mes amis n’allaient pas voter pour Hollande. Alors j’ai choisi le PS. »

Mais elle n’en reste pas moins sceptique face à la politique que mène l’actuel président de la République. Sur fond d’ « antisocial », une chanson de Trust, elle le dit sans détour.

« Sarkozy nous baisait à sec et lui nous met de la vaseline. »

« Et dans six mois, ils vont recommencer », assure Monique, qui a été syndiquée à la CGT pendant toute sa carrière.

« Ce qu’ils n’auront pas pu faire passer cette fois-ci dans leur réforme, ils le retenteront la prochaine fois. »

 

>Photos : Lucile Jeanniard et Laurent Burlet

Et si le prochain article que vous lisiez existait grâce à vous ?

Depuis 12 ans, à Rue89Lyon nous portons un journalisme de terrain qui se fait au plus proche de vous, de vos préoccupations et de votre vie. Aujourd’hui nous voulons faire plus. À l’heure de la défiance grandissante des citoyen·nes envers les médias, on veut vous impliquer dans la fabrique de l’information.

Nos enquêtes, ce sont vos histoires, vos combats et vos luttes. Mais aujourd’hui nous voulons vous donner encore plus de place dans la fabrique de l’info.

Engagez vous avec nous. Venez contribuer à faire le Rue89Lyon de demain.


#Manifestation

Activez les notifications pour être alerté des nouveaux articles publiés en lien avec ce sujet.

Voir tous les articles

Autres mots-clés :

Partager
Plus d'options