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Autoréduction : relaxe générale pour des vols à Leader Price

En novembre 2007, pendant le mouvement contre l’autonomie des universités (loi LRU), le campus de Lyon 2, à Bron, est occupée. Une cinquantaine d’étudiants décide de mener une action au Leader Price d’à côté. Ils en repartent avec plusieurs caddies, sans payer. Ce lundi 26 mars, quatre ans et demi après les faits, cinq personnes poursuivies pour « vols en réunion avec violence » ont été relaxées, fautes d’éléments, avec les « excuses » du président du tribunal.

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Pour la première fois en France, une action d’autoréduction faisait l’objet de poursuites judiciaires. Cette pratique militante « anticapitaliste », issue des mouvements autonomes italiens des années 70, a surtout été popularisée en France par les mouvements de chômeurs. Cela consiste notamment à pénétrer dans un supermarché et à en repartir sans payer, après avoir bloqué les caisses, le temps d’obtenir gain de cause.

Généralement, les directions de magasins préfèrent laisser passer quelques chariots de militants politiques plutôt que de perdre des clients désertant le supermarché momentanément occupé.
Ce fut le cas dans des Monoprix à Paris ou à Grenoble  en 2008 et 2009.

Le directeur du Leader Price s’oppose

A Lyon, le 28 novembre 2007, il en a été autrement. Le directeur du magasin Leader Price, aidé d’un vigile, a tenté de s’opposer à la cinquantaine d’étudiants qui repartaient avec au moins cinq caddies. Ils les ont ainsi suivis jusqu’à l’amphithéâtre que les étudiants avaient occupé, prenant quelques coups, selon leurs dires, au passage.

A grand renfort de CRS, le campus a été évacué dans la soirée. Présent sur les lieux lors de cette évacuation, nous avons pu constater, sur une passerelle, que le directeur du Leader Price tentait d’identifier parmi les 77 étudiants (ils ont tous faits l’objets d’un contrôle d’identité) les auteurs du vol de la fin d’après-midi : 13 personnes ont été interpellées.

 

Une instruction bâclée

Après quarante heures de garde-à-vue, douze personnes ont été mises en examen « pour vol en réunion avec violence » par un juge d’instruction. Cinq ont finalement fait l’objet d’un renvoi devant le tribunal correctionnel de Lyon. Les autres ont obtenu un non-lieu.

A l’audience, tous les prévenus ont nié avoir participé directement à l’action d’« autoréduction ». Certains font part d’alibis, d’autres déclarent qu’ils n’étaient présents sur les lieux que pour distribuer des tracts. Enfin, Olivier Minot, aujourd’hui journaliste-documentariste, notamment pour Arte-Radio et France Culture, également poursuivi, s’y trouvait tout simplement en tant que reporter pour la radio associative Canut.

Le procureur de la République n’a pu citer que des témoignages imprécis d’employés du magasin sur leurs implications éventuelles, parlant seulement de leur présence sur les lieux au moment des vols :

« Tous s’en tiennent à des termes généraux qui prêtent à ambiguïté. Or on ne peut pas faire l’économie de la précision car c’est le destin de ces gens qui est en jeu. Ça n’a pas été fait ».

Dans son réquisitoire, le procureur évoque les actes d’instruction manqués :

« Des employés du magasins auraient dû être réentendus et des confrontations auraient été nécessaires ».

 

« Les excuses de l’institution »

Après ce réquisitoire, le président, Jean-Daniel Piffaut, a prononcé une relaxe générale pour les cinq prévenus, par une formule en latin, ici traduite : « Reconnaissance unique, reconnaissance nulle » :

« Toute la procédure souffre d’un vice originel. Il n’y a qu’un seul témoin (le directeur du Leader Price, ndlr) qui a fait le tri pour qu’ensuite les personnes soient présentées devant le vigile et le magasinier ».

Il a présenté les « excuses de l’institution » avant de souhaiter une « pleine réussite » pour leurs activités futures.
Les avocats qui ont à peine plaidé, donnaient une explication politique à ce fiasco judiciaire qui aura duré plus de quatre ans. L’un d’eux, Bertrand Sayn, explique :

« Les reconnaissances du directeur du magasin ne valent rien. Ce sont des reconnaissances de circonstances pour justifier de l’expulsion de la fac occupée ».

Son confrère, Olivier Forray, va dans le même sens :

« C’est une réponse judiciaire d’un gouvernement qui voulait en finir avec les occupations des facs mais qui n’y arrivait pas. Or la comparution immédiate était impossible car ça aurait été automatiquement un fiasco. Et une fois l’université évacuée, ce n’était plus une priorité pour personne : ni pour le ministère de l’Intérieur, ni pour le juge d’instruction. Ça a pris quatre ans pour rien ».

Entre-temps, la direction de Leader Price s’est également évaporée. Aucune plainte n’a été déposée pour les vols du magasin de Bron.

Aller plus loin

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