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Diagnostic d’endométriose à 40 ans : « Je suis tombée des nues »

Sophie a 45 ans. En 2020, après plusieurs mois de fortes douleurs et un parcours médical tortueux, on lui diagnostique une endométriose. Maintenant débarrassée de cette affection, elle voudrait sensibiliser sur cette maladie méconnue et mal-soignée, qui touche une femme sur dix.

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Dans son appartement lyonnais, Sophie nous a accueilli pour raconter son parcours avec l'endométriose. ©MA/Rue89Lyon
Dans son appartement lyonnais, Sophie nous a accueilli pour raconter son parcours avec l’endométriose.

C’est dans l’ambiance tamisée de son appartement, décoré de tableaux peints de sa main, que Sophie nous accueille. « Celui-là, je ne l’aime pas trop », rit-elle, en enlevant un tableau derrière elle, pendant que nous la prenons en photo. Une touche de légèreté après un récit de quatre ans de douleurs et de parcours médical compliqué liés à l’endométriose. Aujourd’hui, cette directrice artistique de 45 ans est enfin débarrassée de cette maladie chronique, grâce à une opération.

L’annonce de ce diagnostic, il y a trois ans, l’a laissée sans voix, tant elle ne se reconnaissait pas dans les témoignages qui décrivent cette maladie. « Quand j’entendais Énora Malagré ou Imany parler de leur endométriose, elles dépeignaient des tableaux terribles, avec des souffrances énormes, des mares de sangs, des symptômes très handicapants. Comme je ne cochais pas ces cases là, je n’avais pas fait le rapprochement », détaille-t-elle.

« On a tellement l’habitude d’entendre que c’est normal d’avoir mal »

La quarantenaire avait l’habitude d’avoir mal aux ovaires et au ventre pendant ses cycles menstruels. « On a tellement l’habitude d’entendre que c’est normal d’avoir mal que je faisais avec. Je donnais même un petit nom à mes douleurs », ironise-t-elle.

C’est l’arrêt de sa pilule contraceptive, qu’elle prenait depuis l’adolescence, qui déclenche les premières crises de douleurs insupportables. Ce cachet quotidien a sans doute contenu l’endométriose durant la première partie de sa vie car les hormones sont l’un des traitements possibles pour empêcher cette maladie de se développer.

« Les crises sont devenues de plus en plus intenses et elles n’étaient pas liées aux règles. Je le sentais venir dès le matin. Je savais que dans la journée j’allais vider mes intestins, avoir des douleurs dans le dos et jusqu’au bout des doigts. Après, j’étais séchée et je ne pouvais que dormir », décrit Sophie. L’affection finit par l’handicaper dans son quotidien. Elle ne peut parfois plus se rendre au travail ou se retrouve en grande souffrance au beau milieu de randonnées, pourtant l’une de ses passions.

Un diagnostic d’endométriose compliqué par des violences médicales

D’abord, Sophie pense à un problème lié à son appareil digestif et d’ordre alimentaire, puis elle se tourne vers la gynécologie. Un premier médecin pose le diagnostic de kyste ovarien. Quelques mois plus tard, elle consulte un second gynécologue pour un deuxième avis et subit des violences médicales.

« Il m’a ausculté très brusquement, sans considération pour ma douleur. C’était une vraie torture. Au bout de dix minutes, il a décrété que c’était une endométriose. Je suis tombée des nues, entre la violence du rendez-vous et le diagnostic amené comme ça », raconte la directrice artistique, qui s’est effondrée en larmes après la consultation.

Commencent les premiers examens pour évaluer l’ampleur de l’endométriose. Après une échographie pelvienne, on lui diagnostique une adénomyose et une « masse » sur l’ovaire gauche, qui viennent s’ajouter à l’endométriose et au kyste ovarien.

« C’est un peu du charabia pour moi à ce moment-là », commente-t-elle. En réalité le diagnostic est plutôt critique, et nécessiterait une prise en charge rapide car la masse pourrait être cancéreuse. Mais le médecin ne l’a recontacte pas et Sophie ne prend pas la mesure de l’urgence.

C’est l’intensité des douleurs qui la pousse à se tourner à nouveau vers la médecine. « Je souffrais tellement qu’il fallait que je me mette en ordre de bataille, que je trouve une solution. Les dernières crises que j’ai fait, j’ai cru que j’allais crever », confie-t-elle. Elle tente de prendre rendez-vous à l’hôpital de la Croix-Rousse, qui lui trouve un créneau… six mois plus tard.

« La médecin ne comprenait pas qu’on m’ait laissé dans la nature. Elle s’inquiétait énormément et elle m’a fait refaire toutes les images. La végétation a été qualifiée de tumeur et l’endométriose était arrivée à un tel stade que l’utérus était abîmé. Les lésions étaient probablement plus étendues, mais ils n’étaient pas capables de les détecter », relate Sophie.

Une opération pour se débarrasser de l’endométriose

La découverte d’une tumeur potentiellement cancéreuse occulte un temps l’endométriose. L’urgence est d’opérer pour l’enlever. Finalement, Sophie se fait retirer l’ensemble de l’utérus, une hystérectomie.

Lors d’une seconde opération, les médecins se rendent compte que son utérus était rétroversé et donc plus proche de ses intestins. Son endomètre s’y était propagé, expliquant ses douleurs intestinales. « Quand j’ai décrit mes symptômes à la gynécologue, elle pensait que j’avais de l’endométriose dans la poitrine et les épaules », détaille Sophie, soulagée que cela n’ait pas été le cas.

« Maintenant, je n’ai plus d’utérus et donc plus d’endomètre. C’est radical, je n’ai absolument plus aucune douleur », sourit-elle. Pour elle, la décision a été facile à prendre : elle ne veut pas d’enfants et son compagnon a eu une vasectomie. Pour d’autres femmes atteintes d’endométriose et qui voudraient être enceintes, d’autres traitements hormonaux ou chirurgie peuvent être possibles.

Aujourd’hui, Sophie aimerait surtout informer sur l’endométriose mais aussi sur les diverses affections qui touchent les femmes. Elle a lancé une chaîne Youtube pour raconter son parcours, et inviter d’autres femmes à le faire. Professeure dans une école d’enseignement supérieur, elle songe aussi à mettre en place des ateliers de prévention. Un petit pas pour améliorer la prise en compte des douleurs de ses élèves concernées.


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