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Les journaux nationaux de retour dans les kiosques à Lyon ce mercredi

Après six semaines d’interruption, la distribution des journaux nationaux a repris ce 1er juillet dans la région lyonnaise. La SAD à Vénissieux, filiale de Presstalis liquidée suite au redressement judiciaire de sa maison-mère, a redémarré ses activités dans la nuit de mardi à mercredi, sous forme de régie temporaire pour le distributeur de presse. Distributeur qui vient s’être repris par la coopérative des quotidiens, et qui devient France messagerie.

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Kiosque avec titres nationaux

Le Monde, Le Figaro, Libération… De nombreux journaux nationaux étaient aux abonnés absents des kiosques lyonnais depuis plusieurs semaines, mettant en péril les finances de nombreux marchands de journaux et éditeurs de presse.

Le vendredi 15 mai, le tribunal de commerce de Paris avait prononcé le redressement judiciaire de Presstalis, la première société de messagerie de presse française, qui distribuait 75% des titres dans le pays. Résultat, ses deux filiales régionales, la SAD (Société d’agences et de diffusion) et Soprocom, qui comptent 512 salariés sur une quinzaine de sites, avaient dû cesser leurs activités le soir même du verdict.

Dans les grandes villes telles que Bordeaux, Nantes, Toulouse ou Lille des régies de substitution ont été mises en place, et une partie des salariés a été réembauchée par des dépositaires indépendants. Mais sur les sites de Lyon et Marseille, occupés par les ouvriers du livre souhaitant redémarrer leurs activités, la distribution s’est stoppée nette, faute d’accord avec Presstalis, désormais France Messagerie.

Dans la zone d’activité de l’Arsenal, à Vénissieux, 110 salariés de la SAD étaient en charge de la répartition des journaux et des magazines dans 600 points de vente de la région lyonnaise. 600 points de vente qui n’ont pas pu être alimentés durant plus de six semaines.

Kiosque avec titres nationaux
Les titres nationaux se sont absentés durant plus de six semaines des marchands de journaux de la région lyonnaise. Ils étaient de retour ce matin dans ce kiosque à Oullins.
CC : DD/Rue89Lyon

Les journaux locaux toujours pas distribués

Après un long bras de fer entre le syndicat du livre CGT et Presstalis, le distributeur de presse a décidé de mettre en place une régie temporaire dans l’entrepôt de Vénissieux. Le but : relancer au plus vite la distribution des journaux, avant de trouver une solution pérenne.

Avec cette régie temporaire, une vingtaine de salariés (sur 110) sont embauchés en CDD par un transporteur, pour assurer les fonctions purement logistiques.

Point noir, la situation est encore bloquée pour les journaux locaux. Ces titres ne traitaient pas en temps normal avec les messageries, mais passaient directement par la filiale régionale, la SAD. Cette dernière étant liquidée, et la régie temporaire dépendant de Presstalis (devenue ce mercredi France messagerie), ces journaux n’ont toujours pas accès aux points de vente livrés par ce distributeur.

C’est le cas de l’hebdomadaire Tribune de Lyon qui travaille depuis dix ans avec la SAD implantée à Vénissieux.

En parallèle des points presse, l’hebdomadaire a commencé à développer il y a quelques années son propre réseau de distribution. Monoprix, Franprix… A ce jour, ce réseau permet la livraison de l’hebdo et du mensuel Lyon Décideurs dans 150 points de vente sur Lyon et sa première couronne.

« Ça nous permet de sortir la tête de l’eau depuis plusieurs semaines », témoigne François Sapy, directeur de publication de Tribune de Lyon.

Mais la SAD, c’est plus de 550 kiosques à journaux dans la région lyonnaise. La situation pour l’éditeur de presse reste donc critique.

« Depuis la liquidation, on perd 40% de nos ventes chaque semaine. »

N’ayant pas les moyens logistiques de distribuer à cette échelle, le magazine espère trouver une solution de remplacement rapidement, sans passer par la régie temporaire.

Une crise de la distribution d’une ampleur inédite

Alors que la crise sanitaire n’a pas épargné de nombreux vendeurs de journaux, la faillite de Presstalis et la cessation d’activités de ses filiales a fini d’en enterrer certains.

Selon Daniel Panetto, le président de Culture Presse, fédération des marchands de presse, 740 kiosques et maisons de la presse ont mis définitivement la clef sous la porte en France au cours des quatre premiers mois de l’année, contre 579 pour toute l’année 2019. Sur les 23 000 marchands de journaux du pays, 1 116 ne recevaient plus de quotidiens, ni de magazines, d’après les informations du Monde. Dans le Sud-Est, où la distribution a été très ralentie, la vente de journaux et magazines représente de 70% à 80% du chiffre d’affaires des adhérents de Culture Presse, selon la directrice régionale, Françoise Josse-Valla.

Si beaucoup de titres de la PQR (presse quotidienne régionale) ont leur propre réseau de distribution, tels que le Progrès, de nombreux magazines qui passaient par la SAD, ont dû chercher des alternatives pour être distribués.

« Ils se sont retrouvés sans solution du jour au lendemain, sans qu’on les ait prévenus », regrette le représentant syndical.

Cette crise de la distribution apparaît comme étroitement liée au blocage des entrepôts des filiales régionales de Presstalis (France messagerie aujourd’hui), à Lyon et Marseille par la CGT du livre. Interrogé par le Monde, le distributeur de presse a effectivement remis la faute sur les employés en question :

« Dans ces deux bastions de la CGT, les salariés ont occupé les dépôts, organisé des descentes dans les imprimeries et chez un dépositaire. Résultat, les gens ont peur et personne n’a voulu reprendre l’activité ».

Si Guillaume Dumoulin de la CGT reconnaît qu’il y a bien eu une occupation des sites dès le 11 mai par les ouvriers, et des « actions » dans le but de défendre leur travail,  ce dernier insiste sur la faible implication de l’entreprise anciennement appelée Presstalis dans les semaines qui ont suivi pour redémarrer leur activité.

« Ce n’était pas un blocage, puisque la SAD a été liquidée »

Selon ce représentant vénissian des ouvriers du livre, les salariés ont toujours eu la volonté de reprendre le travail : l’occupation leur aurait permis de « préserver l’outil » et d’éviter « les risques de pillage dans une boîte abandonnée ».

Pour Guillaume Dumoulin, c’est bien la liquidation de la filiale qui est à l’origine de cette crise de la distribution.

« Ce n’est pas un blocage, puisque la SAD a été liquidée, et comme on est une boîte de logistique, si on n’est pas livrés, on ne risque pas de livrer ».

Le matériel du site appartenant à Presstalis (désormais France messagerie), les salariés nécessitaient l’autorisation de la maison-mère pour redémarrer l’activité, notamment sous forme de régie. Mais le distributeur aurait tardé a donné son aval, craignant une reprise par le biais des Messageries lyonnaises de presse (MLP), leur principal concurrent, selon Guillaume Dumoulin.

« MLP était très intéressé par la mise en place d’une régie dans notre entrepôt. Ce ne sont pas forcément nos copains, mais on avait un objectif commun : le redémarrage de nos activités, et ils y ont mis du leur, contrairement à Presstalis. »

A la suite à une réunion en préfecture du Rhône le 26 juin, réclamée par les salariés depuis le début du conflit pour organiser une reprise rapide de la distribution, Presstalis a finalement mis en place une régie temporaire.

Projet de coopérative des salariés de Vénissieux

Une vingtaine d’employés ont repris le travail cette nuit avec la régie temporaire. Sur le long terme, Un groupe d’une quarantaine de salariés espère une solution pérenne pour conserver leur activité.

Sur le plan national, la reprise de Presstalis n’impliquant pas la réouverture du site de Vénissieux, les salariés portent eux-mêmes un projet de reprise, sous forme de société coopérative d’intérêt collectif (SCIC). D’après le délégué syndical, les deux messageries, MLP et Presstalis, aujourd’hui France messagerie, se sont déjà engagées à donner leur accord :

« Les messageries ont concédé aux salariés le mandat d’exploitation et l’exclusivité de la zone de distribution qu’ils couvraient initialement ».

Les employés pourraient ainsi continuer à livrer leurs points de vente habituels dans la région.

Cette SCIC, espérée pour l’automne, regrouperait une quarantaine de salariés, et pourrait inclure au capital les messageries, des collectivités locales et des éditeurs de presse.


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