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Les WC à l’école : « J’ai très envie… mais je préfère me retenir »

Appréhension, angoisse, honte, peur, dégoût : c’est ce que peuvent ressentir bon nombre d’élèves lorsqu’ils franchissent la porte des WC de l’école. Pour les enfants, aller faire ses besoins relève parfois du parcours du combattant. À tel point qu’un sur deux se retient d’y aller pendant le temps scolaire, au risque de se rendre malade.

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Les WC à l’école : « J’ai très envie… mais je préfère me retenir »

Rue89Lyon met en lumière un des articles de ce dense dossier publié dans le numéro 4 du magazine FLUSH.

Infections urinaires, constipation, gastro-entérites… Éviter les sanitaires à tout prix peut entraîner de sérieux troubles chez les enfants, à court terme et dans leur vie d’adulte. Bérengère, maman d’une petite Mathilde âgée de six ans, en a fait l’amère expérience.
Sa fille s’est retenue pendant toute son année de CP. Les conséquences sur sa santé ont été désastreuses :

« Elle a fait plusieurs infections urinaires et quatre pyélonéphrites. »

Une pyélonéphrite est une infection des reins causés par le développement de bactéries et de microbes dans la vessie. Quand l’urine est retenue trop longtemps, bactéries et microbes remontent jusqu’aux reins, ce qui entraîne fièvre, douleurs abdominales et vomissements.

« À chaque infection, Mathilde doit être hospitalisée pendant 48 heures. Elle a ensuite des piqûres à la maison tous les jours pendant une semaine, ce qui est très contraignant. »

L’origine de ses pyélonéphrites à répétition semble venir de l’état des toilettes de l’école, particulièrement sales :

« Ma fille me dit toujours qu’il n’y a pas de papier, que les toilettes sont bouchées, que ça ne sent pas bon. Elle préfère donc se retenir d’aller faire pipi et attend de rentrer à la maison pour s’y précipiter », explique Bérengère.

Le cas de Mathilde est certes extrême mais elle n’est pas la seule écolière à se plaindre. En plus des problèmes de santé provoqués par l’urine qui stagne dans la vessie, les enfants qui se retiennent ne parviennent plus à rester attentifs en classe. Ils ont mal au ventre, se tortillent sur leur chaise, s’angoissent…

En découlent des problèmes de concentration et une baisse des résultats. Le Professeur Boillot, pédiatre et urologue au CHU de Grenoble, voit régulièrement dans son cabinet des enfants en souffrance. Il observe une tendance aux infections urinaires et aux vessies trop pleines qui débordent, surtout chez les petites filles :

« Ce sont des maux typiques du CP. Comme la plupart des enfants mangent à la cantine et passent donc toute leur journée à l’école, ils se retiennent beaucoup et cela leur cause des ennuis. Quand on a sept ans, on peut tenir trois heures sans aller aux toilettes. Pas huit heures », explique le pédiatre.

WC à l’école : dépasser les blocages

Lors de ses consultations, le Pr Boillot n’hésite pas à secouer les puces de ses jeunes patients :

« Je leur dis : tu te débrouilles, tu vas faire pipi, sinon tu continueras à être malade et à faire dans ta culotte. En général, il suffit que l’enfant arrête de se retenir pour que tout s’arrange. »

Le blocage peut aussi venir des parents, très soucieux de l’hygiène de leurs chérubins.

« On est dans une société maternante qui confine parfois à l’absurde », s’agace le professeur.

À trop répéter que les toilettes sont dégoutantes et qu’il ne faut surtout pas s’asseoir sur la cuvette, l’enfant finit par ne plus oser y aller.

« Je n’ai jamais vu un patient tomber malade parce qu’il s’était assis sur une cuvette sale. En revanche, j’en ai vu des centaines malades parce qu’ils n’allaient pas aux toilettes », précise d’ailleurs le Pr Boillot.

L’urologue estime que l’enfant doit être capable de s’adapter au monde qui l’entoure, trouver des solutions par lui-même. Se rendre aux toilettes, c’est aussi apprendre à être débrouillard : opter pour le sanitaire le moins sale, retenir sa respiration…
La petite Mathilde semble avoir trouvé la parade : sa maman lui donne désormais des lingettes pour pallier le manque de papier !

> Cet article est un extrait d’un dossier signé Elise Moreau publié dans le numéro 4 du magazine FLUSH. Illustrations : Véropée

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