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« À Lyon, à la veille de l’hiver, on remet à la rue un couple de 60 ans »

Tribune / A Lyon, à la veille de l’hiver, des ménages pris en charge à l’hôtel pour éviter la rue, se retrouvent de nouveau dehors au motif que leur situation ne fait pas apparaître de critère de vulnérabilité particulière, de nature à justifier la prolongation de cette prise en charge. Il leur est indiqué qu’ils disposent de 11 jours pour quitter les lieux sans qu’une alternative ne leur soit proposée.

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Sabrina, 30 ans, en procédure d'expulsion. ©DR

Alors que les acteurs locaux viennent de signer le nouveau plan départemental d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées qui pose le cadre des décisions qui vont être mises en œuvre par les institutions dans les cinq prochaines années en faveur du logement des personnes défavorisées ou connaissant un déclassement fort, la Fondation Abbé Pierre alerte sur la dégradation des situations locales pour des personnes très précaires.

Aujourd’hui, il y a un risque de déshumanisation lié à l’acceptation collective de voir des personnes rejetées des lieux mêmes où les institutions leur avaient offert un abri. 
Ce cri d’alarme lyonnais intervient alors que la Fondation interpelle nationalement cette semaine autour de l’accélération des logiques d’exclusions et de la promotion d’actions sur les territoires qui permettent quotidiennement aux personnes en situation d’exclusion de sortir de la rue, aux mal logés de trouver un toit stable et décent.


Un couple de 60 ans sans ressource

Que l’hébergement d’urgence reste ponctuel, cela relève plutôt du bon sens. 
Mais faire sortir d’un abri et d’une protection, des personnes qui n’ont rien pour les renvoyer vers la rue, ce n’est pas acceptable.

En l’espèce, la situation autour de laquelle nous avons été alerté renvoie à un couple de 60 ans, sans ressource et sans autonomie financière pour pouvoir s’alimenter, se mettre à l’abri, se chauffer, se soigner, et qui avait été orienté à l’hôtel après un long parcours de rue.

D’autres couples parmi les situations concernées, sont accompagnés d’enfants.

Que l’on retrouve collectivement des moyens de générer des places supplémentaires pour répondre à la permanence des besoins, là aussi, cela relève du bon sens. 
Mais que l’on fasse sortir d’un dispositif de réponse des personnes fragiles, parce que l’on ne sait plus comment générer des places nouvelles, ce n’est pas pensable.

En matière de traitement de l’urgence, la pression est telle que l’on ne sait également plus pour qui l’on cherche une place : pour la personne qui arrive à Lyon suite à une mobilité professionnelle ?, pour le demandeur de logement social en attente depuis deux ans ?, pour le réfugié de dernière minute ? etc.
Parce que ce sont toutes ces situations, la rue aujourd’hui, et c’est également parce que nous connaissons mal les parcours et les trajectoires qui peuvent conduire à se retrouver dehors, que nous sommes amenés à faire n’importe quoi avec les gens.

Le désarroi des acteurs de la réponse (Préfet, DDCS, MVS, associations, élus locaux) de la réponse symétriques à la pression du désarroi des personnes en galère ou à la rue, rejaillit sur la manière de travailler des uns et des autres.
Pour sortir les personnes de la rue et faire que chaque personne mal logée puisse trouver un toit et s’y maintenir, il nous faudra également sortir du risque de repli des acteurs.

Sabrina, 30 ans, en procédure d'expulsion. ©DR
Sabrina, 30 ans, en procédure d’expulsion. ©DR


11 000 mal logés sont aidés chaque année

Au-delà de ce signal nécessaire, la Fondation tient à rappeler qu’elle vient localement en appui aux acteurs pour proposer des solutions limitant les dégradations que connaissent quotidiennement les personnes mal logées ou en passe de le devenir. 11 000 mal logés sont ainsi aidés chaque année en Auvergne Rhône-Alpes grâce à  la générosité de nos donateurs.

Le rôle de la Fondation Abbé Pierre n’est donc pas d’être seule, mais bien plutôt de participer collectivement à la recherche de solutions pour limiter les logiques d’exclusion qu’endurent les personnes.

Toutefois, la Fondation est aussi là pour interpeller sur le sens politique des choses, dès lors que les gens se retrouvent dehors, que les filets de protection ne protègent plus, que des décisions institutionnelles impliquent des dégradations trop fortes pour les personnes au risque d’une déshumanisation.

On peut comprendre que les politiques publiques s’actualisent dans leur construction, qu’il y ait des bouleversements institutionnels, réglementaires ou financiers, mais lorsque ces bouleversements vont trop loin et créent des écarts trop importants, entre ce que visent les politiques publiques et ce qu’elles ont réellement à offrir à l’échelle de des personnes en galère, la Fondation Abbé Pierre est là aussi pour alerter.


#Hébergement

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