Par Caroline Debray
La dizaine de manifestants se sont ensuite dirigés à l’intérieur des Subsistances
Selon un des manifestants, le débat était pour eux « l’occasion de d’affirmer la famille telle que représentée par un père, une mère et des enfants et le fait que ce serait une déconstruction de la famille protectrice de l’enfant si cette conception est remise en cause ».
Mutations et crispations
Alors, la famille, un papa, une maman et un enfant ? Pour Irène Théry, sociologue spécialiste de la famille et membre du groupe de réflexion sur la nouvelle loi famille, cette vision de la famille « PME » est une invention.
« Dans aucune société humaine, un père et une mère ne suffisent à faire un enfant. La famille se construit dans un système symbolique de parenté, sur plusieurs générations ».
Pour elle, « la famille homoparentale a été utilisée comme bouc émissaire » par les protestataires, et on a assisté au cours de l’année 2013 à une crispation autour de ce modèle familial œdipien.
Crispés, ils semblaient l’être en effet ce dimanche, devant les Subsistance, la tension était palpable. Même ambiance auprès des membres de l’organisation qui ont dû, par mesure de sécurité, refuser l’accès à la conférence à certaines personnes du public.
Pourtant le sujet ne devrait pas provoquer autant de passions. En effet, les 4 intervenants de la conférence sont unanimes: la famille est un espace en mutation, tout comme le droit. Caroline Mécary, avocate spécialisée dans le droit de la famille et elle aussi membre du groupe de réflexion ministériel sur la nouvelle loi famille, revient sur les évolutions du droit de la famille dans un court historique depuis 1791 et met en avant un fait intéressant : ces évolutions, qui à l’époque ont fait l’objet de débats et de protestations paraissent aujourd’hui évidentes et inaliénables. Elle prend pour exemple le divorce avec consentement mutuel. Qui aujourd’hui revendiquerait la suppression de ce droit égalitaire ?
Vers de nouveaux modèles familiaux?
Anne Verjus et Irène Théry lors de la conférence sur le sens de la famille. © Bertrand Gaudillère
Pour Anne Verjus, sociologue et politiste au CNRS, le modèle familial traditionnel provoque les inégalités entre sexe, notamment en ce qui concerne la garde des enfants. Avec beaucoup d’humour, elle propose de repenser notre manière de faire des enfants, en préférant nos meilleurs amis à nos amants pour en faire nos compagnons éducatifs.
Un an après le début de la « Manif pour tous », la famille moderne démontrée et défendue par les intervenants de la conférence: une famille multiforme et en mouvement, semble bien s’imposer dans l’esprit de la population. Pour preuve, seuls quelques irréductibles du mouvement étaient là ce dimanche alors que toutes les conditions d’une mobilisation réussie étaient réunies. Une dizaine de manifestants qui s’est transformée comme par magie en une cinquantaine sur twitter. C’est bien que la famille traditionnelle, telle qu’ils la conçoivent, n’a de sens que pour eux.
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