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Est-il possible d'avorter en été à Lyon ?

Une lettre signée Najat

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Moyennement possible. Voire pas du tout, répondront quelques femmes qui, pour avoir une IVG en ce mois d’août, doivent faire face à des délais d’attente pas vus depuis au moins deux ans. Le Planning familial s’alarme de la situation et, après la promesse d’un dispositif d’urgence mis en place par l’agence régionale de santé, attend avec une certaine inquiétude les projets de restructuration très flous des services d’orthogénie de septembre prochain.

« C’est normal que les personnels prennent des congés en été. Il ne s’agit pas de taper sur eux, au contraire, on est tous dans la même barque. »

 

Mais trois semaines d’attente pour une IVG, « c’est trop », calcule Marion Athiel, membre du conseil d’administration du Planning familial. Non seulement pour les femmes proches de la limite légale au-delà de laquelle il n’est pas possible de se faire avorter en France, soit 12 semaines de grossesse ; mais aussi pour celles qui peuvent y avoir recours beaucoup plus tôt. En effet, ces dernières, face à cette carence de rendez-vous, ne peuvent plus choisir l’IVG médicamenteuse et sont basculées sur une IVG chirurgicale, par aspiration.

Une réunion avec l’agence régionale de santé (ARS), dépendant du ministère de la Santé, a eu lieu mardi soir, aboutissant à des « engagements ».

« Toutes les femmes qui se trouvent dans une situation d’urgence seront dirigées chez nous, détaille Anne-Marie Durand, médecin à la tête de la santé publique au sein de l’ARS. Nous nous engageons à leur trouver une solution au sein du département. »

L’emploi du temps coordonné de tous les services d’orthogénie de l’agglomération est chaque année un casse-tête pour la période estivale, certains centres ferment, tous les autres ralentissent la cadence. Et sur les 17 médecins généralistes de ville, conventionnés pour pratiquer l’IVG médicamenteuse, seuls trois sont disponibles actuellement à Lyon.

Anne-Marie Durand ne veut pas parler de défaut de coordination pour l’année 2012 :

« Elle a bien eu lieu. Quatre femmes ont dû s’adresser à d’autres départements, c’est vrai.  C’est toujours quatre de trop, mais cela reste un petit chiffre. Ce sont des situations très difficiles et cela ne doit pas arriver. Si d’autres cas se présentent, le Planning devra saisir l’agence, et à charge pour nous de trouver une solution.

Mais très honnêtement, ce qu’on espère, c’est répondre aux situations d’urgence. On ne réglera pas toutes les difficultés cet été. »

 

Les deux semaines qui viennent de s’écouler et la prochaine, celle du 15 août, sont les plus délicates à gérer pendant l’année. Au Planning familial, on n’imagine pas que les retards cumulés et que les difficultés puissent se résorber avant la fin du mois de septembre.

A l’ARS, on va serrer les dents jusque là en espérant que plus aucun des rares médecins officiant en orthogénie pendant cette période ne tombera malade.

La situation lyonnaise a par ailleurs très vite reçue un écho du côté de la ministre aux Droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem. Ancienne adjointe au maire de Lyon, la ministre et porte-parole du gouvernement a notamment vu son ex-collègue lyonnaise Thérèse Rabatel, adjointe déléguée à l’Egalité des femmes, s’activer sur le dossier.

Najat Vallaud-Belkacem s’est ainsi fendu d’un courrier écrit à l’attention de l’ARS, actant le rendez-vous pris avec le Planning, et demandant à la structure, pourtant directement rattachée au ministère de la Santé,  de « tenir ses engagements ». Pour l’été au moins.

Pour la rentrée, la ministre a également demandé un rendu des devoirs de vacances : l’ARS devra faire remonter jusqu’aux ministères concernés par l’orthogénie (Santé, Education et Droit des femmes) un bilan et, pour la première, fois, le Planning familial pourra également apporter à ce document ses propres données.

 

Le service d’orthogénie, et les autres

« Je ne suis pas sûre que les services maternité ou cardiologie doivent faire face aux mêmes problèmes », compare Marion Athiel.

L’orthogénie serait donc le parent pauvre des services hospitaliers, parce que moins valorisant, et surtout moins rémunérateur. Au début du mois de juillet dernier, le collectif de défense des centres IVG du Rhône (composé du Planning familial, de plusieurs syndicats, et d’associations féministes) émettait un premier signal d’alerte concernant un projet de restructuration à l’hôpital de la Croix-Rousse évoqué l’air de rien et mené de façon un peu trop discrète à son goût.

Après avoir pointé le dispositif estival bancal, le Planning familial attend de pied ferme les rendez-vous de septembre prochain, notamment à Lyon-Sud et à l’hôpital de la Croix-Rousse, qui pourraient présenter des modifications structurelles de leurs services.

« Les restructurations hospitalières appartiennent aux responsables d’établissement, mais l’ARS portera dessus un regard aigu, car c’est un dossier sensible. De toute façon les établissements de santé sont amenés à revoir l’organisation des services, c’est obligé, économiquement… Et s’il y a réorganisation, on fera attention à ce que ce ne soit pas aux dépends de la prise en charge des femmes, » promet, ou espère, Anne-Marie Durand.


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