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Le Crépin de Lyon, une peausserie dans son jus depuis 121 ans

121 ans, trois générations et des milliers de produits improbables. Le Crépin de Lyon, maison fondée en 1895, est probablement le plus vieux concept store lyonnais.

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Le Crépin de Lyon, une peausserie dans son jus depuis 121 ans

Jacques Baudière, marchand crépin, crédit : Anne Bouillot/Petit Bulletin.
Jacques Baudière, marchand crépin, © Anne Bouillot/Petit Bulletin.

« Bonjour, auriez-vous des lacets bleus en cuir de vachette ? » Oui. « Et une ceinture verte toute douce en cuir de kangourou ? » Aussi. « Des clous de ressemelage ? » Évidemment. « Des talons tournants ? » Bien entendu ! « Des boutons pour bottines ? » Bien sûr. « Des ceintures en peau de gazelle ? » Au fond à droite, derrière les calendriers des années 20. « Des petites bourses en cuir pour ranger ma monnaie ? » Non, mais je peux vous la fabriquer.

Jacques Baudière, marchand crépin, troisième génération du nom, régale antiquaires, collectionneurs et autres particuliers à la recherche du mouton à cinq pattes.

Sa caverne d’Ali Baba n’a pas bougé d’un iota depuis plus d’un siècle.

À droite, des becs de gaz des années 1800. À gauche, des pubs anciennes et des buvards surannés. Sous des tas de fourrures, un vieux poêle de 1860. Au mur, des cartouches de clous à galoche et des valises de présentation du siècle dernier.

Au plafond, une romaine centenaire de 350 kilos qui servait à peser et descendre le cuir à la cave. Au fond, entre deux peaux, trois ceintures et cinq moutons retournés, trône Pernod, le chien empaillé de Jacques-Alfred Baudière, le créateur de ce lieu si singulier.

Un lieu hors du temps

Jacques, son petit-fils, a tenu à garder la boutique comme antan.

« Au début des années 1900, la ville de Lyon comptait une trentaine de marchands crépins, lesquels fournissaient les cordonniers en cuir, clouterie, fil et autre petit outillage. Aujourd’hui, nous ne sommes plus que deux. Logique : nous marchons de moins en moins, nous nous rendons désormais plus au garage pour notre voiture que chez le cordonnier pour nos semelles » ironise le Lyonnais.

Tout petit, la boutique était déjà son terrain de jeu favori.

« J’aimais venir aider mon grand-père et mon père. Il était naturel que je reprenne le flambeau, que je perpétue la tradition. »

Toujours tout sourire, l’hôte sort de vieux registres, montre les photos de Pernod — de son vivant — devant le magasin, n’est pas avare d’anecdotes (il fournit la crème des canapés en cuir de l’Hôtel de Ville) et il est de bon conseil.

Spécialiste du cuir et de la peausserie, il crée des ceintures sur mesure, déniche des fourrures rares et possède des tas de produits improbables en lien (ou pas) avec la cordonnerie — des martinets, du cuir à semelle, des peaux de zèbre, des embauchoirs, des plaques publicitaires, des bonnets fourrés, de vieilles cartes postales.

Le challenge ? Déceler ce qui est à vendre de ce qui ne l’est pas. Car ce lieu unique en son genre fait à la fois office de boutique et de musée. Tellement que Jacques Baudière aimerait qu’elle soit classée au patrimoine mondial de l’humanité.

« Je n’ai pas de repreneur, la boutique a donc des chances de disparaître quand je ne serai plus là… Ce serait dommage, c’est un véritable monument historique. »

Conseil : avant de débarquer, appelez pour vérifier si la boutique est ouverte, Jacques Baudière passant régulièrement du temps dans son atelier de restauration, aux Brotteaux.

Le Crépin de Lyon, 15 rue Tupin, Lyon 2e

Par Julie Hainaut sur Le Petit Bulletin


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