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Musée des Tissus de Lyon : pourquoi le dossier est-il bloqué ?

Les étoffes chatoyantes, l’histoire des soyeux lyonnais et des échanges commerciaux à travers les époques, celles de savoir-faire ancestraux, de la mode et d’un artisanat vieux de 4000 ans. C’est ce que portent le Musée des Tissus et celui des Arts décoratifs, nichés dans une petite rue du 2è arrondissement de Lyon.

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Musée des Tissus de Lyon : pourquoi le dossier est-il bloqué ?

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Sous la tutelle historique de la CCI (chambre de commerce et de l’industrie) qui n’en veut plus faute de moyens, le lieu est devenu une patate chaude que se jettent les collectivités entre elles. Si elles sont toutes lasses du modèle des subsides à verser, elles jurent par le même temps vouloir le défendre.

Une énième « réunion de la dernière chance » s’est tenue ce mardi avec les différents acteurs du dossier, mis autour de la table par la CCI Lyon Métropole qui voudrait bien qu’on la débarrasse d’un fardeau trop lourd à porter, devenu éloigné des missions sur lesquelles l’organisme voudrait se recentrer.

A son issue, « aucune solution n’a été trouvée », a tranché le président de la CCI, Emmanuel Imberton, alors même que l’Etat vient de lui promettre un petit coup de pouce exceptionnel de 250 000 euros.

Mais qu’est-ce qui cloche dans cette affaire ?

En coulisses, le dossier crispe sérieusement tous les acteurs. A la veille de cette réunion, le préfet de région Michel Delpuech avait déclaré, comme un avertissement lancé à Emmanuel Imberton, que  la CCI avait l’ « obligation » statutaire de continuer à assurer la gestion du musée des Tissus (l’unique en France à être possédé par une chambre consulaire), jusqu’à ce que des solutions soient trouvées.

Combien de temps encore la CCI devra-t-elle l’assumer ? Dans un communiqué lapidaire, Emmanuel Imberton montre qu’il estime pouvoir choisir son délai et selon lui, il est arrivé à son terme. Il compte bien ne pas soumettre au vote le budget dédié aux musées, lors de l’assemblée générale de la CCI qui se tiendra le 14 mars prochain. La ligne sera tout simplement rayée, allégeant un budget global de fonctionnement dont la baisse est programmée : moins 38% d’ici 2017. La situation a de quoi sérieusement agacer Emmanuel Imberton : l’organisme consulaire subit une amputation budgétaire suite à une décision du gouvernement.

Il n’imagine pas supporter la charge plus longtemps, lui qui a déjà dû mettre en place un plan social et se séparer de 10% des salariés.

Et les 250 000 euros posés sur la table par l’Etat ? « Pas suffisants », d’autant que le préfet ne lâche pas la pression de son côté non plus. A l’issue de cette réunion de mardi, le préfet de région Michel Delpuech a écrit :

« Bien évidemment, cette dotation exceptionnelle ne sera mise en œuvre que si la CCI, lors de son assemblée générale du 14 mars, adopte une décision conforme au calendrier indiqué par le préfet. »

Les tissus vont-ils tomber en poussière ?

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Malgré une pétition internationale et la reconnaissance par chaque acteur public sollicité de l’intérêt d’un tel lieu, reste que ces musées sont méconnus du grand public ; ils ne suscitent pas un mouvement de défense très fort et ne sont en réalité traités dans les médias que par l’angle politique. Qui y a déjà mis les pieds ? Qui peut citer la dernière exposition qui s’y est déroulée ?

Pourtant, comme le rappelait Libération, avec 80 000 visites et un chiffre d’affaires de 300 000 euros par an, le musée affiche 45% d’autofinancement, quand ce taux s’élève de 3 à 18% pour les autres musées de région. Il contient des pièces exceptionnelles, prestigieuses, fréquemment prêtées à des musées d’envergure internationale, à travers le monde.

L’enveloppe de 250 000 euros promise (sous conditions) par l’Etat aurait pu passer pour une main tendue, un premier effort permettant de faire levier, incitant d’autres acteurs à s’engager aussi.

Mais Gérard Collomb a donné un non catégorique dès le départ : ni la Ville ni la Métropole de Lyon n’entreront chez elles une nouvelle ligne budgétaire. Au niveau du maire et président d’agglo, on veut bien jouer au coordinateur, à l’entremetteur et faire jouer le réseau économique. Mais pas question de sortir un sou, d’autant qu’un musée des Confluences, véritable mastodonte financier, est venu se greffer aux nombreuses obligations.

Car en réalité, s’engager pour ces musées signifie assumer 2,5 millions d’euros de fonctionnement par an (1,7 millions d’euros une fois les recettes encaissées), mais aussi 8 millions d’euros de travaux nécessaires au lieu.

« A quoi s’ajoutent 10 à 15 millions d’euros supplémentaires pour la remise en état indispensable de la scénographie de ce musée », avait aussi précisé Georges Képénékian, premier adjoint de la ville de Lyon.

Laurent Wauquiez, voyant que le dossier prenait un espace médiatique certain, a déjà déclaré qu’il se voyait bien mettre quelques billes. Le débat autour des orientations budgétaires de la Région se tiendra la semaine prochaine, jusqu’à quelle somme et à quel point Laurent Wauquiez est-il prêt à se mettre un  fil à la patte dans le but de passer pour le sauveur des arts patrimoniaux, lui qui a promis des dizaines de millions d’euros d’économies sur son mandat ?

Le musée des Tissus fait les frais d’une politique culturelle globale qui n’a pas su réagir à temps et qui touche ses propres limites.

 

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