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A Lyon, c’est la saison des expulsions de squats et bidonvilles

[Mis à jour] Jeudi matin, c’est un nouveau bidonville qui a été expulsé au petit matin, à Bron. En une semaine, la préfecture du Rhône en est à sa quatrième évacuation de terrain ou bâtiment occupé. Selon les comptages de la préfecture, c’est 286 personnes qui ont dû quitter leur hébergement précaire pour la rue. Aucune proposition de relogement ne leur a été faite.

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Les cabanes détruites du petit bidonville de Roms derrière le squat. ©LB/Rue89Lyon

L’arrivée des beaux jours annonçaient ces expulsions. Lors de la présentation du plan froid, le précédent préfet du Rhône, Jean-François Carenco, reconnaissait qu’il avait des difficultés à héberger les Roms et les demandeurs d’asile et avait annoncé qu’il maintiendrait les squats le temps de la période hivernale.

« Les campements qui se comportent bien, c’est à dire ceux où il n’y a pas de foyer de délinquance et pas de problème de voisinage, ils restent « .

A la tête de la préfecture du Rhône depuis le 1er avril, soit depuis que les températures remontent, Michel Delpuech a pris la suite de cette politique saisonnière et il a donné l’ordre d’expulser les squats et bidonvilles sous le coup d’une décision de justice. En commençant le jour des vacances de printemps :

  • Vendredi 10 avril, c’est un petit bidonville coincé au bord du Rhône, au bas du cours d’Herbouville (Lyon 4e) qui a été expulsé.
  • Mardi 14 avril, le plus gros squat de Lyon a été évacué, boulevard Yves Farge (à Gerland, Lyon 7e) ainsi qu’un campement situé derrière le bâtiment. Les 140 personnes sont actuellement hébergés par dans un gymnase d’une école catholique.
  • Mercredi 15 avril, une quinzaine de personnes habitant plusieurs maisons rue du Moulin-à-Vent à Vénissieux ont été expulsées. Les occupants sont présentés comme « anarchistes » par la préfecture.
  • Et donc ce jeudi, le bidonville de Bron a été évacué.

Situé à la sortie du périph’ au lieu dit « la Boutasse », ce bidonville a pu accueillir près de 200 Roms de Roumanie depuis août 2014. Selon un premier comptage de la police relayée par l’AFP (via leparisien), 113 personnes ont été expulsées (60 adultes et 53 enfants) suite à un jugement du 20 octobre 2014. Le terrain appartient à la Métropole de Lyon.

D’autres expulsions pourraient suivre, d’autres bidonvilles étant sous le coup d’une décision de justice :

A Vaulx-en-Velin, environ 250 personnes habitent impasse Jacquard depuis juin 2014.
A Villeurbanne, à la Feyssine, environ 100 personnes ont élu domicile depuis plus de deux ans.
A Saint-Priest, les 70 personnes qui vivent derrière une tranchée de deux mètres de profondeur sont également expulsables immédiatement.

Les cabanes détruites du petit bidonville de Roms derrière le squat. ©LB/Rue89Lyon
Les cabanes détruites du petit bidonville de Roms derrière le squat du boulevard Yves Farges, à Gerland (Lyon 7e). ©LB/Rue89Lyon

« Politique absurde et incohérente »

Que vont devenir ces nouvelles personnes expulsées de leur bidonville à Bron ? La veille de l’évacuation, le père Bruno-Marie Duffé annonçait qu’elles ne pourraient être accueillies dans le gymnase des Maristes où 140 personnes du boulevard Yves Farge ont déjà été mises à l’abri. Le vicaire épiscopal « Famille, Santé, Société » qui a œuvré pour trouver ce lieu explique qu’il n’y a plus de place et, une fois de plus, que c’est à l’Etat d’assumer ses compétences, à savoir l’hébergement d’urgence.
Il pointe une contradiction de cette politique :

« On expulse des personnes qui vont aller s’installer plus loin. Et si elles repartent dans leur pays, c’est pour mieux revenir quelques mois plus tard ».

Dans un communiqué, le MRAP « dénonce l’expulsion du bidonville de Bron en violation de la circulaire ministérielle du 26 août 2012 » qui prévoit, entre autre, que tous ces terrains squattés fassent l’objet d’un diagnostic social et de propositions de relogement. Le MRAP parle d’une « politique absurde et incohérente » :

« D’un côté, le préfet annonce la création de 420 places d’hébergement d’urgence, de l’autre il expulse 400 personnes. Faut-il absolument au préfet un quota de personnes vivant dehors ? (…) Une fois de plus on va nous annoncer qu’on exécute une décision de justice alors que dans le même temps le préfet bafoue les décisions de justice qui le condamnent [notamment] à reloger les familles reconnues prioritaires en commission DALO. »

Le collectif des professionnels de l’urgence sociale pointe un autre paradoxe dans un communiqué. Vendredi dernier, à la suite d’un rassemblement pour le droit au logement, une rencontre a eu lieu avec le directeur de la cohésion sociale. Selon ces travailleurs sociaux, il a été annoncé qu’il n’y aurait pas de remise à la rue des « 624 personnes » encore hébergées dans les structures hivernales qui devaient fermer le 15 avril, notamment par le recours à des nuitées d’hôtel.

En garantissant la continuité de l’hébergement, la préfecture respecte, a minima, la loi sur le droit au logement opposable et applique les directives de la ministres Sylvia Pinel.

« Cet engagement solennel est le moindre mal. (…) En revanche ces dispositions ne sauraient suffire : qu’en est-il pour les 1500 personnes laissées pour compte du plan froid alors que se multiplient les expulsions des différents campements sans solution d’hébergement ? »


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