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Les jeunes cathos font la com’ du cardinal Barbarin avec un #projetdeouf

Il est rentré d’Irak dans la nuit du dimanche 7 au lundi 8 décembre. Pour sa deuxième visite en six mois faite aux Chrétiens réfugiés, le cardinal de Lyon Philippe Barbarin s’est appuyé sur une communication nouvelle. Une trentaine de « jeunes cathos geeks » ont transformé ce voyage de 48 heures en #projetdeouf sur Twitter avec l’objectif de relayer « de manière décomplexée le message de l’Eglise ».

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Le cardinal Philippe Barbarin © Pierre Maier/Rue89Lyon.

Le cardinal Philippe Barbarin © Pierre Maier/Rue89Lyon.
Le cardinal Philippe Barbarin © Pierre Maier/Rue89Lyon.

Une chaîne Youtube, un site erbilight.org nourri d’une importante base de photos et de vidéos et, avant ça, un suspense alimenté sur Twitter sous le mystérieux hashtag #projetdeouf. La com’ a été minutieusement préparée pendant dix jours, dans une arrière-salle de la basilique de Lyon dans laquelle s’est enfermée une trentaine de « jeunes cathos complètement geeks », rapporte Natalia Trouiller, chargée de la communication du diocèse.

Une petite armée du web recluse autour de pizzas, d’ordinateurs et de pas mal de foi. Avec une exigence pour parvenir à développer le site et le projet en temps et en heure : un prêtre devait venir leur faire la messe chaque jour.

Finalement, ce vendredi 5 décembre, à 13 heures, le compte à rebours mis en ligne sur erbilight a pris fin pour donner l’info : le cardinal Barbarin a prévu de repartir en Irak.

Le voyage avait été tenu secret jusque là. Au diocèse, l’entourage de l’archevêque raconte :

« L’embargo a tenu alors qu’une délégation d’une centaine de personnes était prévue depuis plusieurs jours pour accompagner le cardinal, dont plusieurs journalistes. Une centaine d’autres personnes ont aussi été invitées mais ont décliné. Il y avait au moins mille personnes informées de ce voyage et donc autant de chances que le projet fuite, mais tout a tenu jusqu’aux dernières secondes. »

Sur Twitter, il y avait donc ceux qui savaient. Et les autres.

Pourquoi ce mystère ? Dans le but de créer une attente forte et suivie, certainement, mais ce sont « surtout des raisons de sécurité » qui ont prévalu, nous assure-t-on. Cette zone du Moyen-Orient est risquée, plusieurs territoires voisins en Irak et en Syrie toute proche ont été pris par l’autoproclamé Etat Islamique.

 

« L’Eglise qui veut se montrer djeun’s »

Pour ce voyage, la date n’a pas été choisie au hasard : il s’est fait le week-end précédent ce lundi 8 décembre qui, à Lyon, marque le plus gros événement de l’année dans la ville, la Fête des Lumières. A l’origine, elle consistait en l’illumination des fenêtres par les Lyonnais pour remercier la vierge Marie d’avoir épargné la ville de la peste.

Le site baptisé erbilight (que l’on traduirait donc par « lumière à Erbil ») rapporte les faits et gestes de la délégation pendants ces 48 heures. Le cardinal avait apporté dans ses bagages pas moins de 5000 bougies-lumignons pour dupliquer sur place la procession et les prières de la fête lyonnaise dans sa version catholique, autour de la figure de Marie.

Alors, un « projet de ouf », cette Fête des Lumières à Erbil ? Finalement, l’expression, « partie d’une private joke », a désigné au moins autant l’opération de communication qui a grossi à la mesure des espérances de ses instigateurs que le séjour de 48 heures lui-même, passé au sein de familles chrétiennes déplacées par deux fois pour certaines, car chassées de Qaraqosh (ville où le cardinal Barbarin avait fait son premier voyage en Irak il y a quelques semaines) par les groupes armés en août dernier.

« Certains se sont dit voilà encore un coup de l’Eglise qui veut se montrer djeun’s et qui, en fait, va se ridiculiser », commente Natalia Trouiller. Avant d’ajouter :

« Ce sont des critiques tout à fait justifiées car la com’ a souvent été ça. Avant, c’était comment faire pour que le moins de gens nous voient et que ce soit chiant. Maintenant, on s’est décomplexés et on a envie de se servir au mieux des nouveaux moyens technologiques pour faire passer le message du Christ. »

Un virage que certains n’ont pas manqué de noter.

 

Les Chrétiens d’Irak et les Roms plutôt que Nabilla

Le hashtag #projetdeouf a en effet beaucoup tourné, mais quasiment exclusivement dans la cathosphère, composée en partie de membres actifs depuis quelques temps déjà sur les réseaux, réunis dans des associations anti-mariage gay ou encore de personnalités telles que Bruno Gollnisch, conseiller régional FN.

Pour Natalie Trouiller, l’essentiel est que le message soit passé, que l’ensemble des médias en parlent, même sous l’angle de la communication et des réseaux sociaux (comme Rue89Lyon) :

« On sait ce qu’est l’actu, une info en chasse une autre. Pour une fois on avait envie que dans les principaux mots clefs de Twitter il y ait autre chose que Nabilla. Je n’ai pas d’opinion sur elle mais on s’est dit qu’on pouvait peut-être tenter d’attirer l’attention sur ce voyage, sur la situation des Chrétiens et des autres minorités chassées, actuellement logées dans des camps de fortune à Erbil. »

Gargarisé par le bon relais dans les médias de son initiative humanitaire, le diocèse de Lyon qui porte notamment un projet de réhabilitation d’immeuble à Erbil pour loger les réfugiés d’Irak, se voit bien mener la révolution de la communication catholique.

Le cardinal Barbarin possède son compte Twitter (@CardBarbarin) mais il ne le gère pas lui-même. Il « mesure l’intérêt des réseaux sociaux », nous confie-t-on dans son entourage mais « n’idolatre pas la chose, à l’instar de certains politiques qui sont en permanence dessus ».

Barbarin-catho-Lyon
Le cardinal Barbarin bénit un enfant Rom à Villeurbanne.

L’équipe du diocèse tente de convaincre actuellement l’archevêque de Lyon de poursuivre cette première percée dans la web-communication autour d’une autre question, celle des Roms qui vivent dans des camps de fortune dans l’agglomération lyonnaise.

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#cardinal Barbarin

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