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Médiation sociale : tout le monde aime, personne ne veut payer

Présents aux pieds des immeubles, dans les bus ou les administrations, les médiateurs sociaux sont réclamés de partout. Mais quand il s’agit de sortir le chéquier, les potentiels employeurs (Etat, collectivités, grandes entreprises) se défilent.

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C’est encore une fois la question du financement de ce type de métier qui sera au cœur des premières assises nationales de la médiation sociale organisées ces 12 et 13 décembre à Lyon.

 

Un coupe-vent fluo arpentant les allées d’une cité décrépie. Voilà l’image qu’ont généralement les médiateurs sociaux. Des agents de prévention, une sorte de pré-police envoyée au contact des jeunes trop turbulents. L’image n’est pas totalement fausse mais ne recoupe qu’une partie de la réalité de ce métier né il y a 20 ans dans les quartiers dits « sensibles ». Aujourd’hui reconnu comme faisant partie des métiers du social, il peine toujours à se faire financer de la même façon qu’un poste d’éducateur de rue, ou d’assistant social.

 

Des femmes-relais au coupe-vent fluo

Historiquement, au tournant des années 80/90, ce sont les militantes de quartiers populaires, qui ont été repérées comme « femmes-leadeuses » puis « femmes-relais » par le Fonds d’Action Sociale de l’époque. A Vaulx-en-Velin, après les émeutes, ces femmes qui portaient les doléances auprès de la mairie. Aidées par des associations comme la Fonda (en Rhône-Alpes) ou Profession Banlieue en Région Parisienne, elles ont vu leur statut évoluer en « femmes-relais » puis « médiatrices sociales et culturelles ».

Aujourd’hui, leur rôle, pour la plupart, est de faire le lien entre les administrations et les habitants d’un quartier. Cela passe notamment par de l’accompagnement à l’hôpital, chez le médecin, à l’école ou dans les administrations.

A Lyon, les médiateurs peuvent aussi être des employés des PIMMS (point infomation médiation multi services). Créés en 1998, ces PIMMS permettent aux grandes entreprises (comme EDF, Véolia ou SNCF) et services publics de se réimplanter dans les quartiers qu’ils avaient désertés quelques années plus tôt. L’avantage pour ces structures est d’avoir un guichet unique avec un employé multitâches, pour principalement régler des problèmes d’impayés et d’amendes.

 

Reconnu, le métier reste précaire

Les études et autres enquêtes se suivent et se ressemblent : tous les acteurs du social reconnaissent l’utilité d’emplois de médiation sociale.
Pourtant, il est difficile de trouver un poste en CDI correctement rémunéré. La plupart des postes sont financés en emplois aidés.
Le principal dispositif d’emploi-aidé est celui d’adultes-relais, créés en même temps que les emplois jeunes et qui leur ont survécu. Financés à 80% par l’Etat, ils représentent le tiers des 12 000 médiateurs sociaux (chiffres Acsé, mai 2011).

En 2009, l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances (l’Acsé) qui assure la supervision de ce type de dispositif orienté « politique de la ville », a rendu un rapport très largement positif. Selon lui, les emplois adultes-relais assureraient :

  • le renforcement du lien social
  • un accès facilité aux droits
  • l’amélioration de la tranquillité publique
  • dans le champ scolaire, les postes adultes-relais ont permis la diminution de l’absentéisme, l’amélioration des résultats et une meilleure implication des parents.

Problème, après avoir épuisé les deux renouvellements de la convention de trois ans, les associations sont obligées de licencier ces adultes-relais. Lesquels ne peuvent généralement trouver un emploi ailleurs, car ces mêmes associations n’ont pas d’argent pour pérenniser les postes.

 

Une question de finances publiques

Pour que des postes soient définitivement créés, il faudrait que l’Etat et les collectivités territoriales les financent comme ils financent des emplois d’éducateurs spécialisés ou d’assistants sociaux.
C’est une question de reconnaissance définitive du statut. Des référentiels métiers ainsi que des formations ont été élaborés sous l’égide, notamment des associations puis du réseau France Médiation. Reste l’inscription dans les conventions collectives, comme la plus réputée dans le social, la convention 66. C’est ce que plaide, Bénédicte Madelin, directrice de l’association Profession Banlieue.
Pour elle, le débat de fonds reste celui des financements. Car si des structures ne reconnaissent pas la médiation sociale, c’est surtout pour ne pas avoir à rémunérer les postes correspondants :

« Reconnaître son utilité implique qu’il faut la payer. Un certain nombre d’administrations utilisent très régulièrement, via des associations, les services des médiateurs sociaux sans les payer. De fait, ils sont payés grâce aux emplois aidés de l’Etat ».

En février 2011, un groupe de travail sous l’égide du secrétariat général du comité interministériel des villes (SG-CIV) a émis dix propositions pour cette reconnaissance définitive et son financement. Parmi ces propositions, l’idée d’un portage mutualisé de la médiation. Sur un même territoire, plusieurs collectivités et services publics pourraient payer un médiateur social. Dans cette perspective, l’Etat devrait donner l’exemple en finançant hors enveloppe d’emplois aidés.

A Lyon, plus de 300 personnes concernées par la sujet sont attendues, pendant deux jours, pour faire avancer la problématique lors de ces premières Assises nationales. Elles seront clôturées par le directeur de l’Acsé. Son patron, le ministre de la Ville, Maurice Leroy, est déjà venue dans l’agglomération lyonnaise, à Vénissieux, pour promettre des cadeaux de Noël à certains quartiers. Difficile de croire, en ces temps de disette, qu’il y aura une deuxième tournée.

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