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Laurent Wauquiez (presque) président de Les Républicains et (déjà) rhabillé pour l’hiver

FLORILÈGE / Candidat à la présidence de son parti Les Républicains, Laurent Wauquiez apparaît comme le grand favori, s’exposant au feu des critiques, jusque dans son propre camp. Ses adversaires s’en donnent à cœur joie à coups de « droite dure », « sectarisme » ou « s’il est élu, je m’en vais ». Non mais.

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Laurent Wauquiez, Juliette Jarry, vice-présidence de la région en charge du numérique et Xavier Niel, patron de FREE au Digital Summit le 30 janvier 2017 à Lyon. ©Léo Germain/Rue89Lyon

En 2016, Nicolas Sarkozy avait choisi de lancer sa campagne pour la primaire de la droite et du centre à Châteaurenard. Sur une ligne très « droitière ». Son poulain Laurent Wauquiez a choisi le même théâtre pour effectuer sa rentrée le 30 août dernier et lancer sa candidature à la présidence des Républicains, officialisée le lendemain. Sur la même ligne :

« Je veux faire renaître l’espoir à droite. Je pense qu’on a besoin d’un profond renouvellement et je veux que la reconstruction de notre droite se fasse sur des valeurs claires. Je suis candidat parce que je pense que la France a besoin de la droite. Et il faut que la droite soit vraiment de droite ! »

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Le scrutin se tiendra le 10 décembre prochain avec un éventuel second tour prévu le 17 décembre. Le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes aura face à lui des portes-flingues quasi inconnus de cadres du parti qui ont en horreur sa ligne politique ou sa personne. Bien souvent, les deux. Depuis son entrée en campagne, il fait figure d’épouvantail.

Valérie Pécresse, la président d’Île-de-France, se serait bien vue elle aussi dans le fauteuil. Elle a finalement décidé de renoncer à se présenter, officiellement pour ne « pas cumuler les deux fonctions » en cas de victoire.

À ses yeux, une victoire de la ligne défendue par Laurent Wauquiez représenterait la fin de son parti. Elle parle « d’implosion » de sa formation et de risque de « repli identitaire » que constituerait la ligne politique du favori. Pourtant, se dire de droite ne l’effraie visiblement pas elle non plus :

«J’étais à droite avant Wauquiez quand il était centriste !», déclare-t-elle à Paris Match.

Elle juge ainsi qu’à l’inverse de sa personne, il existe avec Laurent Wauquiez une « porosité » entre ses idées et celles du Front National.

Front National : le double répulsif Laurent Wauquiez

Avant l’été, certains dirigeants frontistes avaient d’ailleurs publiquement (et stratégiquement) fait du pied au leader la droite de la droite. Avant de se mettre en retrait de la vie politique, Marion Maréchal-Le Pen estimait qu’il y avait « des choses à faire » avec lui. Le vice-président du FN, Florian Philippot, lui, s’est dit disponible pour « prendre un café » avec lui.

Ces mamours trahissent peut-être une appréhension. Celle que Laurent Wauquiez refasse le coup de Nicolas Sarkozy en 2007. Jean-Marie Le Pen, lui, le pense tout cas :

« Je pense que pour le Front national, Wauquiez représente un danger réel de concurrence. […] Par le passé, il y a d’autres leaders de droite, comme monsieur Sarkozy en 2007, qui ont utilisé cette méthode, celle d’aller chasser sur nos terres. Et il faut reconnaître qu’à l’époque… ça a marché. Marine doit donc se méfier de Wauquiez. C’est probablement le concurrent le plus redoutable qu’elle risque d’avoir pour les années à venir. »

C’est ce qu’estime aussi Patrick Mignola, conseiller régional Modem dans la majorité de Laurent Wauquiez et tout frais député de Haute-Savoie (sous l’étiquette République en marche cette fois).

«Chez lui, tout est tendu vers la récupération des voix du FN, autrement dit, il veut vider l’électorat du Front : c’est donc un raccourci d’imaginer LR pactiser avec le FN, cela ne se fera évidemment jamais», confie ainsi au JDD.

Quand d’autres centristes criaient déjà à l’incompatibilité avec la droite dure de l’actuel président de région pour les régionales de 2015, lui avait finalement décidé de faire alliance. Pour assez vite retourner sa veste.

Laurent Wauquiez lors de la présentation de certains de ses colistiers. Crédits : Eric Soudan.
Laurent Wauquiez lors de la présentation de certains de ses colistiers (dont Patrick Mignola à sa droite). Crédit : Eric Soudan.

Dans la région toujours, le plutôt centriste maire de Saint-Étienne, lui apporte un soutien peu appuyé. L’inclinaison droitière du président de la Région ne lui plaît toujours pas mais il entend garder de bonnes relations de voisinage. Au moment où Valérie Pécresse lance son mouvement « Libres » réunissant les plus centristes du parti, il ne fait pas de pas vers elle.

« Même si nous avons eu des points de désaccords, je soutiens Laurent Wauquiez. Mais je serai très attentif à ce qu’il n’oublie pas les valeurs sociales de la République.(…) Je reste fidèle à l’héritage du gaullisme sociale, comme avait pu l’être Philippe Séguin. Cette voix n’est portée par personne actuellement » a-t-il indiqué ce week-end au Progrès.

Bon on fait quoi, on se casse ?

Sa drague des électeurs du FN et son attachement aux « valeurs » et à « l’enracinement », constituent alors un point d’accroche pour ses adversaires au sein de sa propre famille. Frédéric Lefebvre, ancien député LR des français de l’étranger, parle de « droite sectaire de Wauquiez » et l’attaque sur sa stratégie identitaire. Il ressort alors la proximité avec Sens Commun, émanation politique de La Manif pour tous au sein des Républicains.

« Sens commun est devenu le cœur des Républicains, quand la droite modérée s’est déportée sur Emmanuel Macron. Laurent Wauquiez est d’autant plus assuré de la présidence de LR que le « grand remplacement » des militants a été engagé. »

La menace de la purge. Voilà, un autre argument brandi par ses détracteurs. Chaque écurie a peur de voir la maison repeinte et meublée selon les goûts du probable futur chef de famille. Jean-François Copé, lui aussi tenant d’une droite « vraiment de droite » et ancien président de l’UMP après une luette face à François Fillon qui a laissé des traces, en est convaincu.

« On va se retrouver avec exactement le même syndrome que précédemment. Sarkozy avait viré les non-sarkozystes, Fillon avait viré les non-fillonistes et Wauquiez virera les non-wauquiézistes, c’est à dire tout le monde, puisque tout le monde le hait ! », déclare-t-il à l’hebdomadaire Marianne.

Alors, la menace de quitter le navire de la part des « modérés » est savamment distillée sous cape dans les médias. Un élu d’Île-de-France déclarait à 20 minutes :

« La menace est réelle, ce n’est pas du bluff. Laurent Wauquiez est aujourd’hui dans la radicalisation d’un mouvement qui ressemble de plus en plus à un bateau mort. Il n’a pas de vision, il va dans tous les sens comme une girouette, mais c’est toujours pour servir son plan de carrière »

Le juppéiste Dominique Bussereau qui pense parler également pour les « modérés » Jean-Pierre Raffarin et Alain Juppé, ne dit pas le contraire :

«Quitter le parti, c’est une option que l’on regardera, affirme-t-il. L’autre option, c’est que le mouvement de Valérie Pécresse marche et nous permette de faire vivre la tendance modérée»

Même ses nouveaux amis sont éclaboussés

À l’Assemblée Nationale, un groupe de députés élus sous l’étiquette Les Républicains s’est détaché de leurs collègues du parti. Ils soutiennent l’action du gouvernement d’Emmanuel Macron (dirigé par Edouard Philippe, l’un des leurs) et se sont baptisés les « constructifs ». Leur chef de file, Thierry Solère, ancien soutien de François Fillon, ne voit d’ailleurs pas vraiment ce qu’il partage avec Laurent Wauquiez.

« Au bout de deux heures de débat de Macron, j’ai du mal à voir ce qui nous éloigne. Au bout de cinq minutes d’un meeting de Wauquiez, j’ai envie de sortir de la salle. »

Ils attendent d’ailleurs sagement d’être exclus du parti.

Et quand il fait preuve de bonne volonté pour montrer son désir d’union et de rassemblement, ceux qui viennent à lui se font également rhabiller. Lors de sa traditionnelle montée du Mont Mézenc en Haute-Loire le 3 septembre dernier, Laurent Wauquiez a orchestré tout ça en conviant Virigine Calmels, adjointe et proche du maire de Bordeaux Alain Juppé.

La sentence de l’ancien Premier ministre n’a pas tardé :

« Virginie Calmels, c’est la logique Endemol. Ça lui rapporte, elle y va. Elle n’a pas de principes. En mars, elle me soutenait, puis elle s’est offerte, en vingt-quatre heures, à Fillon. Pour moi, c’est une grosse déception. Si vous avez un parquet en bon état, ne l’invitez pas », aurait-il déclaré au Canard Enchaîné, avant de démentir.

À qui le tour ?


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