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Avec Jean-Luc Mélenchon pour la présidentielle, « mais après c’est compliqué »

Ce dimanche 5 février, Jean-Luc Mélenchon était en meeting à Eurexpo et son double en hologramme s’est déployé à Aubervilliers, spectral.

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Jean Luc Mélanchon (le vrai) lors de son meeting le 5 février 2017 à Eurexpo à Lyon. ©Léo Germain/Rue89Lyon

Derrière le candidat de la « France insoumise », la campagne se dédouble pour certaines formations de l’ancien Front de gauche : soutenir sa candidature pour la présidentielle et militer pour son propre camp pour les législatives. En espérant, pour certains, d’hypothétiques candidatures unitaires.

Il aura un an dans quelques jours. Au micro, Charlotte Girard coordinatrice du projet, le rappelle juste avant que Jean-Luc Mélenchon ne grimpe sur scène se faire cloner pour son « meeting hologramme ».

Le 10 février prochain, le mouvement « La France insoumise » aura un an. Lancé pour porter et appuyer sa candidature, il aurait à ce jour rassemblé près de 250 000 bénévoles « en appui » du candidat.

Exit donc le « Front de gauche ». D’ailleurs, aux abords comme à l’intérieur du hall d’Eurexpo qui abrite le meeting du candidat, les seuls « signes ostentatoires » sont à l’effigie de ce nouveau mouvement populaire et citoyen.

Aucun drapeau ou banderole du Parti Gauche, fondé par le candidat, ou du PCF qui lui a officiellement apporté son soutien, ni d’autres formations qui ont fondé jadis le Front de Gauche et mené la campagne présidentielle de 2012.

Seul le « Phi » couleur bleu ciel et ocre du mouvement s’affiche aux murs et sur les badges.

Vente du livre "L'avenir en commun" de Jean Luc Mélanchon lors de son meeting le 5 février 2017 à Eurexpo à Lyon. ©Léo Germain
Vente du livre « L’avenir en commun » de Jean Luc Mélenchon lors de son meeting le 5 février 2017 à Eurexpo à Chassieu. ©Léo Germain/Rue89Lyon

« On applique la décision majoritaire mais c’est compliqué… »

A l’extérieur, avant le passage à la fouille, quelques autocollants PCF apparaissent pourtant au revers de vestes. Des militants vendent l’Humanité Dimanche.

À la une : Benoît Hamon (PS), Yannick Jadot (EELV), Pierre Laurent (PCF) et Jean-Luc Mélenchon (PG-France insoumise) avec ce titre : « Gauche, un avenir en commun ». Voudraient-ils d’une candidature commune ? Non, ils l’assurent ils soutiennent Jean-Luc Mélenchon.

« On applique la décision majoritaire », assure Bernard, militant à Lyon.

Mais ils font aussi campagne pour eux aussi. Si les militants du PCF ont apporté leur soutien à la candidature de Jean-Luc Mélenchon pour la présidentielle de 2017, le parti a malgré tout présenté ses propres candidats pour les législatives.

Notamment dans le Rhône.

« C’est compliqué. Les législatives c’est l’essentiel pour nous. Il nous faut un groupe communiste important. Alors on applique cette décision majoritaire pour la présidentielle mais on mène aussi cette campagne pour les législatives», poursuit Bernard.

Vente du journal "L'Humanité" au meeting de Jean Luc Mélanchon le 5 février 2017 à Eurexpo à Lyon. ©Léo Germain/Rue89Lyon
Vente du journal « L’Humanité » au meeting de Jean Luc Mélenchon le 5 février 2017 à Eurexpo à Chassieu. ©Léo Germain/Rue89Lyon

Avec ses camarades, il continuera de proposer l’Huma plus tard à l’entrée de la salle. C’est d’ailleurs par là et sous les magazines brandis en l’air avec sa Une unitaire que Jean-Luc Mélenchon entrera en piste.

« On fait campagne pour Jean-Luc Mélenchon. Hier encore, on était les seuls à Villeurbanne à tracter pour faire venir au meeting d’aujourd’hui.

Mais on fait campagne avec cette réserve qu’il y a, à nos yeux, un besoin d’unité », explique habillement Mathieu Soares, militant communiste.

La France insoumise pour ne pas recréer la gauche plurielle

En annonçant sa candidature très tôt, Jean-Luc Mélenchon a pris de vitesse tous ses partenaires de gauche. Avec ce mouvement citoyen, il les court-circuite. Il s’affiche alors en lien direct avec ceux qui le portent, ces bénévoles qui s’engagent dans la campagne sans nécessairement adhérer formellement à une formation politique.

C’est le cas de Karim Rémy, membre du « groupe d’appui de Jean-Luc» de Villeurbanne, badge de la « France Insoumise » au col.

« C’est ma première expérience militante. J’ai voté Hollande en 2012 mais son mandat m’a déçu. Je me suis tourné alors vers ce mouvement, j’ai pu participer au programme. Je sens une véritable dynamique sur le terrain. Par la suite, on trouvera un terrain d’entente. Rassembler, c’est le mot d’ordre aujourd’hui. »

La candidature de Jean-Luc Mélenchon pour la présidentielle de 2017 ne fait pas ou plus débat. Même si c’est du bout du tract. Mais elle a malgré tout bousculé les formations de l’ancien Front de gauche comme Ensemble. Localement, ses membres ont majoritairement choisi de ne pas rejoindre la France Insoumise.

Certains parmi ceux qui étaient favorable à l’idée font partie de l’organisation du meeting.

Comme Pascal Lebrun :

« Je ne peux pas comprendre qu’on ne reconnaisse pas la démarche unitaire dans la France Insoumise. Ce dont on parle depuis vingt ans, c’est ce qui se passe ici. Le Front de gauche on a vu que c’était trop vite parti en gauche de cartels », regrette-t-il.

Pour lui, l’alliance du PCF avec les PS pour les municipales de 2014 ou les élus communistes « Collomb compatibles » à la Métropole de Lyon « ça ne passe pas ».

« Faire alliance avec Hamon, Jadot et Pierre Laurent ? Mais on va recréer la gauche plurielle », peste-t-il.

La force est pour lui dans ce mouvement qui porte la candidature de Jean-Luc Mélenchon et tenter de dépasser « les 12,5 % de 2012 ».

« Dans nos rangs il y a des Parti de Gauche insoumis, des Ensemble insoumis et quelques communistes insoumis mais très peu. Mais localement, des Communistes insoumis dans le Rhône ça n’existe pas vraiment », tranche-t-il.

Les Insoumis. C’est ainsi qu’ils s’appellent. C’est ainsi que Jean-Luc Mélenchon s’adresse parfois à son public au cours du meeting. Après des phrases qui font mouche, ce sont des « Résistance, résistance, résistance » qui s’élèvent des travées.

Un photomaton pour les candidats aux législatives

Autocollant « Ensemble » bien visible, et il y tient, Armand Creus, ancien conseiller régional Front de gauche de Rhône-Alpes est malgré tout venu au meeting. En prenant soin de bien s’arrêter avec les vendeurs de l’Humanité à l’extérieur.

Il n’y a pas si longtemps il qualifiait la candidature de Mélenchon de « populisme de gauche » avec cette « rencontre d’un homme providentiel avec le peuple. »

« On vote pour lui, bien entendu. Plus que jamais on appelle à voter pour lui. Mais on n’est pas dans France Insoumise qui est un nouveau qui ne dit pas son nom. Plus que jamais aussi on appelle la France insoumise à s’ouvrir au PCF, à Ensemble et aussi à Benoît Hamon pour qu’il se détache du PS », tente-t-il de démêler.

Il fait partie de ceux qui portent depuis mai 2016 ce qui s’est appelé « L’appel des 100 ». Des militants de différents formations de gauche ont formulé ce qui pourrait être un programme commun pour éviter l’éparpillement des candidatures et l’échec assuré au premier tour de la présidentielle.

Tracts lors du meeting de Jean Luc Mélanchon le 5 février 2017 à Eurexpo à Lyon. ©Léo Germain/Rue89Lyon
Tracts lors du meeting de Jean Luc Mélanchon le 5 février 2017 à Eurexpo à Chassieu. ©Léo Germain/Rue89Lyon

Pour l’heure c’est donc comme un jeu de dupes. La candidature de Jean-Luc Mélenchon ne fait pas ou plus débat. Elle est là et ne sera pas freinée. Pour la suite en revanche, chacun fait doucement pression sur l’autre.

Alors que chacun a les mots « rassemblement » et « démarche unitaire » à la bouche, le PCF a déjà présenté ses candidats pour les législatives. Dans le grand hall d’Eurexpo où se tient le meeting, une salle est réservée pour prendre en photo les candidats aux législatives de… la France insoumise.

« Mais ça peut encore bouger, assure Armand Creus. Il faut mettre une pression unitaire pour que ça aboutisse à des candidatures communes. Il faut éviter le choc des Titanic entre Mélenchon et Hamon et le choc des radeaux aux législatives. Si on part tous de notre côté, on est morts. »

Avant d’aller voir le discours du candidat, il conclut :

« Oui, Jean-Luc Mélenchon nous a divisés. Il faut qu’on essaye de surmonter cela. »

Comme pour les matches, « prendre les élections les unes après les autres »

L’interview du candidat de la France Insoumise parue le matin même dans Le Parisien se disant prêt à discuter sous conditions avec Benoît Hamon candidat du PS, va selon lui dans ce sens.

Pour Cécile Cukierman, sénatrice PCF de la Loire présente elle aussi dans le public, même son de cloche.

Toujours un peu équilibriste :

« Il faut prendre les élections les unes après les autres. Si on veut réussir les législatives, il faut réussir la présidentielle. Aujourd’hui on ne peut plus donner le sentiment de faire de la politique à l’ancienne, il faut qu’on cogite ensemble pour trouver des nouvelles façons de faire. »

Tenter d’exister individuellement dans une démarche unitaire indispensable à chacun mais pas vraiment à l’oeuvre pour le moment. Voilà, là où semblent naviguer les formations de gauche à Lyon.

L'Union des étudiants communistes distribuent des tracts à la sortie du meeting de Jean-Luc Mélenchon le 5 février 2017 à Eurexpo à Chassieu. Photo BE/Rue89Lyon
L’Union des étudiants communistes distribuent des tracts à la sortie du meeting de Jean-Luc Mélenchon le 5 février 2017 à Eurexpo à Chassieu. Photo BE/Rue89Lyon

À la sortie du meeting, l’Union des étudiants communistes s’est postée face au flot des 12 000 personnes annoncées regagnant parking ou tramway.

Sur leurs tracts, toujours le même dédoublement là aussi : s’engager dans leur organisation et appeler à vote pour le candidat Mélenchon le 23 avril puis « pour les candidats PCF/ Front de Gauche aux élections législatives ».


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